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20 novembre 2012 2 20 /11 /novembre /2012 10:44

 

http://imstars.aufeminin.com/stars/fan/adriana-karembeu/adriana-karembeu-20061225-190707.jpgCe soir, France 2 programme une émission choc au titre quelque peu putassier : “ Les pouvoirs extraordinaires du corps humain ”. Pour nous prouver que le corps humain possède des capacités insoupçonnées (plus je vieillis, plus je me dégrade et plus j’en suis convaincu), le médecin médiatique Michel Cymes a prétendument « escaladé le Mont-Blanc » en compagnie d’Adriana Karembeu (pourquoi science et jolie femme serait-elle incompatibles ?). Dans les faits, les deux vedettes se sont fait déposer par hélicoptère à 4300 mètres, au col de la Brenva. Avec l’autorisation du maire adjoint de Chamonix. La supercherie a été dénoncée par le maire de Saint-Gervais (m’est avis que ces deux maires de droite ne partent pas souvent en camping ensemble).

 

Pour avoir fait de la rando en montagne à plus de 3000 mètres d’altitude alors que j’étais plus jeune que ne l’est aujourd’hui Cymes, je sais très bien que le simple fait de terminer à pied, sur 500 mètres de dénivelé, l’escalade du Mont-Blanc est un exercice en soi très difficile.

 

Le problème n’est pas dans cette petite polémique. Il est, comme toujours, dans la com’, dans l’image. Pourquoi est-il nécessaire, pour expliquer, vulgariser des réalités scientifiques intéressantes, d’aller chercher une femme de 41 ans plus célèbre pour sa beauté, la longueur de ses jambes (1m26) que pour sa connaissance du corps humain, même si elle a accompli trois années d’études de médecine dans sa jeunesse en Tchécoslovaquie ?

 

Que fait Adriana Karembeu aujourd’hui ? Elle est l’égérie des magasins de décoration Atlas, elle a introduit sa société de « diffusion » en bourse et elle présente un documentaire-réalité (toujours ces trucs à la limite du faux) sur M6 qui traite des difficultés de la vie de couple (« Allo Adriana, ici c’est M6. Dis donc, depuis que toi et ton footballeur avez divorcé, tu serais pas un peu experte en vie de couple ?).

 

Cela fait des années que le Mont-Blanc est un boulevard. Cela dit, je partage l’opinion du maire de Saint-Gervais – dont j’aime beaucoup la ville – qui « déplore la banalisation du Mont-Blanc et condamne avec la plus grande fermeté toutes ces actions d'ego ou toutes celles commerciales qui poursuivent des objectifs uniquement personnels et mercantiles. »

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18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 07:01

http://europeanastatic.eu/api/image?type=VIDEO&uri=http://images1.noterik.com/domain/euscreen/thumbs/7/3/EUS_738EFABE5A7047CFA369F2B13CD2A1DA.jpg&size=FULL_DOCNé en 1934 dans l’île de Thasos, Vassilis Vassilikos passa son adolescence à Thessalonique où il fit des études de droit. Il devint journaliste, mais dut s’exiler en France en 1967 pour ses idées politiques.

En 1961, il avait obtenu l’équivalent du prix Goncourt pour Trilogie, un recueil de nouvelles. En 1967, il écrivit Z, qui relate l’assassinat du député de gauche Lambrakis, récit que Costa-Gavras portera à l’écran avec le succès que l’on sait.

Lors du rétablissement de la démocratie en Grèce, Andreas Papandreou lui demanda de devenir directeur des programmes à la télévision en 1981, un poste qu'il occupa jusqu’en 1984. Il a également été responsable de la délégation grecque à l'UNESCO.

C’est en France qu’il écrivit de nombreux poèmes d’exil.

 

 

EN BUVANT DE L’OUZO « SANS RIVAL »

 

En buvant de l’ouzo« Sans rival »,

Je me suis rappelé

De très anciens villages,

Des phrases ianchevées

Faites d’olives, de pastourma,

Et d’un peu de fromage de Kynthio.

L’odeur du rez-de-chaussée,

Et la clé des cabinets

Toujours dans les mains du propriétaires

 

Stratos, Procope, Kostis,

Et Vaghia, originaire de Kozani,

Qui tant voulait, dans la capitale,

Devenir metteur en scène. Tous mes amis

Qui ne peuvent boire

Et les autres qui boivent désormais sans moi.

 

Je me suis rappelé tout cela,

Comme un poème de Kavafis en traduction,

Quand tu n’as pas l’original, quand,

Ne pouvant plus résister

A l’embrasement de la mémoire,

Tu mets beaucoup d’eau, tu mets de la glace,

Et tu bois alors un liquide

Blanc , doux et nostalgique.

 

POST-SCRIPTUM

Peu de feuilles,

Beaucoup d’arbres.
Peu d’amis,

Trop de souvenirs.
Clairsemés les amis,

Foule les souvenirs.

En amour, peu de sentiment,

Beaucoup d’actes.

 

 

(Traduction Dominique Grandmont).

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13 novembre 2012 2 13 /11 /novembre /2012 07:08

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/0/0e/Pablo_Neruda_Ricardo_Reyes.jpeg/220px-Pablo_Neruda_Ricardo_Reyes.jpegDe la biographie de Neruda (son vrai nom était Neftalí Ricardo Reyes Basoalto), on retiendra qu’il était né en 1904 au Chili. En 1971, il obtient le prix Nobel de littérature. Fidèle soutien du président Allende (celui que Pompidou appelait « le docteur Allende » car il n'avait jamais considéré son élection comme légitime), Neruda rédige en 1972 Incitation au Nixoncide et éloge de la révolution.

 

Lors du coup d’État du 11 septembre 1973, les livres de Neruda sont brûlés. Il meurt le 23 septembre 1973, officiellement d’un cancer de la prostate. Malgré la surveillance de l’armée, son enterrement fut une grande manifestation contre la dictature.

 

En 1974, paraît son autobiographie J’avoue que j’ai vécu, où il écrit :

 

Je veux vivre dans un pays où il n'y ait pas d'excommuniés.
Je veux vivre dans un monde où les êtres soient seulement humains, sans autres titres que celui-ci, sans être obsédés par une règle, par un mot, par une étiquette.
Je veux qu'on puisse entrer dans toutes les églises, dans toutes les imprimeries.
Je veux qu'on n'attende plus jamais personne à la porte d'un hôtel de ville pour l'arrêter, pour l'expulser.
Je veux que tous entrent et sortent en souriant de la mairie.
Je ne veux plus que quiconque fuie en gondole, que quiconque soit poursuivi par des motos.
Je veux que l'immense majorité, la seule majorité : tout le monde, puisse parler, lire, écouter, s'épanouir.

 

Sur l’exil, on pourra retenir cet extraordinaire petit poème :

 

L'EXIL EST UN ROND

 

L’exil est rond

Un cercle, un anneau :

tes pieds en font le tour,

tu traverses la terre,

Et ce n’est pas la terre

Le jour s’éveille et

Ce n’est pas le tien,
la nuit arrive :

Il manque tes étoiles

Tu te trouves des frères,

Mais ce n’est pas ton sang.

 

(Chants libre d’Amérique latine)

 

http://schabrieres.files.wordpress.com/2010/05/pablo_neruda.jpg

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12 novembre 2012 1 12 /11 /novembre /2012 07:06

Ignace, évêque d’Antioche d’origine syrienne, fut condamné par l’empereur Trajan à être dévoré par des lions. Ça tombait bien, il n’aspirait qu’à mourir pour le Christ. Il considérait cette mort comme une libation : « Laissez-moi me délecter de ces lions, que je souhaiterais beaucoup plus cruels qu’ils ne sont . » Pour Trajan, exécuter Ignace devait freiner l’expansion du christianisme. Raté.

 

(Jactatio)

 

http://exprimezvotrepotentiel.files.wordpress.com/2011/10/saint_ignace_dantioche_et_les_lions_h300.png

 

 

 

Quand les révolutions broient leurs enfants… Né en 1883, Adolf Abramovitch Joffe choisit le camp de Lénine et de Trotski en1917 contre Zinoviev et Kameniev. En 1926, Staline décide une première purge de ses opposants. En 1927, Joffe est gravement malade. Staline refuse de le faire soigner à l’étranger. Le 12 novembre, Joffe se suicide. Il laisse à Trotski ces quelques mots : « Ma mort est l’acte de protestation d’un combattant convaincue de la justice de la voie que vous avez choisie, Lev Davidovitch. » Sur sa tombe, Trotski dira (et ce sera sa dernière intervention publique en URSS) : « Sa vie, non son suicide, doit servir de modèle à ceux qu’il a laissés derrière lui. La lutte continue. Chacun reste à son poste. Que personne ne déserte ! »

 

(Jactatio)

 

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/ba/Grave_of_Adolph_Joffe,_2011.jpg/80px-Grave_of_Adolph_Joffe,_2011.jpg

 

 

Irene Lentz (ou Irene), 1900-1962, fut la plus grande costumière d’Hollywood. Proche de Doris Day, elle habilla également Dietrich, Taylor, Turner, Garland. Elle abusa un peu de l’alcool et des calmants.Son grand problème fut son amour éperdu, mais non partagé, pour Gary Cooper. L’acteur mourut en 1961. Quelques mois plus tard, Irene se tailla les veines, mais rata son coup. Elle se jeta alors d’une chambre d’hôtel au 14ème étage. Elle laissa quelques lettres pour sa famille, pour son mari malade et pour les résidents de l’hôtel à qui elle demanda de l’excuser pour le grabuge causé par sa mort.

 

(Impatienta doloris)

 

http://p2.storage.canalblog.com/23/67/466416/53387458.jpg

 

 

Enfant des bas-fonds, né en 1952, Eugene Izzi écrivit de nombreux romans policiers (souvent sous le pseudonyme de Nick Gaitano) situés dans les bas-fonds. Avec un réel succès. Le 7 décembre 1996, Izzi est retrpuvé pendu dans son bureau de travail du centre de Chicago. Une mort très troublante.

 

La porte était fermée de l’intérieur. Il portait un gilet pare-balles. Dans ses poches, des menottes, une bombe de gaz paralysant et une disquette d’un roman inachevé. Que racontait ce roman ? Un protagoniste, auteur de romans policiers, enquête sur les milices paramilitaires de l’Indiana. Il a revêtu un gilet pare-balles et est armé. Un soir, la milice entre dans son appartement et tente de le pendre. Heureusement, il s’échappe.

 

La famille d’Eugene accepta la version du suicide, mais certains affirmèrent que l’auteur avait infiltré un groupe de partisans de la suprématie de la race blanche et qu’il s’apprêtait à leur consacrer un livre.

 

(Tædium vitæ)

 

http://3.bp.blogspot.com/__lZhex01AAg/S3Nxrc7E8ZI/AAAAAAAADtI/EU3s0am9d9I/s320/izzi2.jpg

 


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9 novembre 2012 5 09 /11 /novembre /2012 06:46
http://i89.servimg.com/u/f89/11/69/59/15/malek_10.jpgNé en 1927, Malek Haddad a vécu la langue française à l’école comme un exil : « L’école coloniale colonise l’âme... Chez nous, c’est vrai, chaque fois qu’on a fait un bachelier, on a fait un Français. […] Il y a toujours eu une école entre mon passé et moi. […] Je suis moins séparé de ma patrie par la Méditerranée que par la langue française ».

 

Il s’inscrit à la faculté de droit d’Aix-en-Provence mais abandonne ses études pour aller travailler comme ouvrier agicole avec Kateb yacine en camargue.

Pendant la Guerre d’Algérie, Malek Haddad collabore à plusieurs revues parmi lesquelles Entretiens, Progrès, Confluents, Les Lterres françaises.

Après 1962, il s'installe à Constantine, collabore à l’hebdomadaire Atlas et à la revue Novembre,et dirige la page culturelle d’An Nasr qui paraît alors en langue française. Chargé de la direction de la Culture au ministère de l’Information de 1968 à 1972, il fonde la revue littéraire Promesses. Il est nommé en 1974 secrétaire de l'Union des écrivains algériens.

Malek Haddad décède d'un cancer en 1978 à Alger.

 

Après le retour à la terre natale et la fin de l'exil, Malek se trouve face au chômage et au despotisme. Ce qu’il exprime dans le poème “ Début d’exil : il pleut ” :

Ombre du col relevé

J'ai seize ans quand il pleut

La ville a peur des étrangers

Elle aime bien ses habitudes

Je marche

Je traîne

J'ai ma lettre à chanter

Je suis un continent qui rêve à la dérive...

Je suis le voyageur aux étapes baroques

Du jardin qui sourit

Au grenier qui médite

Je me monte en ménage un peu tous les deux mois.

Il pleut

La ville a peur des étrangers

Elle aime bien ses habitudes […]

(Écoute et je t’appelle, 1961).

 

De lui, voici peut-être les vers que je préfère . Nougaro aurait pu les chanter :

 

Je n’ai que des chansons

Pour celui qu’on enchaîne

Pour la main qu’on refuse

Pour le jour qu’on accuse

Je n’ai que des chansons

Pour les blés qu’on piétine

Pour la nuit qu’on malmène

Pour la colombe en deuil

Sur l’olivier brûlé

Mais je sais qu’un refrain

Ça peut faire du bien

Donne-moi ta main

Viens ...

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5 novembre 2012 1 05 /11 /novembre /2012 07:15

 

http://2.bp.blogspot.com/-MCpcgHsE36c/TekDgB1GyYI/AAAAAAAAB90/IqX6xUT4JxY/s1600/hikmet.jpgNâzim Hikmet fut le plus grand poète turc du XXe siècle, inconnu dans son pays de son vivant, ses œuvres étant interdites. Nâzim Hikmet est né à Salonique en 1902, dans une famille de hauts fonctionnaires de l’Empire ottoman. Avec une grand-mère polonaise du côté maternel, un grand-père gouverneur d’Alep, féru de poésie, et une mère artiste, pétrie de culture française, le jeune Nâzim avait tout pour réussir une brillante carrière. Il a passé près de la moitié de sa vie d’adulte dans les prisons turques, et pratiquement le reste du temps en exil à Moscou, ou en voyages à travers le monde. Déchu de sa nationalité, il mourra à Moscou en 1963, à lâge de 61 ans, citoyen polonais.

 

L’année suivante ses poèmes sont publiés en Turquie, après 28 ans d’interdiction. Mais il faudra attendre 2009 pour que la nationalité turque lui soit rendue.

 

 

Les heures de Prague 

Dans Prague tandis que blanchit l’aube

La neige tombe,
liquide,

d’un gris de plomb.

Dans Prague doucement s’éclaire le baroque

Tourmenté, lointain ;

Il tremble dans ses dorures une tristesse noircie.

Sur le Pont Charles les statues

sont des oiseaux venus d’une étoile morte (…)

Dans Prague passe une voiture,
une charrette que traîne un seul cheval,

devant le cimetière juif.

La charrette est chargée

de la nostalgie d’une autre cité

et le charretier c’est moi.

Dans Prague doucement s’éclaire le baroque

tourmenté, lointain
dans ses dorures une tristesse noircie.

Dans Prague au cimetière juif

la mort est silencieuse, muette.

Ô mon amour, ô mon amour
l’exil est pire que la mort…

 

C’est un dur métier que l’exil

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31 octobre 2012 3 31 /10 /octobre /2012 07:01

En 1955, Roland Barthe publiait “ Le Tour de France comme épopée ”, un texte très innovant sur le Tour de France, repris dans Mythologies en 1957. Extraits :

 

http://s2.e-monsite.com/2009/12/19/925427160-0-0-0-bobet-bartali-jpg.jpg

 

Sur la géographie du Tour de France : 

« La géographie du Tour est, elle aussi, entièrement soumise à la nécessité épique de l'épreuve.

Les éléments et les terrains sont personnifiés, car c'est avec eux que l'homme se mesure et comme dans toute épopée il importe que la lutte oppose des mesures égales : l’homme est donc naturalisé, la Nature humanisée. (...) les étapes sont avant tout des personnages physiques, des ennemis successifs, individualisés par ce mixte de morphologie et de morale que définit la Nature épique. (...) Le Tour dispose donc d’une véritable géographie homérique. Comme dans l’Odyssée, la course est ici à la fois périple d’épreuves et exploration totale des limites terrestres. Ulysse avait atteint plusieurs fois les portes de la Terre. Le Tour, lui aussi, frôle en plusieurs points le monde inhumain : sur le Ventoux, on a déjà quitté la planète Terre, on voisine là avec des astres inconnus. » 

 

Sur le dopage :

« Doper le coureur est aussi criminel, aussi sacrilège que de vouloir imiter Dieu ; c’est voler à Dieu le privilège de l’étincelle. »

 

Le Tour comme champ de bataille :

« La dynamique du Tour se présente évidemment comme une bataille, mais l’affrontement y étant particulier, cette bataille n’est dramatique que par son décor ou ses marches, non à proprement parler par ses chocs. Sans doute le Tour est-il comparable à une armée moderne, définie par l’importance de son matériel et le nombre de ses servants ; il connaît des épisodes meurtriers, des transes nationales »

 

La morale du Tour :

« Le Tour possède une morale ambiguë : des impératifs chevaleresques se mêlent sans cesse aux rappels brutaux du pur esprit de réussite. C’est une morale qui ne sait ou ne veut choisir entre la louage du dévouement et les nécessités de l’empirisme. Le sacrifice d’un coureur au succès de son équipe, qu’il vienne de lui-même ou soit imposé par le directeur technique, est toujours exalté, mais toujours aussi, discuté. Le sacrifice est grand, noble, il témoigne d’une plénitude morale dans l’exercice du sport d’équipe, dont il est la grande justification ; mais aussi il contredit une autre valeur nécessaire à la légende complète du Tour : le réalisme. On ne fait pas de sentiment dans le Tour, telle est la loi qui avive l’intérêt du spectacle. (...) 

Le Tour est un affrontement de caractères, il a besoin d’une morale de l’individu, du combat solitaire pour la vie (...) Mais le Tour est aussi un sport, il demande une morale de la collectivité. C’est cette contradiction qui oblige la légende à toujours discuter et expliquer le sacrifice, à remettre chaque fois en mémoire la morale généreuse qui la soutient. »

 

Le Tour comme mythe :

« Je crois que le Tour est le meilleur exemple que nous ayons jamais rencontré d’un mythe total, donc ambigu ; le Tour est à la fois un mythe d’expression et un mythe de projection, réaliste et utopique tout en même temps. Le Tour exprime et libère les Français à travers une fable unique où les impostures traditionnelles (psychologie des essences, morale du combat, hiérarchie des surhommes et des domestiques) se mêlent à des formes d’intérêt positif, à l’image utopique d’un monde qui cherche obstinément à se réconcilier par le spectacle d’une clarté totale des rapports entre l’homme, les hommes et la Nature. Ce qui est vicié dans le Tour, c’est la base, les mobiles économiques, le profit ultime de l’épreuve, générateur d’alibis idéologiques. Ceci n’empêche pas le Tour d’être un fait national fascinant, dans la mesure où l’épopée exprime ce moment fragile de l’Histoire où l’homme, même maladroit, dupé, à travers des fables impures, prévoit tout de même à sa façon une adéquation parfaite entre lui, la communauté et l’univers.

 

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25 octobre 2012 4 25 /10 /octobre /2012 13:05

 

http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/images/1003936-Louis_Aragon.jpgDans un essai sur Aragon, publié chez Gallimard, l’auteur du « Con d’Irène » apparaissait vêtu d’un « cache-sexe rouge vif ». Le chapitre a été censuré par l’ayant-droit du romancier. Le voici dans son intégralité. 

 

Dans les beaux quartiers de Paris, l’automne pluvieux disperse l’or des parcs et presse aux épaules les passants. A l’étage d’un hôtel particulier aux pavés usés sous les roues des carrosses, on ferme les volets d’un appartement composé comme un double cœur, volière de vers et de chansons, galion gorgé d’éditions rares et d’objets curieux, aquarelles d’un siècle englouti. Appelons le maître des lieux Castille. Le flot des visiteurs a cessé depuis qu’au fond de cette grotte le magicien agonise. Ni les cartes postales reçues du bout du monde qu’il mêlait à des lambeaux d’affiches ou de journaux pour les arranger en fresque, ni l’amitié des peintres qui décorent diversement ses murs, ni l’hommage officiel des princes ou les chuchotements de ceux qui viennent encore aux nouvelles ne retiendront Castille de partir. Le vieux roi qui voudrait tant mourir, et n’y arrive pas.

 

Scellée depuis douze années, la porte de l’autre chambre n’ouvre plus sur «l’avenir de l’homme». Nul ne pénètre dans le sanctuaire où il a dressé Ses portraits, Ses romans, Ses toilettes – à Elle. Il a fait de ce reposoir un mythe, et du reste de l’appartement sa tanière. A force de manipuler l’amour, il en semblait irradié. Son bel canto avait vicié Castille; mimait-il éperdument, ou éprouvait-il sincèrement les passions? Les avis restaient partagés. Peut-être le grand poète avait-il besoin de dire pour ressentir, et de la rencontre d’un stylo avec d’une feuille de papier pour atteindre l’heure de la sensation vraie? Beau comme la rencontre…, y avait-il assez rêvé? Les daltoniens se confient au jugement des autres pour séparer le rouge du vert, Castille semblait à certaines heures affligé d’un daltonisme des passions; distinguant mal l’amour de la haine ou la joie de la douleur, il lui fallait s’en remettre assez souvent à sa femme, ou à son Parti, ou au témoignage de ses propres écrits. Chanter pour se donner courage ou contenance, vocaliser l’amour pour l’inoculer à l’autre et à soi-même, c’était peut-être la clé de son bizarre réalisme.

Depuis 1971, Castille prenait ses vacances d’été à Toulonentouré d’une cour de jeunes gens auxquels il distribuait chatteries, caresses et coups de griffe comme un pianiste réhausse son jeu à coups d’apoggiatures et d’effets de pédale. Je m’y trouvais mêlé en juillet 1973, habitant moi-même cette ville depuis mon affectation de professeur de philosophie au lycée Bonaparte; j’avais, pour la collection Poche-critique créée par Georges Raillard, écrit un petit ouvrage sur Blanche ou l’oubli qui avait plu à son auteur, nous avions échangé quelques messages, il m’avait reçu rue de Varenne et, puisque j’étais toulonnais, invité à passer le voir au cap Brun quand lui-même y serait.

Je me retrouvais donc sur la corniche de la résidence-hôtel, pour un déjeuner pris en terrasse à l’ombre entêtante des pins; au loin sur la grande nappe bleue, les voiliers faisaient un semis de petites mites, tandis que dans la minuscule piscine en contrebas quelques jeunes gens juraient et s’ébrouaient avec de grands splashes. J’imaginais avant de venir Castille entouré d’artistes, de fins causeurs ou de critiques experts, mais je tombais autour de la table sur ces «charlatans de Gallipoli (…) des gens, des gens, des gens encore (…) des paltoquets et des pécores» évoqués dans Le Roman inachevé; je revois deux hurluberlus fraîchement débarqués du festival d’Avignon, soudain séduits par le décor et décidés à y prendre racine, auquel notre hôte débitait des anecdotes qu’ils écoutaient en feignant l’intérêt. La conversation languissait, aussi fus-je soulagé quand Castille me lança gaiement au café, qu’il buvait en y ajoutant une quantité effroyable de sucre: – Eh bien jeune homme, je suis content de vous! Vous plairait-il d’entendre la suite? Attendez-vous à pire…, et il m’avait entraîné sans façon dans sa chambre, en escaladant l’escalier avec une vigueur surprenante.

 

Sur une table devant la fenêtre étaient disposées des liasses. Castille les soupesa avec la circonspection d’un haltérophile, puis d’un paquet tira prestement quelques feuilles qu’il commença à lire d’une voix emphatique, le dos tourné au jour. A cette époque, il laissait encore pousser ses longs cheveux blancs en crinière. Pourtant ce n’était pas le lion qu’évoquait le visage de Castille, malgré son profil arrondi de félin et la fente parfois cruelle des paupières filtrant un regard bleu. Son port de tête n’était pas assez noble ou tranquille, les expressions les plus contraires couraient sur ses traits avec la rapidité de l’araignée sur sa toile.

Cette déconcertante cinématographie de la face semblait prendre naissance à la base onduleuse du cou: tout en lisant Castille branlait du chef, et coulait de côté des regards en lame de faux. Sa voix légèrement nasale découpait les mots avec la précision d’une dague; non contente de dire elle semblait décortiquer et déguster chaque phrase, suspendue à d’invisibles guillemets, ou élevée jusqu’à la lumière comme un joaillier vante un bijou de prix qu’il détache pour le faire tourner aux yeux de l’acheteuse. Il était difficile d’échapper à son charme hypnotique, tant la haute silhouette dépassait la mesure ordinaire de l’homme ou de la femme et suggérait l’apparition mélodieuse de la Sphinge, ou de quelque serpent à sonnettes à la morsure sucrée.

Je m’efforçais de ne rien perdre de cette mise en scène, mais son étrangeté même nuisait à l’intelligence des paroles, dont le fil se rompait souvent. Les sautes de ton et les syncopes caractérisent le maniérisme lyrique du dernier Castille, qui me faisait profiter là de son dernier roman, en se plaisant à souligner et à dramatiser les accidents de sa prose, partout où ça disjonctait.  – Tu vois petit, ce bouquin me déborde, quel désordre bon Dieu quel désordre, jamais je ne m’y retrouverai…

Car soudain dans la chambre il m’avait tutoyé, tout en piochant parmi les feuillets qu’il battait comme un jeu de cartes – pour anticiper sur l’image que répéteront tous les commentateurs de Théâtre/roman. Puis, dans un grand geste théâtral le poète rejeta impatiemment le manuscrit et se dressa vivement. Le peignoir s’ouvrit sur le slip de bain. Castille nageait chaque jour en mer, assez souvent seul et droit vers le large, et je vis que le grand âge n’avait pas ruiné son corps bronzé, à la stature athlétique. Il me tourna le dos et disparut sans un mot dans la salle de bains.

Plusieurs minutes s’écoulèrent, avec des bruits d’eau. Une bouffée de parfum envahit la pièce, d’un musc lourd dominé par la rose. Quand Castille regagna son siège pour reprendre sans autre explication le fil de sa lecture, j’eus du mal à contenir ma stupéfaction: le Vieux s’était fardé et fait les yeux en y collant, par un détail de coquetterie inconcevable, des faux-cils dégoulinant de rimmel. Il avait abandonné le peignoir et troqué son slip pour un cache-sexe rouge vif. J’avais à présent devant moi une drag queen qui se mit à rythmer de plus belle les propos d’Eurianthe ou de quelque Lélio, tout en se caressant la poitrine et la toison ventrale. Le parfum, un gel plutôt, n’avait pas été appliqué au hasard et il était facile, à la courte distance où j’étais, de deviner de quel orifice copieusement enduit émanait l’entêtante invite. Dans mon dos, le grand lit blanc à la courte-pointe impeccablement tirée se chargea soudain d’une présence redoutable ; en quelques minutes, la confusion des genres avait changé de caractère.

 

Que faire? Je jugeai prudent de ne rien laisser paraître, me levai dès la fin de la lecture, remerciai et cherchai l’air au dehors, en tirant la porte sur les vociférations du baroque opéra dont, par une chaude après-midi de juillet, Castille m’avait fait l’unique spectateur. Ses lèvres aux accents rugissants et suaves avaient déployé pour moi l’éventail du désir amoureux sans lésiner sur l’orchestre, ponctuant par les clochettes de la douleur le largo langoureux des stances, tressant ses trilles au frémissement des cordes, ça me remettait quatre vers en mémoire, «Dites flûte ou violoncelle / Le double amour qui brûla / L’alouette et l’hirondelle / La rose et le réséda», amour double en effet puisque par derrière… Comment jamais te dire Je t’aime? modulait de mille façons le poème, tandis que le colimaçon parfumé de la rose implorait Défonce-moi!Ou, dit avec plus d’emphase dans Le Paysan de Paris: «Bats-moi, effondre-moi (…). Saccage enfin, beau monstre, une venaison de clartés».

L’abîme ouvert par Castille ne me détourna pas de le revoir, et je me mis à fréquenter davantage ses livres. «Sexuellement je l’avais percé à jour et il ne me le pardonnait pas», écrivit Drieu la Rochelle de son ancien ami; pour moi au contraire, le mélodieux frelon me parut plus proche, et presque fraternel, du jour où il me révéla sa fêlure. En ce temps-là, le veuvage de Castille était récent, et le plus exposé des secrets mondains n’était pas encore devenu le Polichinelle de Paris; la fable pourtant s’en répandait, et le poète ne fit rien pour la démentir; il s’affichait au contraire en diverses mondanités avec son secrétaire ou d’autres garçons de moindre calibre, semant chez les vieux grognards d’un réalisme qu’ils appelaient toujours socialiste l’embarras de ne plus savoir, devant le nouveau couple, sur quel pied danser.

Je croisais le secrétaire – appelons-le Raoul – qui fumait nerveusement au pied de l’escalier; il faisait le guet je crois bien, mais pas comme Leporello veillant sur les amours de son maître. Son regard m’instruisit mieux que les chamailleries du caravansérail sur les supputations et les jalousies qui peuplaient le petit monde de Castille. Le jeune homme composait sur son protecteur des vies parallèles aux détails suggestifs qui tiraient de Castille, dont le regard fatigué ne savait plus reconnaître la peinture, des cris d’extase. «Hourra Raoul !» avait titré quelques années plus tôt sur deux pages Les Lettres françaises. Ensemble ils promenèrent ce livre, dont ils firent des lectures publiques à deux voix pour inaugurer ici un Centre culturel, là une bibliothèque Elsa Triolet.

Plus tard il y aurait l’exhibition télévisée et les bredouillements sous le masque. Une suite funèbre de paroles à côté et de bouffonneries jusqu’à la décomposition finale. Castille toujours sublime et pathétique faisait le sourd quand on le suppliait d’intervenir fût-ce d’un mot dans les affaires du Parti ou de l’U.R.S.S., mais sur son œuvre et dans ses amours il se parodiait désormais lui-même, comme pour remettre sa fameuse fidélité à l’échelle de la grimace discordante et du «ratage carnavalesque du temps». Face à ses détracteurs et ennemis qui étaient légion, il avait toujours eu la passion d’en rajouter, façon de prendre les devants disait-il, ou pour le bizarre plaisir d’armer l’adversaire.

 

Je rencontrais Castille une dernière fois, dans une librairie de Grenoble où il venait lire quelques poèmes, dont le très touchant «Voyage d’Italie» où passe la voix blessée de Marceline Desbordes-Valmore. Les demandeurs d’autographes s’écrasaient sur son passage et je revois Raoul, costumé en cocher, empilant dans un grand sac les livres que Castille dédicacerait plus tard. Je m’avançais vers lui pour lui redire mon attachement, avec à la main un exemplaire d’Irène dans l’édition de Régine Deforges où je le priais de me mettre un mot. – Pourquoi voulez-vous, mon petit, que je vous dédicace un livre qui m’est étranger puisque j’ai toujours refusé d’en endosser la paternité – ou devrais-je dire la maternité? Et en effet, Castille résista jusqu’au bout, pour des raisons que je m’explique mal, à reconnaître l’un de ses plus beaux cris. Après cela, peut-être découragé, je ne le revis jamais plus.

Il fallait un certain héroïsme pour lamper ainsi à petites gorgées la cigüe lente du suicide. On avait bien ri quand, profitant d’un discours officiel où il remettait ses manuscrits à la nation française, il avait solennellement institué Raoul son «prolongateur». Un cordon électrique! Un échotier s’en empara et un bon mot courut Paris, «la prise de la Castille», ah ah! Prolongateur, Raoul? Un rouage tout au plus de cette machine à se moudre soi-même, un Sganarelle de rencontre à la table du séducteur, à l’heure où les Commandeurs de marbre se bousculent aux portes. Dans ce théâtre de marionnettes où Raoul était le dernier du casting, Castille avait toujours occupé tous les emplois, à la fois l’idolâtre et l’idole, la cantatrice et son amant, persécuté-persécuteur… Castille à la voix de cristal maintenant sous les tubes, aux mains des hommes en blanc. Et autour de la bibliothèque, des tableaux et des manuscrits, le vol pesant des charognards.

«Je fais ce que je peux», aurait-il dit entre deux comas. Si telles furent ses dernières paroles, il est curieux de mettre son œuvre et sa vie en regard. Pour fermer le bec aux nécrologues qui ont déjà remis leur copie sur le thème de la Castafiore. Car la mort de Castille suscita, venant de la gauche, une surenchère d’attaques furieuses, alors qu’il fut salué à droite avec respect et admiration sous la plume de François Nourissier ou de Jean d’Ormesson. Le sphinx ne dira plus rien, il emporte avec lui le mot de son énigme, mais il aura tant parlé, écrit, chanté… Castille enduisait d’un baume de douceur ses déchirures, il épongeait d’une gaze parfumée une plaie inguérissable, comme il aimait à la fin, parmi les jeunes gens, se travestir de rubans et de falbalas. L’irréparable avait eu lieu une fois pour toutes, à la naissance, il avait eu trop mal à sa parentèle, trop tôt désespéré des êtres les plus proches. De sorte que quand les choses commencèrent à vraiment mal tourner aux environs de 36, du côté de l’U.R.S.S. et de sa grande famille communiste, ça dut rappeler quelque chose à l’enfant truqué qu’il avait été, et peut-être le confirmer, le rassurer dans ses choix.

Il n’y a pas d’amour heureux, pas de famille sans mensonges, pas de couple dans discorde ni d’idéal sans trahison? On n’aura rien dit de Castille tant qu’on n’aura pas admis à quel point il vivait dans une dépendance amoureuse sciemment entretenue, dopée, revendiquée… A quel point l’amour cela vous dupe, cela vous abîme! Nane ou Nancy, évoquant leur trente mois de passion commune, a confié à sa biographe qu’elle le trouvait trop demanding. Sur quelques photos, on lit dans son regard cette demande qui dépasse les mots, l’attente d’une chose immense et qui n’arrive jamais.

Il est temps que le Vieux maintenant disparaisse, il n’a que trop tardé. Le dernier d’une époque qui ne se retrouvera plus, il part sous les moqueries et sa couronne roule au caniveau. Le monde a tourné sur ses talons de verre, et la musique a changé. Au moins a-t-il pénétré la mémoire populaire où sa vie se prolonge pas ses chansons, ses poèmes. Tout le monde connaît quelques chansons tirées de Castille, et qui les écoute sans trembler? J’en parlais un jour avec un ancien camarade de l’UJC-ML, qui me plaisantait sur mon goût: – Quoi, Castille, ce faux derche? – Peut-être mais… tu as pris le temps d’écouter ses chansons? – Ah les chansons, elles me font chialer! 

Daniel Bougnoux

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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 13:05

J’ai un fort penchant pour l’œuvre de Jean-Louis Beaucarnot (link). Dans son Entrons chez nos ancêtres, que je viens de lire en poche, il évoque un problème qui, en fait, titillait mon inconscient depuis toujours : l’objet de la prière du couple de paysans de L’Angelusde Millet. Une foultitude d’autres inconscients que le mien ont été stimulés par cette posture. On compte en effet des milliers de caricatures et de détournements d’un tableau qui a acquis depuis longtemps le statut d’icône populaire. Par exemple celle-ci de Lesueur Christin, dénommée En attendant le printemps,

 

http://kicswila.pagesperso-orange.fr/clin-oeil/angelus_lesueur.jpg


 

ou celle-ci de Jean-François Batelier :

 

http://www.rirenvert.org/wp-content/uploads/2011/02/angélusweb1.jpg


 

L’Angélus est une prière récitée trois fois par jour, à six heures, midi et 18 heures (vu la lumière qui baigne le tableau de Millet, on peut penser qu’il s’agit de la prière de fin de journée). Cette prière tire son nom de son premier mot en latin : 

 

Cette prière est récitée trois fois par jour, à six heures, à midi et à dix-huit heures, mais cet horaire peut varier selon le travail et les régions. À ces heures, on sonne une « cloche de l'angélus ». À noter qu’en Irlande, la chaîne de télévision publique diffuse quotidiennement cette cloche à 18 heures.

La prière tire son nom de son premier mot latin, « Angelus Domini nuntiavit Mariæ » (L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie).

 

Millet a évoqué son tableau en ces termes : « L'Angélus est un tableau que j'ai fait en pensant comment, en travaillant autrefois dans les champs, ma grand-mère ne manquait pas, en entendant sonner la cloche, de nous faire arrêter notre besogne pour dire l'angélus pour ces pauvres morts ». Ce qui signifie que le rythme de la vie paysanne est peut-être aussi important que la religiosité du monde rural dans ce tableau. En 1938, Salvador Dali, lui-même profondément catholique (royaliste et franquiste, mais ceci est une autre histoire), consacra un livre (que je n’ai pas lu) à ce tableau : Le Mythe tragique de l'Angelus de Millet. Citée par Beaucarnot, la thèse de Dali est que les paysans en prière se recueillent en fait devant un cercueil d’enfant. En 1963, à la demande de Dali, Le Louvre accepta de radiographier l’œuvre, et l’on découvrit, sous le panier, un caisson noir de la taille d’un cercueil de petit enfant.

 

Dali détourna Millet à deux reprises, avec L’Angélus architectonique de Millet :

 

http://www.sommeil-mg.net/spip/local/cache-vignettes/L291xH394/Salvador_DALI_L_Angelus_architectonique_de_Millet_1933-14237.jpg

 


et Réminiscence archéologique de L’Angélus de Millet :

 

http://cache2.allpostersimages.com/p/LRG/7/772/7OBI000Z/affiches/dali-salvador-reminiscence-archeologique-de-l-angelus-de-millet.jpg

 


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21 octobre 2012 7 21 /10 /octobre /2012 05:49

http://en.cubafiesta.net/upload/nicolas%20guillen01.jpgNicolás Guillén est né le 10 juillet 1902 à Camaguëy et est mort le 16 juillet 1989 à la Havane. Fils d’un imprimeur, il fit des études de droit, devint avocat, puis journaliste.


Guillén s’inscrit dans le mouvement de rénovation artistique du début du XXème siècle. Il a inventé, sous l'influence de la négritude francophone et de la “ Renaissance de Harlem ”, une poésie d'inspiration africaine et antillaise du nom de « négrisme » (« negrismo »). Il a mené toute sa vie une lutte contre l’exploitation et les injustices sociales. Son œuvre poétique questionne l’identité culturelle du Cubain, identité mêlant l’apport culturel des Indiens Siboney, habitant l’île avant l’arrivée des Espagnols, celui des esclaves noirs originaires d’Afrique de l’Ouest, et celui des descendants des colons espagnols. Il combattit en Espagne aux côtés des républicains, devint membre du parti communiste exerça les fonctions de directeur des archives folkloriques nationales cubaines. Sous l’ère Battista, il vécut en exil de 1954 à 1958.


Le poème qui suit est extrait de La Colombe au vol populaire.

 

Exil

 

Le fleuve

Coule circonspect ;

Onde civilisée

Qui salue en silence

En levant son chapeau.

Mon pays dans le souvenir et moi, à Paris, là cloué

Comme une tendre pipistrelle.

Je veux

Cet avion qui m’emportera :

Quatre moteurs,

Vol sans escale !

 

Le sang brille sur la poitrine

de ce nuage qui lentement

passe dans le ciel bas.

Vêtu de noir. Blessé

par quatre lames d’acier neuf.

Il vient de la mer des Antilles,

La mer pirate et cannibale,

La dure mère aux yeux avuegles

Et au sommeil assassiné.

Ah ! repartir avec ce nuage,

Ses quatre lames,

Son habit noir !

 

(Traduction : Claude Couffon)

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