Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 octobre 2012 4 25 /10 /octobre /2012 06:14

http://www.theibug.com/wp-content/uploads/2010/11/lance-armstrong-cancer-photo.jpgCi-dessous, un bel article de Jean-Emmanuel Ducoin (rédacteur en chef de L'Humanité), publié sur son blog (link).

 

Célébré par Bush et Sarkozy, l'ex-septuple vainqueur du Tour désormais déchu de tous ses titres, fut le symbole du catéchisme marchand.

 

 «Armstrong n’a aucune place dans le cyclisme. Il mérite d’être oublié.» En entendant ces mots, hier, dans la bouche du président de l’Union cycliste internationale, Pat McQuaid, il nous fallut un long moment d’introspection pour mesurer à sa juste valeur le poids des années endurées comme l’ampleur du cataclysme annoncé. Comprendre ne va jamais sans tremblements, surtout quand il s’agit du plus grand scandale du sport moderne. Depuis la lecture du rapport de l’agence antidopage américaine (Usada) et ce qu’elle appelle «une conspiration du dopage le plus sophistiqué jamais révélé dans l’histoire», il ne pouvait en être autrement. Exit l’ex-idole de juillet. Enfin!

 

Acteur cynique d’une époque née de la métamorphose des corps par le sang et la génétique, Lance Armstrong avait mis en place «un système mafieux» pour «assurer le secret» sur une organisation gigantesque, au service d’une icône incomparable et inégalée. Souvenons-nous.


Armstrong n’était qu’un revenant de la maladie et cette particularité, rare dans un sport aussi impitoyable avec les organismes, lui offrait du crédit et de la compassion. Le caractère de l’homme importait plus que ses capacités. «Chaque jour qui passe est un jour gagné sur la vie», disait-il aux cancéreux. Et aux spécialistes du vélo, il confessait: «Ma course contre le temps m’a fait comprendre qu’on ne peut pas gagner le Tour tant qu’on n’est pas un homme.» Nous étions sommés de le croire. Et pour cause. Aux lisières du mystère de la fabrication des performances, déjà elles-mêmes aux extrémités de ce qui est moralement acceptable d’entreprendre, Armstrong n’avait rien d’autre à perdre «que la vie». Sujet délicat s’il en est. Car suspecter un individu sauvé d’un cancer si grave que beaucoup l’avaient condamné avant l’heure relevait alors de l’impossible. Il avait vaincu la maladie. Que ne pouvait-il vaincre? Sauf à oublier qu’entre-temps un mutant de la biochimie avait pris la place d’un «simple» sportif, qu’il avait laissé sous lui un corps sans vie, duquel il se vengeait. Le roman était en place. Un roman noir.

 

Avec la «globalisation Armstrong», un décalage a fini par se creuser entre les coureurs, mutés en figurines de jeux vidéo, et le public, fidèle à l’heure de célébrer sur le bord de la route la mémoire de sa propre histoire. Le Tour de France s’est défait de son caractère onirique pour se convertir en machine à spectacle où l’on peut lire l’essence générale du sport: un modèle réduit de l’ultralibéralisme. Célébré par Bush et Sarkozy, par CNN et les télévangélistes, par Nike et Drucker, Armstrong fut le symbole du catéchisme marchand. Non seulement il a triché avec un mépris sans bornes, mais il a versé le mythe du maillot jaune dans celui de l’american way of life revisité pour les besoins de l’époque, la gloire, le fric, le consumérisme, le pouvoir. L’exigence de crédibilité du modèle Armstrong n’était qu’une condition subjective de la confiance commerciale qui reposait sur ses épaules.

 

Comment ne pas croire que quelque chose nous a trahis, dont le dopage sous toutes ses formes ne serait qu’un des avatars? En danger de mort, le cyclisme vit la crise la plus sérieuse de son histoire. Mais il ne s’en sortira pas sans un moratoire global sur toutes ses activités, sans des états généraux débouchant sur une vélorution et, surtout, sans éliminer tous ceux qui, de près ou de loin, à l’UCI, dans les équipes et ailleurs, ont collaboré aux années de plomb. Deux écueils nous guettent : croire que l’on peut tout changer et croire que l’on ne peut rien faire. Le cyclisme reste une belle métaphore. À condition de ne pas sombrer dans la désespérance.

 

http://blog.1001actus.com/files/lance3.jpg

Partager cet article
Repost0

commentaires

J
Ha! le bonheur de voir tomber un champion, celui qu'on ne sera jamais, celui dont on enviait la réussite.<br /> Un *revenant* qui déjà avait remporté de toutes victoires, la + grande.<br /> Enculer, de tous nos systèmes capitalisants le plus franchou<br /> illard, des beuvrés habillés en sapin de noël, sur le bord des routes, qui attendent toute une journée pour voir passer l'homme *le + vite*, le hélant, le rouleur ailé, projetant pour les uns leurs<br /> rêves d'être un homme, gagnant, pour les unes ceux d'avoir un homme, gagnant. Et lui, haut de toute sa souffrance, de mépriser ces regards anonymes.<br /> Je te salue, Amstrong, so strong U ar', tu es allé sur la lune au moins 10 fois. Champion du monde à 20 ans, et quelle raclée à ton cancer. Tu as, mieux que tous consultants ou *commenteurs*, tous<br /> ignoranT, su révèler les failles des porcs, et des portés, EN GENERAL.<br /> Je mettrai le sang d'un loup dans les veines du + jeune, et on verra s'il franchit la ligne d' *arriver premier* 7X. T'inquiète, c'est pas demain. Continue ta lutte la plus utile, avec l'argent des<br /> crédules, et les autres détalerons. Oui : personne ne t'arrivera jamais au talon, étalon! Merci Lance, pour toujours, CHAMPION!!
Répondre
D
Jeune, je racontai à mon père que j'avais vu avec surprise une souris dans mon garage.<br /> Ce sont des bêtes discrètes, répond-il. Si tu en as vu une, sois sûr qu'il y en a bien d'autres.<br /> <br /> Au fil des années, j'ai pu vérifier la théorie des souris. Un exemple? Aux informations, on annonce que par grand vent, une grue est malencontreusement tombée dans la cour d'une école, faisant une<br /> petite victime. Un ami assureur consulte les données et m'apprend que de nombreuses grues sont déjà tombées, mais sans qu'on en parle.<br /> Y a t-il un rapport entre la théorie des souris et le cyclisme professionnel?
Répondre
B
<br /> <br /> Vous nous entraînez dans des questions métaphysiques pas possibles. On va avoir du mal à suivre...<br /> <br /> <br /> <br />