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6 novembre 2024 3 06 /11 /novembre /2024 06:01

Lu sur le site du PCFR.

 

 

Régulièrement, à chaque vote annuel du budget de l’État, à chaque élection politique, changement de gouvernement ou verdict d’une agence de notation, les médias et les experts font peur à la population sur la dette publique de la France, autrement dire à longueur d’antenne… Pour y parvenir, ils usent de mensonges, approximations ou fausses idées. Le but principal est de justifier de nouvelles coupes budgétaires dans les services publics ou les dépenses sociales afin d’augmenter les taux de profit du capital.

 

A chaque mode de production correspondent des formes de répartition historiquement définies. La répartition du revenu national en régime capitaliste est déterminée par le fait que la propriété des moyens de production est concentrée entre les mains des capitalistes et des propriétaires fonciers qui exploitent le prolétariat et la paysannerie. Dès lors, la répartition du revenu national s’opère non pas dans l’intérêt des travailleurs, mais dans celui des classes exploiteuses. Ainsi, le budget de l’État en régime capitaliste est, entre les mains de l’État bourgeois, un instrument de dépossession supplémentaire des travailleurs et d’enrichissement de la classe capitaliste ; il accentue le caractère improductif et parasitaire de l’utilisation du revenu national. Outre les impôts, les emprunts et la dette publique constituent un important chapitre des recettes de l’État capitaliste. L’État bourgeois recourt le plus souvent aux emprunts pour couvrir les dépenses exceptionnelles, en premier lieu les dépenses militaires qui rapportent des profits aux industriels. Et les budgets publics en général, hormis sous le coup des luttes populaires, servent à entretenir leurs appareils répressifs et à soutenir les politiques des monopoles (en France aujourd’hui le « capitalisme vert » et les nouvelles technologies) dans le contexte de concurrence internationale.

 

 

Quelques-uns de ces mensonges, approximations et fausses idées

 

« La France » a une dette publique insoutenable ? Est gérée à l’envers du bon sens ? Il faut réagir, sinon « La France » va faire faillite !

 

Faux ! Aucun État ne peut faire faillite. Un État peut éventuellement « faire défaut » ou « banqueroute » c’est à dire arrêter de payer ses créanciers (ceux qui lui prêtent) qui choisissent en général soit d’étaler la dette soit d’en annuler une partie ou totalité. Bien sûr ce n’est pas sans conséquence dont la première est que pour faire rouler la dette, l’État va emprunter à des taux plus élevés étant donné que les créanciers (les prêteurs, les investisseurs) lui font moins confiance. Faire défaut est arrivé trois fois à l’Allemagne en 1930, après la guerre et même en 1990 dans une certaine mesure, une fois à la France au XIXe siècle et plus récemment à la Grèce en 2008 par exemple. Mais ces États n’ont pas fait faillite ou disparu, aucun d’ailleurs ne le peut : ce ne sont pas des entreprises.

 

 

Le ratio dette/PIB, utilisé par les experts bourgeois, a-t-il du sens ?

 

Comme toute dette, la dette publique française (État plus collectivités publiques), c’est-à-dire le passif, a pour contrepartie un actif (écoles, hôpitaux, routes, bâtiments, ports, des entreprises ou des parts dans des entreprises...). Or le solde actif / passif est très largement positif en France. L’État, les collectivités publiques etc. ont beaucoup plus de possessions que de dettes. De sorte qu’un enfant pour reprendre les formules bourgeoises, ne naît pas avec une dette de 32 000 € comme dit par les bonimenteurs mais avec un patrimoine net de 4 500 €. Les spécialistes aiment à comparer la dette publique, un passif patrimonial, c’est à dire un stock, à un flux, c’est à dire des revenus, le PIB. Grave erreur pas anodine. La logique comptable qui en découle est que le PIB devrait se comparer avec le montant des intérêts de la dette et non pas la dette, et que le capital de dette passif, 2 000 milliards, doit se comparer avec le capital d’actif, c’est à dire 20 000 milliards !

 

 

L’État agent économique très particulier

 

D’autre part, l’État est un agent économique très particulier. Tout d’abord, il n’a pas d’horizon temporel fini, il pourra donc toujours emprunter pour se refinancer. Deuxièmement, l’État aujourd’hui au service du capital monopoliste (les grandes entreprises) peut décider, au moins en partie, du niveau de ses revenus, et donc de sa capacité de remboursement, via les règles fiscales qu’il met en place. De plus, la pertinence du ratio dette/PIB est critiquable dans la mesure où il n’existe aucun seuil à partir duquel la dette deviendrait un danger pour la pérennité des finances publiques. Le Japon s’en sort bien avec une dette égale à 240 % du PIB alors que la Grèce a été en difficulté à 180 %. Au surplus l’État et les collectivités sont même beaucoup moins endettés que le ménage de France le plus simple qui a décidé d’acquérir une résidence principale.

 

 

Fausse conclusion : Attention les marchés vont sanctionner « la France » !

 

Comme toujours, il faut introduire une dimension qualitative dans l’analyse. D’abord, la dette a augmenté fortement en valeur absolue – il y a donc un effet numérateur. Dans le même temps, le PIB a fortement chuté dans la période covid, ce qui a fait un effet dénominateur important.

 

Ensuite, la dette française est une des dettes les plus demandées par les acheteurs de dettes. Il y a plus de demande que d’offre de dette française, les organismes financiers se l’arrachent car c’est un placement sûr et non risqué. Les détenteurs de la dette publique française sont à la fois très diversifiés et très national, ce qui est positif pour sa solidité. La dette française est à moitié détenus par des banques et opérateurs français et l’autre moitié étrangers : 70 % en 2010 avant de redescendre progressivement jusqu’à aujourd’hui. Du côté des agents résidents, selon les données de la Banque de France de fin septembre 2020, 6 % de la dette publique française était détenue par les organismes de placements collectifs français (OPC), 7 % par les banques françaises, 13 % par les assurances françaises et 24 % pour les « autres résidents français ».

 

 

Comment l’État se finance (mécanisme), selon quel mécanisme ?

 

L’Agence France Trésor (AFT) est chargée des émissions d’emprunts de l’État. Elle doit trouver les meilleures conditions, que ce soit pour le délai de remboursement et le taux d’intérêt. L’AFT émet donc des obligations affiliées au trésor (OAT) qui sont ensuite acquises par des fonds de pensions, des sociétés d’assurances, des banques, en somme des collecteurs d’épargne dont le rôle est d’investir cette épargne. L’AFT va émettre les obligations par « petits » bouts tout au long de l’année, selon les besoins, et à chaque fois les conditions seront différentes.

 

 

« Faire rouler » la dette

 

En moyenne, fin 2020, l’État français était endetté à huit ans et soixante-treize jours. On l’a dit, chaque emprunt à une date d’échéance différente (cinq ans, dix ans, trente ans…) – on parle aussi de maturité. Huit ans et soixante-treize jours est donc la moyenne pondérée des échéances de ces emprunts. L’AFT profite de ces taux bas pour allonger la maturité de la dette, en s’endettant à long terme. En effet, fin 2018, la maturité de la dette était de sept ans et trois cent trente-six jours. Puisque l’État doit constamment emprunter, notamment pour rembourser les emprunts qui arrivent à échéance, il utilise des taux bas pour emprunter à long terme et se couvrir d’un risque de remontée des taux d’intérêt. Les taux de dette actuels ne sont donc jamais ceux utilisés en ce moment pour payer, ils se lissent en même temps que l’État doit faire rouler la dette.

 

 

Et la dette privée ?

 

La plupart des bonds de crises économiques éclatent par un excès de dette privée et non de dette publique. L’exemple le plus connu dans l’histoire économique récente étant évidemment la crise de 2007-2008, dites des « subprimes » qui étaient des prêts hypothécaires relativement risqués car les emprunteurs avaient des ressources très faibles et des situations précaires. Aux États-Unis, c’est la dette privée des étudiants qui menace aussi l’économie, au point que l’administration Biden a réfléchi à l’annulation d’une partie de cette dette. En France, dans le détail, la dette des entreprises de production s’élève à 85 % du PIB et celle des ménages à 65 %. La dette des entreprises productives (que les réformistes peuvent aussi appeler « sociétés non financières ») s’explique notamment par celle des monopoles (grandes entreprises à implantation internationale) qui ont notamment beaucoup recours à l’endettement pour financer leur croissance externe, c’est-à-dire le rachat d’autres entreprises (fusion-absorption).

 

 

Idées reçues sur la dette publique française
PS : Elections aux EU. Une brève analyse de mon ami Théophraste R. (un pseudo ?) :
 
Comment anticiper sur ce qui va arriver de bon ?
La meilleure méthode est de voir ce que les médias présentent comme bon. C’est, à plus de 90 %, le contraire qui est vrai.
Exemple yankee. En 2009, notre classe politico-médiatique votait Obama (Hélas, il fut le président étasunien qui a balancé le plus de bombes sur des pays pauvres, faibles et lointains).
Exemple français. En 2017 Macron était un « génie de la finance » bien gentil (le méchant était Mélenchon).
Pour les élections de novembre 2024 aux Etats-Unis, notre presse, nos commentateurs, nos politologues, nos « journalistes » (sic), quasi-unanimes, ont désigné Donald Trump dans le rôle du méchant avec une telle insistance, un tel zèle, une telle ardeur, que la place leur a manqué pour signaler un possible défaut de sa concurrente Kamala Harris.
Idées reçues sur la dette publique française
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8 octobre 2024 2 08 /10 /octobre /2024 05:01

Lui, c’est un bon ! Un bon quoi ? Un bon suppôt et thuriféraire du capitalisme libéral, un économiste d’extrême droite, un bouffeur de classes ouvrière et salariale, même s'il se pense de centre-gauche. Et il aime cogner : “ La capitalisation est une mesure de justice sociale ”, “ en 2070, il y aura 7 millions de retraités pour 100 000 actifs ”, “ une journée de solidarité de plus ? Une très mauvaise idée ! ”

 

Dans le civil, il est le directeur des études de l’Institut Sapiens, un institut sage, savant et raisonnable, comme son nom l'indique. Il est diplômé de l’université de Strasbourg, où il enseigne, mais il est surtout connu pour être fréquemment sollicité dans les médias qui souhaitent son oracle en matière de formation, d’emploi, d’Europe. Ses deux derniers ouvrages publiés sont Les robots, mon emploi et moi (2019) et Un robot dans ma voiture (2020) aux éditions ESKA.

 

Je l’écoutai tout récemment sur les antennes de France Info, interrogé par un baveux qui bavait d’admiration. Il l’avait présenté comme “ économiste ”. Notez que, lorsque sur les ondes nationales on fait appel, par exemple, à un Michaël Zemmour, on s’empresse de préciser qu’il est un « économiste de gauche » ou « proche de la gauche ». Un économiste de droite, quant à lui, n’a pas à être qualifié : il est, au sens sartrien du terme.

 

Ce matin-là, Erwann Tison, qui s’était déjà distingué en s’opposant violemment à une journée de solidarité en plus (quand il entend le mot “ solidarité ”, air connu…) pour financer la précarité des retraités, estime que la ré-indexation des retraites sur l’inflation est un scandale et il se plait à opposer les retraités dont les retraites augmentent – très faiblement, je suis bien placé pour le savoir – aux travailleurs, jeunes et moins jeunes, dont le pouvoir d’achat stagne quand il ne recule pas. En bon porte-coton du capital, Tison feint d’oublier que ce que touchent aujourd’hui les retraités ne tombe pas du ciel. Ils ont travaillé – et il est vrai que la situation de l’emploi était bien meilleure il n’y a pas si longtemps que cela – ils ont donc fortement cotisé pour payer les retraites de la génération précédente au nom de la solidarité intergénérationnelle (quand je voyais mon salaire ponctionné de 6%, je me disais que je payais la retraite de mes parents qui n’ont jamais eu besoin de se perdre dans les arcanes des retraites supplémentaires. Et je me disais par voie de conséquence que la retraite que je toucherais un jour ou l’autre ne serait pas un cadeau tombé du ciel mais le juste produit de cotisations solidaires.

 

Les retraités d’aujourd’hui ont perdu près de 8% de pouvoir d’achat depuis l’arrivée du boy de Rothschild aux affaires en 2017 et la fin de 2023.

 

Un des gros problèmes de la classe salariale aujourd’hui est qu’elle vit dans le temps long (40 années de travail et de cotisation) tandis que la classe dirigeante vit dans un temps le plus court possible avec la recherche du plus grand profit à tout prix, à toute berzingue, comme disent les chtis.

 

En tant que directeur des études de l’Institut Sapiens, et en tant que directeur de l’Observatoire innovation économique et sociale (OIES, 12 chercheurs et une chercheuse, soyons sérieux au n niveau de la parité féminine), Erwann Tison est un fin et redoutable observateur de la société française.

 

Une brève liste de ses publications parle d’elle-même :

 

“ Pourquoi poursuivre des exonérations de charges qui cassent la croissance française ? ”

 

« Quand la Mairie de Paris gaspille l’argent public pour produire quelques tomates cerises ».

 

« EDF, nouvel exemple d'un État impotent qui cherche à régir le moindre aspect de l'économie ».

 

« Une journée de solidarité en plus ? Une très mauvaise idée ».

 

« Pas de souveraineté économique sans libre-échange. »

 

Dire que Tison fait des cauchemars mélenchnesques toutes les nuits est faibles : « La Nupes a perdu les élections présidentielles et législatives, mais son programme a tout de même été porté au pouvoir. Cette pensée pouvant traverser l'esprit de n'importe quel observateur économique, résume très bien le parfum de nationalisation flottant dans l'air depuis quelques mois. La période du Covid-19 a été un véritable exutoire pour le surmoi dirigiste de notre classe politique. Au prétexte de la lutte contre la pandémie, le gouvernement a pu déployer des trésors de mesures interventionnistes qui feraient pâlir de jalousie tout membre de l'alliance bolivarienne. »

 

Pour revenir à l’Institut Sapiens, on ne saurait passer sous silence qu’il a été fondé par, entre autres, un fanatique du libéralisme économique en la personne d’Olivier Babeau, docteur en économie (avec pour thèse “ Le manager et la transgression ordinaire des règles : le cas des cabinets de conseil en management ”), agrégé en sciences de gestion et dont Wikipédia dresse un portrait très nuancé. Ce brillant universitaire fut conseiller du Premier ministre François Fillon et du secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement Roger Karoutchi. Un de ses hauts faits d’armes en politique fut, en 2019, de participer à la Convention de la droite aux côtés de deux figures d’une droite vraiment de droite : Ivan Rioufol (qui a son rond de serviette sur CNews) et Laurent Alexandre (qui se dit de centre-gauche). En 2018, Acrimed le décrit comme un militant politique agissant sous couvert de vulgarisation scientifique au détriment de l'honnêteté intellectuelle et de la rigueur scientifique. En 2019, il est, selon Arrêt sur images, « devenu une figure médiatique appréciée par plusieurs familles de droite et d'extrême droite : « pro-business », anti-écologie, pourfendeurs du politiquement correct et effrayés du grand remplacement.

 

L’Institut Sapiens, qui s'affirme indépendant, non-partisan, et inspiré par les valeurs de l’humanisme est critiqué pour ses relations avec de grandes entreprises, le Medef, les mouvements transhumanistes. Selon Libération, il ressemble plus à une agence de représentation d’intérêts que d’un institut scientifique et impartial.

 

 

Connaissez-vous Erwann Tison ?

 

PS : La photo ci-dessous représente un enfant palestinien qui regarde un bulldozer israélien démolir son école. Gageons que ce bulldozer fait de la graine de “ terroriste ” pour dans 15 ans.

Connaissez-vous Erwann Tison ?
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1 septembre 2024 7 01 /09 /septembre /2024 05:01

Par Guillaume Etiévant pour Frustration Magazine.

 

Régulièrement, le patronat, les médias mainstream et les  partis de droite nous ressortent leur angoisse recuite : face à tout l’argent public dépensé, comment allons-nous payer la dette ? Le problème de la dette publique est mis en avant pour nous convaincre que des « efforts » seront nécessaires pour la rembourser, c’est-à-dire une baisse des dépenses publiques et la poursuite des privatisations. Le MEDEF en a encore remis une couche à ce sujet cette semaine pour tenter de décrédibiliser le programme du NFP et ainsi contribuer à assurer la vitrine idéologique du coup d’Etat de Macron. On ne va pas se le cacher, a priori, les chiffres de la dette peuvent faire peur : au deuxième trimestre 2024, la dette publique de la France a atteint 3 159,7 milliards d’euros, soit 110,7 % du PIB contre environ 100 % du PIB avant la crise Covid. Alors, est-ce vraiment un problème ? Allons-nous léguer cette dette à nos enfants, comme se plaisent à le répéter les éditorialistes chauves n’ayant jamais ouvert le moindre livre d’économie sur le sujet ? En acceptant l’endettement public, sommes-nous en train de condamner nos enfants à en supporter le poids écrasant ?

Pour y voir plus clair, répondons aux arguments serinés par ceux qui aiment parler de dette toute la journée, mais ne jugent pas utiles de consacrer quelques heures à se renseigner sérieusement sur le sujet. 

1. Non, on ne lègue pas la dette aux générations futures puisque la dette actuelle sera remboursée par la dette future.

L’État renouvelle indéfiniment sa dette (il « roule sa dette »), et ce ne sont que les intérêts qui sont à la charge des contribuables (50 milliards d’euros en 2024). En effet, à l’inverse des ménages qui remboursent le capital prêté et payent les intérêts chaque mois jusqu’à l’échéance, l’État ne paye que les intérêts chaque année et rembourse la totalité du capital à l’échéance. Et pour le faire, il s’endette du montant nécessaire. 

Par exemple, si l’État emprunte 500 millions sur dix ans à un taux de 2,5%, il paiera 12,5 millions d’intérêts par an et devra rembourser le capital de 500 millions en une seule fois dix ans plus tard. Il réalisera alors un nouvel emprunt de 500 millions pour rembourser le capital. Et ainsi de suite, indéfiniment.

2. Vous aurez remarqué que les médias adorent comparer l’État à une entreprise. Mais ils ne précisent jamais que les entreprises sont en moyenne beaucoup plus endettées que l’État !

L’une des manières de mesurer la dette d’une entreprise est de la mettre en regard des actifs détenus. Si on applique le même calcul à l’État, son taux d’endettement est très faible. Selon l’INSEE, fin 2022, le patrimoine économique national s’élevait à 20 052 milliards d’euros en France. La dette publique s’établissait quant à elle à 2 950 milliards d’euros, ce qui fait un taux d’endettement autour de 15 % seulement. En comparaison, en moyenne, en France, le taux d’endettement des entreprises dépasse les 35%.

3. Le montant total de la dette publique en France est limité.

Avoir une dette qui pèse environ 110,7 % de la richesse produite en un an, cela paraît élevé, mais cela signifie simplement qu’il faut un peu plus d’un an de richesses produites pour rembourser des titres de dette remboursables sur des années (8 ans d’échéance en moyenne, mais cela peut aller jusqu’à 50 ans).

L’État français emprunte à des taux faibles, ce qui limite son niveau de dette. Les taux d’intérêt à dix ans sur la dette publique française sont passés de 10 % en 1990 à 0,5 % au printemps 2019, puis sont remontés à 3,2 % cette année car une partie des intérêts d’emprunt sont indexés sur l’inflation, et parce que la BCE a mis fin à sa politique volontariste de baisse des taux pour lutter contre l’inflation. 

Selon l’INSEE, fin 2022, le patrimoine économique national s’élevait à 20 052 milliards d’euros en France. La dette publique s’établissait quant à elle à 2 950 milliards d’euros, ce qui fait un taux d’endettement autour de 15 % seulement. En comparaison, en moyenne, en France, le taux d’endettement des entreprises dépasse les 35%.

L’inflation peut d’ailleurs avoir un effet positif sur le niveau d’endettement : en effet,  par exemple, si les prix augmentent fortement, la monnaie a donc moins de valeur (on achète moins de choses avec 100 euros que le mois précédent, ces 100 euros “valent” donc moins qu’auparavant). L’Etat rembourse donc sa dette avec une monnaie qui vaut moins que celle avec laquelle il a emprunté. Si l’inflation (5,7% en 2023 en France) est plus forte que les taux d’intérêt, ce qui est le cas en France, le taux d’intérêt réel est donc en baisse. C’est particulièrement avantageux pour un État, car les revenus fiscaux, qui augmentent généralement avec l’inflationcroissent plus rapidement que le coût des remboursements de la dette. 

Rappelons également qu’une partie de la dette publique française (environ 20 %) est détenue par la BCE, qui a racheté ces dernières années des titres sur le marché secondaire, c’est-à-dire qu’elle les a rachetés aux investisseurs qui ont prêté à la France. Cette dette ne coûte pas grand-chose à l’État français, car les intérêts touchés par la BCE lui sont reversés. En effet, les bénéfices de la BCE issus des intérêts d’emprunt sont reversés en dividendes aux États membres de la zone euro.

4. La dette n’est donc en soi pas un problème ; elle est au contraire un outil très efficace de relance de l’investissement et de l’emploi.

Il est tout à fait normal de financer des investissements de long terme (dans les infrastructures publiques ou la transition énergétique, par exemple) par de la dette qui se remboursera sur des années, plutôt que par des impôts prélevés sur une seule année. Qui peut se permettre d’acheter une maison avec ses revenus d’un an ?  

L’alarmisme au sujet de la dette ne vise le plus souvent qu’à servir de prétexte à la destruction constante de nos acquis sociaux, non pas pour réduire la dette, mais pour remplacer des dépenses publiques utiles à tous par des dépenses ne servant que les bourgeois. Au-delà de leur propagande servie quotidiennement, cette pression s’exerce par tout un appareil idéologique international, allant de l’Union européenne aux agences de notations mondiales

Le vrai problème aujourd’hui ce n’est pas le montant de la dette en tant que tel, mais le fait que ce soit en partie une mauvaise dette, gonflée par les cadeaux fiscaux et sociaux aux entreprises, les allègements d’impôts pour les plus riches et des intérêts versés aux banques et aux compagnies d’assurances étrangères. La hausse de cette dette ne contribue plus au bien-être de la population. Ce n’est pas une fatalité. Une autre dette est possible, contractée sans intérêt auprès de la Banque de France, si nous sortions de l’euro, et servant exclusivement à financer les investissements publics. Elle cesserait alors d’être un instrument bourgeois d’oppression du peuple, pour devenir un outil d’émancipation collective. 


Guillaume Etiévant 

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