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26 juillet 2014 6 26 /07 /juillet /2014 05:09

Le matin du 16 janvier 1954, lorsque nous apprîmes dans la cour de mon école primaire d’Hénin-Liétard (« Liétard », j’y tiens) le décès de Madame Coty, l’épouse sans aspérités d’un président lui aussi sans aspérités (quoique doté d’une réelle personnalité), nous fûmes tristes. Parce que cette dame, qui ressemblait à toutes les dames françaises de 70 ans, était entrée dans notre existence sans avoir forcé le destin et sans se plier aux règles de ce qu’on n’appelait pas encore la pipeulisation.

 

Dans un ouvrage republié en 1954 (Nouveaux portraits), Françoise Giroux rendit hommage à la modestie de cette fille d’armateur havrais élevée dans des pensions religieuses et dans un couvent de Southampton, ce qui lui donna une parfaite maîtrise de l’anglais : « Aussitôt après l'élection, lorsqu'elle s'est vue dans les journaux, elle a reçu un choc : « Regardez-moi », dit-elle attristée, « je ne prétends pas être mince, mais enfin tout de même... » ». Elle déclare aussi : « je ne suis pas une pin-up, je suis une grand-mère ».

Sous les ors de l’Élysée (13)

Les chansonniers l’affublèrent de surnoms plutôt vachards : « Madame sans gaine », « la bûche de Noël », « Madame des tas ».

 

La mort soudaine, due à une crise cardiaque, de la Première dame de France, fut l’occasion d’une vraie émotion populaire. 22 000 personnes assistèrent à une messe en l’église de la Madeleine ou sur le parvis. Le président René Coty avait fini par accepter le principe d’une cérémonie officielle à Paris mais avait refusé que les obsèques de sa femme au Havre fussent payées par l’État.

 

Lorsque René Coty fut élu président de la République au seizième tour de scrutin, les journalistes se précipitèrent à l’appartement qu’occupait le couple au quai aux Fleurs à Paris. Ils tombèrent sur Madame Coty, une personne de bonne corpulence, les mains pleines de farine, en train de faire une tarte. Ce fut parti pour « potiche et godiche » et autres surnoms peu flatteurs. Malgré l’étole de vison qu’elle portait presque toujours, que son mari lui avait offerte « pour faire présidente », Germaine Coty incarna, renvoya parfaitement l’image de la femme au foyer des années cinquante, discrète, dévouée à son mari.

Sous les ors de l’Élysée (13)

Très ébranlé par le décès de son épouse, René Coty envisagea de démissionner (n’imaginant pas une seconde que, quatre ans plus tard, De Gaulle le pousserait gentiment par la porte) mais il se retint, ne voulant pas ajouter de la crise aux crises.

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