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10 novembre 2011 4 10 /11 /novembre /2011 06:37

 

http://2.bp.blogspot.com/-uZiHkYjCeIQ/TeDlhMpLurI/AAAAAAAADkU/crIiqI5XHpc/s1600/justice_injustice.jpgJ’ai sous les yeux une ordonnance d’une Cour d’appel. Il s’agit d’un document instructif et édifiant.

 

L’affaire oppose le client d’un avocat à son conseil. Dans ce litige, le client s’est d’abord adressé au bâtonnier de l’Ordre des avocats qui a donné entièrement raison à son confrère. Le client a donc porté l’affaire devant la Cour d’appel du lieu.

 

Le client avait formulé des griefs très sérieux à l’encontre de l’avocat dont il avait utilisé les services dans deux affaires :

 

-       L’avocat n’a jamais évoqué le montant des honoraires qu’il comptait lui réclamer.       

-       Dans la première affaire, l’avocat ne l’a pas informé d’une décision défavorable de la juridiction qui avait statué.      

-       L’avocat ne l’a pas informé de la radiation de l’affaire et de la possibilité d’ester de nouveau en justice.       

-       L’avocat a demandé pour son client 5000 euros de dommages et intérêts alors que ce client avait expressément stipulé qu’il ne réclamait aucun argent.      

-       Dans la seconde affaire, l’avocat s’est lancé, contre l’avis de son client, dans une procédure lourde, en adressant, au nom et à l’insu de ce client, un courrier revêtu de sa signature numérisé, donc en commettant un faux en écriture.

-       L’avocat n’a jamais pris la peine de répondre  aux courriels de son client et de faire suivre des factures d’huissier le concernant.

 

Pour ces motifs, le client, qui avait versé une provision pour honoraires, demandait de ne pas verser le reliquat et la restitution de la provision.

 

Le bâtonnier de l’Ordre des avocats (pour qui le faux en écriture ne relevait pas d’un manquement à la déontologie) refusa d’accéder à ses demandes, se contentant d’accorder aux clients une ristourne de quelques dizaines d'euros.

 

En lisant l’ordonnance de la Cour d’appel, la connivence, l’esprit de corps sautent aux yeux, ne serait-ce que dans la forme (qui n’est rien d’autre que le fond qui remonte à la surface, comme disait Victor Hugo). Lorsque le magistrat reprend, en discours indirect libre, les dires du client, il utilise systématiquement le conditionnel. Selon le client (qui « ne justifie pas ses dires »), l’avocat (qui, lui, n’a pas à justifier ses propos) « aurait diligenté une procédure », « il aurait subi de multiples renvois », « cette procédure aurait fait l’objet d’une procédure d’incompétence » (et le condamné à mort « aurait eu » la tête tranchée). Lorsque, par miracle, l’indicatif est utilisé, le magistrat commet des inexactitudes : il évoque des « poursuites » de la part d’huissiers alors qu’il s’agissait de « rappels ». Selon le magistrat, l’avocat a « mené à leur terme » les deux procédures, ce qui est faux puisque, dans l’une d’entre elles, l’avocat, « réputé et diligent » selon la Cour, avait porté l’affaire devant une juridiction incompétente, ce que n’aurait peut-être pas fait un étudiant en droit en deuxième année. Cela devient comique lorsque, évoquant un même fait, le magistrat utilise le conditionnel pour le client (« Me X aurait diligenté une procédure ») et l’indicatif pour le conseil (« Me X a conduit une procédure »).

 

L’affaire était donc entendue. Il n’y eut pas mort d’homme, heureusement.

 

Un dernier petit point de topographie : dans la juridiction où se sont déroulés ces faits, les bureaux de l’Ordre des avocats sont situés à dix mètres de la salle de la Cour d’appel.

 

Contiguïté incestueuse, quand tu nous tiens…

 

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