Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
23 juin 2019 7 23 /06 /juin /2019 05:21
Ci-dessous un article très intéressant de Jérôme Henriques pour Le Grand Soir sur la barbarie du monde du cirque, en France tout particulièrement.

 

 

Mowgli (désignant un bâton muni d'un crochet) : "Ca sert à quoi ça ?" Baghera : "Ca a été conçu par les humains pour s'enfoncer dans la tête des éléphants ..." Mowgli : "Mais, pourquoi veulent-ils quelque chose qui s'enfonce dans la tête des éléphants" Baghera : "Pour leur apprendre leurs règles ... les humains font ces choses, et même pire ..." Le Livre de la Jungle (Rudyard Kipling, 1894).

Un spectacle grand public

En Europe, on compte aujourd’hui environ 900 cirques (1), lesquels totalisent un effectif de plusieurs dizaines de milliers d’animaux sauvages. Parmi les espèces couramment "utilisées", on peut notamment citer les fauves (lions, tigres, léopards ...), les éléphants (d’Afrique, d’Asie), les singes (chimpanzés, babouins, macaques ...), ainsi que les ours, girafes, chameaux, zèbres, hippopotames, otaries, autruches, perroquets ... Les chapiteaux européens attirent chaque année des dizaines de millions de spectateurs (environ 15 millions, rien qu’en France), lesquels viennent s’émerveiller devant des tigres qui sautent à travers des cerceaux en feu, des éléphants qui s’assoient sur des tabourets, ou encore des ours qui font du vélo ... bref, devant des animaux sauvages qui effectuent des numéros précis avec une discipline et une rigueur déconcertantes.

 

Une vieille tradition

Les spectacles d’animaux ne datent pas d’hier. On peut notamment remonter aux jeux du cirque sous la Rome antique (combats de fauves) ou encore évoquer la présence de montreurs d’ours dès le moyen-âge. Cependant, ce n’est qu’à partir du XVIIIème siècle que l’on va véritablement assister à l’essor du cirque dit "moderne", c’est à dire du cirque tel que nous le connaissons aujourd’hui. Si les premiers spectacles comprennent surtout des numéros équestres (le premier de ce genre est celui présenté Philip Astley à Londres en 1769), il faut attendre la fin du XIXème pour voir apparaître les premières "ménageries de cirque", soit l’exhibition au sein de cirques d’animaux sauvages importés des colonies ; des ménageries qui ne cesseront de croître par la suite (début XXème, celles de Ringling Bros/Barnum & Bayley aux Etats-unis ou de Krone en Europe totalisent chacune plusieurs centaines d’animaux). Viendront ensuite, dans la seconde moitié du XXème siècle, les premiers numéros de dressage et de domptage.

 

Pourquoi une telle fascination ?

Des animaux exotiques déambulant sous des tentes et/ou effectuant des numéros imposés par l’homme, cela n’a à priori rien de naturel ni d’authentique. Pourquoi les cirques fascinent-ils autant alors ? Hormis la curiosité de pouvoir observer ces animaux "pour de vrai" (ce qui peut être fait plus simplement en allant au zoo), on peut principalement trouver deux raisons à cela. D’un côté, il y a un aspect "domination des forces de la nature" qui est probablement flatteur pour l’espèce humaine : "regardez ces bêtes féroces et imposantes, et bien moi, j’appartiens à l’espèce qui arrive à les dompter". D’un autre côté, il y a aussi un imaginaire dans lequel certains (les plus jeunes notamment) veulent se projeter : la prétendue "complicité entre l’homme et l’animal" par exemple. Ajoutez à cela une touche d’anthropomorphisme (des ours faisant du vélo en tutu ...) et une pointe de rhétorique (désigner les dresseurs comme des "entraineurs", les animaux comme des "partenaires" ...) et le tour est joué. Le cirque, finalement, c’est que du bonheur !

 

Un environnement inadapté par nature

Il suffit pourtant de se pencher sur quelques considérations éthologiques pour se rendre compte de l’inadaptation, par nature, des cirques. Dans la nature, chaque animal développe toute une palette de comportements liés aux besoins de son espèce : cela comprend notamment les interactions sociales (organisation de groupe, hiérarchie), la sexualité (recherche de partenaires, accouplement), l’alimentation (exploration, chasse, fouille au sol ...), mais aussi les comportements territoriaux (marquage), locomoteurs (sauter, courir ...), de confort (repos, toilette, bains de boue/poussière ...) et maternels (allaitement, protection, éducation ...). Or, qu’en est-il dans les cirques ? Les groupes sociaux sont déstructurés ou inexistants, les stimuli externes (partenaires, nourriture ...) annihilés, les activités d’exploration et de locomotion réduites à quelques mètres carrés, les comportements maternels entravés et l’établissement de toute distance de fuite rendue impossible.

 

Le cas des fauves

Lions, tigres, léopards, jaguars ... Prenons l’exemple des fauves. Dans la nature, ils explorent des territoires allant de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de kilomètres carrés. Course, saut, nage, escalade, la plupart utilisent l’espace en trois dimensions et sont presque toujours en mouvement. Comment, dès lors, concevoir leur vie en cirque, où l’espace et la locomotion sont limités aux seuls 3 ou 4 mètres carrés de la voiture-cage (ou occasionnellement un peu plus, lorsqu’un accès à une zone de repos extérieure leur est permis) ? Idem en ce qui concerne l’organisation de groupe, dont il n’est pas tenu compte non plus. Ainsi certains animaux naturellement grégaires, comme les lions (qui ont l’habitude de vivre en famille), sont-ils souvent contraints de vivre seul, tandis que d’autres plutôt solitaires, comme les tigres, peuvent-ils au contraire être contraints de cohabiter (parfois même avec des individus d’autres espèces) (2).

 

... des éléphants

Les éléphants sont des animaux à la fois très sociaux et très intelligents. Ils ont conscience d’eux-mêmes (cf le test du miroir), font preuve d’empathie et ont conscience de la mort (cf leurs rites funéraires). Quant à leur mémoire prodigieuse, elle n’est pas que légendaire (un éléphant peut par exemple se mettre soudainement en colère si un évènement ou un lieu lui rappellent un souvenir traumatique passé). Communiquant entre eux par des contacts tactiles et olfactifs, les éléphants forment des groupes sociaux pouvant aller jusqu’à plusieurs dizaines d’individus (la "harde", assez stable, est généralement organisée autour d’une matriarche). Nomades, ils parcourent environ une dizaine de kilomètres par jour et passent près de 80 % de leur temps en mouvement (leur anatomie est antinomique avec un maintien en position immobile). La toilette enfin : immersion dans l’eau, frottements contre des arbres, bains de boue ... c’est un véritable rituel ! Et dans les cirques alors ? Rien de tout ça forcément : des animaux souvent détenus seuls, parfois enchainés au sol ou enfermés dans des camions.

 

... et autres

On pourrait aussi parler des singes (babouins, macaques ...), habitués à vivre en groupe au sein de grandes forêts ; des ours, habitués à vivre seuls au milieu des montagnes ; des hippopotames, qui passent leurs journées à moitié immergés dans les eaux stagnantes des marais ; des girafes, dont la structure anatomique est particulièrement adaptée à la vie en savane, des oiseaux, capables de s’orienter sur de très longues distances dans le ciel, etc. En réalité, les problèmes liés à la captivité concernent tous les animaux sauvages ... même ceux (majoritaires au sein des cirques) qui n’ont jamais connu la vie en liberté. La domestication d’un animal prenant plusieurs milliers d’années, les espèces sauvages disposent logiquement d’un moindre potentiel d’adaptation que les espèces domestiques. En captivité, elles conservent ainsi globalement les mêmes besoins que dans la nature.

 

Une vie remplie de manques

Besoins alimentaires, grégaires, sexuels, maternels, autant de manques subis par les animaux captifs. Dans la nature, les espèces prédatrices telles que les fauves passent la majeure partie de leur temps à explorer et marquer leur territoire, à chasser. Quant aux espèces végétariennes (éléphants ...), elles peuvent passer jusqu’à 80 % de leur temps à "fourrager" (pour sélectionner différents types de végétaux, racines, etc.). Dans les cirques, toutes ces espèces doivent généralement se contenter d’une nourriture identique (quartiers de viande pour les unes, foin ou croquettes pour les autres) et distribuée à heures fixes. Une privation territoriale (et exploratoire) donc, laquelle s’ajoute à d’autres : privation sociale (groupes sociaux annihilés, absence de congénères), sexuelle (partenaires à proximité pendant les phases de chaleur, phases de reproduction en dehors des cycles biologiques) ou encore familiale (séparations précoces, elles-mêmes causant des comportements maternels déficients à l’âge adulte).

 

... dans un univers de nuisances

Là-dessus, se greffent d’autres problèmes. Des nuisances précisément. Nuisances thermiques d’abord, quand des espèces habituées aux climats chauds (comme les éléphants ou les lions) et d’autres habituées aux régions plus froides (comme les ours), doivent toutes supporter les températures imposées par les cirques (elles-mêmes variant selon les lieux et périodes d’itinérance). Nuisances olfactives ensuite, quand certaines espèces doivent supporter l’odeur de leurs prédateurs, d’autres celle de leurs proies et toutes celle des humains (odeurs stressantes ou frustrantes donc). Nuisances lumineuses et sonores enfin, lesquelles découlent de l’activité humaine : éclairage inadapté et discontinu, va et vient du personnel, bruits de la foule, des camions. Rappelons que le champ auditif de nombreuses espèces est beaucoup plus large que le nôtre, ce qui implique aussi une démultiplication des nuisances sonores (infrasons émis par les moteurs de camions etc.).

 

Des troubles psychologiques

Dans cet environnement de misère, où l’absence de stimuli va de pair avec l’infliction de nuisances, on assiste logiquement à une dégradation de la santé psychologique des animaux. Soit des troubles mentaux (apathie, dépression, névroses, psychoses ...) couramment accompagnés de déviances comportementales, au premier rang desquelles les stéréotypies. Il en existe de plusieurs sortes : les stéréotypies de type déambulatoire (va et viens incessants, que l’on trouve principalement chez les félins), celles caractérisées par des balancements continuels (du corps chez les singes, de la tête chez les éléphants ou les ours), celles qui consistent en des mouvements de langue ou de léchage (girafes, antilopes), ou d’autres plus spécifiques (tic à l’appui chez le cheval, comportements de régurgitation-réingestion chez certains singes).

 

... marqueurs d’un mal-être chronique

Aussi fréquents que durables (ils concernent la plupart des animaux et peuvent les occuper des journées/nuits entières), ces mouvements répétitifs sont caractéristiques de l’enfermement. Les explications qu’en donnent les éthologiques & zoologues vont d’ailleurs toutes dans le même sens : ils sont "marqueurs d’un état de mal-être chronique", selon I. Hannier ; la "preuve d’une souffrance chronique", pour Françoise Wemelsfelder ; les "manifestations d’un échec à s’adapter de façon appropriée" selon Mac Bride et Craig ; "une espèce de pansement du système nerveux du cerveau et qui permet de supporter l’insupportable" pour Marie-Claude Bomsel ; ou encore des mouvements "pouvant être apparentés à la folie humaine" selon F. Kurt. A propos de folie, notons que les stéréotypies ne sont pas les seuls comportements pathologiques observés en cirque. Entre autres exemples, citons ceux d’animaux qui mordent les barreaux de leur cages (ours), se cognent la tête contre les parois (singes), s’arrachent les poils ou les plumes (oiseaux) ou encore maltraitent (voire tuent) leur progéniture (félins et autres).

 

Et le dressage ?

Les seuls moments où les animaux échappent à leurs cages ou leurs chaines (3), c’est lors des séances de dressage (ou plus brièvement lors des spectacles). Et là encore, ce n’est pas Byzance. On peut classer les méthodes de dressage en deux catégories : celles basées sur un "renforcement négatif" d’un côté et celles basées sur un "renforcement positif" de l’autre. Les premières utilisent la contrainte et la punition (en gros, la force et la violence) tandis que les secondes, réputées plus douces, jouent sur la motivation et la récompense (alimentaire notamment). C’est un point sur lequel les circadiens communiquent beaucoup : selon eux, les méthodes coercitives étant moins efficaces, seules subsisteraient aujourd’hui celles basées sur la confiance et l’échange. Un propos qu’il faut bien sûr modérer ; tant sur son aspect rhétorique (un animal qui a faim ne serait-il pas prêt à effectuer n’importe quoi en échange d’un peu de nourriture ? de fait, n’y a-t-il pas contrainte là aussi ?) que sur sa véracité ...

 

"Hurt him ! Make him scream !"

"Frappe le ! Fais le crier ! Si tu es effrayé à l’idée de le frapper, c’est que tu n’as rien à faire ici". Ces mots sont ceux prononcés par Tim Frisco, directeur de "l’animal care" (bien-être animal) au cirque Carson & Barnes, en 1999. Filmé en caméra cachée par l’un des membres de l’association Peta, on le voit ainsi frapper violemment un éléphant tout en encourageant ses recrues à faire de même. S’en suivront d’autres scandales de même type : certains de portée internationale, révélés par de grandes associations (celui des 3 éléphants, Vana Mana, Sonja et Delhi, battues par leur dresseur Lars Hölscher au sein du Great British Circus / ADI ; celui de l’éléphante Anne, régulièrement battue par le personnel d’un cirque itinérant britannique / ADI ; celui des éléphants de Ringling Bros / Peta) et de nombreux autres (moins retentissants) remontés par des gens lambda grâce à leur smartphone.

 

De la complicité en public, des coups en privé

Si le fait de violenter (ou même de contraindre) un animal en public semble toujours contre-productif (perte de sympathie de la part des spectateurs), il n’en va pas de même en privé. En témoigne l’utilisation de l’ankus. Outil indissociable des numéros d’éléphants, ce bâton muni d’un crochet permet de les diriger en les piquant derrière les pattes ou les oreilles (renforcement positif où es-tu ?). Mais comme la gestuelle est toujours travaillée et que le crochet est généralement recouvert d’ornements (rubans, fleurs ...), le public ne se rend compte de rien. En témoignent aussi les aveux d’anciens dresseurs : Mikhaïl Simonov expliquant comment faire danser le twist à un ours en le piquant successivement des deux côtés ; Georges Lewis racontant l’épisode d’une éléphante s’étant mise à pleurer après avoir été frappée ; ou encore Vladimir Deriabkine soulignant que la peur des coups et la privation de nourriture sont les deux seuls leviers employés par les dompteurs pour obtenir ce qu’ils veulent. Des témoignages renforçant l’idée d’une pratique courante de la violence en coulisse.

 

Le dressage particulièrement cruel des éléphants

Ancien dresseur au sein de la compagnie Ringling Bros (l’un des plus grands cirques au monde), Sam Haddock est celui qui a révélé au public la grande cruauté du programme de dressage des éléphants. Grâce son témoignage (photos à l’appui), on a ainsi pu découvrir des méthodes assez proches de celle du "brushing" (broyer, anéantir) pratiquée en Asie (en Thaïlande et au Cambodge notamment). Le but ? Amener les éléphants vers leur point de rupture psychologique afin d’obtenir d’eux une soumission totale. Comment ? En arrachant les éléphanteaux à leurs mères dès le plus jeune âge puis en les soumettant à tout un tas de violences physiques (coups, étirement avec des cordes ...). Extrait d’une vidéo commentée par Sam Haddock : "cette corde blanche est reliée à son cou et à sa patte arrière". Puis Gary donne l’ordre de tirer sur la corde pendant qu’il appuie sur la tête avec un crochet. Le bébé éléphant est alors projeté au sol" ...

 

Des cirques chinois au summum de l’horreur

S’il y avait un "prix de l’horreur", c’est peut-être aux cirques chinois qu’il faudrait le décerner. En 2017, un enquêteur de PETA Asie s’est rendu dans 10 cirques (et établissements de dressage) de la ville de Suzhou en Chine (qui, à elle seule, comprend plus de 300 cirques) pour y tourner en caméra cachée. Les images rapportées sont effrayantes : on y voit des oursons forcés à rester debout pendant des heures (sous peine de s’étrangler), des ours (adultes) forcés à marcher sur des barres parallèles, des félins presque incapables de bouger dans leurs enclos minuscules, des singes en train de devenir fous ... Les animaux sont frappés, trainés avec des cordes, secoués, fouettés ; ils crient, grognent, gémissent, certains implorant désespérément du regard, d’autres tentant frénétiquement de s’enfuir.

 

Un physique soumis à rude épreuve

A la douleur paroxystique des coups, s’ajoute celle, plus chronique, apparaissant sur le long terme. Problèmes communs et récurrents, ceux liés à la dureté des sols, lesquels sont notamment responsables de lésions sur les pattes ainsi que sur le reste du corps (la plupart des animaux dormant allongés). Ou encore les problèmes d’articulations, liés à la répétition d’exercices contre-nature. Chez les éléphants par exemple, les numéros classiques (tenir en équilibre sur deux pattes, s’asseoir, monter sur des tabourets ...) sont à la fois source de blessures aux articulations (coude et genou principalement), de problèmes vertébraux et de fissuration d’ongles. Notons que la simple position assise peut avoir des conséquences tragiques chez l’éléphant : en exerçant une pression excessive sur le diaphragme, elle peut causer une hernie, laquelle pouvant elle-même entrainer la mort (si étranglement et nécrose des organes sous-jacents).

 

Des transports stressants et accidentogènes

Un cirque sillonne jusqu’à 10 villes par mois, ce qui représente des milliers de kilomètres parcourus chaque année. Là encore, l’épisode n’est pas de tout repos. Un premier problème est lié à la satisfaction des besoins biologiques. En effet, les longues traversées sont généralement autant d’heures passées sans manger ni boire, à devoir uriner ou déféquer sur place, et ce, parfois dans la plus totale obscurité. Un autre problème est lié à la mobilité et aux secousses ; avec deux possibilités : soit laisser les animaux brinquebaler dans leurs box (avec les cramponnements, réajustements de posture, que cela suppose), soit les contentionner afin d’éviter qu’ils ne tombent (plutôt pour les gros animaux) ; une situation stressante dans les deux cas. Dernier problème enfin : celui lié à la taille exceptionnelle des convois ; des convois qui sont parfois la source de graves accidents.

 

 

 

Un environnement morbide

Si l’on devait résumer en quelques lignes le principe de la maladie (pourquoi elle se déclenche, dans quelles circonstances etc.), on pourrait dire ceci : une maladie apparaît lorsqu’il y a défaut d’adaptation (physique, psychologique) à son environnement ; ou, d’une certaine façon, lorsqu’il y a rupture avec son environnement. Ainsi le fait d’ôter un être vivant à son environnement naturel pour lui imposer celui d’une autre espèce (l’être humain en l’occurrence) est-il logiquement un facteur de morbidité. On passera rapidement sur les nombreux cas d’animaux sauvages qui succombent peu après leur capture ; ou sur le fait que les animaux captifs peuvent eux-mêmes être amenés à changer régulièrement d’environnement (échange entre cirques) pour rappeler un principe simple : l’importation d’animaux sauvage représente un risque important pour la santé des animaux et des humains ; et l’illustrer par un exemple : celui des éléphants qui attrapent la tuberculose ou l’herpès, maladies réputées rares dans la nature.

 

Des animaux hors de contrôle

Habituellement bien confinée à l’abri des regards, la tragédie animale s’immisce parfois de façon fracassante dans la société humaine. L’un des exemples les plus connu et emblématique est probablement celui de l’éléphante Tyke. Rappel : battue et humiliée pendant près de 20 ans, cette éléphante décide de se venger un jour de juin 1994 ; en pleine représentation, elle tue alors son dresseur Allen Campbell (et blesse son assistant Dallas Beckwith) avant de s’enfuir et de semer la panique dans les rues d’Honolulu (Hawaï) ; elle finira sa course 30 minutes plus tard, abattue de 86 balles par la police locale. Plus récemment et plus proche de nous, il y a aussi le cas de Samba (renommée Tania), du nom de cette éléphante ayant tué un homme après s’être enfuie d’un cirque à Lizy-sur-Ourcq (près de Paris) en 2013 ; ou celui de ce tigre errant, abattu en plein Paris en novembre 2017. En réalité, il existe là encore une multitude d’accidents recensés, avec des conséquences plus ou moins dramatiques selon les cas.

 

L’avis des vétérinaires

Plusieurs organismes vétérinaires ont donné leur avis sur les cirques. Regroupant les principales organisations professionnelles du continent, la Fédération des Vétérinaires d’Europe (FVE) a notamment pris position contre en 2015, appelant "toutes les autorités compétentes nationales et européennes à interdire l’utilisation de mammifères sauvages dans les cirques", précisant qu’il n’était "pas possible, par aucun moyen, que leur besoins physiologiques, mentaux et sociaux soient correctement satisfaits". Une déclaration allant dans le même sens que d’autres, plus anciennes, émanant d’organisations nationales (comme la British Vetenary Association, par exemple, l’une des plus ancienne et des plus passionnée sur le sujet). En France, la position de l’Ordre des Vétérinaires est nettement moins tranchée. Ainsi confirme-t-il "la recommandation prise par la FVE de promouvoir l’interdiction ... dans le cadre de cirques itinérants qui ne peuvent satisfaire aux besoins physiologiques et sociaux de ces animaux". Surtout ne pas se mettre les lobbies à dos.

 

Une réglementation existante

Dans notre pays, il existe pourtant une réglementation spécifique concernant les cirques ; réglementation qui, une fois n’est pas coutume, est plus contraignante au niveau français qu’européen. Ainsi l’arrêté ministériel du 18 mars 2011 prescrit-il non seulement des règles de sécurité applicables au personnel et au public, mais aussi des règles régissant les conditions de vie des animaux. Entre autres exemples : "Les animaux doivent avoir la possibilité de se déplacer librement dans les installations extérieures" (article 23), "les installations intérieures concernant les fauves doivent mesurer un minimum de 7 m2 par animal", "les installations extérieures concernant les éléphants doivent ménager un espace d’au minimum 250 mètres carrés pour un maximum de trois animaux" ou encore "les otaries et lions de mer doivent bénéficier de piscines intérieures et extérieures" (annexes III) (4).

 

... mais bien difficile à faire appliquer

Des règles qui sont malheureusement bien difficiles à faire appliquer. Premier problème : la rareté des contrôles. Ainsi, les deux organismes dévolus à cette tâche, la direction départementale de la protection des populations (DDPP) et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) effectuent-ils en moyenne moins d’un contrôle par an et par cirque. Autre problème : la difficulté des contrôles. Car entre les prête-noms (il y a au moins une dizaine de Zavatta, autant de Bouglione ...) et les va-et-viens entre cirques (bon nombre de numéros sont ceux d’artistes indépendants travaillant tantôt dans un cirque, tantôt dans un autre), la constitution de bases de données est un véritable casse-tête. Dernier problème enfin : le manque de moyens. Car, même en cas de constatation de maltraitances, il arrive que les autorités ne sachent pas quoi faire des animaux (où les replacer ...) et que, par facilité, ces derniers soient finalement laissés à leur propriétaire. Sans oublier les problèmes liés à la mobilité : difficile en effet de poursuivre un établissement qui peut facilement et rapidement changer d’endroit (5).

 

Le combat des associations : actions en justice et libération d’animaux

Restent les associations de protection animale. Des associations qui, grâce à leur combat déterminé, arrivent parfois à obtenir le retrait d’animaux malmenés (6). Comme ces deux hippopotammes (Aldo et Tonga) détenus illégalement par le cirque Luigi Zavatta, retirés (puis finalement placés dans un sanctuaire) en 2007 grâce à l’action en justice des fondations Brigitte Bardot et 30 millions d’amis. Ou ces trois lions, libérés du cirque Lamberty en 2010 pour les mêmes raisons (pas de certificat de capacité) par les fondations 30 millions d’amis et Assistance aux animaux. Ou ces quatre baboins et un puma, retirés du cirque Katia Ullman en 2015 (30 millions d’amis) car vivant dans des conditions déplorables (cages non-conformes, vétustes et insalubres). Ou encore ces deux éléphantes (Vicky et Maya), retirées de leur cirques respectifs en 2016 et 2018 suite aux enquêtes déterminées de One Voice (mise en évidence de postures douloureuses, de problèmes de paralysies partielles, plaies non soignées, gestes stéréotypés ...).

 

Le combat des associations : révélations auprès du grand public

Si la décision de justice est parfois nécessaire, elle ne l’est pas toujours. Ainsi y a t-il des cas où, craignant la mauvaise publicité, certains cirques décident par eux-mêmes de retirer leurs animaux des pistes. Ou de mettre fin au contrat d’un dresseur un peu trop brutal. Exemple avec l’éléphante Anne, dont le calvaire, filmé en caméra cachée par ADI (Animal Defenders International), n’a laissé d’autre choix à ses geôliers (un petit cirque anglais) que d’accepter sa libération. Ou avec l’éléphante Vana-Mana, dont le bourreau (là encore filmé en caméra cachée par ADI) s’est finalement vu remercier par le cirque qui l’employait (Francesco Bouglione). Mais l’exemple le plus frappant est celui donné par "le plus grand spectacle du monde", le cirque Ringling Bros/Barnum & Bailey qui, après 9 ans de polémique face à Peta, a décidé en 2016 de retirer tous ses éléphants des pistes.

 

L’action de certains maires

Depuis quelques années, la cause animaliste a pu commencer à bénéficier d’un soutien inattendu : celui de certains maires. Avec les lois de décentralisation, et notamment la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (article 72 : "les collectivités s’administrent librement ... et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences"), les maires sont désormais une autorité compétente (comme le préfet) pour prendre et faire respecter des mesures de sécurité, tranquillité et salubrité publiques sur le territoire de leur commune. Qu’il s’agisse de plaintes d’administrés (confrontés à la vue d’animaux faméliques, attachés et/ou exposés à des températures inadaptés), de non-respect de l’espace public (affichage sauvage, stationnement gênant, détériorations) ou encore de danger aux personnes, les motifs d’interdiction ne manquent pas. D’autant que le Code général des collectivités permet déjà de quoi faire : "les animaux sauvages doivent être placés dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de leur espèce et qui garantissent leur sécurité, leur bien-être et leur santé" peut-on notamment y lire. (7) (8)

 

A quand une interdiction nationale ?

Tourcoing, Narbonne, Pessac, Mérignac, Villeurbanne, Lille, Strasbourg, Montpellier ... les arrêtés d’interdiction fleurissent et touchent désormais de nombreuses grandes villes. Au point qu’il n’est pas si absurde, aujourd’hui, de se poser la question : à quand une interdiction nationale ? Plusieurs pays ont déjà franchi le cap. Certains (comme la Belgique, la Grèce, l’Italie, l’Irlande, le Portugal, les Pays-bas, la Bulgarie, la Roumanie, la Lettonie, la Slovénie, la Croatie, Chypre, Malte, le Pérou, le Costa Rica, le Guatemala, la Bolivie, le Mexique, Israël, l’Iran, le Liban, l’Inde et Singapour) ont totalement interdit la présence d’animaux sauvages dans les cirques, tandis que d’autres (l’Autriche, le Danemark, la Suède, la Finlande, la République Tchèque, la Hongrie, l’Estonie, la Colombie) ont promulgué des autorisations partielles (avec des listes d’espèces autorisées/interdites plus ou moins restrictives).

 

Une évolution des mentalités

Peut-on commencer à espérer la fin du cirque traditionnel (avec animaux) ? En tous cas, les choses avancent. Partout. Même dans les pays où la question de l’interdiction n’est pas encore posée (souvent des pays de longue tradition circassienne). Car partout les initiatives locales se multiplient et forcent le débat. Qu’il s’agisse d’interdictions administratives (grandes villes étasuniennes, canadiennes, allemandes, françaises ..., parlement écossais, communautés espagnoles ...) ou de manifestations de la société civile (happenings/tractage devant les cirques, photos/vidéos chocs remontées sur internet ...) (9), pas une semaine ne passe sans que la question des cirques ne fasse l’actualité. De fait, une certaine prise de conscience semble désormais en train de s’opérer. En témoigne la baisse de fréquentation des cirques ; ou encore les sondages d’opinion : selon un sondage IPSOS réalisé en 2017, "67 % des Français demandent une réglementation qui mette fin à l’exploitation des animaux sauvages dans les cirques" (10).

 

L’avenir : les cirques sans animaux

Et si le cirque était en train de se réinventer ? Car face au cirque traditionnel, on trouve désormais ce qu’on appelle le "nouveau cirque" ou "cirque contemporain". Un type de cirque qui, à l’inverse du premier, mise plus sur le côté artistique et créatif que sur le côté récréatif et spectaculaire. Et qui, surtout, n’utilise pas d’animaux ! Apparu dans les années 1970-1980, avec des compagnies historiques telles que Plume, Archaos ou encore Baroque ..., le nouveau cirque n’a cessé de se développer depuis (11). Au point qu’il compte aujourd’hui de nombreuses formations : Eloize, les 7 Doigts de la main, Phénix, Flying High Circus, New Shanghai Circus ... jusqu’au monumental Cirque du Soleil. Parallèlement, certains cirques traditionnels ont eux aussi commencé à s’adapter. Des cirques comme Pinder, Arlette Grüss ou encore Roncallli qui, à l’instar du changement opéré par André-Joseph Bouglione en 2017, envisagent désormais eux aussi un avenir sans animaux. (12)

 

*****

Les cirques traditionnels sont-il voués à disparaître ? Assurément oui. Déjà parce que tout le monde sait, au fond, que la place d’un animal sauvage n’est pas dans un cirque. Ensuite parce que personne ne peut plus ignorer, aujourd’hui, la réalité de misère et de souffrance qui se cache derrière la "magie du cirque". Enfin parce qu’à l’heure d’internet et des réseaux sociaux, cette réalité est omniprésente et frappe les esprits. Les spectacles avec animaux cesseront un jour, c’est le sens de l’histoire. Ils cesseront comme ont cessé avant eux les spectacles dégradants pour l’espèce humaine (scènes de torture sur la place publique, zoos humains, exhibitions de monstres etc.). Il en va de la morale et du progrès, de la lutte de la civilisation contre l’obscurantisme. Heureusement les choses avancent. Très (trop) lentement, mais elles avancent. Entre la mobilisation croissante de militants animalistes, la multiplication des arrêtés d’interdiction et la prise de conscience du public, les cirques traditionnels connaissent depuis quelques années une baisse de leur fréquentation. Signe des temps, au moment où j’écris ces lignes, je viens de récupérer (sur l’essuie-glace de ma voiture) le tract d’un petit cirque itinérant "100 % humain" (13). De quoi rester optimiste non ?

 

 

 

Notes

(1) On peut classer les cirques en deux catégories :
- les cirques entreprises : Pinder, Amar, Medrano, Grüss ; numéros qui peuvent être loués à la saison ; disposent généralement d’un siège social ; sont gérés par le Syndicat national du cirque.
- les cirques familiaux : direction familiale (généralement transmise de père en fils depuis des générations) ; souvent des noms d’emprunt (toutes les déclinaisons de Zavatta ...) pour attirer le public ; animaux rattachés à l’établissement.

(2) On pourrait aussi parler de chronobiologie : certaines espèces (les lions par exemple) sont diurnes, tandis que d’autres, comme les tigres, sont plutôt nocturnes.

(3) Les animaux sont enfermés/attachés la majeure partie du temps
- Ils passent 1-9 % de leur temps en entraînement ou spectacle et le reste du temps enfermés
- Les éléphants passent entre 72 et 96 % de leur temps enchaînés, les fauves entre 75 et 99 % de leur temps en cage et les chevaux 98 % de leur temps attachés sous des tentes

(4) Autres réglementations concernant les cirques :
- L’article L214-1 du code rural stipulant que "tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce".
- Le règlement n°1/2005 du conseil de l’UE du 22 décembre 2004 relatif au transport d’animaux (et qui supplante la législation française : décret n°99-961 du 24 novembre 1999 ...)
- Le règlement n° 1739/2005 de la commission européenne du 21 octobre 2005 définissant les conditions de police sanitaire relatives aux mouvements d’animaux de cirque.
- Le règlement n° 865/2006 de la commission européenne du 4 mai 2006 relatif à la protection des espèces de faune sauvage par le contrôle de leur commerce.
- La convention de Washington (CITES)

(5) Parmi les problèmes notamment rencontrés :
- des problèmes administratifs : défaut de certificat de capacité (détention illégale d’animaux sauvages), défaut d’autorisation d’ouverture
- des problèmes de mauvais traitements : animaux faméliques et/ou mal soignés, cages trop petites et/ou sales, installations extérieures non montées ...
Des problèmes qui, de l’avis de beaucoup, concerneraient davantage les petits cirques familiaux que les grands cirques.
Un exemple de défaut d’installation des cages extérieures chez Medrano dans ce reportage de France 5 (6’10)

(6) Des animaux qui sont alors généralement placés dans des zoos ou des sanctuaires (Refuge de l’Arche en Mayenne, Elephant Haven en Haute-Vienne, Tonga Terre d’accueil dans la Loire)

(7) Se pose ensuite le problème des installations sauvages (sans autorisation) et de la difficulté pour les maires d’expulser les cirques en question
Quelques exemples : iciici ou ici. Un problème faisant l’objet d’une question au sénat.

(8) Devant gérer cette montée en tension, Matignon a créé fin 2017 une Commission nationale des professions foraines et circassiennes, une instance de dialogue associant les représentants de l’État, des élus locaux et des représentants des cirques.

(9) Ce qui déclenche parfois l’agressivité de certains circassiens. Quelques exemples : iciiciiciiciiciici, ou encore ici

(10) Ailleurs en Europe, les résultats vont dans le même sens. Exemples : AngleterreEspagneMalte

(11) Le match reste pour l’instant inégal (environ 1 million de spectateurs par an pour le cirque contemporain versus 13 millions pour le cirque traditionnel) ; mais les choses évoluent : entre 2016 et 2017, les recettes des cirques traditionnels ont par exemple baissé de 40%.

(12) D’autres cirques, en utilisant uniquement des animaux domestiques, ont une position "entre-deux" : c’est le cas de Zingaro (chevaux) ou de Romanès (chats).

(13) Cirque Eurasia.

Références

The welfare of wild animals in travelling circuses
CCEA : Une image de dignité pour la France avec des cirques sans captivité ni dressage d’animaux sauvages ou domestiques
RSPCA : A review of the walfare of wild animals in circuses
Ethique animale : Les cirques et autres spectacles
Iossa, G ; Soulsbury, CD ; Harris, S : Are wild animals suited to a travelling circus life ?
Code Animal : Derrière les paillettes, les stress
Sciences et Avenir : De la sociabilité des éléphants
L’Express : Intelligence animale : les éléphants "pleurent" énormément
Elephants are super intelligent and affectionate creatures
Le Monde : "La situation des éléphants dans les cirques est gravement préoccupante"
The Telegraph : Elephants in zoos at risk of abnormal behaviour because of small groups
Huffington Post : Un éléphant qui pleure après 50 ans de captivité

Maxisciences : Un puma secouru après avoir passé 20 ans enchaîné dans un cirque
La Dépêche : Les animaux du cirque Fratellini
Nice matin : Les fauves en cage du cirque Muller font polémique à Carros

Quelques vidéos d’animaux confinés et/ou attachés : iciiciiciiciiciiciiciiciiciiciiciici

Quelques exemples d’animaux qui stéréotypent : éléphantéléphant (1)éléphant (2)tigreslionslionnesdromadairechevauxzèbres

Wikipedia : Elephant goad ou bullhook
Peta Exposes Ringling Bros Cruelty
Peta : La violence du dressage des éléphants révélée par Sam Haddock
The Telegraph : RSPCA outrage as elephants (Sonja, Delhi and Vana Mana) return to the circus
One Voice : Traitement infligé par Anton Gartner à ses éléphantes (Diana, Pira, Belinda, Thaï et Baby) en public ...
Mail Online : Anne’s agony
The Guardian : Bobby et Moira Roberts du Great British Circus accusé de maltraiter leur éléphant
France Culture : Violence et maltraitance au cirque : pénétrez dans la cage du dresseur de fauves
20 minutes : Le cirque Ringling Bros accusé devant la justice de maltraiter les éléphants (à propos de la plainte de Tom Rider, un ancien dresseur)
The Guardian : Circus trainer Mary Chipperfield guilty of cruelty to chimpanzee
Holidog Times : Un ours battu avec un bâton en plein spectacle de cirque (Russie)
France 24 : Animaux maltraités au cirque Fontanka de Saint-Pétersbourg
Washington Post : Circus Trainer Mark Oliver Gebel of Ringling Bros Accused Of Abusing Elephant

La violence du dressage, quelques exemples : iciiciiciiciiciiciiciiciiciici

Generation Voyage : L’horrible vérité que vous cachent les dresseurs d’éléphants en Thaïlande
Wikipedia : Elephant crushing
Le Monde : Dans les cirques chinois, des méthodes de dressage cruelles et violentes

Partager cet article
Repost0

commentaires

D
Beaucoup de cirques montrent des animaux bien traités. Il faut (comme moi) avoir connu cela de l'intérieur pour équilibrer son opinion et ne pas tomber dans l'extrême caricature. <br /> L'apologie de la vie sauvage oublie à la fois son extrême cruauté (loi de la jungle), et par ailleurs la destruction des milieux de vie par l'homme. La déforestation et l'invasion des humains font disparaître bien des espèces sauvages. Des éléphants meurent sous les balles, d'autres éléphants participent quotidiennement à des travaux de transport et de construction. Les élevages industriels de poulets, les abattoirs, sont longtemps restés dans l'ombre. Les chevaux de course suivent un entrainement intense. <br /> Enfin, les bobos des villes croisent des sans-abris dans le froid mais veulent chasser (aussi ?) ces animaux qui ne sont pas de chez nous. <br /> Or bien des humains civilisés des villes, quasi domestiqués, sont sujets à une "projection freudienne", à un refoulement inconscient. Ils dénoncent la sauvagerie réduite à l'état d'obéissance. En y réfléchissant un peu, on s’interroge sur les motivations profondes de ces mouvements de protection animale. <br /> Demandons-nous à quel point les gens civilisés dans les villes seraient eux-mêmes d’anciens sauvages devenus domestiqués. Ils sont isolés dans des cubes dont ils rêvent de devenir propriétaires. Leurs femmes ne savent plus accoucher (les femmes sauvages savent). Ils s'extirpent du lit pour aller travailler, OUI, ILS DOIVENT SORTIR DU LIT POUR ALLER TRAVAILLER, et s'adapter à plein de contraintes, ils ne sont plus en contact avec la nature, et curieusement, au lieu de s'indigner contre leur propre condition, ils signent des pétitions sur la souffrance des animaux sauvages domestiqués que les cirques obligent à travailler.<br /> Certes la condition animale mérite toute notre attention. <br /> Mais parfois aussi, notre miroir projette.
Répondre
A
Il est impossible de ne pas éprouver une gêne honteuse en découvrant, à l'entrée de certains villages situés à proximité d' une plus grande ville, le campement d'un de ces petits cirques itinérants. On y voit dans les champs à proximité quelques animaux attachés à un pieux, d'autres dans des cages sur roues. On pense également aux hommes, aux femmes, aux enfants qui participent à cette vie et immanquablement on se dit qu'il y a là une forme de vie, pour toute cette petite communauté, qui est très proche de la survie. <br /> Concernant la souffrance on pense bien évidemment à Montaigne ou à cette citation : " « « Je crois que c'est du sang des bêtes sauvages,<br /> que le fer a été maculé tout d'abord."<br /> Enfin il me semble malheureusement que la description de la vie sauvage idéale ici exposée est largement derrière nous et qu'elle est sur une pente régressive ( inexorable ? ) car l'espace des animaux se réduit mécaniquement par l'augmentation de la population humaine. <br /> Cette situation était déjà décrite, dans les années 50, par Romain Gary dans son roman " les racines du ciel"
Répondre