Je suis en train de regarder sur Canal + cette série étasunienne qui m'a empêché de m'assoupir. Il s’agit d’une adaptation du roman de Dror Mishani The Missing File (Le dossier manquant), publié en 2001. Cette série policière, ayant pour héros récurrent l'inspecteur de police Avraham Avraham, est d'abord parue en hébreu à partir de 2011, avant d'être traduite en plus de 15 langues, dont l'anglais, le suédois, l'allemand et le français. Le premier titre de la série a remporté le prix Martin Beck du meilleur roman policier étranger publié en Suède.
Alors que son épouse, originaire de Pologne, enseigne à l’Université de Cambridge, Dror Mishani tenta d'y terminer sa thèse de doctorat, mais acheva plutôt l'écriture de son deuxième roman.
Le premier épisode de la série met en scène un inspecteur qui enquête sur un nouveau meurtre. On le voit, dans les tout premiers plans, s'incliner devant un cadavre et se mettre à prier le kaddish alors qu'il est interdit de réciter le kaddish si l'on n'est pas en présence de 10 hommes âgés de plus de 13 ans. Il s'agit du détective Avraham Avraham que ses proches appellent « Avi » comme Édouard devient Ted ou Robert devient Bob (ils ne peuvent pas s'en empêcher).
Le personnage principal de la série, Avraham, de la police de New York, est en effet un juif orthodoxe incarné par l'acteur israélien Jeff Willbush, ancien membre de la communauté Satmar de Jérusalem. Le scénariste n’est autre que David E. Kelley, l’un des plus côtés d’Hollywood (Ally McBeal).
Les sites Rotten Tomatoes et Metacritic ont accueilli cette série de manière assez mitigée.
Quelques mots sur les trois acteurs principaux. Jeff Wilbusch est né en novembre 1987 à Haïfa en Israël et a grandi dans la communauté hassidique juive Satmar à Jérusalem. L'une des croyances fondamentales qui distingue la secte Satmar – environ 60 000 personnes – est son opposition à l'État d'Israël. La secte croit que le peuple juif n’a pas vocation à retourner en Israël par la force mais qu'il est plutôt destiné à attendre l'intervention divine et le destin messianique. La langue maternelle de Wilbusch est le yiddish, comme pour ses 13 frères et sœurs. Il parle quatre autres langues : l'anglais, le néerlandais, l'allemand et l'hébreu. Son anglais étasunien est parfait.
Web Bush est secondé par l’actrice étasunienne Juliana Canfield, dans le rôle de Janine Harris. Elle est surtout connue pour son rôle de Jess Jordan dans la série Succession sur HBO et également pour avoir incarné Beth DeVille dans la série dramatique post-apocalyptique Y le dernier homme en 2021. C'est une mulâtresse issue d'une famille de la grande bourgeoisie qui a déjà une belle carrière dans le théâtre et le cinéma. Elle a reçu une nomination pour le Tony Award de la meilleure actrice dans une pièce de théâtre pour sa performance dans Stéréophonic en 2024. Auparavant, elle avait obtenu un baccalauréat ès arts avec spécialisation en anglais, puis un diplôme avec mention à l'université Yale en 2014. Elle a ensuite décroché un diplôme de la Yale School of Drama en 2017. Un de ses arrière-grands-pères était le richissime éditeur de livres Cass Canfield qui possédait entre autres la maison Harper. Soyons people : on a vu Juliana Canfield lors de l'été 2013 dans le bal des débutantes à Paris.
Ces deux policiers enquêtent sous l’autorité d’une commissaire jouée par Karen Robinson, une actrice noire possédant la double nationalité britannique et canadienne. Karen est née en Angleterre mais elle a grandi en Jamaïque avant de déménager en Alberta avec sa famille à l'adolescence. Très tôt, elle a exprimé ses goûts pour diverses formes artistiques : le chant dans diverses chorales, le théâtre, la poésie. Elle a étudié la communication et le théâtre au Mount Royal College de Calgary avant de travailler comme actrice professionnelle au début des années 90. Physiquement ce n'est pas du tout une beauté : on ne voit au premier regard… que son regard qu'elle nous transmet par des yeux exorbités, un peu des yeux de poisson. Le reste de la distribution est plus traditionnel, plus grand public, avec des acteurs blancs ou noirs que l’on pourrait rencontrer dans n’importe quelle autre série.
Cette série est très réaliste, avec un souci du détail dans toutes les scènes se déroulant dans un cadre policier.
Je donne ici un résumé des premiers épisodes de la saison 1. Apparemment il n’y aura pas de saison 2, pour des raisons que je ne connais pas.
L'inspecteur Avraham Avraham fait donc équipe avec Jeannine Harris pour enquêter sur la disparition de Vincent, un adolescent de 16 ans, semble-t-il sans histoire. Abraham envisage la possibilité d’une fugue avant d'apprendre que le jeune adolescent s'était disputé avec son père la veille de son départ. Le sac à dos et le téléphone du jeune homme sont retrouvés. Avraham n'écarte pas la piste de la fugue mais cela ne le satisfait pas. L’enquête patine. Le père de Vincent donne l’impression de freiner les efforts d’Avraham. Zack Miller, un voisin de la famille, a donné des cours de soutien au jeune homme pour l'aider à préparer son entrée à l'université. L’épouse de Zac fouille dans le carnet de son mari et trouve des textes décrivant le mal-être de l’adolescent, des informations que Zac a caché à la police. Le corps de Vincent est retrouvé dans la rivière, caché dans une valise. On apprend que l'adolescent a surpris son père en train d'abuser de sa petite sœur avant de mourir sous les coups de son géniteur, fou de rage. Il s’agit d’une mort sans l’intention de la donner.
L'inspecteur Columbo faisait semblant de ne rien savoir mais il savait tout, grâce à son intuition et à sa raison. Il ne cessait de gigoter et de grimacer alors qu'Avraham est hiératique, retranché derrière l'inexpressivité de son visage. Avraham ne sait rien mais il trouve, mu par une spiritualité très profonde et par son art de la parole : il envoute littéralement les personnes qu'il interroge et leur fait dire des mots, des phrases qu'elles ne soupçonnaient pas. En outre, il est un surdoué, heureusement contrebalancé par une coéquipière simplement intelligente, qui comprend au quart de tour, à laquelle les spectateurs peuvent s'identifier : les questions qu'elle lui pose sont celles que nous-mêmes lui poserions. The Calling reprend les thèmes habituels des série policières, mais en cassant les codes.
Son potentiel était énorme. On ne comprend pas pourquoi les diffuseurs (les producteurs également ?) ont décidé de ne pas tabler sur l'originalité des premiers – et derniers – épisodes.
PS qui n'a rien à voir :
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