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19 mars 2022 6 19 /03 /mars /2022 06:01

Dans son numéro du 17 au 25 mars 2022, Télérama fait une analyse strictement juridique de la guerre en Ukraine afin d'envisager la possibilité de traduire en justice ceux qui l'ont déclarée (articles “ Le droit pour se défendre ” et “ L'épreuve des preuves ”).

 

La Seconde Guerre mondiale a produit un chapelet impensé d'horreurs : massacre de populations civiles dans des camps de concentration avec un objectif génocidaire, bombardements implacables de villes anglaises (Coventry), allemandes (Dresde) par des moyens conventionnels, puis par la bombe atomique (Hiroshima). En réaction, la communauté internationale (l'ONU) a légiféré pour tenter de fixer les limites à ne pas dépasser, dans le droit fil des travaux des deux conférences de la Paix ayant réuni à La Haye quarante nations en 1899 et 1907. Avec l'idée que ceux qui outrepasseraient ces limites en commettant des crimes de guerre définis rigoureusement pourraient être déférés devant des cours de justice internationales. Mais la politique étant, comme toujours, un rapport de forces, on sait que les États-Unis ont refusé la comparution de leurs soldats ou dirigeants potentiellement coupables devant de telles instances. Les Russes pourraient faire de même.

 

Au commencement était le Mot. Télérama reprend donc les mots utilisés par Poutine pour justifier son “ opération militaire ” (Poutine n'utilise jamais le mot “ guerre ” et l'a interdit dans les médias. Le président russe parle de “ génocide ” perpétré par des “ néonazis ” ukrainiens, des “ fanatiques ”. Poutine semble être obsédé par cette notion de génocide qu'il avait déjà utilisée lors de l'intervention en Géorgie en 2008 et en Crimée en 2014. Mais il lui est difficile de se lancer à l'assaut de ceux qu'il considère comme coupables en faisant fi du droit international défini dans le Charte des Nations unies. Un des articles fondamentaux de cette charte (2-4) stipule que « Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. » Entre autres, à de rares exceptions près, une opération militaire n'est possible que si le Conseil de sécurité l'autorise (on sait que les États-Unis ont été des spécialistes de cet engagement sans autorisation) en cas d'agression ou de « responsabilité de protéger » une population, ou à la demande d'un autre État, comme la France au Mali récemment. Télérama souligne que, hormis cette autorisation, seule la légitime défense peut justifier la force armée. La guerre lancée par les Russes ne se situant dans aucun de ces cadres, elle se situe hors du champ de la légalité. Le 2 mars, l'Assemblée générale des Nations unies a « exigé le retrait immédiat » des forces russes d'Ukraine. Sans aucun effet puisque les décisions de cette Assemblée ne sont pas contraignantes, contrairement à celles du Conseil de sécurité que la Russie paralyse par un droit de veto permanent.

 

Depuis la Charte de 1945, la Cour internationale de justice a pour vocation de régler les différends entre les États tandis que la Cour pénale internationale, en tant que tribunal permanent, a pour mission de juger des individus soupçonnés de crimes de guerre, crimes contre l'humanité, génocides. Il est peu vraisemblable que Poutine ait jamais à se présenter devant cette instance, pas plus que George Bush ou Anthony Blair, accusés de crimes identiques lors de la guerre d'Irak. D'autant que la Russie n'a pas ratifié le Statut de Rome qui délimite la compétence de la CPI. Cette cour a surtout condamné du menu fretin, comme le congolais Thomas Lubanga Dyilo qui avait enrôlé des enfants de moins de quinze ans, ou encore le salafiste malien Abou Tourab, reconnu coupable d'avoir détruit des monuments historiques religieux. Fretin un peu moins menu, le président serbe Slobodan Milošević qui mourut en prison avant la tenue de son procès.

 

Dès le 27 février (je cite Télérama), l'Ukraine a saisi la CIJ arguant que l'invasion russe était illégale car basée sur une fausse allégation de génocide. L'audience s'est tenue les 7 et 8 mars. La Russie ne s'est pas présentée. Le 24 février, l'un de ses avocats, le Français Alain Pellet, avait démissionné, écrivant à ses amis russes : « Trop c'est trop. Des avocats peuvent défendre des cures plus ou moins discutables ; il est impossible de représenter dans des enceintes vouées à l'application du droit un pays qui le méprise si cyniquement. »

 

Si Poutine est droit dans ses bottes (d'autant que, grâce à un tour de passe-passe institutionnel, il aura peut-être régné 36 ans à la tête de la Russie, égalant le record du dictateur d'extrême droite Salazar au Portugal), c'est parce que, pour lui, l'Ukraine n'existe pas. Pas plus que le département du Pas-de-Calais (s'il lui prenait la fantaisie de proclamer son indépendance) pour l'État français. Il est vrai que la Russie et l'Ukraine sont historiquement imbriqués. Lors des partages de la Pologne à la fin du XVIIIe siècle, l'Ukraine (qui possède sa langue mais 20% des Ukrainiens sont russophones, à commencer par l'actuel président) fut progressivement intégrée dans l'Empire russe. Cependant, la  partie ouest du pays fut  intégrée à l'Empire d'Autriche. Le Russe Leonid Brejnev était né en Ukraine. Également russe, Nikita Khroutchev était né à deux pas de l'Ukraine.

 

Á part ça, et parce que l'heure n'est pas à l'optimisme, je me souviens de Lamartine : « Nos seules vérités sont nos douleurs » et je me dis que, quelle que soit l'histoire de ces deux pays en guerre, la vérité est du côté de celui qui souffre. Même si Fahruddin Sharafmal, présentateur ukrainien de la Chaîne 24, appelle au meurtre d'enfants russes en citant Adolf Eichman.

 

Oui, une guerre peut être déclarée et jugée “ illégale ” !
Oui, une guerre peut être déclarée et jugée “ illégale ” !
Oui, une guerre peut être déclarée et jugée “ illégale ” !

PS : La folie douce a contaminé des syndicats d'enseignants

Près de La Roche-sur-Yon, un collège porte le nom de l’écrivain Russe Alexandre Soljenitsyne qui s’était rendu en Vendée en 1993. Des syndicats d’enseignants demandent qu’il soit remplacé par celui d’un poète ukrainien.
Les syndicats Sud Éducation 85, SGEN CFDT 85, CGT Educ’action 85, FA groupe Henri-Laborit et Attac Vendée « exigent le changement de nom du collège, en soutien aux peuples victimes de la folie meurtrière de Poutine ».
J'observe que le syndicat auquel j'appartiens depuis plus de 50 ans (la FSU) n'a pas signé cet appel honteux. Quant à ce qui reste de la malheureuse ATTAC...
(Ouest-France).
 
PPS : Auvergne. Débaptisons les collèges Vercingétorix. De récentes fouilles dans des caisses prouvent qu'il trompait sa femme.
 
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commentaires

A
C'est curieux en France on évoque souvent les bombardements sur l'Angleterre ou sur l'Allemagne et plus particulièrement celui de Dresde et bien peu ceux sur le territoire français.<br /> Pourtant il y a eu énormément : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardements_en_France_durant_la_Seconde_Guerre_mondiale<br /> Je citerai pour rappel que Saint Malo a été détruit à 80% ou bien la ville martyr de Royan :<br /> " Dans la nuit du 4 au 5 janvier 1945, une escadre aérienne alliée (Anglais et Canadiens de la Royal Air Force) de 347 bombardiers de type Lancaster largue sur la ville de Royan, éclairée comme en plein jour au moyen de fusées, plus de 1500 tonnes de bombes ordinaires dont 285 énormes bombes de 2 tonnes très meurtrières et 14 tonnes de bombes incendiaires, en deux vagues. Les bombes de 2 tonnes sont appelées "blockbusters" ou «cookies» , termes inventés par la presse faisant référence à leur capacité explosive. Elles peuvent en effet éventrer des pâtés de maisons et le souffle d'explosion est si puissant qu'il arrache les toits des maisons. Lors de la 1re vague, 217 quadrimoteurs Avro Lancaster du 5e groupe de bombardement de la RAF larguent leurs bombes de 4h à 4h15. Lors de la 2ème vague, 124 bombardiers survolent la ville de 5h30 à 5h45.
Lorsque la deuxième vague s'éloigne enfin, plus de 1 000 victimes, morts ou blessés, gisent sous les décombres. Les survivants, à demi-nus, commencent à mesurer l'étendue de leur malheur : «hormis quelques pans de mur, il ne restait de la ville qu'un tas de pierres recouvert de neige» (Amiral Meyer). Il neige en effet à Royan et la température avoisine - 10°. Le centre-ville n'existe plus, seul le clocher de l'Église Notre-Dame se dresse encore au milieu des ruines de 5000 maisons.<br /> Ce bombardement a décimé la population civile (442 morts et plus de 400 blessés). La technique meurtrière utilisée à Royan est la même que les bombardements de terreur sur les villes allemandes. Elle s'effectue en deux temps, la ville étant anéantie sous un «rolling carpet bombing», un tapis roulant de bombes. La seconde vague est plus meurtrière avec des bombes de 2 tonnes destinées à tuer le plus grand nombre de personnes : ennemis, civils ou militaires occupés à secourir les victimes de la 1ère vague. L'ennemi ne compte que 47 victimes et aucun ouvrage militaire allemand n'a été touché. 7 avions alliés ont été perdus au cours du raid et 34 aviateurs ont péri." <br /> On comprend qu'il s'agissait pour les américains et les britanniques de diminuer au maximum les leurs lors de leur débarquement. Pourquoi pas mais arrêtons de les présenter uniquement sous un certain jour.<br /> "Comme le dit R. Desquesnes, « Avec le recul, on peut, aujourd'hui, se poser la question de savoir si on avait réellement besoin, au milieu du mois d'avril 1945, d'une telle démonstration de force sur la côte atlantique, alors qu'au même moment les Soviétiques s'emparaient, dans Berlin, de l'aéroport de Tempelhof »1<br /> C'est ainsi, en France, on est toujours disposé à s'attendrir sur le malheur des autres et c'est normal, oubliant notre propre histoire ou à admirer le courage des mêmes pour, par un effet d'opposition, diminuer ou oublier celui dont ont fait preuve bien de nos prédécesseurs ( Dunkerque)<br /> Je vois dans cette logique le résultat de la culture dominante et efficace de nos élites qui depuis de nombreuses années nous envoient une image détestable de nous-mêmes cherchant à se dédouaner de leurs responsabilités dans ces désastres puisque ce serait le peuple français qui n'aurait pas été à la hauteur comme le sont aujourd'hui les chômeurs, responsables du chômage, les pauvres de la pauvreté et pour finir les non vaccinés ( j'ai reçu les 3 doses ) de la pandémie.<br /> Car il y a derrière la représentation dévalorisante qu'ils font de nous la valorisation implicite d'un modèle respectable, celui des anglo-saxons. Un modèle qu'il faut absolument copier, sous-entendu celui du libéralisme pur et dur.
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G
Mes parents, qui ne se connaissaient pas, habitaient Arras. Ils ont subi en 1944 des bombardements toutes les nuits. Après des nuits, ma mère était tellement épuisée qu'elle ne descendait plus aux abris et aurait préféré mourir dans son lit. Mon père, 19 ans, se mettait dans une encoignure de porte, fumait une cigarette et regardait le bombardement du jour comme s'il s'était agi d'un feu d'artifice.