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4 août 2025 1 04 /08 /août /2025 05:01

Le site Communistes revient sur les derniers propos du ministre des Affaires Etrangères Jean-Noël Barrot sur la situation au Proche Orient : « Le Hamas doit être désarmé et exclu durablement de toute gouvernance de Gaza et de la Palestine. » ; L’autorité palestinienne doit être profondément réformée et les pays arabes doivent normaliser leur relation avec Israël. ».

Ces deux phrases, selon Communistes, constituent la substantifique moëlle de l’interview de Barrot. Parlons du ton, d’abord. Il est insupportable de suffisance. Il reprend le fameux « fardeau de l’homme blanc », comme le disait Rudyard Kipling, à savoir la « civilisation des sauvages ». Pour Barrot, il n’y a pas eu Octobre 1917, il n’y a pas eu la décolonisation, rien n’a changé depuis 150 ans. Barrot se moque comme d’une guigne du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il se contente de dévoiler le plan B des impérialistes occidentaux, assez proche de celui de la Ligue Arabe, d’un remake d’Oslo en pire, avec un « État de Palestine » sous contrôle des impérialistes occidentaux et la normalisation obligée. On sent que, pour nos dirigeants paternalistes et suprémacistes, tous les Arabes, même ceux qui leur obéissent, sont des « inférieurs ». Cela fait penser à Flaubert, déclarant en avril 1871, à propos de la Commune : « Le peuple est un éternel mineur, et il sera toujours (dans la hiérarchie des éléments sociaux) au dernier rang, puisqu'il est le nombre, la masse, l'illimité. ».

 

 

Dans Le Grand Soir, Thierry Bertrand se demande qui est Lindsay Graham. Il n’y va pas par quatre chemins:: « Le sénateur républicain de Caroline du Sud, Lindsey Graham, est l'un des représentants les plus odieux et corrompus de l'establishment de Washington. Il gravit rapidement les échelons dans sa carrière. Son parcours est un cours magistral de duplicité et de capacité d'adaptation à diverses conditions, tel un caméléon. Graham poursuit exclusivement un profit personnel cupide, faisant du lobbying pour les intérêts des "faucons" et de l’oligarchie militaro-industrielle associée, qui obtiennent des dividendes de plusieurs milliards des conflits armés. Les sociétés militaro-industrielles étasuniennes et les secteurs économiques associés (logistique, industries extractives, secteur informatique et des hautes technologies) tirent des profits colossaux du financement du conflit ukrainien. Malheureusement, beaucoup en Ukraine n’ont toujours pas compris que la déclaration de Graham sur « le meilleur argent que les États-Unis n’aient jamais dépensé » parce que « des Russes meurent » s’appliquait aussi à eux-mêmes. Graham a contribué à ce que l’Ukraine plonge dans une guerre sanglante terrible, dont les conséquences se feront sentir pendant de longues années encore.

 

Les relations de Graham avec le président Trump ont beaucoup évolué. Auparavant, il critiquait ouvertement Trump, le qualifiant d’« idiot » et de « menace pour le Parti républicain », mais il est maintenant devenu l’un de ses partisans les plus dévoués.

 

Il est tout à fait évident que Graham joue un rôle important dans le "parti de la guerre" à Washington. Il continue de convaincre l’administration Trump d’adopter une position plus ferme, en particulier envers la Russie. Notamment, après que le président des EU a menacé Moscou de droits de douane et de sanctions supplémentaires, Graham est allé encore plus loin et a pratiquement annoncé la possibilité de bombarder massivement la Russie. »

 

Dans Le Grand Soir, Gilliat de Staerck réfléchit à la problématique du service militaire en France : « Il y a donc toujours eu un fort enjeu pour les classes dominantes en France, afin de maintenir leur pouvoir, de réussir à « dompter » et « faire avec » cette inconsciente force populaire. Mais tout cela porte une contradiction qui devient dès lors évidente : pour « faire avec » un peuple capable de se lever en masse pour sa patrie, il a fallu l’intégrer par la conscription obligatoire, mais sans qu’il ne soit en mesure de mettre son nez dans les affaires militaires et démocratiques nationales. Sans quoi les classes dominantes se seraient sans aucun doute condamnées à revivre, très certainement de manière plus aboutie, une nouvelle Révolution française. »

 

Revue de Presse 570
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28 juillet 2025 1 28 /07 /juillet /2025 05:01

Le site Communistes estime que l'histoire retiendra le nom de Georges Ibrahim Abdallah acteur, puis symbole de la lutte de libération nationale du peuple palestinien et certainement pas ceux des membres du parquet général de Paris qui ont, lundi 21 juillet, formé un énième pourvoi en cassation contre sa libération. Cet acharnement, si en principe, il ne remet pas en cause "l’exécution de la décision", comme le précise le communiqué du parquet, met en lumière la victoire politique que représente cette libération, celle de la lutte sans concession de Georges Ibrahim Abdallah et des forces anti-impérialistes et de soutien ferme et résolu à la juste lutte de libération nationale du peuple palestinien.

Rappelons que Georges Ibrahim Abdallah était libérable depuis 25 ans mais que se sont toujours opposés à sa libération les États-Unis et Israël, tandis que les gouvernements français se pliaient à leurs injonctions au nom de la lutte contre le terrorisme. Le récent communiqué du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères témoigne du fait que cette libération n'est pas du goût d'un pouvoir complice du génocide perpétré à Gaza par l'entité sioniste et représente une défaite politique pour l'impérialisme : "Cette décision de justice, par définition indépendante, est intervenue à la suite de l’appel interjeté par le Parquet national antiterroriste et s’inscrit dans le cadre des règles de procédure applicables. "

La déclaration du ministère qui engage l'État français, souligne sa solidarité avec les "victimes américaines et israéliennes", en fait des agents du Mossad israélien et de la CIA étasunienne et donc des combattants impérialistes et qualifie de "terroriste" l'action pour laquelle Georges Ibrahim Abdallah a été condamné en 1987, comme elle condamne aujourd'hui les actions de résistance du peuple palestinien.


Dans Le Grand Soir, Jacques-Marie Bourget revient sur la collaboration des capitalistes français avec Hitler, dès les années trente. Ce, à l’occasion de la réédition de l’ouvrage d’Annie Lacroix-Riz Industriels et banquiers français sous l’Occupation. 

Constatons, dit-il, que De Gaulle ne lui a pas facilité le travail, en 1945, en ordonnant une épuration légère afin que la France continue au plus vite d’exister et ne devienne pas un bantoustan américain. De la fin de la guerre à 1950 la Justice chargée de l’épuration n’était qu’une vaste blanchisserie. La majorité des industriels et banquiers, sauf quelques cas trop flagrants, sont sortis indemnes du passage devant les robes noires. Parfois sanctionnés mais vite amnistiés.

Or, dès les années 20 et 30, les entrepreneurs et financiers ont choisi Hitler et Mussolini, pour fuir le Front populaire et les cohortes Communistes.

Ce monde, dans une guerre qui vient, a déjà choisi la défaite. « Hitler va mettre de l’ordre en France », dit alors Georges Lang, imprimeur membre du Comité France-Allemagne fondé en 1935. Selon Annie Lacroix-Riz : « On ne résiste pas à l’occupant qu’on a appelé et installé ». Souvent avec un tempo plus rapide que les politiciens qui vont finir par collaborer, les industriels et banquiers crient déjà « A Berlin, à Berlin ! ». On demande l’abolition de droits de douanes puisque le projet est de construire un nouveau capitalisme façon Europe Nouvelle.
Les puissants de l’économie française rêvent d’une installation durable. Mais certains pragmatiques, eux, songent d’abord à spolier les « biens juifs ». Exemple dans une lettre que Pierre Taittinger adresse à Darquier de Pellepoix dans laquelle il se plaint de ne pas avoir assez de « biens juifs » à « administrer ». Donc de la crapulerie ordinaire. Pour ceux qui ont collaboré (la majorité), l’Occupation a été une ère fructueuse : le capital des grandes banques a doublé ou triplé. Les valeurs boursières de nombreuses entreprises ont grimpé, atteignant jusqu’à six fois leur valeur d’avant-guerre. Le beurre et l’argent du beurre. Certes, après guerre, il y a eu des nationalisations, comme celle de Renault, mais rien de grave pour les capitalistes. Dans les coffres des banques dorment encore des euros qui sont des petits de l’argent bien sale, des fortunes de guerre.
Le plan de l’IG Farben à l’été 1940 consistait à « obliger l’industrie française à travailler pour la machine de guerre nazie », nous dit Lacroix-Riz. Quant au français Kuhlmann, un rapport indique qu’en août 1940, l’entreprise a proposé de « mettre son industrie tout entière au service de l’Allemagne pour renforcer le potentiel chimique pour la continuation de la guerre contre l’Angleterre. Annie Lacroix-Riz nous rappelle qu’IG Farben a financé la construction du camp de la mort Auschwitz III, avec l’argent où cousinaient marks et francs.
Ceux qui estiment qu’un tel livre va faire du foin, provoquer des divorces au motif que le grand père a payé notre château, en vendant du ZyclonB et de l’acier aux Allemands, se trompent. Annie Lacroix-Riz, pourtant femme qui transmet la vérité des archives, est assignée au placard par la nouvelle presse de propagande tenue par les Bolloré and Co. Surtout ne pas raviver les moments d’égarement. En rejoignant l’Elysée - par un train parti de Vichy - Mitterrand a été le premier à assigner le monde intellectuel et la presse au silence. Sifflé la fin de l’histoire avec Bousquet en chef de gare.
 
Revue de Presse 569

DE LA POESIE A L'ÉTAT PUR : les perles du Bac :

https://www.youtube.com/watch?v=pEC8liISUEE

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30 juin 2025 1 30 /06 /juin /2025 05:01

Dans Le Grand Soir, Philippe Arnaud décrypte (comme on doit dire maintenant) la partie du Journal télévisé de France 2, présenté par Laurent Delahousse, consacré à l'attaque étasunienne contre l'Iran :  

« Rien ne pouvait se faire, a expliqué Delahousse, sans le travail, au préalable, finalement, des Israéliens, sur le terrain ». Dans ce contexte, le terme "travail", a une connotation éminemment positive. Delahousse en parle comme d’une opération pacifique, d’une opération de génie civil de grande envergure, comme celle du viaduc de Millau, où il aurait dit : « Ce grandiose ouvrage d’art n’aurait pas pu se faire sans le travail, auparavant, des géographes et des géologues ». Pour Delahousse, construire une infrastructure routière ou écraser un pays rebelle, c’est du pareil au même.

Delahousse cautionne les mots du général d'aviation Patrick Dutartre, invité en plateau : « les Israéliens avaient fait un travail énorme de suppressions, si vous voulez, des menaces [..]. Mais, malgré ces précautions les Américains avaient mis tout en œuvre, au cas où, pour détruire ces systèmes [i.e. : anti-aériens] et ils ont été très peu agressés [sic !]. Quelle inversion ! Voilà une hyper-puissance, disposant peut-être d’un rapport de force de 10 000 pour 1 à celle d’un pays qui ne lui a rien fait, qui ne représente aucune menace pour elle, qui l’attaque sans préavis, et ce serait-elle, cette hyper-puissance prédatrice, qui serait la victime, qui serait l’agressée ?

 

Toujours dans Le Grand Soir, Yorgos Mitralias rappelle que la famine, comme arme de génocide à Gaza, avait déjà été utilisée en Union Soviétique durant le Deuxième Guerre mondiale : « Force est de constater que le présent recours de l’État d’Israël a la famine comme arme de guerre contre la population de Gaza ressemble comme deux gouttes d’eau au « Hungerplan » (Plan de la faim) mise en œuvre par les nazis en Union Soviétique en 1941-1942, afin d’éliminer 30 millions de citoyens soviétiques. Dans les deux cas, même déshumanisation préalable des victimes, même volonté de ceux qui se posent en « Herrenrasse » (race des maîtres) d’exterminer leurs « Untermenschen » (sous-hommes) slaves et juifs alors, et palestiniens aujourd’hui, et même projet de vider le territoire de ses populations indigènes afin de l’occuper et le coloniser. Et à Goering qui déclare à Galeazzo Ciano, ministre des affaires étrangères de Mussolini, que « de 20 à 30 millions de personnes mourront de faim cette année en Russie. Et c’est sans doute très bien ainsi, car certains peuples doivent être décimés » fait écho le ministre israélien Bezalel Smotrich qui déclare sans ambages qu’il serait « justifié et moral de faire mourir de faim 2 millions de Palestiniens à Gaza. » »

 

Le World Socialist Website dénonce l’acte de censure politique par lequel la Deutsche Bank a résilié le compte de l'éditeur Mehring Verlag, la maison d'édition en langue allemande du World Socialist Website. Mehring Verlag est le principal éditeur des œuvres de Léon Trotski en Allemagne.

Le livre de Christoph Vandreier, Why Are They Back ?, publié en 2018, explore la résurgence du fascisme en Allemagne et reste d'actualité compte tenu de la montée en puissance du parti d’extrême droite AFD (Alternative pour l'Allemagne).

Depuis quelque temps, les banques allemandes ciblent les voix dissidentes en fermant leurs comptes. Si cette pratique visait initialement l'extrême droite, les fanatiques du complot et les groupes anti-vaccins, elle touche désormais de plus en plus les organisations de gauche, socialistes et pacifistes.

Les banques travaillent en étroite collaboration avec l'agence de renseignement intérieure (Verfassungsschutz), qui a été dirigée pendant des années par Hans-Georg Maaßen, une figure d'extrême droite. Les organisations dénoncées par cet organisme opaque et irresponsable comme étant « d'extrême gauche » – pour s'être opposées à l'austérité, à la guerre et au capitalisme – risquent de perdre la base financière nécessaire à leurs activités et à leur subsistance.

La Deutsche Bank, responsable de la fermeture du compte, était profondément complice des crimes nazis : elle a financé Auschwitz, soutenu la préparation de la guerre du Reich et les projets des SS, et tiré profit du commerce de l'or volé aux Juifs assassinés. Elle a également participé à l'« aryanisation » de la maison d'édition Ullstein, dont les livres – notamment le classique anti-guerre d'Erich Maria Remarque, Á l’Ouest, rien de nouveau – ont été interdits et brûlés par les nazis. Après la guerre, les Alliés ont prévu de démanteler la Deutsche Bank et de poursuivre ses dirigeants pour crimes de guerre. Mais le capital allemand a prévalu, et la banque a été rétablie en tant qu'institution financière nationale dirigée par des gestionnaires liés aux nazis.

 

Revue de Presse 565
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26 juin 2025 4 26 /06 /juin /2025 05:01

En 1942, Robeson décida de ne plus jouer au cinéma tant que des rôles humiliants seraient réservés aux acteurs noirs. En 1943, il fut le premier acteur noir à jouer le rôle d’Othello dans un théâtre de Broadway. Durant 296 représentations, un record qui tient toujours.

 

Á la même époque, Robeson prit position en faveur de Mao Tse Toung. Le militant progressiste chinois Liu Liangmo lui enseigna la chanson patriotique “ Chee Lai !” (Soulève-toi). Il l’interpréta dans un théâtre de New York et l’enregistra en anglais et en Chinois en 1941. “ Chee Lai !” devint l’hymne national de la République populaire de Chine après 1949.

 

Après le lynchage de quatre Noirs en Géorgie en juillet 1946, Robeson rencontra le président Truman et l’avertit que si ces pratiques continuaient, les Noirs se défendraient par eux-mêmes. Truman répondit que l’heure n’était pas venue de légiférer. Robeson fonda la Croisade américaine contre le Lynchage et exigea du Congrès qu’il vote de nouvelles lois sur les droits civiques.

 

Dans le même temps, il prôna une alliance entre les syndicats et le Parti communiste des États-Unis (dont il ne fut jamais membre). Il fut néanmoins convoqué par la Commission sénatoriale et refusa de dire s’il était membre ou non du parti : « Certains des Américains les plus brillants et les plus distingués vont aller en prison car ils refusent de répondre à cette question. Je suis prêt à les rejoindre si nécessaire. »

 

Pendant toute la guerre froide, Robeson ne se départit jamais de son soutien à l’URSS. Il déclara au Congrès mondial des partisans de la paix de Paris en 1949 : « Nous ne ferons pas la guerre à l’Union Soviétique. Nous nous opposons à ceux qui veulent faire renaître l’impérialisme allemand et instaurer le fascisme en Grèce. » Cette prise de position fut censurée aux États-Unis, y compris par de nombreux organes de presse noirs dont le grand magazine politique The Crisis.

 

Robeson s’opposa à la participation des États-Unis à la guerre de Corée et aux menaces de son pays contre la Chine populaire. Le Département d’État exigea alors qu’il remette son passeport aux autorités, ce qu’il refusa. Le motif mis en avant par l’administration étant que « ses critiques répétées du traitement des Noirs aux États-Unis ne devaient pas être connues à l’étranger ».

 

En 1956, Robeson fut convoqué par le Comité des activités anti-américaines où il lui fut demandé s’il était membre du Parti communiste. Il refusa de répondre. Á la question de savoir pourquoi il ne vivait pas en Union soviétique, dont il partageait l’idéologie, il répondit : « Parce que mon père fut un esclave et parce que mon peuple est mort d’avoir bâti les États-Unis, je vais rester ici et aucun fasciste ne pourra m’en faire partir. » Les autorités décidèrent alors de ne plus distribuer ses productions artistiques.

 

Lorsque Robeson publia son autobiographie Here I Stand (Me voici) en 1958, aucun quotidien ou magazine “ blanc ” n’en fit mention alors que l’ouvrage fit l’objet de critiques favorables en Grande-Bretagne ou au Japon.

 

Dès qu’il put récupérer son passeport, Robeson s’envola pour le Royaume-Uni et, en avril 1959, il joua à Stratford-upon-Avon dans un Othello mis en scène par Tony Richardson. Au mois d’août, il partit pour la Russie et chanta dans le stade Olympique de Moscou où il obtint un succès phénoménal. Puis il alla se reposer en compagnie de Nikita Khrouchtchev à Yalta. Le 11 octobre 1959, il fut le premier chanteur noir à se produire dans la cathédrale Saint-Paul de Londres. En 1960, il donna ce qui serait son dernier concert en Grande-Bretagne pour recueillir des fonds pour le Mouvement pour la liberté des colonies. En octobre 1960, il fut le premier artiste de renom à se produire dans le désormais célèbre opéra de Sidney. En Australie, il réaffirma son soutien au marxisme-léninisme et il dénonça les conditions de vie infligées aux Maoris et aux Aborigènes.

 

En 1961, il eut de sérieux problèmes cardiaques tandis que sa femme souffrait d’un cancer. Il retourna en URSS et tenta de se suicider dans sa chambre d’hôtel. Il informa son fils qu’il souffrait de paranoïa. De retour à Londres, il accepta une thérapie par électrochocs. En août 1963, comme sa condition continuait de se détériorer, il accepta une hospitalisation à Berlin-Est. Sa santé s’améliora légèrement. Il retourna aux États-Unis en décembre et termina sa vie dans une solitude complète. Il souffrit alors de pneumonie et d’un blocage rénal.

 

Il lui fut proposé de soutenir le mouvement des droits civiques, mais à la condition qu’il critique l’Union soviétique, ce qu’il refusa.

 

Après la mort de son épouse, il vécut très discrètement à Philadelphie.

 

Il mourut le 23 janvier 1976. Il fut enterré au cimetière Ferncliff à Hartsdale dans l’État de New York. L’un des porteurs de son cercueil n’était autre que Harry Belafonte.

 

En Russie, une tomate porte le nom de Paul Robeson…

 

 

Une version de 1936 d’“ Ol’ Man River ” .

 

Paul Robeson (II)
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17 juin 2025 2 17 /06 /juin /2025 05:01

Propos recueillis en 2004 par Antony Burlaud, Savoir/Agir n° 54

 

Savoir/ Agir : Parler de ton parcours, c’est évoquer une vie d’intellectuel, et une pratique continue de l’écriture. Première question : ce statut d’intellectuel, cette familiarité avec (et ce goût de) la chose écrite, ont-ils été une conquête ou un héritage ?

Bernard Cassen : Pendant des décennies, j’ai effectivement passé beaucoup de temps à écrire : des livres, des articles, des préfaces, des traductions, des discours, des motions, des comptes rendus, des communiqués, et j’en passe… Très tôt, j’ai eu conscience du poids des mots, de leur capacité de structurer le réel ou de le faire émerger. J’ai pu voir à quel point la maîtrise de la langue était un outil inestimable dans les relations personnelles et sociales. Mais ce n’était pas ma motivation première : je prenais tout simplement plaisir à « habiter » la langue française. J’aimais les dictées et j’avais généralement un dictionnaire à portée de la main. Mon implication dans les combats pour le français et la francophonie vient donc de loin, du temps de l’école primaire !

Pour répondre plus directement à ta question, je dirais que mon rapport à l’écrit n’est pas un héritage familial, il s’est formé au fil des années. Ce n’est pas non plus une conquête au sens militaire du mot car, dans ce domaine, je n’ai jamais rencontré d’obstacle dans mon parcours.

Savoir/ Agir : S’il n’y a pas eu d’« obstacle » dans ton parcours scolaire et académique, il y a eu, assurément, des étapes. Peux-tu les rappeler ?

Bernard Cassen : Je suis titulaire du certificat d’études primaires élémentaires et d’un doctorat d’État en civilisation britannique. Entre les deux, j’ai passé le brevet, le bac, la licence, la maîtrise, le CAPES et l’agrégation d’anglais. Pourquoi le « certif » ? Dans les années 1950, c’était encore le diplôme terminal de la majorité des jeunes des milieux modestes. Pour les meilleurs élèves des écoles primaires, repérés par les instituteurs, il existait cependant une possibilité de continuer des études après l’obtention du certificat. C’était soit le lycée, auquel on pouvait accéder via le concours d’entrée en sixième, soit les écoles dites « cours complémentaires » qui prolongeaient les enseignements du primaire de la sixième à la troisième, mais avec un encadrement composé d’instituteurs triés sur le volet, et non pas de profs du secondaire. J’avais été reçu au concours, mais mes parents avaient dû renoncer à me faire entrer au lycée car ils n’avaient pas les moyens d’acheter les manuels de la classe de 6ème. Je me suis donc retrouvé dans le cours complémentaire de garçons Carnot à Argenteuil (Val d’Oise). À Carnot, j’ai eu la chance d’avoir des enseignants qui m’ont d’office inscrit au concours d’entrée à l’école normale d’instituteurs de Versailles. J’y ai passé trois ans : les classes de seconde, de première et de terminale, et j’ai obtenu le bac. Ensuite, j’aurais dû faire une quatrième année de formation professionnelle pour devenir instituteur. Là encore, je n’ai pas eu à me poser de questions sur mon avenir. Sans que je demande quoi que ce soit, ce sont les profs de Versailles qui m’ont exfiltré (avec une bourse d’études) vers une classe prépa au lycée Chaptal à Paris. Puis, j’ai suivi les cours d’agrégation à l’Institut d’anglais de la Sorbonne. Ma baraka ne m’a pas déserté : j’ai été reçu premier au concours d’agrégation en 1961, puis nommé au lycée Henri IV à Paris. Pas pour longtemps, car j’ai ensuite été nommé assistant à la Sorbonne en 1963, sans avoir fait acte de candidature. De l’école Carnot au Quartier latin, j’ai en quelque sorte été pris en charge par la main invisible de l’école républicaine qui m’a fait gravir sans encombre les premiers étages de l’ascenseur social. Ce qui me frappe rétrospectivement, c’est qu’à aucun moment je ne me suis préoccupé du « jour d’après » la réussite à un diplôme ou un concours.

Savoir/ Agir : Ce moment de la formation universitaire est-il aussi, pour toi, le moment de la formation politique ?

Bernard Cassen : Ma formation politique a commencé avant l’université, et sur le tas, à Argenteuil où j’habitais. Mon père, employé à EDF, était membre du Parti communiste et de la CGT. Il était également conseiller des Prud’hommes où il avait une réputation de « dur » face au patronat. Je le revois encore tenant chaque dimanche matin sa table de vente de L’Humanité dimanche près du marché. C’est dans ce contexte militant, plus que dans la lecture des classiques du marxisme, que s’est développée en moi une conscience de classe qui ne m’a jamais quitté. Ma relégation dans un cours complémentaire – alors que j’avais été reçu au concours d’entrée au lycée – ne pouvait qu’alimenter mon sentiment d’injustice ! Pour autant, vu mon parcours, j’aurais trouvé indécent de me la jouer damné de la terre.

À partir du milieu des années 1950, ma conscience politique s’est déplacée d’un anti-capitalisme surtout théorique (les Trente Glorieuses anesthésiaient les luttes sociales) à un anticolonialisme qui s’exprimait dans les campagnes pour la paix au Viet Nam et en Algérie.

Je n’ai jamais été porteur de valises, mais j’ai participé à la plupart des grandes manifestations pour la paix et contre l’OAS, y compris à celle du 8 février 1962 au métro Charonne où la police, sous les ordres du préfet Papon, massacra huit manifestants. J’ai eu une sacrée chance de ne recevoir qu’un coup de matraque ce soir-là…

De 1959 à 1961, pendant les trois années (de la licence à l’agrégation) où j’ai suivi des cours à la Sorbonne, j’ai été membre (disons plutôt simple cotisant) de l’Unef sans y exercer des responsabilités.

Savoir/ Agir : As-tu – comme ton père, et comme beaucoup d’intellectuels de gauche à l’époque – pris ta carte au PCF ?

Bernard Cassen : Non. On m’a souvent demandé pourquoi je n’avais pas adhéré au PC. D’une part, je n’étais pas d’accord avec son alignement sur l’URSS. D’autre part, j’étais allergique au centralisme démocratique et à la discipline de parti, et j’en aurais vraisemblablement été exclu très vite. Le statut informel de « compagnon de route » du PC me convenait parfaitement. J’étais dans la position confortable de celui qui peut choisir ses engagements, tout en étant adossé à la capacité de mobilisation du parti. Mais j’ai toujours eu une grande admiration pour les militants du PC, pour leur courage, leur sérieux et leur abnégation.

Savoir/ Agir : À la fin des années 1960, tu vas jouer un rôle clef dans la création de l’université de Vincennes. Comment le jeune angliciste que tu étais se retrouve-t-il embarqué dans cette aventure ?

Bernard Cassen : Aucune université n’a été aussi médiatisée que celle de Vincennes, tant elle a multiplié les innovations en tout genre. Sa création elle-même a dérogé aux règles administratives et comptables les plus élémentaires et donné pendant quelques mois de considérables pouvoirs à trois enseignants qui se trouvaient être « the right people in the right place and at the right time ». Il s’agissait de trois anglicistes : Pierre Dommergues, familier des universités américaines, Hélène Cixous et moi. On était en juillet 1968, juste après Mai. Le pouvoir gaulliste, craignant une rentrée chaotique, avait décidé de faire quelque chose pour les universités. Le ministre de l’éducation nationale, Edgar Faure, avait constitué une commission chargée de lui faire des propositions, et dans laquelle figurait le doyen de la Sorbonne nouvellement élu, Raymond Las Vergnas, par ailleurs angliciste lui aussi. La commission avait débouché finalement sur la création de deux universités à part entière : les futures Dauphine et Vincennes, cette dernière bénéficiant du statut de « Centre expérimental ». Las Vergnas fut nommé par le ministre chargé de mission pour le créer. Vu la charge de travail que cela représentait, Hélène Cixous, très proche de lui, lui suggéra de se faire représenter à la commission par Pierre Dommergues dont elle était également très proche. À son tour, Pierre me proposa de me joindre à lui pour cette aventure. Ce que j’acceptai. C’est ce trio ne détenant aucun mandat officiel et s’abritant derrière celui de Las Vergnas qui est devenu l’interlocuteur du ministère, des prestataires de services et des entreprises opérant jour et nuit sur le chantier de la future université dans le bois de Vincennes. En fait, Hélène n’était pas intéressée par les questions d’intendance et se cantonnait aux contacts intellectuels, plus valorisants pour elle. Pierre et moi avons ainsi été amenés à décider de tout, de la taille des amphis à l’implantation de la crèche. Nous prenions des engagements financiers considérables en ne sachant pas si nous pourrions vraiment les tenir. Évidemment, nous activions aussi nos réseaux, y compris, dans mon cas, les réseaux politiques et syndicaux.

Savoir/ Agir : Racontée ainsi, la chose semble relever du miracle. J’imagine pourtant qu’il y a eu des difficultés…

Bernard Cassen : En effet, fin août, le projet Vincennes fut à deux doigts de capoter. La raison ? La rupture intervenue entre mes deux collègues. En guise de représailles, Hélène demanda à Las Vergnas de nous retirer le mandat officieux que nous nous étions attribué. Le coup était rude, nous n’étions plus rien dans le dispositif Vincennes. Surtout, c’est le projet qui, sans notre « force propulsive », risquait de se banaliser, de perdre son caractère expérimental et même d’être placardisé. Le ministère avait compris que la rentrée ne serait pas nécessairement chaude et qu’il pourrait peut-être se dispenser de créer une université en catastrophe.

J’ai pensé qu’il y avait quand même une carte à jouer : rechercher un accord avec le PC pour sauver la Vincennes que nous étions en train de bâtir. Tout reposait sur Las Vergnas, qui avait absolument besoin du soutien du parti (via le Snesup) pour rester doyen de la Sorbonne face aux mandarins de droite qui le détestaient. Les bases d’un accord étaient donc simples : le Snesup confirmait son soutien à Las Vergnas qui nous remettait en selle. En contrepartie, nous faisions nommer une douzaine de profs communistes dans la nouvelle université. Chacun a respecté sa parole et, au grand dam d’Hélène, Pierre et moi sommes revenus à la barre. L’affaire fut bouclée en moins d’une semaine. Sans la confiance personnelle dont je bénéficiais à la direction du PC, les choses auraient été plus compliquées. Bien qu’elle n’ait pas hésité à mettre en danger le projet Vincennes pour des raisons strictement personnelles, Hélène Cixous en a constamment revendiqué la paternité exclusive. Ni Pierre de son vivant, ni moi n’avons jamais voulu la suivre sur ce terrain.

Savoir/ Agir : Il y a, autour de Vincennes, toute une légende. Toi qui y as enseigné, quel souvenir en gardes-tu ? Et quels bilans – intellectuel, politique… – en tirerais-tu ?

Bernard Cassen : Pendant une quinzaine d’années, j’ai fait partie des instances de gestion de l’université, en même temps que du département d’études des pays anglophones initialement appelé département d’anglo-américain. Accepter une responsabilité de direction au niveau central relevait un peu du sacerdoce. Il fallait par avance se préparer à des interventions intempestives d’étudiants dans les cours, des occupations de locaux, voire des séquestrations. Chez les profs, le clivage principal opposait deux ensembles : d’un côté ceux que l’on appelait les « gauchistes » (mais dont seulement un très petit nombre étaient des militants d’extrême-gauche) rejoints par des enseignants de droite ou de gauche soudés par l’anticommunisme ; d’un autre côté, le reste des profs, plus nombreux, dont les communistes. Je me situais dans cet ensemble. Chez les étudiants, le ton était donné par les maos de la Gauche prolétarienne, experts en manipulation des assemblées générales. Tout cela ressemblait à du théâtre avec ses rituels, et il ne fallait pas prendre au premier degré les affiches du style « À mort Cassen ». En fait, il y a eu très peu de violences physiques à Vincennes.

Il est difficile de faire un bilan global des expériences de ce centre expérimental. Les méthodes pédagogiques variaient d’un département à l’autre et également d’un prof à un autre. Mais quelle que soit leur discipline, ils ont tous immédiatement vu la différence avec les autres universités : ils avaient devant eux un public nettement plus âgé que celui qu’ils avaient pu connaître auparavant. Il comprenait en effet beaucoup de salariés, dont certains non-bacheliers. Outre cette conquête qui s’est généralisée par la suite au niveau national, que retenir de mes années Vincennes ? Principalement, une atmosphère de liberté, des rapports moins formels entre étudiants et enseignants, la présence de nombreux collègues étrangers qui ont fait de Vincennes une université-monde. J’ai cependant regretté le comportement de certains profs, parmi lesquels des stars de leur spécialité. Dans les années 1970, il s’en est trouvé un petit nombre pour cautionner le trafic de drogue dans les amphis et pour inscrire dans la liste des reçus à une unité de valeur les noms d’étudiants qu’ils n’avaient jamais vus. J’ai toujours eu horreur de la démagogie, quitte à me faire huer dans une assemblée générale.

Savoir/ Agir : Pendant ces années 1960 et 1970, tu enseignes l’anglais, mais tu développes une autre passion : l’espagnol. D’où te vient ce goût, qui va en quelque sorte « t’arrimer », et pour longtemps, à l’Amérique latine (hispanophone, mais aussi lusophone) ?

Bernard Cassen : En 1958, j’ai commencé à apprendre l’espagnol dans la rue, d’abord en Espagne, puis en Amérique latine, muni d’un dictionnaire et d’une grammaire. J’avais, en effet, à me présenter à une épreuve de deuxième langue pour boucler ma licence d’anglais et j’avais décidé d’aller passer le mois de juillet en Espagne. Je m’étais mis sur les traces d’Ernest Hemingway après avoir vu le film tiré de son roman Le Soleil se lève aussi, qui se déroule pendant les fêtes de la San Fermin à Pampelune. Je suis ainsi entré dans l’univers de la langue espagnole ; je m’y suis senti immédiatement chez moi.

J’ai fait mon premier voyage en Amérique latine en 1971 : un périple de deux mois dans une dizaine de pays, qui avait commencé par le Mexique, pour se terminer en Uruguay. J’étais alors président d’une association d’échanges internationaux, Inter-Échanges. Sous l’empire de la nécessité, j’ai dû mobiliser ce qui restait de mes compétences en espagnol et je m’en suis tiré finalement pas trop mal.

Plusieurs facteurs jouèrent un rôle important. Le premier est la proximité culturelle entre une partie de l’Espagne et le Sud-Ouest français. Mes parents étaient landais et j’avais de la famille à Mont-de-Marsan, à Dax, à Tarnos, à Hendaye et à Bayonne, ma ville de prédilection avec Biarritz où je passe régulièrement une partie de mes vacances. Dans les années 1950, tous (y compris moi) parlions encore ou comprenions ce que nous appelions le patois, en fait une variété du gascon (rien à voir avec le basque).

Savoir/ Agir : Je suppose qu’il y avait aussi, dans ton tropisme sud-américain, une composante politique.

Bernard Cassen : Bien sûr. Mon rapport à l’Amérique latine s’est construit largement à travers le prisme de problématiques politiques françaises. Exclue du pouvoir à Paris depuis la création de la Vème République, la gauche du Programme commun avait reporté ses espoirs sur la victoire dans les urnes de Salvador Allende et de l’Unité populaire au Chili. Le 11 septembre 1973, le coup d’État du général Pinochet la plongea dans un véritable deuil qui se prolongea pendant plus d’une décennie avec les dictatures militaires en Argentine et en Uruguay. Il a fallu attendre les années 2000 pour que la gauche latino-américaine redevienne porteuse d’espoir avec, comme figures emblématiques, Lula au Brésil, Evo Morales en Bolivie, le sous-commandant Marcos au Mexique, Rafael Correa en Equateur, Hugo Chavez au Venezuela et Fidel Castro comme référence commune. J’ai eu le privilège de les rencontrer et je ne m’étonne pas que les États-Unis aient voulu leur peau, notamment en ce qui concerne ces deux visionnaires hors du commun qu’ont été Fidel et Chavez.

Comme avec Salvador Allende et l’Unité populaire, le débat politique français a largement puisé dans le répertoire des expériences latino-américaines. À droite, où les mots « Venezuela » ou « Chavez » ont été érigés en épouvantails, mais aussi dans une partie de la gauche qui a fait de même et rendu les armes. Dans leur grande majorité, et parfois sans craindre les fake news, les médias ont relayé les campagnes de déstabilisation concoctées à Washington contre les gouvernements progressistes du sous-continent. Dans la période récente, ils ont adapté leur vocabulaire au contexte français en faisant un large usage du qualificatif fourre-tout – et infamant à leurs yeux – de « populisme ». Déconstruire ce bourrage de crâne est une tâche à laquelle, avec Ignacio Ramonet, avec Maurice Lemoine, ancien rédacteur en chef du Diplo, avec Christophe Ventura, entre autres, j’ai participé en veillant à rester dans les clous de l’honnêteté intellectuelle.

J’ajouterai, pour finir d’expliquer mon « tropisme » latino-américain, un autre facteur, l’Espagne : je vivais les victoires remportées par les gauches latino-américaines, même transitoires, comme autant de revanches rétrospectives sur la dictature franquiste.

Savoir/ Agir : C’est encore dans ces années 1960 et 1970 que tu entres en journalisme. À quels motifs obéissait cette bifurcation ? La carrière universitaire ne te suffisait-elle pas ?

Bernard Cassen : Je ne raisonnais pas en termes de carrière, mais en termes de capacité d’influence et de conviction. Je me trouvais intellectuellement à l’étroit dans l’anglicisme, tout en y acceptant des responsabilités, notamment en étant élu au Conseil national des universités.

Savoir/ Agir : Comment es-tu entré au Monde diplomatique ? Et quel était l’esprit du journal, à l’époque ?

Bernard Cassen : À sa création en 1954, le Diplo était un simple supplément mensuel de politique étrangère du Monde. Nommé à sa tête en 1973, Claude Julien en a rapidement fait un journal à part entière avec sa ligne propre et sa petite équipe de collaborateurs permanents ou semi-permanents dont les premiers étaient deux universitaires : Ignacio et moi.

J’avais déjà un pied dans la maison (ce dont j’étais très fier !) car, depuis 1967, je collaborais au Monde des livres, supplément hebdomadaire du quotidien, dans lequel je suivais particulièrement l’actualité littéraire anglaise. C’est Claude Julien, alors chef du service étranger du quotidien, qui m’avait recommandé comme pigiste à Jacqueline Piatier, responsable de ce supplément. En 1973, et, à mon grand regret, j’ai dû choisir entre Le Monde des livres et Le Monde diplomatique. Il n’y avait pas photo ! Dans le Diplo, je n’avais plus de limites géographiques ou thématiques pour le choix des collaborateurs et des sujets. Avec Claude Julien, Micheline Paunet (rédactrice en chef adjointe), Ignacio et moi, nous nous partagions le monde…

Savoir/ Agir : Tu as évoqué, en même temps qu’Allende, l’Union de la gauche française. Comment te situais-tu par rapport à cette dynamique ?

Bernard Cassen : Comme la plupart de mes amis, j’ai toujours voté à gauche. J’ai donc jubilé quand le programme commun a été signé en juillet 1972, et je me souviens bien d’un meeting enthousiaste auquel participaient François Mitterrand, Georges Marchais et Robert Fabre. L’heure de la gauche semblait venue, mais il fallut attendre 1981 pour qu’elle arrive au pouvoir.

Cette victoire a eu des conséquences presque immédiates pour moi : Jean-Pierre Chevènement, nouveau ministre de la recherche et de la technologie, me proposa de prendre la direction de la Mission interministérielle de l’information scientifique et technique, la Midist, qui entrait dans ses attributions. Cette structure d’une trentaine de collaborateurs avait un triple objectif : élaborer et impulser une politique nationale et internationale de l’information scientifique et technique ; développer la culture scientifique et technique ; promouvoir le français comme langue scientifique.

Savoir/ Agir : Tu t’es donc retrouvé projeté dans l’appareil d’État. Comment as-tu vécu cette expérience ?

Bernard Cassen : Je découvrais un nouveau métier. C’est tout juste si je savais qu’un serveur n’était pas nécessairement un salarié de la restauration ! Du jour au lendemain, je me suis retrouvé dans un environnement dont je n’avais qu’une connaissance très limitée et dans lequel mes interlocuteurs étaient les patrons des grands organismes de recherche, plusieurs ministères, les sociétés savantes, des entreprises et des élus.

Mais, se dirent certains, que diable venait faire un angliciste dans ce poste où l’on attendait normalement un profil un profil d’X, des Mines ou de Centrale ? J’ai pris un gros risque en l’acceptant, mais je ne pouvais pas refuser une telle offre. Pour me convaincre, Chevènement m’avait dit, en plaisantant à moitié, que cela me permettrait de faire avancer la cause du français langue scientifique et, au-delà, celle de la francophonie dont nous étions des militants de longue date. Je l’avais rencontré plusieurs fois dans des colloques et dans des réunions dans la mouvance du CERES, et je me retrouvais dans ses analyses et dans ses propositions. J’ai pu apprécier sa vision d’état-major, son absence de sectarisme dans le choix de ses collaborateurs et sa capacité de mobilisation de la communauté scientifique et de l’opinion pour faire de la recherche une grande cause nationale. Et c’était un lecteur assidu du Monde diplomatique !

De novembre 1981 à juillet 1985, la Midist a été un grand moment de ma vie professionnelle. J’ai eu la chance de pouvoir m’entourer de collaborateurs brillants, de disposer de budgets non négligeables pour nos actions et de bénéficier de la confiance de Chevènement jusqu’à son départ du gouvernement en 1983. Pendant ces années, j’ai pu voir de près les rouages de la haute fonction publique et comment on peut animer une équipe de fonctionnaires. Signe qui ne trompe pas à cet égard : trente-cinq ans après mon départ de la Midist, une bonne partie des anciens se retrouvent toujours régulièrement pour un repas amical…

Savoir/ Agir : Après ton départ de la Midist, tu reviens à la vie universitaire et explore de nouvelles thématiques en créant l’Institut d’Études européennes. Pourquoi ?

Bernard Cassen : De toute manière, mon poste à la Midist dépendait des alternances politiques, et la droite revenue au pouvoir en mars 1986 n’avait aucune raison de me faire un cadeau que je n’aurais pas accepté. Pas principalement pour des motifs politiques, d’ailleurs, mais parce que je voulais me consacrer prioritairement au Diplo et aussi à l’université. Pourquoi ? Pour prendre en compte la montée en puissance de la question européenne dans les affaires publiques, que nous avions quelque peu négligée. En 1986 est ratifié par le Parlement l’Acte unique européen, dans l’indifférence presque générale. En revanche, le traité de Maastricht adopté de justesse par référendum en 1992 fait l’objet de débats qui inaugurent des visions critiques de la construction européenne. La victoire du « non » au référendum du 29 mai 2005 sur le Traité constitutionnel européen en sera la manifestation la plus spectaculaire.

C’est pour accompagner cette évolution que Mireille Azzoug et moi créons à Paris 8 (Vincennes), en 1992, un Institut d’études européennes (IEE). Mireille en assurera efficacement la direction jusqu’à sa retraite, et Edith Cresson acceptera pendant 20 ans de présider son conseil d’administration. Une des originalités de l’IEE est son pluralisme idéologique, alors que la majorité des enseignements sur l’Europe dans les universités françaises semblent sortir tout droit d’une filiale de la Commission européenne. Ce n’est évidemment pas mon cas, et les papiers que je publie alors dans le Diplo ou ailleurs passent mal à Bruxelles… Il faut croire cependant que l’information circule mal au sein de la Commission ou bien que l’on n’y lit pas les dossiers, puisque, il y a quelques années, une de ses structures m’avait attribué une « chaire européenne Jean-Monnet »…

Au Diplo également, il nous fallait mieux prendre en charge les affaires européennes en ne nous laissant pas enfermer dans les questions techniques et institutionnelles, tout en les maîtrisant au moins aussi bien que ceux qui nous critiquaient dans les structures communautaires, dans les administrations et dans les départements de droit et d’économie des universités. Mine de rien, cela implique un travail considérable, et qui n’est jamais achevé. À partir du milieu des années 1980, je serai un peu le « Monsieur Europe » du Diplo. Anne-Cécile Robert est venue ensuite renforcer ce pôle au sein de la rédaction.

Savoir/ Agir : Dans les années 1990, on peut dire que le Diplo travaille à « réarmer » intellectuellement une gauche désorientée par l’expérience Mitterrand, la fin de la logique des blocs, l’offensive néolibérale…

Bernard Cassen : Oui, on peut faire cette lecture, même si nous n’avons jamais ambitionné le statut de maîtres à penser. Claude Julien avait intitulé un de ses livres Le Devoir d’ irrespect et cette formule définissait bien notre démarche commune. Il s’agissait de remettre en question les idées dominantes dans tous les domaines, et d’abord le néocolonialisme, l’impérialisme, l’atlantisme, et plus tard le néolibéralisme, l’européisme béat et le conformisme médiatique. Je te rassure : nous n’utilisions ces mots en « isme » qu’avec la plus extrême parcimonie, en sachant qu’un bon reportage peut être aussi parlant qu’un long développement théorique.

Au fil des années, le Diplo a élargi son lectorat autant par la qualité de son contenu éditorial que par l’absence de concurrents sur son créneau. Pratiquement tous les médias généralistes sont aujourd’hui entre les mains de milliardaires qui, comme Vincent Bolloré, sèment la terreur dans des rédactions insuffisamment dociles à leurs yeux. Finalement, il est rassurant de voir qu’une entreprise de presse comme Le Monde diplomatique peut être en très bonne santé financière, ce qui constitue une des garanties de son indépendance.

Savoir/ Agir : Cette indépendance du Diplo (qui était à l’origine, tu l’as dit, un supplément duMonde) a été consolidée au milieu des années 1990. Et tu as été, alors, l’un des artisans de cette prise d’autonomie.

Bernard Cassen : Oui, nous avons négocié les structures de la société qui gère le Diplo avec Jean-Marie Colombani, lorsqu’il était directeur du Monde. Le capital de cette structure est détenu à 51 % par le groupe Le Monde, à 24 % par l’association Günter Holzmann (AGH), dont font partie tous les personnels du Diplo, et à 25 % par l’association Les Amis du Monde diplomatique (AMD) qui regroupe environ 4 000 lecteurs organisés en groupes locaux, et dont la mission est de contribuer à la mise en débat des analyses du journal, ainsi qu’à sa diffusion. Cette architecture est un cas unique dans le paysage médiatique français. Les personnels du journal et les lecteurs y détiennent conjointement 49 % des actions et c’est l’AGH qui, statutairement, désigne le directeur du mensuel (et non pas l’actionnaire majoritaire). Il faut reconnaître que cet actionnaire a toujours joué le jeu et n’a jamais tenté d’infléchir la ligne du mensuel.

Savoir/ Agir : Peux-tu dire un mot du duo que tu formes, alors, avec Ignacio Ramonet ?

Bernard Cassen : C’est Claude Julien qui m’avait fait connaître Ignacio lors d’un dîner chez lui au moment où, en janvier 1973, il prenait la direction du Diplo et constituait avec nous sa petite équipe. Nous étions rapidement devenus non seulement des collègues, mais aussi des amis et, pendant presque un demi-siècle, il n’y a pas eu la moindre anicroche entre nous. Nous étions (et sommes restés) à la fois intellectuellement complices et complémentaires. J’étais impressionné par sa culture, notamment scientifique, la clarté de ses analyses géopolitiques et son acharnement documentaire quand il relisait un papier ou une carte. Je partageais sa vision du monde et sa rigueur dans le traitement de l’information. Et j’apportais un « plus » : mon expérience de l’organisation acquise dans mes fonctions de direction à l’université et dans la haute administration, ainsi que ma connaissance des milieux politiques et des mouvements sociaux, et pas seulement en France. Autant dire que cette expérience s’est révélée décisive dans la naissance de l’association Attac et celle du Forum social mondial (FSM).

Savoir/ Agir : En effet, c’est Ignacio Ramonet et toi qui « inventez » Attac. D’où vient l’idée, quel est le projet ? Et comment trouve-t-il une traduction concrète ?

Bernard Cassen : Tout est parti d’un éditorial d’Ignacio intitulé « Désarmer les marchés » et publié dans le numéro de décembre 1997. Il analyse le rôle prédateur de la finance et suggère la création d’une association qui s’appellerait Attac et militerait pour une taxation des mouvements de capitaux spéculatifs dont les produits seraient affectés à des projets sociaux, éducatifs, environnementaux et de santé publique à l’échelle planétaire. C’était la fameuse taxe Tobin, du nom d’un prix Nobel d’économie américain très connu.

Deux ou trois jours après la sortie du journal, énorme surprise : nous commençons à recevoir des lettres, messages et coups de fil nous demandant de créer l’association Attac, ce que nous n’avions jamais envisagé ! En quelques semaines, ce sont plusieurs milliers de lecteurs qui nous somment de passer à l’acte. Nous n’avons plus le choix. Malgré les réserves de certains d’entre nous, la décision est prise de lancer Attac, et c’est moi qui suis à la manœuvre. Après quelques consultations, je prépare un projet de statuts originaux : peuvent devenir membres des adhérents individuels et des personnes morales (syndicats, autres associations, entreprises, journaux proches du Diplo). C’est ainsi que se retrouveront autour de la même table lors des conseils d’administration, entre autres, des composantes de la FSU, de la CGT, de Solidaires, la Confédération paysanne, l’association Raisons d’agir devenue Savoir/Agir, le Mrap, le DAL, Charlie Hebdo. Autre innovation : la mise en place d’un conseil scientifique – essentiellement composé d’universitaires et de chercheurs – qui peut être saisi ou se saisir pour produire des textes ou des livres sur les thématiques d’Attac. Ignacio sera nommé président d’honneur et moi élu président tout court. Je resterai cinq ans à la tête d’Attac et je continuerai à siéger dans son Bureau pendant toute la mandature de mon successeur Jacques Nikonoff. Je suis toujours membre de l’association.

Savoir/ Agir : Il n’est pas question de retracer ici toute l’histoire d’Attac. Mais on peut s’arrêter sur le référendum de 2005…

Bernard Cassen : J’ai relu récemment un bon nombre d’articles de mon dossier de presse sur ce référendum. Pratiquement tous étaient favorables au « oui » et certains s’en prenaient violemment à Attac, jugée responsable de leurs déboires. Ils découvraient tardivement les raisons de notre victoire : un travail de fond sur le texte du traité pour s’en approprier le contenu, et un déploiement sur l’ensemble du territoire de toutes nos forces militantes (nous avions à l’époque environ 30 000 membres). Tout cela ne s’improvise pas. Attac s’y était préparée depuis que, dans nos analyses et à l’occasion du traité de Nice de 2000, l’Union européenne (UE) avait rejoint le club très fermé des institutions de la mondialisation libérale que nous combattions depuis la création de l’association (le FMI, la Banque mondiale, l’OMC, les accords de libre-échange, l’OCDE, la Banque centrale européenne). Je suis de ceux qui ont introduit la question européenne dans nos rencontres-débats, dans nos universités d’été et dans nos livres. Le Diplo avait évidemment été un de nos outils privilégiés pour cette entreprise d’éducation populaire. Quand, le 14 juillet 2004, Chirac annonça la tenue d’un référendum sur le TCE, nous avions déjà des centaines de militants maîtrisant le sujet et prêts à affronter les tenants du « oui », y compris des ministres qui avaient à peine lu le traité. Nous avons tous la nostalgie de cette exaltante campagne ! J’espère que l’histoire repassera les plats, tant sont nombreuses les raisons de nous mobiliser aux niveaux national, européen et international.

Savoir/ Agir : Au nombre des succès d’Attac, il faut aussi compter le lancement du Forum social mondial…

Bernard Cassen : Sans le Diplo, il n’y aurait pas eu d’Attac, et sans les deux il n’y aurait pas eu de Forum social mondial (FSM). Comme je l’ai raconté dans mon livre Tout a commencé à Porto Alegre (paru en 2003), tout a d’abord été imaginé en février 2000, le 16 exactement, dans mon bureau du Monde diplomatique à Paris. Ce jour-là, je recevais deux amis brésiliens, Chico Whitaker et Oded Grajew, qui revenaient de Davos, en Suisse, où venait de se terminer le Forum économique mondial et où se retrouve chaque année le gratin des dirigeants politiques, de la finance, des multinationales et des médias en général à leur dévotion. Ils en avaient été scandalisés et me demandaient ce que l’on pouvait faire contre cette forteresse de l’oligarchie mondiale.

Très rapidement, nous avons conçu un plan de bataille : d’une part, organiser un événement international qui s’appellerait le Forum social mondial (FSM) et cela aux mêmes dates que celles du raout de Davos : il s’agissait d’utiliser sa notoriété pour nous hisser à sa hauteur dans un mano a mano entre deux Forums ; d’autre part, l’organiser au Brésil : je proposai à mes deux amis qu’il se tienne à Porto Alegre, capitale de l’État de Rio Grande do Sul. En 1998, j’avais publié dans le Diplo un reportage sur cette ville devenue un laboratoire de la démocratie participative, et j’avais gardé le contact avec le maire, Tarso Genro, et le gouverneur de l’État, Olivio Dutra. Ils allaient être de précieux partenaires.

La suite est la chronique d’un véritable tour de force : comment mettre sur pied une rencontre de 4 ou 5 jours, que nous espérions de grande ampleur, en moins d’un an ? Le FSM était en effet programmé pour le 25 janvier 2001. Il fallait tout prévoir : les locaux, les transports, les financements, le programme, les interprètes, l’accès à Internet, et j’en oublie. Restait cependant à faire connaître cette initiative aux quatre coins du monde. Ce fut la tâche du Diploet d’Attac auxquels le FSM avait emprunté leur mot d’ordre « Un autre monde est possible ». Le mensuel était traduit en une quinzaine de langues et des mouvements Attac s’étaient constitués dans une vingtaine de pays. Par leur biais, nous avons pu toucher un grand nombre de mouvements et de militants du monde entier. Ce premier FSM, tenu à Porto Alegre, fut une grande réussite et le forum est devenu un rendez-vous annuel ou presque de la galaxie altermondialiste.

Je garde encore vivante en moi l’émotion que je ressentis lorsque je fus le seul non Brésilien convié à prendre la parole lors de la séance d’ouverture devant plus de 10 000 personnes.

Savoir/ Agir : Peux-tu dire un mot de ton rapport à l’Europe ?

Bernard Cassen : Comme je te l’ai dit, la centralité de la question européenne dans les politiques publiques m’est progressivement apparue comme une évidence à partir de Maastricht. Dans le Diplo, comme dans Attac, j’ai analysé l’Union européenne comme une déclinaison européenne de la mondialisation libérale et je n’ai pas changé d’opinion. La question que je me pose est d’ordre géopolitique : est-ce que l’Union européenne ne peut être que cela dans un nouvel ordre international caractérisé par l’émergence à visée hégémonique de pôles de puissance, voire d’hyper-puissance, à savoir les États-Unis, la Chine, l’Inde et la Russie ? Une Europe-puissance, une souveraineté européenne articulée avec une souveraineté nationale sont-elles compatibles avec un projet démocratique, solidaire et environnemental ? Je me dois d’être cohérent avec moi-même : comme j’ai toujours été favorable à l’unité latino-américaine, dans la lignée de Bolivar et telle que relancée par Chavez de son vivant, je dois logiquement adopter la même attitude pour l’Europe. Il me paraît donc urgent de tenter de répondre à ces interrogations…

Savoir/ Agir : Pour finir, une question rétrospective plus générale. Comment qualifierais-tu le type de « rôle » que tu as joué, le type de posture intellectuelle et politique que tu as manifestement choisie – rôle et posture qui ne sont pas réductibles, me semble-t-il, aux figures de l’universitaire, ou du journaliste, ou de l’homme politique, ou même de l’essayiste ? S’il fallait résumer le tout d’un mot, que choisirais-tu ? « Architecte » ? « Organisateur » ? « Homme-orchestre » ?

Bernard Cassen : Cela va sans doute te paraître curieux, mais je ne me suis jamais posé la question de mon identité sociale. Probablement parce que j’en ai toujours eu plusieurs, simultanées qui plus est… Formellement, je peux me considérer comme un intellectuel dans la mesure où, pour une large part, ma formation et mes activités m’ont conduit à évoluer dans le champ de la production et de la transmission des savoirs et des idées. Quant à me définir comme écrivain, cela ne m’est jamais venu à l’esprit. Malheureusement, je ne suis ni poète ni romancier ni dramaturge ! S’il fallait que je remplisse un formulaire administratif ou un CV comportant la rubrique « profession », je pourrais choisir entre professeur, journaliste, éditeur, traducteur, dirigeant associatif, haut fonctionnaire, mandataire social dans une entreprise de presse...

Bref, ta question est bonne, mais elle me plonge dans l’embarras. Tu me demandes de me caractériser en un seul mot ! Dans la presse écrite, les titres, les sous-titres et les chapeaux sont rédigés par un secrétaire de rédaction et pas par l’auteur du papier. J’invoque cette pratique pour te refiler la patate chaude : à toi de choisir le qualificatif approprié ! Enfin, si je devais malgré tout proposer quelque chose, alors oui, pourquoi pas : « homme-orchestre engagé dans le débat d’idées » ?

Bernard Cassen par Bernard Cassen
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16 juin 2025 1 16 /06 /juin /2025 05:01

 

Le Parisien revient sur le viol en 2024 d'une fille juive de 12 ans à Courbevoie. Le tribunal pour enfants de Nanterre a condamné à 9 et 7 ans de prison ferme deux mineurs jugés pour ce viol à caractère antisémite.

Les magistrats ont prononcé une mesure éducative de cinq ans et un placement à l’encontre d’un troisième jeune homme, âgé de 12 ans et 10 mois au moment des faits et contre qui une peine d’emprisonnement ne pouvait pas être prononcée en raison de son âge. Le président a justifié la lourdeur de la peine « nonobstant leur jeune âge et les carences éducatives importantes, au regard de leur personnalité toujours inquiétante et du trouble social immense à la société et à la victime et en raison de ce qu’elle était : une jeune fille de confession juive ».

Selon ses premières déclarations, l’un des mineurs avait filmé la scène, qui s’est déroulée dans une crèche désaffectée de Courbevoie, au pied du quartier d’affaires de la Défense et non loin du domicile de la préadolescente. L’un des mineurs l’avait ensuite menacée de mort si elle parlait à la police et exigé qu’elle lui remette 200 euros le lendemain.

En 2024, un total de 1570 actes antisémites ont été recensés en France, selon le ministère de l’Intérieur.

 

 

Dans ResPublica, Bernard Tepper fait la recension du livre de Raymond Debord Vers un monde sans enfants ? : en nous conseillant de sortir des clichés : « Le livre nous vaccine contre le néo-malthusianisme largement répandu dans toutes les franges de la société jusque dans les institutions internationales. Non, il n’y a pas trop de monde sur la Terre. Toutes les analyses démographiques montrent que c’est l’inverse, puisque nous allons vers un hiver démographique. Non, il ne faut pas commencer par obliger les Africains à avoir moins d’enfants pour qu’ils se développent mieux. À l’inverse, il faut développer leur économie et leur société et, tout naturellement, le nombre d’enfants par femme en âge de procréer va diminuer. Non, il ne faut pas écouter Terra Nova. Dans un premier temps, cet organisme de réflexion a eu l’idée saugrenue de conseiller à la gauche d’abandonner les couches populaires pour les remplacer par une alliance des couches moyennes avec les catégories discriminées que l’on doit essentialiser. Dans un second temps, Terra Nova produit un gloubi-boulga mélangeant un néo-malthusianisme avec des louvoiements dont la présentation complexe rime avec la pseudoscience. Non, ni la nuptialité ni la religion ne sont la cause principale directe du nombre d’enfants.

Selon le World Socialist Website, « L’administration Trump mène de vastes rafles sur les lieux de travail et le déploiement de l’armée se poursuit dans les villes américaines. L'une des plus importantes descentes sur un lieu de travail de la nouvelle administration Trump a eu lieu mardi, lorsque des agents ont arrêté environ 80 travailleurs de l'usine de conditionnement de viande Glenn Valley Foods à Omaha, dans le Nebraska. Cela représente plus de la moitié de l'effectif total de l'usine et, selon un mandat, 107 des 140 travailleurs faisaient l'objet d'une « enquête ».

Les rafles se caractérisent par une illégalité de plus en plus flagrante, les personnes détenues se voyant refuser toute procédure régulière. Selon Le Guardian, de nombreuses personnes arrêtées ces derniers jours ont déjà été expulsées.

Les immigrants représentent une part importante de la population des grandes villes américaines. Environ 40 % des habitants de Los Angeles et 35 % de ceux de New York sont nés à l'étranger.

 

 

Enfin, L’Humanité évoque le pantouflage florissant ces dernières années : « Christophe Castaner, Cédric O, Muriel Pénicaud… On ne compte plus les responsables macronistes qui ont fait le choix de se reconvertir dans le privé, avec tous les risques de conflit d’intérêts que cela comporte. Ex-ministre de l’Intérieur et par ailleurs président de la société du Tunnel du Mont-Blanc alors qu’il avait été sèchement battu lors des dernières législatives, le premier a été embauché comme conseiller par l’entreprise chinoise fast-food chinoise Shein ; ancien secrétaire d’État au Numérique, le second a posé ses valises comme lobbyiste dans une start-up d’intelligence artificielle ; ancienne ministre du Travail, la troisième a intégré le conseil d’administration du géant de l’enseignement privé Galileo.

 

Revue de Presse 563
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8 juin 2025 7 08 /06 /juin /2025 05:01
On part du mot “ queer ”. Les premiers sens de ce mot sont étrange, suspect, louche. Et aussi dérangé. La connotation sexuelle est venue après. Et là, pas d'hésitation : l'équivalent de queer en français est pédé. Donc, utiliser queer dans le contexte homo, c'est dire, sans le dire, tout en le disant. Donc pas très franc du collier.
 
Que dire des personnages ? Á gauche, une femme, à l'air méchant, semble porter une écharpe tricolore. Á droite, une femme relativement âgée porte en bandoulière un sac aux couleurs de la Palestine (sans le noir). Au centre : une femme voilée encadrée par deux hommes colorés. L'un de ces deux hommes est en train de pendre, d'étrangler un homme blanc affublé d'une cible dans le cou. En se marrant.
 
Quant au slogan “ Queers de tous les pays, unissons-nous ”, il s'agit d'un détournement minable d'un vrai slogan révolutionnaires du XIXème siècle. Les personnes concernées n'ont même pas été fichues de forger un slogan à elles.
Je n'aime pas du tout cette affiche !
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24 mai 2025 6 24 /05 /mai /2025 05:01

D'une manière générale, les noms de villes anglaises comportent de nombreuses lettres muettes. Les socio-linguistes expliquent cela par le fait que lorsque des gens résident longtemps dans un même lieu, suivis par leur descendance, ils ont tendance à triturer et raccourcir les noms de leur ville ou village de diverses manières. Mais si les prononciations changent, les orthographes évoluent très peu.

 

 

Marc Fryd, un de mes anciens collègues de Poitiers, consacra un article à “ la variation dans le lexique toponymique anglais : le cas de la métathèse [changement de la place d'un son dans un mot] dans l’élément – thorp ”. J'en extrait ceci : « On se souvient de l’émoi causé par la mort tragique de la princesse Diana, née Spencer, le 31 août 1997. L’ampleur de la couverture de l’événement par la presse et les media eut incidemment pour effet d’attirer l’attention du grand public sur une question d’onomastique qui se trouva vite investie d’une charge dramatique : la prononciation du siège de la famille Spencer, le célèbre château d'Althorp, dans le Northamptonshire. En effet, à l’occasion de l’afflux de journalistes, de curieux, et de visiteurs venus se recueillir devant les grilles du château, l’écart entre la prononciation [ˈɔːlθɔːp] employée par la presse et le grand public, et la, ou plutôt, les prononciations reçues par le Comte Spencer lui-même, fut cause chez les premiers d’une irritation croissante suscitée par la hauteur dont il faisait preuve pour faire valoir le bon usage, en l’occurrence [ˈɔːltrəp], voire [ˈɔːlθrəp]. Comme il convient dans le pays lorsque la prononciation d’un nom propre est en jeu, la presse se tourna vers un expert à l’autorité incontestable pour en avoir le cœur net, et l’on fit ainsi appel à Graham Pointon, directeur de la BBC Pronunciation Unit. Interrogé par un reporter du journal télévisé de la BBC, Graham Pointon fut à même d’apporter une réponse claire et sans appel : ’The only criterion we go by is what the owner of a name says.’ [J'ai personnellement toujours pensé cela : les gens du cru ont raison, même s'ils ont tort car une prononciation, bizarre aujourd'hui, peut toujours s 'expliquer pour des raisons historiques ou sociologiques]. Sur ce point, Pointon parlait avec assurance, fort en effet d’une preuve irréfutable, matérialisée par le billet retranscrit ci-dessous, à lui transmis par nul autre que le neuvième Comte Spencer en personne :

 

’I can remember my grandfather pronouncing it like this ; my octogenarian great-aunt does, too – and it is clear that alternative pronunciations only came about recently, out of laziness (it became simpler not to correct the many who mispronounced it – the majority of whom were foreign visitors to the house.’ »

 

Le résultat est que les prononciations contre-intuitives sont légions. Quelques exemples accompagnés d'une phonétique pseudo-anglaise puis de l'alphabet phonétique international :

 

Je vous laisse chercher pour Cholmondeley, Gloucester, Worcester, Featherstonehaugh, Leicester, Newark. 

 

Source 

Des noms de villes anglaises pas piqués des vers

Rien à voir :

Raphaëlle me dit que mes cheveux sont blancs. Ah bon…
Bon, d'accord mais, sans me vanter, contrairement à la plupart des hommes de 77 ans, j'ai des cheveux. Na !
Des noms de villes anglaises pas piqués des vers
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19 mai 2025 1 19 /05 /mai /2025 05:01

Selon le World Socialist Website, Israël intensifie les bombardements, les déplacements forcés et la famine à Gaza. Tandis que le président américain Donald Trump poursuivait sa tournée au Moyen-Orient, Israël a intensifié ses massacres à Gaza, bombardant deux hôpitaux et tuant au moins 80 personnes en une seule journée. Mardi, le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou a promis d'achever l'occupation militaire de Gaza, affirmant que « dans les prochains jours, nous entrerons [...] avec toute la force nécessaire pour achever l'opération ».

Il a ajouté : « Il n'y aura pas de situation où nous arrêterons la guerre. » Nétanyahou a réitéré son plan de nettoyage ethnique de Gaza, déclarant que son gouvernement avait « mis en place un organe de direction qui permettra aux [civils] de quitter » Gaza.

 

Pour le site Communistes, la seule réponse à Macron et au patronat : la lutte tous ensemble et en même temps ! 

Durant trois heures dans un spectacle bien huilé où Macron et des faire valoir ont occupé la scène, d'un cirque propagandiste, les idées et les exigences patronales ont été la ligne directrice de ce show présidentiel sur TF1. Si les commentaires de la presse se dessinent sur un arc allant d'une certaine déception du "tout ça pour ça" du journal le Parisien jusqu'à celui ressemblant à la découverte de l'eau tiède de l'Humanité et son : "Macron s'enferme dans l'arrogance et le libéralisme", peu d'entre eux soulignent les quelques points forts qui confirment la trajectoire politique du fondé de pouvoir de la grande bourgeoisie, trajectoire qui vise à conforter les intérêts de la classe capitaliste.

Pour notre part, nous avons retenu trois points significatifs de cette orientation.

Le premier, c'est le refus absolu d'un changement quelconque dans le domaine économique et social avec la justification d'une politique d'aide massive au patronat au détriment des salariés : pas question de revenir sur la réforme des retraites, sur le maintien des aides aux entreprises capitalistes en leur laissant la liberté totale de licencier comme chez Arcelor-Mittal, Vencorex et bien d'autres, le tout accompagné du rejet d'un revers de main de leur nationalisation. Ajoutons-y que la petite musique sur le coût de la protection sociale et des retraites s'est accompagné d'une attaque en règle contre le financement de celle-ci qui "repose trop sur le travail". Le journal patronal Les Echos fait une lecture correcte de cette orientation en titrant : « Macron remet la TVA sociale sur la table », revendication chère au MEDEF qui y voit l'effacement des cotisations patronales et fait miroiter une augmentation des salaires nets en diminuant les cotisations salariales (en réalité l'une et l'autre sont une partie du salaire socialisé) au profit d'une fiscalisation totale du financement qui déjà bien avancée mine les bases même de la protection sociale et affaiblit le salaire réel par la voie de l'impôt.

 

 

Selon Christian Eyschen, dans Le Grand Soir, à en croire les relais du gouvernement français, l’hexagone serait un parangon de liberté pour l’Université et la recherche, un havre vers lequel les scientifiques étasuniens brûleraient de se réfugier… Sous-entendu : si bien sûr les universités et organismes de recherche leur faisaient des offres ad hoc au lieu de persister dans l’archaïsme du recrutement par voie de concours, sous le statut de la fonction publique. L’antienne est martelée sur tous les tons depuis janvier, et de fait, les attaques de Donald Trump et Elon Musk contre l’Université et la recherche sont très concrètes, elles ont des effets dévastateurs et elles relèvent de l’obscurantisme le plus total, même s’il est adossé à de grandes déclarations d’amour à la technique et à l’innovation.

Ce dernier paradoxe n’est qu’apparent et se retrouve chez certains des nouveaux convertis français de la liberté académique : la science, c’est bien, quand c’est pour le marché, l’innovation, le profit, et tant qu’à faire, l’armée. Le reste, en revanche, relève du « wokisme », de « l’islamo-gauchisme » etc., et mérite qu’on lui coupe les vivres, voire qu’on l’embastille quand les choses vont vraiment trop loin.

 

Revue de Presse 559
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16 mai 2025 5 16 /05 /mai /2025 05:01

Elle est née vers 1773 dans le comté de Charles City (ainsi nommée en l’honneur du futur roi Charles Ier). Elle est morte en 1835 à Charlottesville (hommage à Charlotte de Mecklembourg-Strelitz, épouse du roi George III.

 

Esclave de son métier. Sa mère travaillait pour John Wayles, le père de Martha Wayles, épouse de Thomas Jefferson, décédée avant que celui-ci ne devienne le troisième président des États-Unis. Á noter que la mort du père de Martha apporta aux Jefferson 20 000 hectares de terre et 135 esclaves, ce qui fit doubler la fortune du futur président. Avec le remariage de Martha Wayles avec Thomas Jefferson, Sally passe au service de l’illustre planteur de Virginie.

 

Après la mort de Martha, vraisemblablement de diabète, Thomas Jefferson s’installe à Paris comme ambassadeur des États-Unis. Il y fait venir Sally, qui voit donc du pays. De retour aux États-Unis, Jefferson meurt en 1826. Sally s’installe à Charlottesville.

 

Jefferson était contre le métissage, tout en ayant eu – très vraisemblablement – un enfant avec Sally. Il écrivit : « La fusion des Blancs et des Noirs produit une dégradation à laquelle aucun amoureux de son pays, aucun amoureux de l'excellence du caractère humain, ne peut innocemment consentir. »

 

Les historiens hésitent sur la nature des relations entre le président Jefferson et Sally. Certains pensent qu’il abusa d’elle, d’autres estiment que les relations furent consenties. En particulier Dumas Malone, auteur d’une biographie de Jefferson en six volumes (Jefferson and His Time, prix Pulitzer) qui estiment que l’on manque toujours d’indices probants, dans un sens ou dans l’autre.

 

Des rumeurs plus ou moins folles commencèrent à courir. Le journaliste crapoteux James T. Callender écrira en 1802 : « Tout le monde sait que [Jefferson] eut pour concubine une de ses esclaves, du nom de Sally. Le nom du fils aîné de Sally est Tom. Il ressemble comme deux gouttes d’eau au Président. Il a aujourd’hui entre 10 et 12 ans. »

 

En 1873, Madison Hemings, l’un des fils de Sally, déclara que tous les enfants de Sally étaient de Jefferson. Le film de James Ivory Jefferson à Paris (1995) corrobore cette version des faits. Tout comme, avant lui, le roman de Barbara Chase-Riboud, La Virginienne (1979).

 

Comme ses frères et sœurs, Madison fut affranchi par le Président. Mais selon certains historiens, le père des enfants de Sally serait Randolph, planteur de son état, le plus jeune frère de Thomas Jefferson. Les questions de bâtardise qui parcourent l’histoire de France ont dû inspirer les Zuniens de la classe supérieure !

 

 

En 2017, des archéologues découvrent, à l’occasion de travaux dans la maison de Thomas Jefferson à Monticello, une pièce cachée où Sally aurait vécu en compagnie de ses enfants. L’historien Winthrop Jordan affirma que Jefferson séjournait à Monticello pour la conception de chacun des enfants de Sally…

 

Connaissez-vous Sally Hemings ?

PS : États-Unis : La police de l’immigration poursuit sa campagne de terreur dans tout le pays

Encouragée par Trump et les démocrates qui le laissent faire, la police de l'immigration à travers les États-Unis opère dans une impunité sans foi ni loi en menant ses opérations d’expulsion fascistes. Dans les États gouvernés par les républicains comme par les démocrates, les agents fédéraux relevant du ministère de la sécurité intérieure (DHS) – y compris les brutes de l'Immigration and Customs Enforcement (ICE) et leurs complices de la Customs and Border Protection (CBP) et des Homeland Security Investigations (HSI) – arrêtent des parents, des enfants et même des fonctionnaires sans motif, sans mandat et sans procès équitable.

Chaque jour, les médias sociaux diffusent des vidéos montrant des images horribles de brutes masquées et lourdement armées qui déchirent des familles, les menottent et les font disparaître dans des véhicules banalisés. Les personnes détenues sont gardées dans un réseau de prisons à but lucratif pendant des semaines, voire des mois, avant d'être exilées vers un pays « d'origine », qui peut aller d'une méga-prison salvadorienne à un donjon libyen, en passant par un pays où la personne n'est pas allée depuis des années ou dont elle n'a aucun souvenir, parce qu'elle est arrivée aux États-Unis alors qu'elle était enfant et qu'elle y a grandi.

Incapable de procéder à des « expulsions de masse » avec les forces dont il dispose actuellement, Donald Trump a ordonné vendredi au ministère de la sécurité intérieure d'embaucher 20 000 agents supplémentaires. Cherchant à expulser un million de personnes d'ici la fin de l'année, l'administration Trump fait appel à la police des États pour participer aux opérations.

Dans le Tennessee, sous direction républicaine, la Tennessee Highway Patrol s'est associée à l'ICE pour procéder à des perquisitions et enlèvements illégaux de résidents. L'opération raciste et ciblée a débuté le 3 mai et s'est concentrée sur les quartiers latinos de Nashville. Au petit matin, la police de l'État a commencé à effectuer des centaines de contrôles routiers avec des agents de l'ICE. Les immigrants soupçonnés d'être sans papiers ont été arrêtés et rapidement embarqués dans deux bus nolisés pour être envoyés en Louisiane.

Depuis le 3 mai, la patrouille routière du Tennessee a effectué près de 600 contrôles routiers de ce type, et les agents de l'ICE ont arrêté 103 personnes pour des infractions présumées à la législation sur l'immigration, selon l'Associated Press. Cette rafle fasciste a provoqué une colère générale dans l'agglomération de Nashville, qui compte plus de 2 millions d'habitants.

Samedi, un match de la Major League Soccer organisé au Geodis Park de Nashville a été boycotté par des milliers de résidents locaux. La Brigada De Oro, le groupe de supporters latino-américains officiellement reconnu du Nashville SC, a annulé toutes ses activités le jour du match, tandis que de nombreux spectateurs ont brandi des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Nous ne sommes pas tous là » et « No estamos todo aquí » en espagnol.

Dans une vidéo publiée sur sa page Instagram tôt dimanche matin, la chanteuse de rock Monte Mader a indiqué qu'il y avait eu de multiples perquisitions dans le centre-ville de Nashville pendant qu'elle se produisait.

« Nous avons travaillé dans le centre-ville de Nashville, sur le Broadway Strip et il y a eu des descentes de l'ICE sur Broadway dans les bars ce soir. Les établissements fermaient leurs cuisines plus tôt que prévu, renvoyaient leur personnel chez lui et affichaient des panneaux disant “Privé. Ne pas entrer”. »

« Et que ce soit clair », a-t-elle poursuivi. « Ces “policiers fédéraux” masqués qui ne s'annoncent pas, qui n'ont pas de motif valable et qui n'ont pas de mandat violent la loi. [...] Il s'agit d'un enlèvement et d'un trafic d'êtres humains. »

 

Par Jacob Crosse (World Socialist Website)

Connaissez-vous Sally Hemings ?
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