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11 septembre 2012 2 11 /09 /septembre /2012 06:11

Né à Vienne en 1921 de parents juifs, Erich Fried quitte l’Autriche en 1938 et émigre à Londres où il devient journaliste à la BBC. Son père est mort, torturé par la Gestapo.


Dans les années soixante, il milite contre la guerre du Vietnam. Dans les années soixante-dix, il est accusé de complicité intellectuelle avec les terroristes, alors qu’il avait qualifié la lutte de la bande à Baader d’« idiote ». Il figurera néanmoins sur la liste noire publiée par le parti chrétien-démocrate en novembre 1977.

Dans le but de nettoyer la langue allemande des séquelles du nazisme, il prône une écriture dépouillée.

Son œuvre se caractérise par la dimension ludique du travail d’écriture, comme le montre les deux brefs exemples suivants :

 

Der einzige Ausweg

Im aufgeschlagenen Stein

liegt ein Ei

Aus dem Ei

fliegt ein Vogel

Aus seinem Schnabel

ein Stein

Wer den aufbrechen kann

findet drinnen

nichts

.

.

L’unique issue

Dans une pierre fracassée

il y a un œuf

De l’œuf

s’envole un oiseau

De son bec

tombe une pierre

Celui qui peut la forcer

trouve à l’intérieur

rien

 

.

Was es ist

Es ist Unsinn

sagt die Vernunft

Es ist was es ist

sagt die Liebe

Es ist Unglück

sagt die Berechnung

Es ist nichts als Schmerz

sagt die Angst

Es ist aussichtslos

sagt die Einsicht

Es ist was es ist

sagt die Liebe

Es ist lächerlich

sagt der Stolz

Es ist leichtsinnig

sagt die Vorsicht

Es ist unmöglich

sagt die Erfahrung

Es ist was es ist

sagt die Liebe

 

Ce que c’est

C’est du non-sens

dit la raison

C’est ce que c’est

dit l’amour

C’est de la malchance

dit le calcul

Ce n’est que de la douleur

dit la peur

C’est sans espoir

dit le bon sens

C’est ce que c’est

dit l’amour

C’est ridicule

dit la fierté

C’est inconscient

dit la prudence

C’est impossible

dit l’expérience

C’est ce que c’est

dit l’amour

 

(Trad. : BG).

 

 

 

PARADIS PERDU

 

 

Lorsque j’eus perdu

Ma première patrie et lorsque

dans ma deuxième patrie

et mon premier refuge

 

 

puis dans ma troisième patrie

et mon deuxième refuge

j’eus tout perdu

je me suis mis en route

 

en quête d’un pays

qu’aucun souvenir

de pertes irrémédiables

n’empoisonnait

 

Ainsi arrivai-je au paradis

J’y trouvais la paix

Tout y était entier et neuf

Rien ne me manquait

 

Mais un gardien brandissant

son épée de feu me dit :

« Hors d’ici !

en ces lieux tu n’as rien perdu »

 

 

(Trad. : Dagmar et Georges Daillant)

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