Connaissez-vous le « Contrat à impact social » ? Moi non plus.
A force de refiler des dizaines de milliards aux entreprises (qui, pour certains, partent fissa aux Îles Caïman – où on trouve aussi des requins), il arrive un moment où l’Etat est à sec et où il est proposé au privé de se substituer à la puissance publique.
Lorsque vous lisez « Contrat à impact social », vous ne comprenez absolument pas de quoi il retourne, et c’est justement là le sens de la manœuvre : les Solfériniens ont inventé leur Novlangue.
La secrétaire d’Etat à l'Economie sociale et solidaire, Martine Pinville, a récemment lancé un vaste appel à projets (ah, la culture de droite des « projets » !) pour inciter les entreprises privées à financer des programmes d’action sociale.
C’est vrai qu’il faut soutenir les mères célibataires, alphabétiser davantage dans les “ quartiers ”, réinsérer d’anciens détenus. Oui, mais quand il n’y a plus de pépettes publiques, on fait quoi ? On demande à des investisseurs privés de se lancer dans l’aventure. C’est un nouveau concept solférinien. Si le projet s’avère rentable et fonctionne durablement (au-delà de la victoire de la droite en 2017, par exemple), l’Etat rembourse les investisseurs et leur verse une prime. Si le projet échoue, les investisseurs perdent tout ou partie de leur mise. Face à une initiative aussi alléchante, il est cependant permis de douter de l’empressement des investisseurs à se lancer dans cette entreprise.
Comme bien des saloperies, ce contrat nous vient d’outre-Manche où il a vu le jour en 2010. Il est également pratiqué aux Etats-Unis, en Ouganda, en Belgique, sous le nom de “ Social Impact Bond ”). L’un des programmes britanniques consiste à aider à la réinsertion de condamnés à de courtes peines.
Par delà les comptes d’apothicaires (un partenariat public-privé se fait toujours au détriment du public), il reste que le social doit relever de l’espace régalien de l’Etat. Un Etat qui fonctionne à la petite semaine et qui ne s’engage que sur des projets a priori rentables (avec l’aide du privé ou non) finit par se désengager globalement, à se déresponsabiliser.
Au lieu d’implorer le privé de donner son obole, il faudrait le contraindre à payer ses impôts (40 milliards d'euros sont impayés chaque année). Il n’y aurait plus de déficit budgétaire et l’Etat pourrait jouer son rôle de justicier social.