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30 novembre 2015 1 30 /11 /novembre /2015 06:46

Terrorisme : qui est responsable, demande Evariste dans Res Publica ?

 

Nous refuserons aussi qu’on renonce à mettre en cause l’industrie française de l’armement. La France est devenue un des plus grands marchands d’armes de la planète, les dirigeants du Grand capital y sont en lien étroit depuis des décennies avec le capital financier des pétro-monarchies du Golfe persique. Ces représentants d’authentiques États islamiques barbares sont reçus avec les égards les plus humiliants par nos gouvernants ; c’est que leurs capitaux sont devenus, depuis la crise financière de 2008, indispensables à la survie d’un capitalisme français archaïque, ce qui fait fermer les yeux sur les délits d’initiés, blanchiment d’argent mafieux, fraudes fiscales, etc., sans oublier le financement et l’encouragement de Daesh, l’ennemi qui nous fait la guerre, par l’Arabie saoudite, l’allié qui achète « nos » avions…

 

L’ennemi a franchi un cran supplémentaire : ce ne sont plus les athées (Charlie Hebdo), la police (8 janvier 2015) ou les juifs (l’Hypercasher du 9 janvier 2015) mais n’importe qui vivant en France qui est visé. L’idée avait été énoncée par Ben Laden il y a déjà plus de 15 ans : ils veulent créer en France une guerre civile sur des bases religieuses. S’ils y parviennent, c’est la destruction de la gauche politique et sociale dans ce pays. Ces total-terroristes, rois du pétrole (de contrebande) et de vidéos Youtube abjectes, sont des ultra-capitalistes 2.0 d’une efficacité incroyable car ils s’appuient tout à la fois sur les vulnérabilités des démocraties et sur un projet de « civilisation (!) » qui justifie la démesure des actes.

 

 

Politis dénonce les dessous des tarifs abusifs de La Poste :

 

Coté distribution du courrier, les infrastructures sont en voie de disparition : une quinzaine de centres de tri doivent fermer, « autant de dégâts pour l’emploi dans les territoires, et pour l’environnement avec des envois qui vont parcourir des centaines de kilomètres supplémentaires », relève le syndicat. La Poste « poursuit la mise en œuvre de sa stratégie qui se traduit par une réduction de la présence postale sur l’ensemble du territoire, la distribution du courrier et des colis en J+1 est en recul, notamment par le déploiement à grande échelle de la lettre verte. Cette casse du service public s’accompagne d’une casse de l’emploi : - 90 000 en dix ans, 7 352 en 2014 », expliquait le 5 novembre la fédération CGT des activités postales, à la veille du comité de suivi sur le contrat d’entreprise entre La Poste et l’État. En juillet, lors de la présentation des résultats semestriels du groupe, les organisations syndicales ont constaté la suppression de plus de 5 000 équivalents temps plein en six mois.

 

Je citerai pour terminer l’introduction et la conclusion d’un article de Patrick Varetz pour Mediapart, qui se veut malgré tout optimiste après sa visite d’Hénin-Beaumont :

 

J’ai mené mes maigres investigations, et rédigé une bonne partie de ce texte, avant les événements meurtriers du 13 novembre dernier. Tenter de restituer, de façon parcellaire et totalement subjective, l’atmosphère culturelle d’Hénin-Beaumont peut apparaître — dans un tel contexte d’état de choc — quelque peu anecdotique, voire hors de propos. Néanmoins, je ne peux m’empêcher de penser que si la société de consommation n’avait à ce point évidé les esprits, et à ce point détruit le lien social par son libéralisme incontrôlé, nous n’en serions pas là en termes d’extrémisme et de désespoir.

 

(…)

 

Il y a un monde par-dessous, ou par-delà le nôtre – et il est ici, maintenant. Si ces mots du poète Robert Creeley entrent pour moi en résonance parfaite avec la réalité d’Hénin-Beaumont, ils semblent également s’appliquer – avec le même à-propos – à des centaines d’autres villes en France. Des villes où le libéralisme, censément vainqueur, détruit aveuglement emploi et lien social ; des villes où toute vie apparaît désormais éradiquée, depuis que les grandes enseignes de distribution ont créé leurs parcs d’attractions marchands en périphérie des zones urbanisées. Tous, nous voilà relégués en bordure d’un monde encore indifférencié – sur le point d’advenir. Mais à quoi ressemblera-t-il ce monde ? S’annonce-t-il pire, plus violent, partagé entre factions extrêmes, opposées mais pareillement opportunistes ? Ou bien s’invente-il déjà plus humain, plus curieux de connaissance, plus avide de culture et de partage, tout cela parce qu’une infime multitude – invisible et idéaliste – s’empêche chaque jour de renoncer. Oui. Miser sur un monde meilleur, c’est le pari encore qu’il nous faut tenter. Ici et maintenant.

 

Revue de presse (146)

Hénin : le boulevard Basly de mon enfance. Je suis sur la photo...

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28 novembre 2015 6 28 /11 /novembre /2015 06:48

Thierry Frémont (Libération 18 janvier 1995) : “ Quand ça viendra, tant mieux: je serai «bankable», j'aurai plus de scénarios. Je ne manque pas d'ambition: au contraire, je fais ce métier pour grimper jusqu'au sommet. Mais je ne suis pas prêt à faire n'importe quoi pour ça. ”

 

A l’origine, en anglais, « bankable » appartient au jargon financier (« bankable securities » : titres recouvrables par les banques). Le terme est passé, vers 1990, dans le jargon cinématographique : un acteur qui rapporte de l’argent ou sur qui on peut financer un film. Le mot est alors prononcé à l’anglaise. Il a remplacé le mot « rentable », exprimant trop crument pour des oreilles francophones l’idée que le cinéma est, certes, un art, mais surtout un commerce. Il faut dire bankaibeul et non bancable. Or le mot « bancable » (ou banquable ») existe en français depuis 1877, avec le sens qu’il a, à l’origine, en anglais. Il se dit « des effets de commerce remplissant les conditions voulues pour être escomptés ou réescomptés par la Banque de France » (Le Grand Robert). Rien à voir, donc, avec un être humain ou un art populaire.

 

On trouve désormais « bankable » dans des écrits sur la musique, la peinture la littérature (« Stéphane Hessel, n°1 des ventes de livres en 2011, a de quoi s'indigner. Même avec une avance de plus d'un million d'exemplaires vendus sur son poursuivant direct, cinq auteurs ont été plus « bankable » que lui en 2011. », La Tribune, 16 mars 2012). Le terme fait également florès dans le sport : peu importe qu’un sportif en fin de carrière ne soit plus le meilleur s’il est le plus « bankable » : « Le plus bankable des rugbymen français n’a pas l’intention de raccrocher. Il réfléchit à sa « dernière étape ». Où qu’il atterrisse – le Japon, l’hémisphère Sud, Lyon, Toulon ? – il fera sans doute vendre des billets et des maillots. » ‎ Libération, 4 février 2012.

 

Ce glissement sémantique est idéologique : après l’art, l’artiste devient lui-même un produit commercial. Il suscite l’intégration des valeurs de la finance par le plus grand nombre.

 

Mieux vaut dire : rentable, sur quoi on peut miser, qui constitue une valeur sûre.

 

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27 novembre 2015 5 27 /11 /novembre /2015 05:50

 

Que les choses soient claires : je suis athée, je n’ai pas été baptisé, je me suis marié civilement, mes enfants n’ont pas été baptisés et je serai enterré civilement.

 

A côté de cela, je suis un grand visiteur d’églises et de cathédrales (surtout l’été car il y fait frais) et l’un des chocs esthétiques les plus forts de mon existence restera d’avoir vu de mes yeux vu la Pietà et le Moïse de Michel-Ange à Rome.

 

Je trouve lamentable le procès actuellement instruit, depuis un an, par un groupe de pression à l’intérieur de l’Association des Maires de France contre la présence de crèches dans les mairies de certaines villes. Ainsi d’ailleurs que celle des sapins de Noël, la fétichisation de ces arbres n’étant nullement d’origine chrétienne mais païenne.

 

Les crèches ne sont pas apparues sur notre sol la semaine dernière, ce qui n’est pas le cas des horaires réservées aux femmes voilées dans certaines piscines publiques.

 

J’observe que nombre de militants anti-crèches, de droite comme de gauche, sont francs-maçons. Je n’ai rien contre les trois points et j’admire bien des combats qu’ils ont menés depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Ils agitent actuellement un chiffon rouge à peu de frais. Ils surfent sur le concept vague à souhait du « vivre ensemble », tout comme, d’ailleurs, surfent, depuis la tragédie du Bataclan, les bobos parisiens. Pendant ce temps, on oublie les vrais problèmes et le CAC se frotte les mains. Les chômeurs et les smicards d’Uckange et d’Hénin-Beaumont apprécient fortement, n’en doutons pas, que les jeunes cadres puissent picoler (pardon “ boire des coups ”) en terrasse et aller aux concerts dans la douceur des soirées parisiennes. Ça, c'est Paris, le “ Gay Paree ” !

 

Tous les ans, je fais faire à mes filles le tour des crèches qu’une petite dizaine de villages du Gers créent à l’époque de Noël. Le Gers est une terre socialiste – il en reste si peu ! – et la plupart des visiteurs sont comme moi de gauche, athées ou agnostiques. Ces crèches ne sont pas installées dans les mairies mais, néanmoins, dans l’espace public : places, halles etc… Ce sont des crèches à thèmes : Alphonse Daudet, les capitales européennes, les peuples du monde, les contes de Perrault, Marcel Pagnol. Travail d'un an, admirable, instructif et, évidemment, bénévole. Un bain de culture, pas de culte.

 

Au IVe siècle, afin d’attirer à elle davantage de croyants, l’Eglise décida que Jésus était né un 25 décembre, jour d’une fête païenne venue de Perse (qui n’était pas encore chiite), où l’on égorgeait un taureau pour fêter le soleil. Quant à la fête de Pâques, elle nous vient des Juifs.

 

Je sens que l’aile marchante de l’AMF va mettre bon ordre à tout cela. Elle s'occupera ensuite du chômage qui a bondi en octobre.

 

Sus aux crèches !
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20 novembre 2015 5 20 /11 /novembre /2015 06:38

    

Je publie ci-dessous un court texte de Michel Cornaton, rédigé le 25 août 2015.

 

Je connais Michel Cornaton depuis plus de trente ans. Sociologue, psychologue, Michel a enseigné aux universités d’Abidjan (où nous fûmes collègues et amis) et de Lyon 2. Sa vie durant, il aura été un chercheur inlassable et rigoureux. Il fut le premier – et l’un des rares – à dénoncer et à étudier de manière exhaustive les « camps de regroupements » en Algérie, l’un des grands scandales cachés de la IVe République finissante. Pendant la guerre d’Algérie, les autorités coloniales déracinèrent et concentrèrent de force au moins deux millions de personnes dans des camps faits pour durer.

 

En 1964, Bourdieu publia Le déracinement, une approche sociologique de ce scandale, où il forgea le concept de paysans « dépaysannés ». Mais sa guerre d’Algérie connut une part d’ombre évoquée ici.

 

Créé en 1955 sur le modèle indochinois le 5ème Bureau assimila la guerre d’Algérie à une croisade des temps nouveaux mettant aux prises l’Occident chrétien avec le communisme camouflé sous les couleurs de l’islam. La lutte devait être menée selon trois axes : le soutien moral des troupes, l’action sur les populations musulmanes rurales, la démoralisation des bandes rebelles par des actions chocs. Le 25 décembre 1955 paraît le n°1 de Bled, journal de propagande de l’armée. Peu après la semaine des barricades à Alger, le 5 février 1960, à la surprise générale, le nouveau ministre des armées, Pierre Messmer, avait dissous à tous les échelons le 5ème Bureau d’Action psychologique dès son entrée en fonction. Il le considérait en effet comme un « véritable Etat dans l’armée » et avait fait de sa dissolution une priorité absolue.

 

Cinq décennies plus tard, l’ouverture au public des archives de la guerre d’Algérie réserve d’autres surprises, en particulier la révélation du rôle de Pierre Bourdieu, le futur sociologue, au Comité central d’action psychologique du Gouvernement général à Alger. En déplorant leur « peu d’informations » sur sa période militaire (1955-1957), sans plus d’investigations ses biographes et hagiographes se sont contenté de donner crédit aux quelques lignes de son « auto-analyse » posthume dans laquelle il se présente comme un deuxième classe dépourvu de toute responsabilité jusqu’aux « derniers mois » du service militaire. Or, selon le compte rendu officiel du Comité central d’action psychologique sa présence est mentionnée dès le 18 septembre 1956, non pas à titre de petit « employé aux écritures » mais d’ « assistant de M. Gorlin », le directeur de l’information. La réunion est présidée ce jour par Lucien Paye, le futur ministre de l’Education nationale de Michel Debré. Bourdieu siège à chacune des réunions du Comité, aux côtés du colonel parachutiste Ducourneau, un parent béarnais auquel il doit son détachement auprès du Gouverneur général de l’Algérie, Robert Lacoste. Au fil des mois il va monter en grade au point d’être pleinement intégré au Comité d’action psychologique, dont l’importance grandira au cours de l’année 1957. Pour mieux se rendre compte de l’influence croissante de Bourdieu dans l’Action psychologique il suffit de se référer à la conclusion de la réunion du 13 mars 1957. « M. Bourdieu propose la mise au point, en commun avec le Service psychologique de l’armée, d’une brochure indiquant les méthodes et les techniques de l’information, faisant le point d’un certain nombre de thèmes permanents de propagande se référant à l’œuvre de la France dans ses territoires africains. Ce qui faciliterait l’orientation et les actions locales des autorités et leur permettrait d’adapter à ces vues communes les circonstances quotidiennes. »

 

Pierre Bourdieu propagandiste de l’Armée ? Qui l’eût cru ? En attendant la publication de cette « brochure », précise-t-il dans son Esquisse pour une auto-analyse, il entreprend « d’écrire un petit livre, un Que sais-je ? », dans lequel il essaiera de « dire aux Français, surtout de gauche », ce qu’est l’Algérie. Vingt ans après l’appel de Londres du 18 juin 1940, en pleine guerre d’Algérie, il s’adresse d’Alger aux « Français, de gauche » pour leur parler… des mœurs et coutumes kabyles, dans le même temps où il est devenu la plume de Lacoste ! Bourdieu fait son entrée sur la scène de l’histoire. En 1961, suite au putsch avorté, de nombreux cadres du 5ème Bureau rejoignirent le noyau dur de l’OAS. A l’occasion de leur procès ils évoquèrent les cours d’action psychologique. Leurs témoignages contribuèrent à déconsidérer un peu plus l’emploi de l’arme psychologique à l’intérieur des forces armées, si bien qu’à partir de 1963 la psychologie fut retirée des programmes d’enseignement militaire supérieur.

 

 

Un chercheur franco-algérien, qui a relu ce texte, propose l’analyse et les précisions suivantes :

 

"En 1961......supérieur" pourrait également laisser entendre que Bourdieu aurait eu une collusion avec l'OAS. Or, Bourdieu à mon sens est dans les petits souliers des Gaullistes, c'est l'homme ou plutôt l'intellectuel organique (rôle qu'il tient au service du groupe dominant) du plan de Constantine. Il est l'expert qui domine alors, après la mise au ban de Jean Servier [ethnologue favorable à l’Algérie Française]. Bourdieu fait non pas de l'ethnologie mais bien un exercice de sociologie en collectant de l'information très précieuse dans les camps de regroupements pour préparer le Plan de Constantine et notamment ses déclinaisons en Métropole. Autre chose aussi : Pierre Bourdieu […] a construit son parcours de manière souveraine en faisant en sorte qu'aucune instante supérieure à lui ne puisse exister. Ce fut le cas pour sa revue Actes de la recherche en sciences sociales où il n' y avait aucun comité de lecture ou de rédaction, ce fut le cas également, selon moi, par son refus de réaliser une thèse de doctorat ; il ne voulait surtout pas de jury !!!. Seule exception : son audition pour l'entrée au Collège de France.

 

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18 novembre 2015 3 18 /11 /novembre /2015 06:20

J’ai déjà utilisé quelque chose de très approchant comme titre d’article, mais comme cette amorce était très accrocheure, j’en profite, à l’occasion de la parution d’un document officiel émanant du Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes, une administration qui dépend du Premier ministre. Le titre de ce document est « Guide pratique pour une communication sans stéréotype de sexe ».

 

Ce titre est hideux et idéologiquement marqué, dès lors qu’il nous inflige le concept de communication. La communication est au totalitarisme ce que l’information est à la démocratie. Mais ceci est un autre débat.

 

Ont participé à l’élaboration de ce document 19 personnes : 16 femmes, et 3 hommes. Une vraie parité, quoi ! L’objectif de ce groupe de travail, où les spécialistes en communication étaient plus nombreu.x.ses que les coiffeures, était de repérer des « stéréotypes de sexe ». L’expression est un peu bizarre : parle-t-on, en effet, de « pratiques de sexe » ? Mais, mettons.

 

On ne peut qu’adhérer aux nombreux postulats sociétaux de ce document, comme, par exemple, celui-ci : « La langue reflète la société et sa façon de penser le monde. Ainsi, une langue qui rend les femmes invisibles est la marque d’une société où elles jouent un rôle second. » Le Haut Conseil a parfaitement raison de rappeler que des noms et expressions tels.les que « chef de famille », « mademoiselle », « nom de jeune fille » n’existent plus dans le droit français depuis des dizaines d’années, même si ils.elles sont toujours présentes dans les têtes. Je me permets de rappeler qu’aux Etats-Unis d’anciennes militantes gauchistes devenues néocons.nes, horrifiées par la double existence de « miss » et de « mrs », ont forgé « ms », qui se prononce comme quelque chose ressemblant à « mzz ». Une « mzz » n’étant ni une « miss » ni une « mrs », la pauvre se stigmatisait comme, au choix, une lesbienne, une vierge, une larguée, une ni baisée ni baisante, bref une créature portant un lourd fardeau sur les épaules. By the way, ces expressions n’ont pas été « bannies » comme le dit le Haut Conseil (colonisé dans sa tête par le franglais) mais « interdites ». Assurément, le Conseil a parfaitement raison de souligner que « Les femmes sont, plus fréquemment que les hommes, présentées par leur prénom uniquement, étant précisée leur qualité d’ « épouse de » ou de « mère de x enfants », quand les hommes sont présentés le plus souvent avec leur prénom et nom, leur qualité, grade ou profession. » Ces pratiques sont (ou étaient) foncièrement idéologiques.

 

Dans ce blog, je n'avais pas attendu le Haut Conseil pour dénoncer une campagne particulièrement sexiste de recrutement dans l’Education nationale en 2011, et que cette même haute instance reprend dans son argumentaire :

Le Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes, ou l’acteure porno est une grande suceure

Le ministre était alors le DRH de l'Oréal et cette campagne avait été facturée, par des communicant.e.s, cela va de soi, 1,3 millions d'euros.

 

Mais le Haut Conseil (a-t-on déjà vu un « Bas Conseil » ?) sombre dans le grotesque du politiquement correct quand il se pique de réécrire la langue française au profit des femmes. Il préconise d’officialiser (souhaite imposer) dans la langue écrite le Morse que des militants d’extrême gauche ou écolos s’efforcent de faire passer dans les mœurs. On ne doit plus écrire « Les militants se retrouveront Place de la Liberté » mais « Les militant.te.s se retrouveront… ». On ne doit plus écrire « Un élève sera responsable du cahier de texte » mais « Un.e élève sera… ». Malheureusement, le Haut Conseil n’a pas, au long de ses interminables explications et recettes, indiqué comment prononcer à l’oral, surtout dans le feu de l’action, « les militant.te.s ».

 

La seconde officialisation du Haut Conseil est la féminisation de la dénomination d’un certain nombre de professions. Je l’ai déjà écrit à plusieurs reprises, la langue est traversée par la lutte des classes. Mais, pour des Conseiller.e.s bobos centre droit/centre gauche qui se veulent dans l'air du temps solférinien, la lutte des classes est un vague souvenir dans des livres d’histoire jaunis. Voici des exemples fournis par le Haut Conseil, prouvant que ses membres ne sont pas conscient.e.s de leur propre aliénation. Il souhaite que s’impose l’usage de nouveaux féminins. Seulement, pourquoi devrait-on dire « professeure » mais « éducatrice » ? « Chercheure » (cette chercheure est une « tête chercheuse ! ») mais « animatrice » ? « Gouverneure » mais « actrice » ? « Ingénieure » mais « transporteuse » ? Pour la bonne et simple raison que, dans le premier cas, nous avons affaire à des femmes de pouvoir qui veulent le beurre et l’argent du beurre en surimposant leur sexe à celui des hommes et, dans le second, à des femmes du peuple qui n'ont pas la parole.

 

Alors, en tant que sentinelle (ah, ben ça alors : suis-je un ou une sentinelle ?), je me dois de citer de larges extraits d’un article publié dans ce blog en avril 2015 à propos de ces initiatives horripilantes :

 

 

« En français comme dans de nombreuses autres langues (en tout cas celles que je connais de près ou de loin), le genre n’est pas nécessairement conforme au sexe.

 

Dans notre belle langue, celle de la raison de Descartes, des noms féminins s’appliquent uniquement aux hommes. On dit « une petite frappe » et non « un petit frappe ». On dit que tel chanteur d’opéra est « une basse » et non« un bas ». François est « Sa Sainteté » et non « Son Saint ». On dit également une tapette, une gouape. Et, à l’armée, une ordonnance ou, voir plus haut, une sentinelle.

 

Dans le même temps, des noms masculins s’appliquent à des femmes : on ne dit pas « une bas-bleu », « une contralto » (lorsqu’on parle de la voix d’une chanteuse). Au XIXe siècle, la petite employée d’une modiste était « un trottin ». Dans le langage familier, quand on dit d’une personne que c’est « un laideron », il s’agit d’une femme (même si, au moyen-âge, le mot était féminin). On a fini par adopter le mot « laideronne » (de moins en moins utilisé, les djeuns lui préférant « thon », vocable masculin qualifiant généralement une fille). Le mot masculin « souillon » a remplacé « souillard »  et s’applique presque toujours à une femme, qui travaillait autrefois dans une souillarde.

 

Et puis, il y a les bien utiles mots épicènes, ceux qui n’ont qu’un genre, quel que soit le sexe des personnes qualifiées. Alors là, la lutte des classes bat encore son plein (sa pleine ?). Il n’y a pas d’« amphytrionne », pas d’« angèle » (les anges n’ont pas de sexe, mais il est masculin), pas de « clerque » de notaire, pas d’ « artilleuse », pas d’« autrice » (qui devrait être le féminin d’« auteur » – sur le modèle de « factrice », mais Taine, qui connaissait bien l’Angleterre, a utilisé « autoresse »), pas d’« apotresse », pas de « bourrelle » (repéré une fois chez Colette qui s’en amusait), pas de « fausse-monnayeuse », pas de « censeuse », pas de « flirte », pas de « forçate », pas de « goinfrette », pas de « gourmette (au sens d'épicurienne) », pas d’« individue », pas de « membrette », pas de « pariate », pas de « tyrane », pas de « première violone ». On ne dit pas non plus « elle m’a pris en traîtresse ».

 

On peut – on doit – féminiser. Encore faut-il le faire intelligemment (j'allais dire esthétiquement), dans le respect du génie de la langue. Disons « une écrivaine » et non « une écrivain ». A noter que le féminin d’« écrivailleur » est « écrivailleuse » et non « écrivailleure » mais qu’ « écrivaillon » n’a pas de féminin. Disons « malfaitrice » et non « malfaiteure ». Disons avec Marcel Aymé « une ministresse » et non « une ministre ». On a bien connu la (légendaire) « papesse » Jeanne.

 

 

Le Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes, ou l’acteure porno est une grande suceure

Vérification de la virilité d'Innocent X

 

Disons « une peintresse » (et non « une peintre »), une « sculptrice » ou une sculpteuse » (comme on dit « une fraiseuse», mais là il s’agit – lutte des classes oblige – d’une ouvrière comme on n’en fait plus) et non « une sculpteure ». Disons « une voyoute », et non « une voyou ». Je comprends que « les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance » (Code civil) pose problème car « épouse » existe. Que fera-t-on de l’expression figée « d’égal à égal », ou de la phrase « dans ce type de rôle, cette actrice n’a pas son égal car elle est sans rivale et n’a pas son pareil ») ? Les plus grands ne se sont pas gênés. Restif de la Bretonne a utilisé « autrice » et Voltaire « professeuse » – en se moquant un peu, tout de même – sur le modèle d’empoisonneuse.

 

Depuis les années trente, on dit « aviatrice » et non « aviateure », « auditrice » (je sais que certain.e.s auraient aimé « cher.e.s auditeur.e.s »), « électrice », « postière ». Et aussi « championne » (ah, Laure Manaudou, cette grande « champion » toujours  détenteure de plusieurs records !). « Officière » ne fait pas – encore – partie du vocabulaire de l’armée, mais appartient depuis le XIVe siècle à celui de l’Église et, depuis 1949, à celui de l’Armée du Salut. Le péjoratif « officemar » n’a pas de féminin. La journaliste et écrivaine Michèle Perrein, qui proclamait être devenue féministe « par amour des hommes », avait fort bien posé le problème dans Entre chienne et louve (1978) : « Lorsque des tas d’entre nous auront été formées à l’École polytechnique, seront devenues officières de marine ou d’aviation, fliquesses en tous genres, le pouvoir sera peut-être partagé, mais il s’agira toujours d’un pouvoir instauré selon des idées et des normes masculines. »

 

On ne saurait passer sous silence le cas des bébés, des enfants en bas âge. En anglais, ils sont généralement du neutre, alors que les animaux de compagnie sont plutôt masculins et féminins. En français, ils sont majoritairement masculins. On rencontre très rarement « une nouvelle-née ». Ainsi que « nourrissonne » ou « enfançonne ». Mais cela peut changer. Le mot « enfant » lui-même sera utilisé pour parler d’une petite fille (« il a sauvé l’enfant de la noyade »). Les Enfants de Marie sont une congrégation de jeunes filles catholiques. L’expression « une enfant » est généralement condescendante (« une malheureuse enfant », « ma pauvre enfant ! »).

 

Je ne sais trop ce que les féministes politiquement corrects ont à dire des noms féminins qui recouvrent des réalités uniquement masculines. « Une canaille », « une femmelette », « Sa Majesté le roi », « une grosse légume », ce sont des hommes. De Gaulle fut « une grande star de la politique ». « Ce type est une vraie bête » signifie aujourd’hui qu’il est un gros balèze, mais cela n’a pas toujours été le cas. « Gens » est masculin, mais pas quand il est immédiatement précédé d’une épithète : « les petites, les bonnes, les vieilles gens ». Mais « les gens de bien », « les gens de sac et de corde » sont du masculin. Pensons également à ces mots problématiques : une chouette ou une girafe peuvent être fortement membrés mais girafeau et girafon n'ont pas de féminin.

 

Que les politiquement corrects s’inspirent de la richesse et de la diversité de la langue. L’histoire, la tradition, le rapport des forces veulent qu’on parte généralement du masculin, forme neutralisée, pour créer le féminin. On a vu l’inverse : « veuf » (1596) vient de « veuve » (1226). « Demoiselle » (appliqué autrefois à une jeune fille noble ou à une femme mariée de la petite noblesse, du latin domnicella) a précédé « damoiseau » (XIIe siècle) qui a précédé « damoiselle » (XIIIe siècle). « Puceau » (1530) vient de « pucelle » (1050), même si ce dernier mot vient de pullus, petit d’un animal. « Gourgandin » vient de « gourgandine ». Le mot « Juif » vient de « juive » (juef a été reconstitué à partir de juieue). Pour constituer le féminin, on a l’embarras du choix. Il y a ainsi le classique « e » qui peut être muet ou pas, surtout si l'on parle avec l'accent du sud (« une amie », « une Espagnole », « une ourse »).

 

Il y a des féminins qui gardent la marque du masculin. Depuis les rapatrié-e-s d’Algérie, une « pied-noir » peut être une « sans-cœur » car elle est « ronchon ». On dit « une Anglaise » mais « une Viking ». « Esquimaude » a remplacé « esquimau », même s'il sagit d'une vraie « poison ». « Laponne », comme « Nipponne (mots chéris des contrepéteures) », sont des formes attestées.

 

Le français a créé « chouchoute » (à partir de « chou »), ou encore une « rigolote hobereaute ». Celle-ci peut être « une butorde », même si elle est une « baillive » (qui n'exerce pas, qui est la femme du).

 

Par ailleurs, un certain nombre de féminins se terminent en « esse » depuis des lustres. On ne dit donc pas « une comte », « une chanoine », « une abbé », ni « une duc », « une dieu », « une bougre », « une mulâtre », « une notaire », « une druide », « une tigre », « une Suisse », « une pape », « une pasteure », « une vengeure ». À noter – toujours la lutte des classes – que les politiquement corrects parlent d’« une maîtresse d’école » mais d’« une maître de conférences. Elle savent ce qu'elles font, les bougre.esse.s !

 

Je pourrais développer à l’infini. Je terminerai par quelques exemples de féminins qui ne sortent même pas de l’ordinaire : « une bufflonne », « une reine », « une chanteuse » (et non « une chanteure »), « une cantatrice » (qui n’a pas de masculin), « une procureuse » (la magistrate) et non « une procureure », mais « une procuratrice » (celle qui procure), « une débiteuse » (celle qui doit) mais « une débitrice » (celle qui débite »). »

 

Au boulot, les Conseiller.e.s politiquement correct.e.s !

 

Dans l’édition de 1935 du Dictionnaire de l’Académie française, on trouvait : artisane, postière, aviatrice, pharmacienne, avocate, bûcheronne, factrice, compositrice, éditrice et exploratrice. Les saines réflexions ne datent donc pas d’hier. Ces mots étaient entrés tout naturellement dans la langue et l’Académie les avait repris pour la bonne raison qu’ils n’étaient pas des barbarismes et qu’ils avaient été constitués dans le respect du génie et de la tradition du français. Mais quand on se contorsionne pour écrire que « la professeure d’université a été nommée rectrice », que « la procureure est une acheteuse compulsive », on perd les pédales parce qu’on a décrété, de manière facho, que le masculin à valeur générique était digne d’Attila. On peut revenir sur cette règle contraignante qui remonte au bas latin selon laquelle notre langue n’a que deux genres, en reconnaissant dans le même mouvement que le masculin l’emporte pour des raisons arbitraires. Mais il ne revient pas à un aréopage de Haut.e.s Conseiller.e.s de proposer des horreurs, de régenter à la chlague une norme langagière qui a assurément besoin de refléter les temps qui changent.

 

Au fait, qui suis-je pour me permettre ce discours d’autorité ? Un homme qui, depuis 45 ans, fait la cuisine, les courses, la vaisselle. Un père qui a langé quatre enfant.e.s, à qui il a donné le biberon, et qui a lavé des couches en coton dans une petite machine à laver électrique en plastique.

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16 novembre 2015 1 16 /11 /novembre /2015 06:48

Dans le Grand Soir, l'inégalé Théophraste revient sur le boycott d'Israël :

 

Naguère, le boycott international des produits sud-africains accéléra la fin de l’apartheid et la libération de Nelson Mandela. Le boycott a été utilisé contre la junte birmane et même contre le Mexique pour obtenir la libération de Florence Cassez.

 

Aujourd’hui, des tribunaux français sévissent contre quiconque appelle au boycott de produits en provenance d’Israël.

 

Israël s’étrangle devant la loi européenne l’obligeant à mentionner l’origine exacte de ses exportations (les produits des terres colonisées).

 

Israël ne tolère d’autre traçabilité que celle utile à ses missiles guidés par Laser.

 

Il faut d’urgence boycotter le mauvais coton filé à Tel Aviv par les dirigeants israéliens, bourreaux de la Palestine et futurs bourreaux de leur propre peuple.

 

 

 

A l'occasion de la campagne pour les régionales, Mathieu Magnaudeix de Mediapart est allé faire un tour à La Réole, une bourgade de 4000 habitants, en bord de Garonne :

 

Derrière les jolies façades du centre-ville, des marchands de sommeil logent des gens au RSA dans des bouis-bouis insalubres. Dans ce coin d’Aquitaine, du Sud-Gironde à Agen, du Médoc à Fumel (Lot-et Garonne), en passant par la Dordogne, l’Insee parle d’un « couloir de la pauvreté » où se cumulent les difficultés. Les usines, on les a plutôt vues fermer. Comme les bureaux de poste, peu fréquentés, toujours menacés. Dans certains villages d’Aquitaine, il y a encore des zones blanches où le portable ne passe pas. L’arrivée du haut débit est fêtée dans la presse locale.

 

Le maire, le socialiste Bruno Marty, élu en 2014, a de grands projets pour La Réole : un centre-ville revitalisé « avec l’aide de la région », des actions pour la réhabilitation des logements, contre la précarité énergétique. Pour les régionales, Marty s’inquiète, bien sûr. Ce prof de maths voit ses anciens élèves du lycée voter « très facilement » pour le parti de Marine Le Pen. « Il y a quinze ans, ce n’était pas le cas. » Peur du déclassement, ressentiment envers la population d'origine maghrébine, pourtant là depuis des lustres...: dans les villages, le Front national grignote, même si le socialisme municipal tient plus le coup qu’ailleurs, tradition radicale-socialiste oblige.

 

 

 

Le village de mes grands-parents, pas très loin de La Réole

 

 

 

Je rédige cette rubrique quelques heures après les attentats de Paris et de Saint-Denis. Sur la page d'accueil d'Orange (privatisée), un article sur les affres que connaît Jennifer Lawrence, actuellement l'actrice la mieux payée au monde :

 

C'est dans un long entretien dont certains passages sont disponibles en vidéo sur le site du magazine Vogue, que Jennifer Lawrence se dévoile et revient sur sa vie de jeune célibataire. En quête d'amour, cette dernière confie vivre dans la solitude la plus totale, aucun homme ne faisant le premier pas. "Personne n'ose me demander. Je suis seule chaque samedi soir, explique-t-elle avant d'ajouter : "Les mecs sont si méchants avec moi. Je sais d'où ça vient, je sais qu'ils essayent d'établir une forme de domination, mais ça blesse mes sentiments". Mais la belle blonde ne baisse pas les bras et donne même des conseils pour la séduire. "Je suis une fille qui veut que vous soyez sympas, dit-elle. Je suis réglo".

 

 

 

A propos des massacres parisiens, je laisse provisoirement le dernier mot à Politis qui titre :

 

Paris : Une tragédie aux conséquences incalculables

Ces nouveaux attentats de Paris s’inscrivent dans une série meurtrière venue de Syrie et menacent durablement la démocratie.

 

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9 novembre 2015 1 09 /11 /novembre /2015 06:21

700 millions de Chinois, et moi, et moi, et moi… Peut-être, mais pas en Corée qui pourrait disparaître au XXe siècle à cause de son faible taux de fécondité (1,2 enfants). Selon l’Obs,

 

Le faible taux de natalité est une obsession des politiques sud-coréens. La dernière trouvaille du parti conservateur, majoritaire à l’Assemblée, Saenuri (littéralement « Nouveau monde ») : réduire la durée de la scolarité de deux ans.

Sérieusement ? Saenuri a proposé de commencer l’école primaire à cinq ans, au lieu de six, et d’enlever une année d’école en primaire et une autre au collège. Sa logique : plus vite on aura bouclé sa scolarité, plus vite on peut faire des bébés. La Maison bleue (la présidence) a répondu qu’elle allait réfléchir à cette proposition. 

Le chef des politiques publiques du parti Saenuri, Jeong Hun Kim, explique sur la chaîne YTN :

« La principale raison de la faible natalité est que les gens se marient trop tard et commencent à travailler trop tard parce qu’ils passent trop de temps à faire des CV. »

L’idée fait bondir l’éditorialiste du Huffington Post Corée, Jung Tae Noh :

« Le parti Saenuri et le gouvernement ne semblent pas considérer les hommes et les femmes en âge de procréer comme des humains. C’est plutôt comme l’éleveur de cochons qui dit aux cochons : vous devez faire des bébés, vite ! »

Revue de presse (143)
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2 novembre 2015 1 02 /11 /novembre /2015 06:40

 

Dans Le Grand Soir, Maximilien Reynès-Dupleix nous donne un exemple de mannes publiques qui engendrent des bénéfices privés :

 

Le maire (LR) de Moissac (82) vient de renouveler la concession de distribution de l'eau à Véolia en offrant à la multinationale une usine de traitement toute neuve de 5,2 M d'Euros.

 

C’est en catimini que ce mauvais coup s’est fait et c’est une fois encore en ouvrant le journal local que l’on apprend que le maire de Moissac, Monsieur Henryot, ci-devant président du SIEPA (Syndicat Intercommunal d’Eau Potable et d’Assainissement) a littéralement vendu, l’usine de traitement des eaux de Moissac à une filiale du groupe VEOLIA.

 

L’usine de traitement des eaux de pompage d’un montant de 5,2 millions d’euros passe sous la coupe de Véolia qui, sans bourse déliée, bénéficie d’un équipement haut de gamme neuf et performant là ou les mêmes auraient dû, depuis de longues années, remettre en état le réseau et s’assurer que demain il n’y aura plus de scories plombées, de métaux lourds et de pesticides dans les verres issus des robinets.

 

Alors que, partout dans la région (exemple : Castelsarrasin !), on organise le retour à une gestion publique de l’eau, de son assainissement à sa distribution, l’ultra libéralisme forcené de l’équipe municipale actuelle renforce les choix de la précédente en faisant payer 2 fois les citoyens.

 

Ici l’argent public, c’est 2 207 411 Euros (42,9%) versés par l’Agence Adour-Garonne, 818 260 (15,9%) versés par le Conseil Départemental et surtout 2 119 329 (41,2%) versé par la commune de Moissac qui, aujourd’hui, font sortir de terre cette usine dernier cri, rendue nécessaire par l’épuisement des puits.

 

 

Toujours dans Le grand Soir (quelle mine, ce site !), Anastase Adonis brosse un tableau lugubre de la Grèce aujourd’hui :

 

Dix mois se sont écoulés depuis que la prétendue gestion de la « crise de l’euro » a anéanti les efforts des Grecs pour se faire entendre, comprendre et traiter en tant que peuple d’un pays-membre d’une communauté « civilisée ». La Grèce a fêté son NON cette année avec moins d’espoir politique et moins d’enthousiasme que d’habitude. On ressentait la situation économique étouffante dans laquelle la Grèce a été mise afin de convenir à un ordre des choses pas très clair ni explicite. L’étouffement de l’espace politique grec passait par le balayage d’un revers de la main de ses cris légaux, constitutionnels et légitimes de société, de Nation, d’Etat. Il n’y a pas de doute que le résultat escompté fut l’anéantissement de toute initiative de changement en Europe, ce qui jette un froid politique glacial constaté dans les peuples du Sud qui ont toute légitimité et les mêmes droits de dire ce qu’une Union Européenne doit être. La majorité politique est devenue une minorité financière et lorsque les règles du jeu changent à la guise de certains, il ne peut y avoir une UE politique.

 

 

Une des émissions désormais les plus déconsidérées du PAF, “ On N’est Pas Couché ”, animée par Laurent Ruquier, aura peut-être l'honneur de recevoir prochainement le président de la République François Hollande :

 

"Nous recevons de nombreuses invitations à de nombreuses émissions, explique l'entourage du président. Nous les examinons toutes. Mais pour y répondre positivement, il faut que ça ait du sens. Nous gardons 'On n'est pas couché' dans un coin de nos têtes", a déclaré l'Elysée à la rédaction de L’Express.

 

 

 

Enfin, Politis nous explique que certains vont pouvoir s’acheter de nouvelles chemises de qualité :

 

En plein conflit social mettant en jeu la suppression de 2 900 emplois, Air France-KLM a annoncé ce jeudi un bénéfice d’exploitation de 898 millions d’euros au troisième trimestre au 2015. Un record dans l’histoire du groupe.

 

Sur le trimestre de juin à septembre, le chiffre d’affaires est de 7,4 milliards d’euros, en progression de 4,7 % une fois retranchés les effets d’une longue grève survenue dans le groupe l’an passé.

 

La chute des prix du pétrole, une hausse de la demande et un effet change important explique ces chiffres selon l’entreprise qui continue de tenir un discours alarmiste sur sa compétitivité à moyen terme. Ces résultats ne permettent « ni de combler le différentiel de compétitivité avec [ses] concurrents ni de disposer des moyens de financer la croissance du groupe », a martelé le PDG d’Air France Alexandre Marie Henry Begoügne de Juniac.

 

Après l’échec des négociations avec les salariés au 30 septembre dernier, la direction a proposé de les rouvrir en fixant une nouvelle date butoir à début janvier pour aboutir à un accord. A défaut, le plan B qui prévoit la suppression de 2.900 postes serait appliqué.

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31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 08:05

 

Dans le numéro de novembre 2015, Serge Halimi voit la France « dégringoler » :

 

Pour trouver un précédent à l’actuel effacement diplomatique de la France, il faut remonter à l’expédition de Suez de 1956 et à la guerre d’Algérie. Ni l’organisation par Paris d’une conférence internationale sur l’environnement, ni les proclamations martiales du président de la République, ni l’incorrigible contentement de soi de son ministre des affaires étrangères ne peuvent plus masquer la dégringolade de la France.

 

En matière européenne, l’alignement sur l’Allemagne fut éclatant pendant l’épisode grec. Le Quai d’Orsay semblait aux abonnés absents ; le ministre des finances se montrait volubile mais inexistant ; et M. François Hollande limita son rôle à celui d’émissaire de Berlin, chargé de faire accepter au premier ministre Alexis Tsipras les oukases de Mme Angela Merkel. Même à Washington, on se déclarait alors surpris par la dureté de l’Union européenne envers Athènes.

 

 

Olivier Zajec observe un basculement stratégique au Proche-Orient :

 

Est-il temps de faire de l’Iran notre ami et de l’Arabie saoudite notre ennemi ? » Sous ce titre provocateur, le chroniqueur britannique Michael Axworthy notait en janvier 2015 que « l’idée selon laquelle l’Iran est devenu une force de stabilité dans la région du Golfe relève désormais de l’évidence acceptée  ».On est bien loin de la rhétorique de l’« axe du mal », reprise sans nuance depuis le 11 septembre 2001 et martelée ensuite avec passion et suivisme. Ni le discours enflammé du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou devant le Congrès américain, le 3 mars 2015, ni les combats d’arrière-garde des disciples néoconservateurs de Thérèse Delpech au Quai d’Orsay ne sont parvenus à prévenir ce renversement des mentalités.

 

Un lourd dossier est consacré au chaos climatique.

 

Philippe Descamps et Dominique Raynaud nous emmènent sur les hauteurs de l’Antarctique (où il ne faut pas oublier son foulard) :

 

Durant la nuit polaire, la température monte difficilement au-dessus des — 60 °C sur les hauteurs de l’Antarctique. A l’intérieur des frêles baraquements de la base de Vostok, on chante Georges Brassens ou Vladimir Vissotsky pour garder le moral. Les rares nouvelles ne sont pas bonnes. Le président américain Ronald Reagan vient de lancer son initiative de défense stratégique pour défier une gérontocratie soviétique impuissante à sortir de la stagnation économique et du bourbier afghan. Approvisionnés par des avions américains, scientifiques français et soviétiques bravent les éléments afin de percer ensemble les secrets du climat. Objectif : remonter le temps en descendant toujours plus bas dans les entrailles du glacier de 3 700 mètres d’épaisseur qui gît sous leurs pieds.

 

 

Pour Éric Martin, deux degrés de plus c’est deux degrés de trop :

 

Contenir le réchauffement global à 2 °C par rapport à la période préindustrielle : cette idée s’appuie sur les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui étudie une palette de scénarios et leurs conséquences. Evoqué dès la fin des années 1990, cet objectif était en discussion au sein de la convention des Nations unies depuis les années 2000. Il paraissait susceptible d’empêcher des conséquences graves ou irréversibles à l’échelle du globe. Depuis la conférence de Copenhague en 2009, toutes les parties ont adopté ce chiffre, qui s’est également diffusé auprès du grand public.

 

 

Sommes-nous tous responsables, demande Christophe Bonneuil ?

 

Anthropocène : ce mot désigne une nouvelle époque de l’âge de la Terre, ouverte par une humanité devenue force tellurique. Le point de déclenchement de ce nouvel âge géohistorique reste sujet à controverse : la conquête et l’ethnocide de l’Amérique ? la naissance du capitalisme industriel, fondé sur les énergies fossiles ? la bombe atomique et la « grande accélération » d’après 1945 ? Mais il y a du moins un constat sur lequel les scientifiques s’accordent : bien plus qu’une crise environnementale, nous vivons un basculement géologique, dont les précédents — la cinquième crise d’extinction, il y a 65 millions d’années, ou l’optimum climatique du miocène, il y a 15 millions d’années — remontent à des temps antérieurs à l’apparition du genre humain. D’où une situation radicalement nouvelle : l’humanité va devoir faire face dans les prochaines décennies à des états du système Terre auxquels elle n’a jamais été confrontée.

 

 

 

Le Monde Diplomatique (88)

Pour Jean Gadrey, la croissance est « un culte en voie de disparition » :

 

Il existe de multiples explications à la « baisse tendancielle du taux de croissance » observée depuis plusieurs décennies dans les pays riches, et plus récemment dans les pays émergents. Même des économistes médiatiques commencent timidement à envisager l’hypothèse d’un monde sans croissance, du moins dans les pays dits avancés. C’est le cas, aux Etats-Unis, de Paul Krugman et de Larry Summers, pour qui « une stagnation séculaire est plausible  ». En France, Thomas Piketty nous met lui aussi en garde : « Est-il bien raisonnable de miser sur le retour de la croissance pour régler tous nos problèmes ? Cela ne résoudra pas l’essentiel des défis auxquels les pays riches doivent faire face. » A son tour, Daniel Cohen nous exhorte : « Affranchissons-nous de notre dépendance à la croissance. »

 

 

Pour Agnès Sinaï, les négociations internationales sont un théâtre d’ombres :

 

La lenteur des négociations climatiques contraste avec la grande accélération de l’histoire humaine, tandis que les instances internationales se montrent impuissantes à inventer des outils et des modes de pensée à la hauteur des enjeux.

 

 

Maxime Carvin dresse le portrait d’un Robespierre sans masque :

 

La première phase de la Révolution française, visant le renversement du pouvoir absolutiste, fait l’unanimité, ou presque : ne vient-elle pas donner corps à l’esprit des Lumières ? Mais la suite divise violemment. Notamment au sujet de Robespierre, qui, selon certains, conjuguerait tous les vices antidémocratiques : le populisme et l’extrémisme. De quoi se méfier de tout projet radical…

 

 

Un article de Martine Bulard « entre cueillette et internet :

 

En à peine plus de trente ans, la Chine a réussi à éradiquer la famine alors qu’avec 20 % de la population mondiale, elle ne dispose que de 9 % des terres arables, concentrées dans la moitié est et en régression constante. Elle est le premier pays producteur de riz, de blé, de thé… Mais les paysans ne peuvent vivre de leur travail et sont obligés, quand ils n’émigrent pas en ville, de trouver d’autres activités. Le phénomène devrait s’accélérer avec les prochaines réformes.

 

 

Pour Alexeï Malachenko, Moscou parie pour la Syrie :

 

Entrée sur le théâtre d’opérations syrien, l’armée russe entend démontrer sa capacité à honorer ses alliances régionales et à défendre ses intérêts stratégiques. En réaffirmant une coopération ancienne avec le régime de M. Bachar Al-Assad, le président Vladimir Poutine espère peser davantage dans la reconfiguration du Proche-Orient. Mais il prend aussi le risque de dévoiler les limites de la puissance russe.

 

 

Pour Aziz El Massassi, la presse égyptienne a été mise au pas :

 

Que tombe le règne de l’armée ! Nous n’avons pas peur et nous ne baisserons pas la tête ! » Au soir du 5 mars 2015, dans le centre-ville du Caire, les slogans des manifestants répondent à la violence du pouvoir militaire. Sur la place Talaat-Harb, devant le bureau d’Air France-KLM, leurs cris de protestation se mêlent aux hommages à Shaima Al-Sabagh, jeune militante de gauche tuée à cet endroit même le 24 janvier, lors de la répression sanglante d’un rassemblement organisé pour honorer les victimes de la révolution de 2011. « Ils ont énormément de courage », observe avec un respect ému Shahira Amin, parmi les rares journalistes présents sur place. Du courage, il lui en faut à elle aussi. Depuis le coup d’Etat militaire contre l’ancien président Mohamed Morsi, en juillet 2013, et surtout la victoire à l’élection présidentielle du maréchal Abdel Fatah Al-Sissi, en mai 2014, les journalistes indépendants sont devenus, avec les Frères musulmans, les bêtes noires du gouvernement.

 

 

Marie Bénilde explique pourquoi l’Europe s’intéresse enfin à la régulation du capitalisme numérique :

 

La surveillance par les services secrets américains des données personnelles des Européens attente au « contenu essentiel du droit fondamental au respect de la vie privée ». Ce jugement de la Cour de justice de l’Union européenne rendu le 6 octobre dernier marque un tournant : sous la pression des industriels, les pouvoirs publics s’intéressent soudain à la régulation du capitalisme numérique.

 

 

Rien ne va plus au Brésil, pays où l’on compte « trois cents voleurs avec des titres de docteur » (Namia Oualalou) :

Réélue de justesse en octobre 2014 et affaiblie par un scandale de corruption sans précédent au sein de la société Petrobras, la présidente brésilienne Dilma Rousseff a souhaité apaiser son opposition en mettant la barre à droite. Peine perdue : elle n’est parvenue qu’à aiguiser l’appétit des libéraux. Coupée de sa base, la voici livrée à des députés rebelles et parfois moins soucieux de politique que d’enrichissement personnel.

 

 

En fait, quelque chose marche au Brésil : le marché de l’art (Anne Vigna) :

 

La crise, quelle crise ? Les déboires économiques du Brésil ont jusqu’à présent épargné le marché de l’art, havre de paix et de prospérité au cœur de la tourmente.

 

 

Selon Henri Léridon, l’Afrique demeure une « énigme démographique » :

 

Les projections démographiques pour l’Afrique déconcertent les analystes. Avec une fécondité toujours élevée, le continent ne suit aucun schéma de transition connu. L’augmentation exceptionnelle de sa population pourrait annihiler les effets bénéfiques attendus des bons taux de croissance enregistrés. Etrangement, cette situation d’urgence ne semble susciter aucune réaction d’envergure.

 

 

Les Bataves seraient-ils plus malins que nous ? En tout cas, ils ferment leurs prisons (Léa Ducré et Margot Hemmerich) : Contrairement à la majeure partie des pays européens, les Pays-Bas enregistrent une baisse de leur population carcérale, au point qu’ils louent désormais des places de prison à la Belgique ou à la Norvège. Une politique de réinsertion très ancienne, un recours accru aux peines courtes et aux sanctions financières, ou encore à une justice négociée, se combinent aux considérations budgétaires pour expliquer ce phénomène.

 

 

 

Pierre Rimbert s’est intéressé à nos intellectuels bougons :

 

Les intellectuels français sont-ils « néoréacs » ? A-t-on encore le droit de débattre ? A intervalles réguliers, des journalistes et essayistes transforment ce genre de questions creuses en controverses nationales. A mesure qu’ils perdent leurs moyens d’informer sous l’effet des concentrations industrielles, les médias se jettent à corps perdu dans ces polémiques où s’affrontent les célébrités — à défaut des idées.

 

 

Un article très enrichissant de Sébastien Lapaque sur Pasolini :

 

Grand perturbateur de l’ordre en place par ses prises de position, ses écrits, ses films, il a la stature d’un héros de légende, témoin de la vigueur subversive des années 1960. Mais c’est peut-être parce qu’il n’a jamais dissocié ses combats politiques de son travail de poète que Pier Paolo Pasolini reste si durablement porteur d’une belle inquiétude.

 

 

 

Enfin, le contrôle que les compagnies d’assurances et les autorités médicales exercent sur nous ne date pas d’hier (Dan Bouk) :

 

Une photographie publiée en 1903 par la société d’assurance-vie New York Life montre une femme en blouse blanche maniant de lourdes boîtes à fiches métalliques, tandis que des hommes en costume noir, assis à leur bureau, plongent le nez dans leur paperasse. Cette image n’illustre pas seulement la division sexuée des tâches, mais aussi une caractéristique peu connue des sociétés d’assurance-vie : le contrôle qu’elles exercent sur les données personnelles de leurs clients. Un volume d’informations plus ample et plus convoité encore que leurs réserves de devises.

 

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31 octobre 2015 6 31 /10 /octobre /2015 08:05

 

Dans le numéro de novembre 2015, Serge Halimi voit la France « dégringoler » :

 

Pour trouver un précédent à l’actuel effacement diplomatique de la France, il faut remonter à l’expédition de Suez de 1956 et à la guerre d’Algérie. Ni l’organisation par Paris d’une conférence internationale sur l’environnement, ni les proclamations martiales du président de la République, ni l’incorrigible contentement de soi de son ministre des affaires étrangères ne peuvent plus masquer la dégringolade de la France.

 

En matière européenne, l’alignement sur l’Allemagne fut éclatant pendant l’épisode grec. Le Quai d’Orsay semblait aux abonnés absents ; le ministre des finances se montrait volubile mais inexistant ; et M. François Hollande limita son rôle à celui d’émissaire de Berlin, chargé de faire accepter au premier ministre Alexis Tsipras les oukases de Mme Angela Merkel. Même à Washington, on se déclarait alors surpris par la dureté de l’Union européenne envers Athènes.

 

 

Olivier Zajec observe un basculement stratégique au Proche-Orient :

 

Est-il temps de faire de l’Iran notre ami et de l’Arabie saoudite notre ennemi ? » Sous ce titre provocateur, le chroniqueur britannique Michael Axworthy notait en janvier 2015 que « l’idée selon laquelle l’Iran est devenu une force de stabilité dans la région du Golfe relève désormais de l’évidence acceptée  ».On est bien loin de la rhétorique de l’« axe du mal », reprise sans nuance depuis le 11 septembre 2001 et martelée ensuite avec passion et suivisme. Ni le discours enflammé du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou devant le Congrès américain, le 3 mars 2015, ni les combats d’arrière-garde des disciples néoconservateurs de Thérèse Delpech au Quai d’Orsay ne sont parvenus à prévenir ce renversement des mentalités.

 

Un lourd dossier est consacré au chaos climatique.

 

Philippe Descamps et Dominique Raynaud nous emmènent sur les hauteurs de l’Antarctique (où il ne faut pas oublier son foulard) :

 

Durant la nuit polaire, la température monte difficilement au-dessus des — 60 °C sur les hauteurs de l’Antarctique. A l’intérieur des frêles baraquements de la base de Vostok, on chante Georges Brassens ou Vladimir Vissotsky pour garder le moral. Les rares nouvelles ne sont pas bonnes. Le président américain Ronald Reagan vient de lancer son initiative de défense stratégique pour défier une gérontocratie soviétique impuissante à sortir de la stagnation économique et du bourbier afghan. Approvisionnés par des avions américains, scientifiques français et soviétiques bravent les éléments afin de percer ensemble les secrets du climat. Objectif : remonter le temps en descendant toujours plus bas dans les entrailles du glacier de 3 700 mètres d’épaisseur qui gît sous leurs pieds.

 

 

Pour Éric Martin, deux degrés de plus c’est deux degrés de trop :

 

Contenir le réchauffement global à 2 °C par rapport à la période préindustrielle : cette idée s’appuie sur les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui étudie une palette de scénarios et leurs conséquences. Evoqué dès la fin des années 1990, cet objectif était en discussion au sein de la convention des Nations unies depuis les années 2000. Il paraissait susceptible d’empêcher des conséquences graves ou irréversibles à l’échelle du globe. Depuis la conférence de Copenhague en 2009, toutes les parties ont adopté ce chiffre, qui s’est également diffusé auprès du grand public.

 

 

Sommes-nous tous responsables, demande Christophe Bonneuil ?

 

Anthropocène : ce mot désigne une nouvelle époque de l’âge de la Terre, ouverte par une humanité devenue force tellurique. Le point de déclenchement de ce nouvel âge géohistorique reste sujet à controverse : la conquête et l’ethnocide de l’Amérique ? la naissance du capitalisme industriel, fondé sur les énergies fossiles ? la bombe atomique et la « grande accélération » d’après 1945 ? Mais il y a du moins un constat sur lequel les scientifiques s’accordent : bien plus qu’une crise environnementale, nous vivons un basculement géologique, dont les précédents — la cinquième crise d’extinction, il y a 65 millions d’années, ou l’optimum climatique du miocène, il y a 15 millions d’années — remontent à des temps antérieurs à l’apparition du genre humain. D’où une situation radicalement nouvelle : l’humanité va devoir faire face dans les prochaines décennies à des états du système Terre auxquels elle n’a jamais été confrontée.

 

 

 

Le Monde Diplomatique (88)

Pour Jean Gadrey, la croissance est « un culte en voie de disparition » :

 

Il existe de multiples explications à la « baisse tendancielle du taux de croissance » observée depuis plusieurs décennies dans les pays riches, et plus récemment dans les pays émergents. Même des économistes médiatiques commencent timidement à envisager l’hypothèse d’un monde sans croissance, du moins dans les pays dits avancés. C’est le cas, aux Etats-Unis, de Paul Krugman et de Larry Summers, pour qui « une stagnation séculaire est plausible  ». En France, Thomas Piketty nous met lui aussi en garde : « Est-il bien raisonnable de miser sur le retour de la croissance pour régler tous nos problèmes ? Cela ne résoudra pas l’essentiel des défis auxquels les pays riches doivent faire face. » A son tour, Daniel Cohen nous exhorte : « Affranchissons-nous de notre dépendance à la croissance. »

 

 

Pour Agnès Sinaï, les négociations internationales sont un théâtre d’ombres :

 

La lenteur des négociations climatiques contraste avec la grande accélération de l’histoire humaine, tandis que les instances internationales se montrent impuissantes à inventer des outils et des modes de pensée à la hauteur des enjeux.

 

 

Maxime Carvin dresse le portrait d’un Robespierre sans masque :

 

La première phase de la Révolution française, visant le renversement du pouvoir absolutiste, fait l’unanimité, ou presque : ne vient-elle pas donner corps à l’esprit des Lumières ? Mais la suite divise violemment. Notamment au sujet de Robespierre, qui, selon certains, conjuguerait tous les vices antidémocratiques : le populisme et l’extrémisme. De quoi se méfier de tout projet radical…

 

 

Un article de Martine Bulard « entre cueillette et internet :

 

En à peine plus de trente ans, la Chine a réussi à éradiquer la famine alors qu’avec 20 % de la population mondiale, elle ne dispose que de 9 % des terres arables, concentrées dans la moitié est et en régression constante. Elle est le premier pays producteur de riz, de blé, de thé… Mais les paysans ne peuvent vivre de leur travail et sont obligés, quand ils n’émigrent pas en ville, de trouver d’autres activités. Le phénomène devrait s’accélérer avec les prochaines réformes.

 

 

Pour Alexeï Malachenko, Moscou parie pour la Syrie :

 

Entrée sur le théâtre d’opérations syrien, l’armée russe entend démontrer sa capacité à honorer ses alliances régionales et à défendre ses intérêts stratégiques. En réaffirmant une coopération ancienne avec le régime de M. Bachar Al-Assad, le président Vladimir Poutine espère peser davantage dans la reconfiguration du Proche-Orient. Mais il prend aussi le risque de dévoiler les limites de la puissance russe.

 

 

Pour Aziz El Massassi, la presse égyptienne a été mise au pas :

 

Que tombe le règne de l’armée ! Nous n’avons pas peur et nous ne baisserons pas la tête ! » Au soir du 5 mars 2015, dans le centre-ville du Caire, les slogans des manifestants répondent à la violence du pouvoir militaire. Sur la place Talaat-Harb, devant le bureau d’Air France-KLM, leurs cris de protestation se mêlent aux hommages à Shaima Al-Sabagh, jeune militante de gauche tuée à cet endroit même le 24 janvier, lors de la répression sanglante d’un rassemblement organisé pour honorer les victimes de la révolution de 2011. « Ils ont énormément de courage », observe avec un respect ému Shahira Amin, parmi les rares journalistes présents sur place. Du courage, il lui en faut à elle aussi. Depuis le coup d’Etat militaire contre l’ancien président Mohamed Morsi, en juillet 2013, et surtout la victoire à l’élection présidentielle du maréchal Abdel Fatah Al-Sissi, en mai 2014, les journalistes indépendants sont devenus, avec les Frères musulmans, les bêtes noires du gouvernement.

 

 

Marie Bénilde explique pourquoi l’Europe s’intéresse enfin à la régulation du capitalisme numérique :

 

La surveillance par les services secrets américains des données personnelles des Européens attente au « contenu essentiel du droit fondamental au respect de la vie privée ». Ce jugement de la Cour de justice de l’Union européenne rendu le 6 octobre dernier marque un tournant : sous la pression des industriels, les pouvoirs publics s’intéressent soudain à la régulation du capitalisme numérique.

 

 

Rien ne va plus au Brésil, pays où l’on compte « trois cents voleurs avec des titres de docteur » (Namia Oualalou) :

Réélue de justesse en octobre 2014 et affaiblie par un scandale de corruption sans précédent au sein de la société Petrobras, la présidente brésilienne Dilma Rousseff a souhaité apaiser son opposition en mettant la barre à droite. Peine perdue : elle n’est parvenue qu’à aiguiser l’appétit des libéraux. Coupée de sa base, la voici livrée à des députés rebelles et parfois moins soucieux de politique que d’enrichissement personnel.

 

 

En fait, quelque chose marche au Brésil : le marché de l’art (Anne Vigna) :

 

La crise, quelle crise ? Les déboires économiques du Brésil ont jusqu’à présent épargné le marché de l’art, havre de paix et de prospérité au cœur de la tourmente.

 

 

Selon Henri Léridon, l’Afrique demeure une « énigme démographique » :

 

Les projections démographiques pour l’Afrique déconcertent les analystes. Avec une fécondité toujours élevée, le continent ne suit aucun schéma de transition connu. L’augmentation exceptionnelle de sa population pourrait annihiler les effets bénéfiques attendus des bons taux de croissance enregistrés. Etrangement, cette situation d’urgence ne semble susciter aucune réaction d’envergure.

 

 

Les Bataves seraient-ils plus malins que nous ? En tout cas, ils ferment leurs prisons (Léa Ducré et Margot Hemmerich) : Contrairement à la majeure partie des pays européens, les Pays-Bas enregistrent une baisse de leur population carcérale, au point qu’ils louent désormais des places de prison à la Belgique ou à la Norvège. Une politique de réinsertion très ancienne, un recours accru aux peines courtes et aux sanctions financières, ou encore à une justice négociée, se combinent aux considérations budgétaires pour expliquer ce phénomène.

 

 

 

Pierre Rimbert s’est intéressé à nos intellectuels bougons :

 

Les intellectuels français sont-ils « néoréacs » ? A-t-on encore le droit de débattre ? A intervalles réguliers, des journalistes et essayistes transforment ce genre de questions creuses en controverses nationales. A mesure qu’ils perdent leurs moyens d’informer sous l’effet des concentrations industrielles, les médias se jettent à corps perdu dans ces polémiques où s’affrontent les célébrités — à défaut des idées.

 

 

Un article très enrichissant de Sébastien Lapaque sur Pasolini :

 

Grand perturbateur de l’ordre en place par ses prises de position, ses écrits, ses films, il a la stature d’un héros de légende, témoin de la vigueur subversive des années 1960. Mais c’est peut-être parce qu’il n’a jamais dissocié ses combats politiques de son travail de poète que Pier Paolo Pasolini reste si durablement porteur d’une belle inquiétude.

 

 

 

Enfin, le contrôle que les compagnies d’assurances et les autorités médicales exercent sur nous ne date pas d’hier (Dan Bouk) :

 

Une photographie publiée en 1903 par la société d’assurance-vie New York Life montre une femme en blouse blanche maniant de lourdes boîtes à fiches métalliques, tandis que des hommes en costume noir, assis à leur bureau, plongent le nez dans leur paperasse. Cette image n’illustre pas seulement la division sexuée des tâches, mais aussi une caractéristique peu connue des sociétés d’assurance-vie : le contrôle qu’elles exercent sur les données personnelles de leurs clients. Un volume d’informations plus ample et plus convoité encore que leurs réserves de devises.

 

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