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21 mai 2011 6 21 /05 /mai /2011 06:35

http://www.caissedesdepots.fr/uploads/tx_templavoila/univ_haute_alsace_mulhouse-.jpgLes universitaires devront bientôt payer pour enseigner. Y compris ceux, nombreux, qui ont soutenu la loi LRU.


En vertu du principe de non-fongibilité, les universités peuvent puiser dans les crédits d’enseignement pour subvenir aux besoins de fonctionnement (la démarche inverse est interdite par la loi).


Les mesures décidées, parmi d’autres exemples, par l’Université de Haute-Alsace, sont éclairantes. Je cite les décisions prises récemment par son conseil d’administration :

 

« Conscient de l’obligation d’engager une politique de maîtrise des coûts (notamment au regard de la progression du volume d’heures complémentaires), conscient que notre engagement du contrat quadriennal sur la réduction des formations à faibles effectifs n’est pas atteint à ce jour,le Conseil d’Administration de l’université, réuni en séance le 4 mai 2011, décide de mettre en place les conditions suivantes d’ouverture des formations dès la rentrée 2011.

 

Conditions d’ouverture des formations à la rentrée 2011

1- Tout cours magistral, TD ou TP délivré à moins de cinq étudiants ne sera pas ouvert à la rentrée 2011.

2- Tout cours magistral délivré au cours de l’année 2011-2012 à un nombre d’étudiants compris entre cinq et dix étudiants sera rétribué au taux horaire de TD.

3- Toute séance de travaux dirigés organisée au cours de l’année 2011-2012 avec un nombre d’étudiants compris entre cinq et dix étudiants sera rétribuée au taux horaire de TP.

4- Toute formation de licence, y compris de licence professionnelle (mention, parcours, spécialité, option…) dont le nombre d’étudiants ne dépasse pas 15 étudiants par année (L1, L2 ou L3) depuis 2008-2009 ne sera pas ouverte à la rentrée 2011.

5- Toute formation de master, ou niveau équivalent (mention, spécialité, parcours, option…) dont le nombre d’étudiants ne dépasse pas 10 étudiants par année (M1, ou M2) depuis 2008-2009 ne sera pas ouverte à la rentrée 2011.

Les conditions d’ouverture des formations indiquées ci-dessus ne s’appliquent pas aux formations qui bénéficient d’un financement autre que la dotation de l’Etat (apprentissage, formation continue, autres types de crédits), sous réserve que leur point d’équilibre financier soit à tout le moins atteint (en général une dizaine d’étudiants sous statut financé par l’intermédiaire d’autres crédits que la dotation d’Etat).

 

Le Conseil d’Administration pourra être saisi de demandes de dérogation par rapport à ces consignes. Les demandes devront justifier de la nécessité d’y déroger. »

 

Cette université est également très en pointe en tant qu'agence immobilière. En témoigne ce document de la Caisse des Dépôts pour l'Alsace (link) :

 

 

"Alain Brillard, président de l’Université de Haute Alsace, et Patrick François, directeur régional Alsace de la Caisse des Dépôts, ont signé le 29 janvier 2009 une convention de partenariat d’une durée de deux ans qui définit le cadre et le champ de la collaboration entre les deux institutions : gestion et optimisation du parc immobilier universitaire, aménagement urbain et universitaire, transports, infrastructures, réseaux et services numériques, vie étudiante et logement, valorisation de la recherche, transfert de technologie, création d’entreprises. La Caisse des Dépôts pourra co-financer les études liées à ces projets, dont la réalisation d’un schéma directeur immobilier, d’ores et déjà convenue.

L’Université de Haute Alsace, qui figure parmi les 18 universités françaises déclarées autonomes au 1er janvier 2009, souhaite utiliser au mieux les opportunités offertes par la loi. Elle entend notamment, avec le soutien de l’Etat et des collectivités territoriales, renforcer son attractivité et développer des coopérations, tant avec les Universités de Strasbourg, de Bâle et de Fribourg, qu’avec celles de l’axe métropolitain Rhin-Rhône.

L’Université de Haute Alsace rassemble plus de 7 600 étudiants, 650 enseignants et chercheurs, 390 personnels administratifs, ingénieurs, techniciens et ouvriers. Elle occupe six sites à Mulhouse et Colmar, sur 130 000 m²."

 


 

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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 14:53

http://www.planetenonviolence.org/photo/art/default/693842-848216.jpg?v=1289419758Dans l’éditorial du Sarkophage n° 24 (qui a le grand honneur d’être censuré en Chine !) Paul Ariès donne ce conseil : « Cessons de nous complaire dans un discours critique qui, collant de trop près à celui de nos adversaires, finit par se laisser imposer l’ordre du jour, jusqu’à épouser la grammaire de sa pensée, tout en croyant rester rebelles alors que nous ne faisons qu’escalader son autre face. »

 

Pour Thierry Brugvin, l’OMS est sous le pouvoir de l’industrie nucléaire : « Quelques jouurs après Fukushima, l’OMS annonce que les risques pou la santé des populations civiles vivant hors du Japon sont assez faibles. »

 

Le premier qui mange du porc de supermarché après avoir lu l’article d’Isabelle Saporta (“ Une agriculture de cochon ! ”) gagne son poids en saucisson Géo : « Que mange un porc ? Tous les déchets des industries du monde entier ! Pardon, maintenant, on dit les coproduits, ça fait plus chic, et surtout, ça fait moins peur. […] Les truies enchaînent les mises bas à une cadence infernale. 30 petits chaque année, deux fois plus qu’il y a 30 ans . Un miracle rendu possible grâce aux hormones. »

 

Dans un article théorique bien mené, Irène Pereira nous invite à construire « une grammaire de la gauche radicale » : cela permettra de « mieux comprendre les divergences à l’œuvre dans les discours, les positions et les stratégies d’action des acteurs en mettant en valeur des logiques philosophiques différentes. »

 

Yann Fiévet (ici, l’article dans son intégralité : http://www.legrandsoir.info/De-la-gratuite-de-l-engagement.html) explique ce qu’est la « gratuité de « engagement » : « Depuis que l’Homme éprouve l’injustice frappant ses semblables ou croit souhaitable de changer l’ordonnancement des choses terrestres l’engagement pour ces objets inhabituels tient en éveil certains de ses congénères. L’engagement ne semble certes pas chose naturelle. Ses contours sont difficiles à délimiter tant les causes à défendre semblent innombrables et souvent incertaines. L’engagement est bien sûr indissociable de la personne de l’engager qui le vit. La figure de l’engagé est complexe car faite d’un mélange inextricable d’éléments plus ou moins fortement intériorisés par la conscience de l’individu au cours de son histoire – et de celle des siens y compris ceux des générations antérieures – et des nombreuses sollicitations du contexte vécu au jour le jour par l’individu attentif. Qu’il soit admiré ou raillé l’engagé est avant tout fidèle à son engagement qu’il veut gratuit de surcroît afin d’en renforcer le noble caractère. Et si l’engagement était un art, un art dont l’esthétique serait destiné à combattre la vulgate du monde marchandisé ? »

 

Une contribution originale de Véronique Petiot : “ L’habitat vernaculaire, une clé pour habiter la terre ” : « É tait vernaculaire tout ce qui était confectionné, tissé, élevé à la maison et destiné non à la vente, mais à l’usage domestique. En anglais comme en français, il s’emploie principalement pour désigner la langue natale. Pourquoi ne pas ranimer ce terme pour penser nos habitats ? […] Le vernaculaire, c’est l’alternative au tentaculaire. »

 

Dans le coin des sophistes, Laurent Paillard évoque, dans la droite, la fiction politico-médiatique « d’une invasion de la France par des hordes de clandestins. […] Bien sûr, une bonne partie de l’électorat de l’UMP n’est pas prête à assumer une politique ouvertement raciste, mais cela fait bien longtemps qu’il est gêné dans son ensemble par la différence de couleur. C’est sur cette corde sensible que tire le discours sur l’immigration clandestine au risque de déclencher une violence incontrôlable. »

 

Un entretien passionnant avec Clifford Conner après son Histoire populaire des sciences : « La production et la propagation du savoir scientifique ont été pour la plus grande part le fait de la masse anonyme des petites gens, ceux du commun, et ce, bien plus qu’on ne le reconnaît généralement. La capacité de Newton à voir plus loin n’est pas tant la résultante du fait qu’il se soit, comme il le formulait “ juché sur les épaules de géants ”, que du fait qu’il se soit hissé sur le dos de milliers de petits artisans anonymes et illettrés. »

 

La décroissance est-elle de gauche, demande Serge Latouche ? « Pour sortir de la crise qui est inextricablement écologique et sociale, il faut sortir de cette logique d’accumulation sans fin du capital et de la subordination de l’essentiel des décisions à la logique du profit. »

 

Deux mots un peu obscurs mais une analyse lumineuse de Nicolas Sersiron : « La stratégie de l’obsolescence organisée veut forcer les consommateurs à renouveler inutilement nombre d’objets et à augmenter les profits des détenteurs de capitaux. Mais une telle stratégie n’aurait pas pu exister sans l’accès facile aux matières premières du Sud, lesquelles n’auraient pas pu arriver à des prix aussi bas dans les pays industrialisés sans le couple infernal formée par les dettes illégitimes et la corruption organisée. »

 

Jacques Testart explique le concept de « l’homme augmenté » : « La déculturation à l’œuvre des projets transhumanistes est évidente avec le macro organisme planétaire dans lequel les individus, dépourvus d’identité, seraient reliés entre eux pour former un monstre unique dont le cerveau serait le réseau internet. »

 

Pierre et Maïta Lucot nous demandent d’en « finir à gauche avec le progressisme » : « Si le progrès technologique a accompagné la désappropriation de l’outil de production, il a également engendré le découplage entre utilisateur-consommateur et production-producteur. Son objet est même d’accroître la distance séparant l’objet de son utilisateur pour empêcher toute réappropriation, toute possibilité d’autoentretien et conduire l’usager à une totale dépendance porteuse d’obsolescence. […] L’énergie nucléaire est le paroxysme de ce système. »

 

Avant l’événement que l’on sait, Paul Ariès demandait : « « Que faire face à DSK, Hulot et compagnie ? » : « Qui sera le candidat du revenu garanti ? Qui sera le candidat de la défense et de l’extension de la sphère de la gratuité ? »

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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 07:00

http://www.le-grand-barnum.fr/wordpress/wp-content/uploads/2011/05/Soubrette2.jpgLundi dernier, Jean-François Kahn et Alain-Gérard Slama devisaient « entre hommes » (vous savez, les hommes, ces créatures couillues qui en ont) sur les égarements de Dominique. Nous étions sur France Culture (pas chez Doc Gynéco), une station d’un certain niveau.

 

Je cite :


J.-F. Kahn : Je suis certain, enfin pratiquement certain, qu'il n'y a pas eu une tentative violente de viol, je ne crois pas, ça, je connais le personnage, je ne le pense pas. Qu'il y ait eu une imprudence on peut pas le… (rire gourmand), j'sais pas comment dire, un troussage,

A.-G. Slama : il appelait ça une erreur de jugement (gloussements).

J.-F. Kahn : que y ait un troussage, euh, de domestique, enfin, j'veux dire, c'qui est pas bien, mais, voilà, c'est une impression.

 

Moi qui étais tant redevable à la contribution aux débats intellectuels de cet homme d’extrême-centre. Je tombe de haut.

 

Quelle crapulerie !

 

Trousser une femme de chambre est une saloperie, heureusement passible des tribunaux.

 

Quant à Alain-Gérard Slama, pas de commentaire.

 

 

http://www.rue89.com/2011/05/18/jean-francois-kahn-pas-de-viol-mais-un-troussage-de-domestique-204530?page=2#comment-2373624

 

 

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 15:00

Sur nouvelobs.com (qui m'a censuré, histoire connue), il y a une blogueuse très sympa, qui écrit des choses toujours censées, et parfois même très profondes : c'est PlumePlume.

 

Une de ses notes récentes :

 

Si c'est un homme...

 

Lu sur « l’Avis sauve » ce matin…

 

…et ça passe sans réaction !

 

 

(de la défécation et de l’anus)

 


4484303960_73c9466f86.jpg

 

 

« Visiblement, ce qui a impressionné mon gamin durant cette journée de Nakba, ce fut sans doute d'observer aux jumelles les conneries des gazaouis en train de se la jouer "martyrs" en devenir et surtout l'incroyable indécence de certains.


En effet, il était écroulé de rire en regardant un de ces nakbaïste en train de démouler son cake au milieu du terrain et se relever sans se torcher.


Il aurait du savoir ce brave arabe que les pierres au lieu de les jeter sur les soldats de Tsahal, il aurait pu en utiliser pour nettoyer son anus.


Ils en oublient leur coran les pauvres ! »

 

Ecrit par : Nina | lundi, 16 mai 2011

 

 

Je me souviens de l’expression d’Anus mundi chez Primo Levi, autrement dit d’Auschwitz…

Je me souviens de la première page de L’espèce humaine de Robert Antelme : Problèmes de défécation d’abord…

 

 

 Rien de comparable, c’est certain.

 

 

Mais ce matin, lisant le commentaire de la Nina, j’ai honte.

 

 

Et je relis ceci sous la signature de Primo Levi dans son ultime écrit, I Sommersi e I Salvati :

 

 

« C'était une honte que nous connaissions bien, celle qui nous submergeait après les sélections, et chaque fois qu'il nous fallait assister à un outrage ou le subir : la honte que les Allemands ne connurent pas, ce que le juste éprouve devant la faute commise par autrui, le remords éprouvé parce qu'elle a été introduite irrévocablement dans le monde des choses existantes et que sa volonté ait été nulle ou trop faible, et qu'elle ait été impuissante. »

 

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 06:30

Parlons pédagogie

  

http://www.ecoleaupluriel.be/images/bonnet-d-ane.jpgDepuis que le capitalisme financier est totalement aux commandes, non seulement de la finance, mais encore de l’économie, et surtout de la politique, ses relais dans l’opinion (hommes et femmes politiques, journalistes, responsables d’instituts de sondages) se gargarisent du mot “pédagogie”. Ce très vieux terme (1495) a pris la place de ce qu’on appelait autrefois “propagande”, de ce qu’on dénomme aujourd’hui, grossièrement, par le vocable “vaseline”. En un mot, pour contaminer les cerveaux, pour faire entrer dans les pauvres milliards de têtes que le bonheur, que le salut passe par le pouvoir absolu des Marchés, que les êtres humains sont au service de l’économie capitaliste, il faut « faire de la pédagogie ».

Point besoin d’être contemporain de Jules Ferry pour se sentir écœuré par l’utilisation, aux fins de bourrage de crâne, d’un mot qui, jusqu’alors, impliquait la libération des esprits. C’est toujours la même chose avec le capitalisme, son idéologie, ses pratiques culturelles de masse : il se saisit d’un concept riche, qui a traversé l’histoire, qui s’est nourri des humains et les a nourris, et puis il simplifie, travestit, trahit selon ses intérêts les plus étroits.

Avec l’aide du Robert, je voudrais rappeler deux ou trois petites choses.

Le terme « pédagogie » dérive du grec παιδαγωγία, de παιδός (/’paɪdɔs/), « l’enfant », et ἄγω (/’a.gɔ/), « conduire, mener, accompagner, élever ». Nous sommes donc dans l’éducation, dans la direction des enfants. Écoutons Renan se souvenir : « Sans rien de ce que l’on appelle maintenant la pédagogie, ils pratiquaient la première règle de l’éducation, qui est de ne pas trop faciliter des exercices dont le but est la difficulté vaincue. » Ce qui signifiait de la lenteur, de la méthode, des obstacles que l’on surmonte. Le contraire du remplissage des cerveaux vides par TF1. Parlant de la culture de la mémoire, Georges Duhamel nous dit qu’en tant que méthode pédagogique, elle a « d’abord pour effet de laisser, au fond de l’esprit, des sédiments utilisables. » La pédagogie, c’est la douceur, le contraire de ce que prônait, selon Alain, le philosophe anglais Locke : « Il ne connaît d’autres moyens que le fouet pour corriger l’enfant menteur. »

À la Renaissance, un des grands précurseurs de la pédagogie fut Rabelais et son abbaye de Thélème, un univers moral de dépassement de soi. Il fut férocement critiqué par Sainte-Beuve (qui critiquait tout mais la sainte n’avait pas toujours raison) qui voyait dans Gargantua « le dernier legs du moyen âge expirant, une éducation crasseuse et routinière ».

Pour Rousseau, dans sa préface à l’Émile, la pédagogie était « l’art de former les hommes ».

Pour le penseur étasunien John Dewey, influencé par Darwin, l’esprit humain était en constante évolution, sous l’influence de son milieu, de ses expériences, de ses actes. Il prôna donc une pédagogie active, socialisante : apprendre en faisant.

On a pu se méfier des pédagogues. Le mot “pédant”, qui signifiait à l’origine “précepteur” est proche. Émile Henriot, que le féminisme n’a jamais vraiment effleuré, disait que Madame de Maintenon n’attirait pas la sympathie parce qu’elle était « dévote, pédagogue et chagrine ». Pour Molière, dans Le Dépit amoureux, « faire le pédagogue », c’était « prêcher en chaire ».

Le mot “pédagogie” redevint totalement positif au XIXè siècle. Fondateur du mouvement coopératif, forte personnalité socialiste et laïque, Robert Owen (l’un des pères de l’enseignement primaire outre-Manche) demandait à la pédagogie d’éveiller la curiosité des enfants.

Cofondateur de la Ligue des droits de l’homme, prix Nobel de la paix, Ferdinand Buisson définissait la pédagogie comme « la science de l’éducation, tant physique qu’intellectuelle et morale ». Pour Durkheim, elle impliquait une « réflexion méthodique » : « L’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et mentaux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu social auquel il est particulièrement destiné ». La pédagogie était donc à la fois une théorie et une pratique, permettant de réfléchir sur « les systèmes et les procédés d’éducation ».

Et l’on ne parlera pas de Ferrière, de Decroly. Ni de Célestin Freinet, bête noire de la droite dure française pendant toute sa vie professionnelle. Il est vrai qu’il avait accueilli dans son école de Vence des petits juifs allemands et des enfants de Républicains espagnols. Pour le coup, nous sommes vraiment loin de Jean-Marc Sylvestre...


Photo : L'école au pluriel

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17 mai 2011 2 17 /05 /mai /2011 06:13


http://www.ps-blog.fr/wp-content/uploads/dsk-ps-2012.jpg"À midi, j'ai regardé le journal télévisé de France 2 qui, bien entendu, était consacré, pour sa plus large part, à l'affaire Strauss-Kahn. Le journal était centré depuis le bureau d'Elise Lucet - la présentatrice - qui, d'une part, s'adressait à divers correspondants, d'autre part, 
recevait des invités à sa table (Vincent Peillon, membre du PS, un commentateur de la chaîne et un avocat américain, doublement habilité au barreau de Paris et à celui de New York).

 

Mais le point sur lequel je veux insister est celui-ci : tout le long de ce sujet, les commentaires de la journalistes ou de ses invités, n'ont pas cessé d'être accompagnés des mêmes images, celles des quelques secondes entre la sortie de Dominique Strauss-Kahn, menotté, du commissariat où il avait été interrogé et son départ dans une voiture. [Cette séquence comportait trois plans (j'appelle "plan" - peut-être le mot est-il inexact - une séquence filmée sans interruption)]. En dehors de ces plans filmés, on trouvait des photos fixes, prises dans les mêmes séquences du même DSK.

 

Rien qu'au début, au bout de 3 mn 10 s, il y avait eu 10 plans filmés du prévenu. Puis un autre plan à 4 mn 54, puis 2 à 5 mn 30, puis 1 à 6 mn 21, puis une photo à 7 mn 15, plus 7 ou 8 photos entre 7 mn 30 s et 8 mn, puis 4 plans à 9 mn 36, puis 1 plan à 15 mn 01, puis un plan à 15 mn 43, puis un à 16 mn 35, puis un à 16 mn 50, puis une photo à 20 mn 57, à 21 mn 12, à 21 mn 22, à 21 mn 31, à 22 mn 17, à 22 mn 55 et à 23 mn 19.

 

En tout, donc, en 25 minutes à peu près de traitement du sujet, Dominique Strauss-Kahn a été vu 37 fois, soit en séquence filmée, soit en photo, et vu avec les mains menottées derrière le dos, sans cravate, et, parfois même à moitié habillé, sa veste ayant glissé le long de sa manche gauche, presque jusqu'au milieu du dos, et les policiers n'ayant pas même songé à la lui remonter.

 

Cette image évoque, pour des Français, un souvenir sinistre, à l'époque de la guillotine, lorsque le condamné se voyait découper le haut de sa chemise pour que le bourreau positionne mieux le cou à l'aplomb de la lame.

 

Ce que j'ai trouvé particulièrement indécent (voyeur, obscène), c'est qu'après les premières images - qu'il n'était pas la peine de montrer trois fois ! - les téléspectateurs aient été abreuvés au moins toutes les 40 secondes de l'image du directeur du FMI dans cette situation humiliante. Et j'ai eu un peu le sentiment que le "texte" du journal (les questions, les analyses, les reportages), loin de constituer le fond de l'émission (dont les images n'auraient été que l'illustration"), n'en avait été que le "prétexte", comme si l'objectif caché était davantage le racolage du téléspectateur (arrivant en zappant d'une autre chaîne et retenu par cet appât) que l'information.

 

Je n'ai pas de sympathie particulière ni pour Dominique Strauss-Kahn, ni pour la ligne politique qu'il incarne au P.S. Je suis évidemment consterné par ce qu'il est censé avoir fait (en attendant d'autres preuves) et, si c'est vrai, je partage la frayeur, l'épouvante, la détresse de la femme de chambre confrontée à une telle agression.

 

Mais je ne peux m'empêcher d'éprouver les images exhibées par France 2 comme la diffusion complaisante d'une scène de lynchage."

 

Ce que Philippe aurait pu ajouter, c'est que la "Loi Guigou" de 2000 interdit de montrer une personne entravée alors qu'elle n'a pas été jugée. Tous les médias français ont donc agi dans l'illégalité.

Ce n'est pas parce que les EU ont des mœurs et des lois bien à eux, et un peu particulières, qu'il faut se couler, tels des colonisés de la tête, dans leur moule.

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16 mai 2011 1 16 /05 /mai /2011 06:30

http://img.clubic.com/03865922-photo-cia-logo.jpg

Vu récemment à la télévision une très bonne émission sur la politique culturelle de la CIA en Europe durant la guerre froide.

 

 

Cette émission montrait fort bien que la CIA n’y était pas allée avec de gros sabots, mais par une colonisation très subtile des esprits, dans le domaine littéraire, mais aussi dans le cinéma, la peinture (l’agence soutenait l’art abstrait), la sculpture etc.

 

Durant toutes mes études d’angliciste, j’ai lu la revue britannique Encounter, tout en sachant que la CIA la pilotait dans l’ombre. Ce mensuel politique et culturel de grande qualité, progressiste, avait été fondé en 1953 par le célèbre écrivain anglais Stephen Spender, ancien membre des Brigades internationales en Espagne, proche un temps du parti communiste britannique, mais aussi par l’intellectuel étatsunien Irvin Kristol, qui sera l’un des inspirateurs du néo-conservatisme d’outre-atlantique, après avoir été marxiste, trotskiste et socialiste. Le financement d’Encounter était assuré, bien sûr par ses valeureux abonnés, surtout par le Congrès pour la liberté de la culture, association culturelle anticommuniste fondée à Paris en 1950, financée par la CIA.

 

En 1966, Frank Kermode (l'un des professeurs de littérature les plus influents au XXe siècle outre-Manche) succéda à Spender. Il démissionna au bout d’un an lorsque fut révélé officiellement ce que même les étudiants français subodoraient : le financement de la revue par la CIA. T.S. Eliot, dramaturge et poète anglais d’origine étatsunienne, viscéralement de droite, avait estimé qu’Encountern’était que de la propagande américaine sous un vernis de culture britannique. Le jour de la démission de Kermode, les masques tombèrent, le cynisme éclata en pleine lumière. Thomas Braden, journaliste et ancien responsable de la CIA, publia dans un quotidien britannique un article intitulé “ Je suis content que la CIA soit immorale ”. Il expliquait : « Nous avons placé un agent dans une organisation d'intellectuels basée en Europe appelée Congrès pour la liberté de la culture. Un autre agent devint un directeur d'Encounter. Les agents pouvaient non seulement proposer des programmes anticommunistes aux chefs officiels de l'organisation, mais ils pouvaient également suggérer des voies pour résoudre les inévitables problèmes budgétaires. Pourquoi ne pas voir si l'argent recherché ne pourrait pas être obtenu auprès de fondations américaines. Comme les agents le savaient, les fondations financées par la CIA étaient tout à fait généreuses quand il s'agissait d'intérêt national. »

 

En France, la CIA finança indirectement la revue Preuves de Raymond Aron. En Allemagne, ce fut le cas de Monat, où s’exprimait Heinrich Böll. En Italie, l’écrivain Ignazio Silone, socialiste, puis communiste (il fut l’un des dirigeants du PCI clandestin au débuts des années 20), finit par frayer avec le Congrès pour la liberté de la culture. Pour certains historiens italiens, Silone aurait même exercé des activités de renseignement au profit de la police fasciste.

 

Quid de Tavernier et Neruda ?

En 1964, le poète chilien partait largement favori pour l’obtention du prix Nobel de littérature. Ancien proche de Federico García Lorca, ancien prix Staline pour la paix, soutien inconditionnel d’Allende, Neruda ne pouvait qu’être dans le collimateur du Congrès pour la liberté de la culture (tout comme Alberto Moravia, soit dit en passant). L’émission expliquait que le Chilien avait été victime d’une campagne de calomnies, de basses critiques, orchestrées par le Congrès, en provenance de plusieurs pays, dont la France. Chez nous, ce fut l’intellectuel René Tavernier qui s’y serait collé. Authentique résistant, le père du cinéaste Bertrand Tavernier fut un éditeur courageux qui publia Aragon en 1942. Il aurait été sollicité afin de participer à une campagne de presse de dénigrement contre Neruda, qu’il avait d’ailleurs publié après la guerre. Le prix Nobel fut décerné à Sartre (lui-même une des cibles favorites du Congrès pour la liberté de la culture), qui le refusa.

 

J’ai pris l’habitude de me méfier de tout ce qui est publié, sur internet ou ailleurs. Je ne sais si ce qui est dit sur Tavernier est avéré ou non. Si c'est le cas, c'est bien triste...

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16 mai 2011 1 16 /05 /mai /2011 06:00

Le quotidien proche du parti communiste britannique met en vente ces deux gobelets (en bon franglais "mugs") pour 10 euros. C'est cher payé.

 


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15 mai 2011 7 15 /05 /mai /2011 15:35

C’est la 42158e fois que je le dis ou l’écris : la LRU est une arme de guerre conçue par l’hyperbourgeoisie internationale pour privatiser l’enseignement supérieur français et sortir ses personnels de la Fonction publique en une génération. Ont lutté contre cette ignominie, outre, évidemment, toutes les bonnes volontés individuelles, le Snesup, la CGT, Sud, une p
artie du syndicat autonome (droite), le Parti communiste, le NPA, le Parti de gauche, ainsi que deux associations d’universitaires : Sauvons l’Université ! et Sauvons la Recherche !. Le SGEN-CFDT, l’UNSA, le Parti socialiste (très tardivement) se sont fort mollement opposés à Pécresse. Les deux confédérations syndicales participent désormais à la gestion de l’Université de manière plutôt zélée. Le Parti socialiste, qui n’a jamais condamné globalement la logique de la LRU, ne prévoit pas de faire abolir cette loi en cas de victoire aux prochaines élections présidentielle et législatives.

 

Un psychodrame vient tout récemment de se dérouler autour de la personne de Bertrand Monthubert, ancien animateur de Sauvons l’Université !. Scientifique de premier plan, Monthubert a joué un rôle déterminant dans le combat contre la LRU. Membre du Parti socialiste, il a choisi d’accepter, après s’être retiré de la direction de SLU, des fonctions éminentes dans ce parti.

 

Le Parti socialiste avait décidé d’inviter à Toulouse (la ville où exerce Monthubert) Étienne Boisserie, l'actuel président de Sauvons l’Université !, à l’occasion d’une journée consacrée à l’université. Très choqué par le programme du Forum des idées du PS, Boisserie, dénonçant la manière dont ce parti accompagne les réformes de la droite en matière d’enseignement supérieur et de recherche, vient d’adresser une lettre ouverte à Monthubert ;

 

Cher Bertrand Monthubert,

Je vous remercie de votre invitation à venir assister aux débats du PS à Toulouse.

J'ai bien entendu regardé attentivement l'organisation de vos travaux, les thèmes abordés et les personnalités invitées. Pour vous dire les choses avec une franchise que je juge préférable, connaissant les combats que vous avez menés, je dois bien avouer une grande déception. De toute évidence, vous avez totalement oublié les représentants des personnels (toutes catégories confondues), un certain nombre de thèmes et de secteurs fondamentaux de nos universités, et particulièrement ceux qui souffrent déjà – et continueront de souffrir – des effets des “ réformes ” conduites depuis 2007. J'entends bien qu'un président d'université – a fortiori quatre – a une certaine expérience des RCE et de l'application de la loi LRU, mais cela ne vous aidera certainement pas à calibrer l'indispensable balayage des effets les plus délétères de la LRU et des graves dysfonctionnements introduits dans les structures universitaires par les différents « -ex » que nombre de vos invités ne manqueront d'ailleurs pas de louer. Au demeurant, l'idée d'inviter à vos travaux un « grand témoin » qui, la veille, aura présenté dans une librairie parisienne le livre qu'il cosigne avec la ministre, permettant ainsi à celle-ci de vanter urbi et orbi son miraculeux « bilan », est un pied de nez qui doit être apprécié à sa juste valeur.

 J'entends bien, par ailleurs, que « l'innovation » – qui se substitue bien trop à la « recherche » pour ne pas devoir susciter quelques interrogations – est une composante essentielle du discours ambiant, mais quid de pans entiers de l'université ? Des SHS ? Des IUT ? Quid des conditions de travail des personnels soumis à la RGPP – les Biatoss depuis un moment, les enseignants-chercheurs sous peu ?

 Beaucoup de « vedettes » et de discours convenus en perspective, un mauvais signal adressé à la communauté universitaire, une incapacité à poser un diagnostic autrement qu'avec ceux qui ont accompagné – ouvertement ou dans les faits, avec zèle ou toute honte bue – des transformations redoutables.

 Avez-vous oublié que votre groupe parlementaire avait, en plein mouvement de 2009, certes tardivement, mais clairement, pris position contre la loi LRU ? Avez-vous oublié que vous-même aviez pris une telle position au même moment ? Êtes-vous en train de vous préparer à annoncer au nom du Parti, comme M. Cambadélis l'a fait en son nom dans le JDD du 8 mai, que la réforme des universités est « peut-être » la seule réussite du quinquennat de Nicolas Sarkozy ? Votre idée de « la société de la connaissance » ne cache-t-elle pas une conversion définitive à « l'économie de la connaissance ? Et, enfin, pourquoi diable avoir pris la peine de consulter les associations SLR et SLU en décembre dernier si c'était pour produire un tel cadre de débat et de réflexion publique ?

 Je reconnais bien volontiers que ce courrier n'est pas une réponse courtoise à votre aimable invitation, mais comment un parti comme le vôtre peut-il à ce point évacuer autant de dimensions du problème de l'enseignement supérieur et de la recherche ? Comment peut-il aussi durablement éviter de tracer des priorités nouvelles pour un secteur gravement affecté depuis 2007. Or, il est consternant de constater qu'aucun de vos invités – à l'exception sans doute de votre élue régionale – n'a jamais pris la mesure de ces bouleversements et des effets néfastes des réformes en cours, quand il ne s'en est pas réjoui au nom d'une « excellence » qu'il est désormais convenu dans les cercles « réalistes » d'invoquer à tout bout de champ, comme jadis, en d'autres lieux, on en appelait aux mannes du « socialisme scientifique » ? Mesurez-vous vraiment – votre parti, pas vous-même – le degré de renoncement atteint, qui consiste à copier le discours de l'adversaire par crainte du discrédit ?

 Cela ne remet pas en cause mon estime pour le militant que vous fûtes, ni mon espoir d'une alternance politique. Mais cela ne sera pas à n'importe quel prix et vous devez prendre enfin la mesure du désarroi des femmes et des hommes sans lesquels l'université n'existe pas. Je ne doute pas que le programme de votre « Forum des idées » - certains d'entre nous y ont lu un « Forum des Idex » - provoquera chez beaucoup d'entre eux un sourire mi-las, mi-désabusé, chez d'autres une grande inquiétude.

 En espérant que votre parti saura un jour comprendre que ce n'est pas seulement d'une alternance dont l'Université et la Recherche ont besoin, mais bien d'une alternative aux politiques en cours, je vous prie de croire, cher Bertrand Monthubert, en mes sentiments les plus cordiaux.

 Étienne Boisserie

 Président de Sauvons l'université !

 

 Deux remarques explicatives avant de poursuivre. Le “ grand témoin ” dont parle Boisserie, qui a cosigné un livre avec Pécresse, n’est autre que le président de l’université Paris V, élu en 2007. Homme assoiffé de pouvoir et de reconnaissance, Axel Kahn eut, pendant la lutte contre la LRU, une attitude plus qu’ambiguë de soutien voilé aux agissements de la droite. Dans sa jeunesse, Kahn fut membre du Parti communiste puis, brièvement, du Parti socialiste. Il est vice-président des Amis du journal L’Humanité et fut membre – au titre de ses compétences en génétiques, peut-être – de la commission de révision de la Constitution française présidée par Simone Veil. Bref, l’homme navigue à la godille, un pied dans chaque camp. Heureusement, il n’y a que deux camps. Je n’ai aucune compétence pour évaluer le savant. Je note ceci dans la page Wikipédia qui lui est consacrée :

 

« Présenté parfois par les médias comme le « généticien français le plus renommé en Europe », Axel Kahn ne figure cependant pas dans la liste des 137 scientifiques français les plus cités, établie par l’Institute for Scientific Information. Cette liste comporte une bonne dizaine de généticiens français, parmi lesquels Pierre Chambon, Daniel Cohen, Jean-Louis Mandel, Marie-Geneviève Mattéï et Jean Weissenbach. Il a néanmoins publié plus de 500 articles dans des revues internationales. »

 

Dans sa lettre, Boisserie joue avec le suffixe “ ex ”. Il faut savoir que les inventeurs de la LRU et les nombreux universitaires qui la soutiennent se gargarisent désormais du concept d’excellence. Cette notion bidon sert à mettre les institutions universitaires en compétition les unes avec les autres, tout comme les personnes. C’est ainsi qu’ont été créés des “ laboratoires d’excellence ” ou Labex. Une minorité de labos pourra bénéficier de cette prestigieuse étiquette et des subventions afférentes. Mais à l’intérieur de ces labos remarqués, seuls 30% des personnels pourront se prévaloir de l’excellence. On imagine donc la lutte à couteaux tirés entre les labos et à l’intérieur même de chaque labo. Ce n'est pas le lieu de se demander ici combien de ministres pourraient bénéficier du label...

 

La lettre d’Étienne Boisserie a été reproduite par Mediapart. Je voudrais, pour terminer, citer quelques commentaires des lecteurs de ce site.

 

Il y a ceux qui pensent, comme 70% des Français, paraît-il, que trop d’universitaires sont des fainéants assistés qui, comme les bénéficiaires du RSA doivent faire leurs preuves en matière d’excellence. On me permettra de ne pas leur faire de publicité. Je préfère citer les lecteurs choqués par les dérives des socialistes :

 

 Si le PS doit prolonger ce qu'a fait Pécresse, inutile pour les enseignants-chercheurs et les Biatoss de voter pour lui en 2012. Nous attendons tous le départ du tandem Sarkozi-Pécresse comme une délivrance. Depuis 2009, il y a de plus en plus de collègues qui n'en peuvent plus et "ne travaillent plus ou à peine", faute de moyens et de perspectives. Savez-vous que désormais, au moins en SHS, les colloques français (y compris de dimension internationale) sont exclus du champ de l'évaluation par l'AERES (la nouvelle autorité d'évaluation) ? La LRU a des effets pervers que l'on ne va plus tarder à mesurer hors de l'université (mais que les enseignants-chercheurs ont d'ores et déjà pu mesurer). Et s'il faut évaluer, c'est par la LRU qu'il faut commencer, de toute urgence. Un enseignant-chercheu), avant la LRU, était évalué de façon permanente par ses pairs, et de façon très supérieure à ce qui se fait ailleurs la plupart du temps dans la plupart des métiers : DEA, puis thèse, puis habilitation à diriger la recherche, concours de bourse ATER, concours de maître de conférences, concours de professeur des universités, passage à la première classe, à la hors classe, et sans cesse la recherche d'aides à la recherche, de financements aux programmes de recherche et d'ouverture de nouvelles formations (DESS, DEA, aujourd'hui masters) ; animation de séminaires et d'écoles doctorales, accueil d'étudiants et de collègues étrangers, contributions aux équipes de recherche, contributions aux journées de recherches, colloques, échanges internationaux, publications et direction de projets de publications, de revues, etc. Facilement 50 heures de boulot par semaine, y compris (surtout) pendant les "vacances". Tout ça chez 99 % des collègues.

 

 Militant du parti socialiste, je peux en effet, faire remonter l'extrême mécontentement des collègues envers les ambiguïtés de mon propre parti. Par ailleurs, la rumeur voudrait (mais je n'ai guère de certitudes en la matière faute de temps ) que Mr Axel Kahn aurait obtenu de V.  Pécresse,  un recul de l'âge du départ à la retraite des présidents d' Université qui expliquerait sa moindre opposition à la réforme.

 

 Dans bien des métiers en lesquels les choses changent vite et en lesquels les formations sont rapides, les exigences sont inévitablement à court terme, mais la Science procède par approfondissement et cette réforme lui est nuisible. Et, en fait, c'est peut-être encore plus vrai dans les sciences "dures" (celles que Mr Monthubert connaît le mieux ...) que dans les SHS. Les lazzis sur Mr Cambadelis qui aurait eu, comme expérience essentielle de la vie universitaire, la gestion de la MNEF n'arrange pas l'image de mon parti auprès des universitaires, sauf peut-être ceux qui ont investi massivement les tâches administratives , et sont probablement les vrais gagnants de la réforme. Rappelons, pour finir, qu'un des ingrédients des défaites de 2002 et 2007 fût l'abstention des enseignants du second degré suite aux propos déconcertants de Claude Allègre. Mon parti a suivi les orientations d'un de ses membres qui s'est empressé de le quitter quand les tentations de " la politique d'ouverture " se présenta. Immense gachis pour la Gauche...

 Pour revenir à la forme que prend ce "Forum des idées" du PS, on ne comprend vraiment pas que n'ait pas été entrepris le travail minimum d'une représentation de la pluralité des acteurs de l'université et de la recherche. Pourquoi 4 présidents d'université quand on sait l'essentiel de la CPU acquis à la politique actuelle? Et pourquoi Monsieur "Axcellence" (Axel Kahn) qui signe un livre avec Pécresse? Faire de lui le "Grand témoin" de ce forum socialiste n'est pas seulement un mauvais signal envoyé à toute la communauté universitaire, c'est acter une pleine adhésion du PS à l'ensemble de la politique d'excellence qui restructure et déstructure la carte territoriale de la recherche et les laboratoires au seul profit des grands groupes industriels et financiers en faisant au passage les choux gras du secteur véreux et incompétent de la consultance.

 Beaucoup attendent que le PS se prononce enfin clairement sur trois sujets centraux : le soutien ou non à la loi LRU et toutes ses conséquences délétères en matière de démocratie et de respect de la collégialité; l'adhésion ou non à la politique d'appel d'offre via les projets d'excellence qui redessinent de façon absurde la carte territoriale de la recherche en concentrant les moyens sur quelques grands pôles et des secteurs disciplinaires à rentabilité immédiate; le devenir des SHS et des Humanités qui sont instrumentalisées et menacées d'affaiblissement ou de disparition sur les deux tiers du territoire universitaire français.

 

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13 mai 2011 5 13 /05 /mai /2011 15:11


L’Agence nationale de la recherche (ANR), en l’occurrence.

Il faut saluer les résistants et les actes de résistances. Ils sont tellement rares, y compris dans les espaces où, il n'y a pas si longtemps, la liberté intellectuelle allait de soi. Ci-dessous, le témoignage d'Odile Goerg, professeur à l'université Denis Diderot.

 

 

"Je souhaite partager l'expérience que j'ai récemment vécue et la décision que j'ai prise. Ayant accepté d'évaluer un dossier, je reçois de l'Agence le dossier, comprenant un résumé bilingue (anglais/français) et le dossier en anglais. N'ayant pas la version française, je m'adresse à l'ANR qui me répond : «  Je viens d'avoir une réponse du coordinateur qui ne pourra fournir de version française dans les délais impartis. Il est vrai que le texte de l'appel à projets recommande l'écriture en anglais, tout en précisant qu'une traduction du français à l'anglais peut être requise pour les propositions écrites en français (mais non l'inverse!). De plus, les économistes, comme c'est le cas ici, ont depuis longtemps assimilé cette nécessité de rédiger leurs travaux en anglais pour les besoins de l'expertise internationale. Cependant je comprends fort bien votre position et vous demande si vous acceptez tout de même de réaliser ce travail d'évaluation à la demande du Comité d'évaluation SHS1 « Sociétés, Espace, Organisation et Marchés ».

 

Ma réponse fut claire : j'ai refusé d'évaluer un projet de l'ANR, organisation française de France, rédigé en anglais.

 

Cette expérience pose au moins deux problèmes :

 

1) le statut du français dans la recherche et dans la diffusion de nos recherches. Cette question me semble fondamentale. Elle fait partie du processus d'imposition du modèle des sciences dites «dures» que l'on veut imposer aux sciences humaines. Dans ce  cadre, se pose de plus la question du statut hégémonique de l'anglais.

 

2) la politique des langues de nos institutions, en l'occurrence l'ANR, mais cela se pose à d'autres niveaux (à l'intérieur des universités, pour les évaluations.) : c'est donc pour une raison de principe que j'ai refusé d'évaluer. Tout en reconnaissant l'intérêt évident de maîtriser d'autres langues (au pluriel) et de diffuser nos recherches à l'international en participant à des colloques à l'étranger et en publiant dans des revues étrangères en se soumettant à leurs propres critères, il me semble que l'abandon du français ne peut être que suicidaire.

 

 

Odile GOERG, professeur des universités

 

Histoire de l'Afrique contemporaine

Université Paris Diderot-Paris "

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