Non, non ! Pas la fibre patriotique. La fibre optique. Être fibré, quoi.
Mon immeuble ayant été relié à la fibre au printemps dernier, un sémillant commercial travaillant
pour Orange déboule chez moi en juin dernier pour me proposer cette connexion moderne. J’accepte, tout en sachant que c’est moins cher ailleurs. Il faut dire que je suis un grand
sentimental : un des cousins de ma femme a été poussé au bord du suicide par ses petits chefs orangistes : ce dinosaure voulait continuer à travailler dans l’esprit du service
public et il cotisait à la CGT depuis trente ans. Rendez-vous est donc pris pour septembre. La veille du jour où le monde doit changer pour moi, je questionne quelques voisins qui ont déjà
accueilli les techniciens fibrants. L’affaire se présente mal : pour mon voisin immédiat, la connexion ne s’est pas faite, il a passé trois heures au téléphone (au 3900, qui n’est pas
un service d’Orange mais un service qui travaille pour Orange) avec un gusse complètement incompétent qui – à distance – a semé la panique dans son ordinateur. Une autre
voisine a viré le technicien au bout de dix minutes : il voulait faire des trous partout dans son petit bijou d’appartement pour faire passer les fils. Quant à mon octogénaire préféré
(86 ans), il a dû aller rechercher deux boxes chez un concessionnaire Orange (deux matinées perdues, une grosse fatigue) pour que cela
marche.
Exceptionnellement, j’eus affaire à un technicien d’Orange, un vrai, même s’il n’avait pas le
statut d’antan. Compétent, efficace, rapide, répondant précisément aux questions que je lui posais. Ma connexion fonctionna moins d’une journée. La box se mit à ramer avec une lenteur qui m’attrista, puis à répondre de manière intermittente. Je fis le 3900 et tombai sur un “ conseiller ” qui avait des qualités mais qui,
à l’entendre, ne connaissait pas grand-chose à la fibre. En outre, je pense qu’il ne disposait pas des bons boutons pour tester pleinement ma
box à distance. Il n’était pas clair, parlait dans sa moustache. L’énervement monta de part et d’autre, au point qu’il finit par me
dire : « Mais, Monsieur, vous ne comprenez rien à ce que je vous dis. » Effectivement, il m’avait demandé d’opérer des branchements qui me dépassaient complètement. Je luis
posai alors la question suivante :
— Seriez-vous capable de traduire d’anglais en français une scène d’une pièce de
Shakespeare ?
— …
— Moi, oui. Vous voyez, cher Monsieur, nous avons tous nos compétences. Vous c’est dans la
téléphonie, moi c’est dans l’anglais. Je ne vous demande pas de lire du Shakespeare dans le texte, ne demandez pas d’être technicien intérimaire chez Orange.
Bref, le bonhomme me proposa un numéro de service après-vente pour aller échanger ma
box contre une autre dans tel dépôt Orange. Comme j’avais bien savouré ma plaisanterie sur Shakespeare, je lui dis que j’étais paralysé des deux jambes
et que je ne pouvais pas me déplacer. Il hésita quelques secondes (était-ce du lard ou du cochon ?) et me dit que, dans ce cas, Orange avait un “ programme ” pour les personnes à
mobilité réduite. Je le rassurai en lui disant que je me débrouillerais sans ce “ programme ”. Et je me dis que si Darty, ou des entreprises de ce type, fonctionnait comme Orange, on
s’amuserait cinq minutes : je te livre un réfrigérateur, il tombe en panne au bout de deux jours, on te donne un bon pour aller toi-même en chercher un autre, et tu te
débrouilles.
Je n’avais donc plus qu’à perdre une demi-journée pour aller chercher une nouvelle boîte (la
défectueuse étant de marque Sagem, pour ne dénoncer personne à la Kommandantur). Une commerciale qui avait deux notions de technique me proposa de
paramétrer la nouvelle box, en me disant que cela me coûterait huit euros. Je fus à deux doigts de lui arracher un œil :
— Vous me livrez du matériel pourri, je dois me déplacer pour l’échanger et vous me demandez huit
euros pour une manipulation qui va vous prendre 15 secondes ?
La péronnelle se tourna vers son chef, constata que les autres clients avaient été très surpris par sa
proposition et me dit qu’on allait m’« offrir » ce service.
De retour chez moi après m’être farci les embouteillages toulousains, je branchai la
Livebox et constatai instantanément que cela ne marchait pas. Alors que j’avais bien précisé à la péronnelle que j’étais passé à la fibre, elle n’en
avait pas tenu compte dans son paramétrage. Le problème dépassait mes compétences : j’échouai, après une heure de tentatives infructueuses à corriger le paramétrage de la
box à partir de mon ordinateur. Avec mon téléphone portable (10 minutes d’attente, bonjour la note !), j’appelai de nouveau le 3900. J’eus la
chance de tomber sur un type compétent et qui connaissait l’univers Mac (ce qui n’est pas toujours le cas chez ce type de technicien) et qui m’aida à corriger tout cela.
Vingt-quatre heures après, tout baignait. La connexion était établie. Mais c'eût trop beau si l'histoire
s'était arrêtée là. Lorsque le technicien vous apporte une nouvelle box, une solution rationnelle, au service du "client" (il n'y a plus d'usager) serait qu'il nous débarrasse de la
vieille. Non, il faut enfoncer ce "client" jusqu'au cou. Et ça, Orange sait faire. Dans les jours qui suivent, le client reçoit donc une lettre assez comminatoire par laquelle il doit rapporter
l'ancienne boîte à une adresse qui lui est fournie. Dans mon cas, il s'agissait d'un certain Layani Samir, 306 route de Seysses à Toulouse. À deux pas de chez moi, donc. Seulement, qu'est-ce que
le "306 route de Seysses" ? Se trouvent à cette adresse : une superette Carrefour, cinq ou six commerces et une résidence d'environ 500 logements. Je me mis donc en quête de retrouver le dénommé
Layani Samir dans cet ensemble. Et, bien sûr, après avoir marché 45 minutes (j'ai actuellement une blessure au pied qui me rend la marche très douloureuse, mais pas l'écriture à
l'ordinateur), je ne le trouvai point. J'appelai donc le 3900. Je reprochai vertement à Orange de fournir des adresses aussi abracabrantesques. Au bout du fil, une péronnelle le prit de très haut
et, pendant que nous parlions, elle tapa "Layani Samir" sur Google et me dit qu'effectivement l'adresse était bonne. Je fis remarquer à la péronnelle qu'il me restait tout de même à trouver ce
Layani parmi 500 personnes. Elle eut le front de me répondre qu'en cherchant sur Google, elle avait "fait mon travail". Durant deux jours, j'ai désespérément tenté d'appeler Layani Samir à son
numéro : 0967139961 en attendant que quelqu'un veuille bien décrocher.
J'ai fini par trouver l'échoppe du Samir en question. Je lui ai rapporté le colis. Sur la lettre comminatoire
d'Orange, il était stipulé que : “ Le commerçant prendra votre colis et collera un reçu retour dont il vous remettra un double. ” Samir m'a dit qu'il ne donnait pas de double. Je lui ai répondu
que c'était très embêtant. Il m'a proposé de reprendre mon colis. De guerre lasse, je le lui ai laissé. Je lui ai tout de même demandé pourquoi le numéro 0967139961 ne répondait pas. Il m'a expliqué que son numéro ne marchait pas.
Donc Orange confie des missions commerciales à des zozos qui n'ont pas le téléphone ni les bons récépissés.
Au fait, le 3900 m’avait proposé, pour une deuxième installation de la box à domicile, un service
à 150 euros, ce que j’ai refusé (un prestataire privé m’aurait pris 100 euros ; 150 euros est du vol mais il faut bien rétribuer les actionnaires d'Orange). Par ailleurs, il y a sept ans, Orange
m’avait vendu une prestation dont elle savait – mais pas moi – qu’elle ne déboucherait sur rien. L’escroquerie consistait à me brancher la télévision sur une box
alors que mon appartement était situé 100 mètres trop loin par rapport au relais. Je pus rompre le contrat (tout de même !) et je me rendis chez Numéricable (mon
immeuble était câblé), où je n’ai jamais rencontré la moindre difficulté.
Nous sommes des centaines de milliers à avoir rencontré ce type de désagrément depuis que France Télécoms
est devenue une entreprise privée. Je propose ci-dessous des extraits d’un témoignage de Marie Guillaumet, une blogueuse qui souffrit d’autant plus qu’elle était une femme : (link).
Au hasard de mes recherches sur orange.fr, une vignette m’incitait à « tchater en direct avec un
conseiller ». J’ai testé, et ça a donné à peu près ça :
— Bonjour, j’ai plusieurs questions sur la fibre.
—
— Désolée, je ne maîtrise pas du tout la Fibre. Il faut les appeler au 0800 10 75 75 [Ce numéro
n’est rien d’autre que le 3900 avec un faux nez].
—
— Merci, au revoir.
—
[…]
J’ai été chaleureusement accueillie par le téléconseiller qui a pris ma commande. Par chaleureusement,
comprendre : accueillie ET draguée. « Vous faites quoi dans la vie ? Vous vivez avec quelqu’un ? » et autres questions déplacées dont je tentais tant bien que mal d’ignorer
les sous-entendus véhiculés par la voix doucereuse de mon interlocuteur.
Tout au long de la prise de commande, j’ai dû répéter et confirmer mes coordonnées – notamment mon adresse, ça
peut se comprendre – deux ou trois fois. J’avais bien précisé l’étage, l’escalier, les deux digicodes, ainsi que mes deux numéros de téléphone.
Je demandai si la souscription par téléphone permettait de bénéficier des mêmes ODR qu’en souscrivant sur le
site d’Orange. Le téléconseiller me répondit par l’affirmative, et qu’il allait m’envoyer les formulaires par courrier pour demander les deux remboursements en même temps que mon contrat.
Enfin, je lui demandai si je devais acheter les trois Liveplugs que j’avais repérées pendant ma prospection : là aussi, la réponse fut affirmative : il fallait bien que j’aie des Liveplugs pour relier mes différents
ordinateurs non wifi à la Livebox. Du coup, une fois raccroché, j’ai dépensé allègrement mes 129€ sur la boutique en ligne d’Orange pour acheter les trois Liveplugs. Je les reçus une semaine plus tard, mais décidai de ne pas ouvrir leur emballage avant que le technicien qui devait venir installer la fibre soit là.
Mon rendez-vous d’installation aurait lieu 10 jours plus tard – un mardi, évidemment, de 8h à 10h. Je
posai une demi-journée de congé. C’est toujours au client de se plier au planning du FAI, et non l’inverse ! (NB : c’est la même chose quand on se fait livrer par Ikea, qui ne livre jamais le
week-end.)
Je raccrochai le cœur un peu plus léger. La semaine suivante, à J-10 de l’installation, j’attendais patiemment
le contrat-papier que j’étais censée recevoir, signer et renvoyer à Orange. Je ne voyais toujours rien venir quand je reçus un appel d’une téléconseillère qui m’informait que mon adresse était
incomplète : il leur manquait le NUMÉRO de ma rue !…
Je le leur redonnais bien volontiers, un peu beaucoup surprise néanmoins que ma commande ait pu
être prise et validée sans cette information, que j’avais pourtant donné deux ou trois fois lors de la souscription par téléphone ! Je n’en revenais pas. D’ailleurs, je n’ai toujours pas
compris pourquoi le logiciel du call center d’Orange ne rende pas obligatoire le champ « Numéro ». La téléconseillère me rassura en me disant
que ça ne changeait rien : le rendez-vous d’installation de la Fibre aurait bien lieu le mardi suivant, mon contrat allait bien m’être envoyé, et tout serait parfait dans le meilleur
des mondes.
Deux jours passèrent. Puis trois, puis quatre. J-4 avant le rendez-vous d’installation, je n’avais toujours pas
reçu le contrat. Je commençais à stresser. Je décidai donc de rappeler Orange pour vérifier qu’ils avaient bien toutes les informations sur mon compte. Résultat : il leur manquait
toujours le numéro de ma rue !! Je dus le redonner pour la énième fois, assez irritée. Cette fois, on me garantit que c’était bon, ils avaient bien toutes les informations nécessaires pour que
l’installation se déroule sans encombre. Le surlendemain, je reçus le contrat, que je renvoyai signé dans la foulée.
Et voilà, nous y étions. LE Mardi Matin De L’Installation De La Fibre. Prête pour 8h, heure officielle du début
de l’installation, je reçois au bout de 20 minutes un appel du technicien qui, je vous le donne dans le mille !, n’avait pas les digicodes !! C’est vous dire si l’information passe bien entre les
différents services d’Orange et leurs prestataires.
Une fois arrivé, il a longuement étudié la configuration de notre appartement pour savoir où il allait percer.
Je me doutais bien qu’il y aurait des travaux, mais je n’imaginais pas qu’il devrait percer un trou dans le mur séparant mon appartement du couloir, avec une perceuse d’enfer qui a fait un raffut
terrible, au point que ma voisine septuagénaire sortit pour demander ce qui se passait. Malaise. Le technicien me raconta que pas mal de clients Orange chez qui il allait installer la Fibre se
désistaient quand ils apprenaient qu’il devait percer un trou. Cela peut se comprendre, puisqu’à aucun moment, sur le web ou par téléphone, Orange ne nous informe que cela aura lieu. Orange parle
d’« installation » sans détailler ce qui va concrètement se passer. Or, si travaux il y a, il faudrait quand même prévenir pour que les clients ne soient pas surpris, qu’ils aient le
temps de prévenir le voisinage, et surtout qu’ils n’abandonnent pas la souscription à cause d’une info qui n’est jamais donnée !
La fibre, c’est réellement une fibre, c’est-à-dire un fil physique qui doit passer depuis la cave où la
réception fibre se fait, via la cage d’escalier à travers différents boîtiers, jusque chez vous.
L’avantage, c’est que j’ai eu le choix d’installer la Livebox où je voulais. Jusqu’à présent, mon ancienne Neufbox était située dans la chambre, ce qui explique que j’avais besoin de
Liveplugs pour faire circuler le réseau jusqu’au salon, sans fil. Du coup, comme c’est surtout dans le salon que j’utilise Internet, le technicien y a
installé ma nouvelle box. Les ordinateurs de la chambre ayant une carte wifi, les Liveplugs étaient, finalement, bien inutiles. J’ai donc dépensé 129€
pour rien.
Comme je n’avais pas ouvert les emballages, et que ma commande avant moins de 15 jours, j’ai pu tout renvoyer à
Orange et me faire rembourser assez rapidement.
Ah, j’oubliais un « détail » : le technicien aurait dû être deux. En effet, son
collègue ayant eu un empêchement, il n’avait pu être sur place à 8. Il était prévu qu’il le rejoindrait et devait le rejoindre une à deux heures plus tard au plus tard. Or, vers 10h30, on
l’attendait toujours, et pour cause : c’est ce deuxième technicien qui avait la Livebox et le décodeur TV !…
Le premier technicien, quant à lui, n’avait que le boîtier qui permet de relier la fibre à la
box. Bref, on a attendu une bonne heure et demie avant qu’il appelle au secours un troisième type, qui a pu venir vers 12h45, armé de la
Livebox et du décodeur. Le temps d’installer tout ça, je leur ai demandé de bien vouloir configurer le wifi sur mon ordinateur portable (c’est compris
dans l’installation). Or, après quinze minutes de tentatives diverses, ils avaient juste réussi à déclencher un BSOD…
Maintenant que c’est fait, je suis très contente de la fibre. Effectivement, un fichier de 700 Mo se télécharge
en une dizaine de minutes. C’est très fluide par Ethernet, forcément ; par wifi ça fonctionne assez bien aussi, bien que le débit soit très aléatoire sur certains de nos ordinateurs.
Le seul problème, c’est qu’Orange a bridé pas mal de sites de téléchargement, dont Megaupload. Ce qui, au
demeurant, pose la question de la neutralité du net (pourquoi ne pas bloquer, de façon totalement arbitraire, certains sites politiques, par exemple ?).
Et puis, niveau service client, réponse aux questions, et installation, cela n’a pas été à la hauteur de mes
attentes. Toujours un peu le sentiment que c’est au consommateur de recouper les informations, de demander autour de lui, de rappeler plusieurs fois le service client Orange pour tenter de parler
à plusieurs téléconseillers et ainsi, d’obtenir une partie de la Vérité.
En outre, j’attends toujours le remboursement de 100€ qui m’est dû parce que j’étais déjà cliente
Orange mobile quand j’ai souscrit à la fibre Orange. Quant à la seconde ODR, je n’ai pu en profiter car il m’a été impossible de retrouver le PDF sur le site d’Orange, parce que, bien sûr, je
n’ai jamais reçu les formulaires que le premier téléconseiller m’avait promis de m’envoyer par la Poste.