On se souvient de ce très beau film japonais de 1983. L’action se déroule dans un village pauvre vers 1860. Selon la coutume ubasute (« abandonner une vieille femme », en japonais ), les habitants arrivant à l’âge de 70 ans (je ne vise personne, regardez-moi) s’en vont mourir volontairement au sommet de la “ Montagne aux chênes ” (Narayama), aidés par leur fils aîné. L’héroïne de ce film, âgée de 70 ans, possède toutes ses dents, qu’elle va consciencieusement casser sur un rocher afin de plus pouvoir manger de viande et donc coûter moins cher à sa famille avant de préparer son départ vers le sommet enneigé de la mort.
Lorsque le film est revenu dans les salles en 2018, Le Monde a fort à propos titré « La Ballade de Narayama, l’humanité primitive ». Et bien grâce au capitalisme financier qui gouverne la planète, nous y sommes de nouveau, en particulier dans la Grande Bretagne thatchéro-blairien.
Un article de Metro News a récemment raconté pourquoi et comment un vaillant soldat de la Deuxième Guerre mondiale âgé de 95 ans doit vendre sa maison pour payer les soins de sa fin de vie. Bob Frost a survécu à une blessure occasionnée par un tir de balle nazie alors qu’il était en mission comme artilleur arrière dans un avion de la RAF. L’administration britannique va l’achever.
Pendant la Deuxième Guerre mondiale, des responsables politiques modérés (centre gauche, centre droit) ont, inspiré par J.-M. Keynes, mis sur pied une des législations sociales les plus progressistes au monde dont tous les résidents sur le sol britannique ont profité en temps de paix. Ainsi, je me souviens m’être rendu vers 1970 chez un médecin “ Service national de santé ” pour un soin mineur, sans décliner mon identité, sans prouver que j’étais assuré social dans mon pays et sans débourser le moindre penny. Thatcher et Blair étant passé par là, ce sont désormais les malades et les vieillards qu’on assassine.
Les services de santé du Kent viennent d’informer Robert Frost qu’il allait devoir apporter son écot pour les soins qui lui sont prodigués. Comme il n’a pas un sou vaillant devant lui, il va être amené à vendre la maison de 350 000 euros qu’il espérait léguer à ses enfants. Le Service national de santé a précisé à Bob Frost qu’il avait vécu trop longtemps et qu’il allait désormais cesser de rembourser ses soins. J’imagine que Bob est en retraite depuis une trentaine d’années et qu’il est temps pour lui de se casser les dents pour ne plus manger de viande. Depuis fort longtemps, les retraites statutaires des britanniques sont deux à trois fois inférieures aux retraites françaises.
Bob n’est pas un malade imaginaire : il soufre actuellement d’une infection rénale et d’une pneumonie. L’administration, qui le couvrait jusque là à hauteur de 5 700 euros par mois (les remboursements ne sont pas “ bar ouvert ” chez les Grands-Bretons) va mettre un terme à cette gabegie.
Si par malheur le banquier de Rothschild est réélu, nous serons logés à cette enseigne avant dix ans.
PS : je serai absent quatre jours mais le blog continue sans moi. La magie ...