Avant de lire le livre de François de Negroni et de Corinne Moncel (Le Suicidologue), je n’avais jamais entendu parler de l’histoire des noyés de la Bonne société. À bord du bateau La Bonne Société, les négriers se souciaient peu du moral de leur marchandise humaine. Les captifs réussirent à maîtriser leurs gardiens et à s’emparer du navire. Mais le reste de l’équipage parvint à mater la mutinerie. Les esclaves se jetèrent à la mer, enchaînés par dizaines plutôt que de subir la déportation. Un vrai manque à gagner pour les propriétaires.
(Substractio)
Il était grand comme trois bites à genoux, mais grâce à sa bonne tête sympathique de gendre idéal, et grâce à son talent, il fut un acteur très populaire dans les années quarante et cinquante. L’Homme des vallées perdues est l’un de ses films les plus connus.
Lycéen, il pratiqua le sport à un haut niveau et, n’était-ce une blessure, il aurait représenté son pays aux JO de Los Angeles en 1932 (en plongeon). Un jour, il trouva sa mère agonisante : elle venait d’ingurgiter du poison à fourmis.
Vers la fin des années cinquante, il devint moins séduisant et resta petit (ses partenaires féminines étaient toutes plus grandes que lui). Il se mit à boire. À 51 ans, en 1954, il se suicida en avalant des somnifères et une forte dose d’alcool.
(Impatienta doloris)
À l’actif de l’actrice Nicole Ladmiral : un seul film (Le journal d’un curé de campagne de Bresson où elle tenait le rôle d’une jeune fille perverse) en 1948, et deux pièces : Deux sous de violette, de Jean Anhouil, avec Dany Robin en 1951, et Quarante et quatre de Jean Davray, mise en scène par Raymond Rouleau en 1952. On ne lui proposa malheureusement rien d’autre. Elle connut également une grosse déception sentimentale et se jeta sous un métro station Daumesnil le 11 avril 1958. Elle avait 28 ans.
(Impatienta doloris)
Paul Lafargue inventa le droit à la paresse. Avec sa femme Laura, fille aînée de Karl Marx, ils avaient fixé la date de leur mort à 70 ans. Né à Cuba en 1842, Lafargue était d’origine amérindienne, bordelaise et juive. Exclu de l’université de Paris pour avoir marqué sa préférence pour le drapeau rouge, il émigre à Londres en 1865. Il se lie à Marx et Engels. En 1866, il est élu au conseil général de l’Internationale. Il participe à la Commune de Paris en 1871. Avec Jules Guesde, il fonde le parti ouvrier en 1880.
En 1883, il est incarcéré à la prison Sainte-Pélagie pour propagande révolutionnaire. Il devient député de Lille en 1891 et est à nouveau emprisonné pour « provocation au meurtre » après la fusillade de Fourmies (1er mai 1891) qui avait fait neuf morts et trente-cinq blessés chez les ouvriers (il s’agissait de la première célébration française et internationale de la journée d’action du 1er mai ; huit des ouvriers tués avaient moins de 21 ans).
Le couple Lafargue connaît de sérieux problèmes matériels : il ne reste rien de l’héritage d’Engels. À 69 ans, en 1911, il se suicide avec sa femme (66 ans) et laisse cette lettre : « Sain de corps et d'esprit, je me tue avant que l'impitoyable vieillesse qui m'enlève un à un les plaisirs et les joies de l'existence et qui me dépouille de mes forces physiques et intellectuelles ne paralyse mon énergie, ne brise ma volonté et ne fasse de moi une charge à moi et aux autres. » Le couple est enterré au Père-Lachaise, en face du mur des Fédérés.
(Taedium vitae)