J’ai plaisir à écouter le journaliste Nicolas Teillard sur les antennes de France Info, en fin d’après-midi. Sa prestation est vivante, intéressante. Et, en plus, il a une bonne tête.
Mais deux choses m’horripilent chez lui : des « heuuu… » longs comme le bras et la manière dont il prononce un mot tout simple et tout bête qu’on utilise tous les jours : « aujourd’hui ».
Je n’insiste pas sur ses « heuuu » car ce n’est pas très intéressant, phonétiquement parlant. Et puis, cela renvoie à quelque chose de profond, d'intime chez lui.
Mais quand je l’entends prononcer « aujourd’hui » « oujordui », c’est toute ma (longue) vie qui défile.
Quand j’étais enfant dans les années 1950, peu de gens prononçaient ce mot correctement. Pour des raisons phonologiques assez banales d’assimilation ou de contamination. Il y a assimilation quand absent devient apsent, anecdote anegdote, Place du Général De Gaulle Plazdu Général De Gaulle. Il y a contamination quand deux choses, deux individus ou deux groupes s’interpénètrent. Un souvenir peut en contaminer un autre. Une des contaminations les plus courantes en langue française est « se rappeler de quelque chose », contamination de « se souvenir de quelque chose » et de « se rappeler quelque chose ».
Mes parents, instituteurs, étaient très attentifs – sans être puristes – à la production langagière de leurs enfants. Ils prenaient donc un malin plaisir à corriger nos fautes à l’oral. Seulement quand, à longueur de journées, les gosses de ma génération entendaient « oujordui » ou, pire encore, « oujourdui », il n'était pas facile de prononcer « aujourd’hui » correctement. Mais l’école primaire veillait au grain et nos maîtres, eux aussi, nous reprenaient quand c'était nécessaire. Si bien qu’au fil des années soixante la prononciation correcte l’emporta. Mais comme tout à tendance, aujourd'hui, à se relâcher – et pour une fois l'angloricain n'est pas responsable – nos oreilles sont de nouveau agressées, contaminées, donc, par des déformations incongrues qu'il serait facile d'éviter.
Il n’y a pas à tortiller : aujourd’hui se prononce /oʒuʀdɥi/. Et pi ché tout’, comme on dit en Picardie. Alors pourquoi tant de haine avec ce bel aujourd’hui qui a cessé d’être vierge et n’est guère plus vivace ? Peut-être parce que ce mot totalement usuel est légèrement plus complexe que « demain » ou qu’« hier » (un enfant dira « ayer » à quatre ans mais plus à huit ans)
Que Nicolas Teillard, qui peut encore corriger ce mauvais pli car il a moins de quarante ans, reprenne les quatre premiers mots de L’étranger : « Aujourd’hui, maman est morte ». S’il nous gratifie d’un oujordui, il n’aura plus qu’à se flanquer deux claques.
Un petit coup de décivilisation :
Selon Lyon Mag, une intrusion s’est déroulée dimanche soir au sein d’une structure médico-sociale pour enfants handicapés, du côté de la rue du Château de la Duchère.
Peu après 21h, trois individus encapuchonnés ont pénétré les lieux afin de visiter toutes les pièces pour réaliser d’importants dégâts, malgré une alarme qui s’était déclenchée. Du mobilier a notamment été brisé par les malfaiteurs. Pire, les intrus ont tenté d'incendier les lieux. Plusieurs portes de placard ont été cassées et les bureaux mis en désordre par ces trois personnes, qui portaient des capuches et des masques chirurgicaux au moment des faits. Des ordinateurs ont aussi été volés. Des analyses d'objets saisis sur place sont en cours.
Alertée, la police s’est immédiatement rendue sur place mais il était trop tard. Les suspects avaient déjà pris la fuite. Une enquête est ouverte pour tenter de les retrouver.
Conséquence, les enfants en situation de handicap n’ont pas pu être pris en charge ce lundi dans les locaux. On ne sait pas encore si le site va pouvoir rouvrir ce mardi.
PS : quelques heures plus tard, dans le même quartier, une intervention policière d’ampleur a eu lieu, obligeant les TCL (transports en commun) à interrompre et à dévier la circulation des bus dans le secteur pendant environ deux heures. Il s’agissait d’une opération du Raid visant à interpeller un Tchétchène.