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20 janvier 2019 7 20 /01 /janvier /2019 06:15

Par Juan Branco

 

Il ne serait alors plus seulement agi de se demander depuis quand donc M. Macron était devenu ami du couple le plus fortuné de France, ni comment l’on accédait à ces individus, contre quelle engeance obtenait-on leur estime – puisqu’il n’y a, dixit Xavier Niel, et l’on commence à comprendre le sens de sa phrase, nulle amitié en ces rapports, ce qui veut dire, de sa propre admission, qu’il n’y a que des intérêts – alors que l’on est censé être un gentil gamin d’Amiens, venu perdu seul à Paris, fuyant l’oppression familiale pour se construire son destin pour un amour tant de fois magnifié ? 

 

N’était-ce pas là l’histoire que, de Paris Match à France Télévision, des journalistes par centaines avaient raconté, dépensant des millions laborieusement arrachés à la société pour mettre en scène documentaires, récits, enquêtes et portraits relayant non pas la réalité, mais une fable fabriquée ? 

 

Un seul journaliste, en un seul ouvrage, tenterait de faire ce travail à temps : L’Ambigu M. Macronde Marc Endeweld. Cet ouvrage, alors que personne ne comprenait rien à rien au phénomène Macron, ne serait pas même chroniqué au Mondeou au Figaro. Un seul courageux, le même qui démissionnerait par la suite de Mariannesuite à son rachat par un oligarque tchèque, un certain Kretinsky, investissant par ailleurs dans Elleet Le Mondepour préparer son rachat d’un Engie que Macron s’apprêtait à privatiser, exactement comme M. Drahi avait racheté Libérationsur demande de François Hollande – demande relayée par Emmanuel Macron – pour se voir autoriser au rachat de SFR, avant de nommer son ami et plume Laurent Joffrin à la tête de sa rédaction. 

 

Cela, ce n’est pas nous qui le racontons. C’est l’homme de main de M. Drahi, Bernard Mourad, intime d'Emmanuel Macron, dans le Vanity Fair de décembre 2018, qui expose sans se gêner les modalités de constitution d’une oligarchie. Sans indignation. 

 

Après tout, qu’importait, quelques milliards par ci, quelques milliards par-là ? Le politique n’était-il pas affaire d’empirisme, ne fallait-il pas les laisser essayer, et qu’importe si entre temps l’on dégradait pour ce faire la vie de millions de gens ? 

 

Pourquoi interrogerait-on l’insistance délirante avec laquelle cet être, outre l’ISF, défend le maintien du CICE, qu’il a créé, et qui chaque année, coûte au moins vingt-milliards à l’État, pour un effet que là encore tous considèrent insignifiant  ?

 

Le lecteur suspicieux demandera à cet instant : et alors ? Cela n’était-il pas, à défaut d’être dit, compris ? Tout d’abord, rappelons qu’il ne s’agit pas que de cela. Qu’outre les menus cadeaux fiscaux, les constitutions de fortunes ne sont pas aussi miraculeuses que l’on le croirait, et que leur lien avec le politique, et leur capacité à l’influencer, est déterminante dès lors que ces fortunes se comptent en milliards et non en millions. Rappelons également que les constitutions de destins politiques en France, en cette si glorieuse démocratie que nous cessons de vanter, ne doivent peut-être pas tant qu’on le croyait aux vertus et qualités intrinsèques des uns et des autres mais bien à leur capacité à séduire et à servir ces mêmes oligarques. Et que l’appui donné à la fortune des uns – appui dont il est objectivement établi qu’Emmanuel Macron donne à ses protecteurs, par l’adoption de toute une série de dispositions fiscales et réglementaires les intéressant directement et n’ayant aucun bénéfice pour le bien commun – peut faire la destinée politique des autres. Quitte pour cela à passer par des tiers peu recommandables. 

 

Rappelons les modalités de constitution de la fortune de Monsieur Arnault, devenu le plus riche d’entre nous : c’est bien grâce à une scandaleuse opération effectuée aux dépens de l’Etat, rachat de Boussac effectué par la grâce d’une faveur politique que lui octroierait lors des années quatre-vingt Laurent Fabius, que M. Arnault a pu construire son empire, devenir milliardaire, racheter des médias par pelletées et, devenu première fortune française, se lier d’amitié avec des Présidents de la République décidés à alléger son fardeau fiscal pour permettre d’à ses enfants léguer une puissance non dissimulée  – Président qui n’hésitera pas, une fois élu, à affirmer que les tentatives de fraudes fiscales n’étaient qu’optimisation, et qu’il y avait de « bonnes raisons » à s’exiler fiscalement en Belgique. 

 

C’est bien par son lien avec le politique, qui a généreusement mobilisé les ressources de l’État pour subventionner les entreprises qu’Arnault prétendrait avoir sauvé après se les être vues littéralement offertes et les avoir démantelées – prétendrait à une politique sociale qu’il trahirait – que cet oligarque a fait sa fortune. C’est bien par des amitiés et autres connivences alors considérées inoffensives, avec Laurent Fabius très spécifiquement, que Bernard Arnault est devenu ce qu’il est, au détriment d’un pays tout entier. Mais surtout, nous rappellerons que si les biens qui fondèrent sa fortune furent bradés par un pouvoir aux abois, ce ne fut pas pour éviter une faillite et des licenciements – puisque factuellement, ces licenciements interviendraient – mais parce que ce pouvoir se trouvait à la recherche d’appuis pour se maintenir en fonctions et contrer l’inexorable retour de la droite à partir de 1983, et cherchait à se constituer un réseau de financiers et de relais médiatiques capables de construire un dispositif écrasant l’espace public et faire ainsi oublier la trahison de leurs promesses de campagne. Qu’ils le firent chronologiquement dans cet ordre, pour se maintenir au pouvoir. Pour dévoyer la démocratie. Et l’on commence à comprendre comment tout cela peut nous affecter beaucoup plus gravement qu’on aurait pu le penser. Le lien entre petite et grande corruption, entre petite et grande politique – entre un CICE créé par un Macron encore secrétaire-général de l’Elysée, dispositif ayant coûté à l’État plusieurs dizaines de milliards d’euros et dont le premier bénéficiaire serait le groupe Carrefour, on le retrouve encore là – et le soutien exubérant que ces mêmes grandes entreprises lui octroieraient en retour – commence à se tisser. Et nous comprenons qu’il y a dès lors là, dans ces questions d’amitié quelque chose qui commence à relever de l’ordre de la criminalité. 

 

De la même façon que l’on ne devient pas milliardaire sans raison, l’on ne devient pas président n’importe comment. Cela est évident. L’exceptionnalité de la fonction qui consiste à diriger un pays nous fait trop souvent penser qu’elle serait le fruit de l’exceptionnalité de la personne qui s’en est saisie. Or certains mécanismes de cooptation et de corruption jouent bien plus fortement que les qualités que l’on croit intrinsèques et nécessaires à la direction des peuples.

 

On rappellera à ce stade que Bernard Arnaud est le propriétaire non seulement du plus grand conglomérat de luxe au monde, capable par leur puissance publicitaire de tuer un média s’ils le décidait, mais aussi directement du plus important média de France, Le Parisien, et du seul quotidien d’information économique de notre pays, excusez du peu, Les Echos, après avoir achevé La Tribune, son concurrent, ce que ne prennent même pas la peine de faire M. Dassault, propriétaire lui du Figaro, et dont on sait quels accords il tissa avec un autre homme politique, Emmanuel Valls.

 

Cela est bien pire, car à quoi bon intervenir directement sur les contenus, lorsque l’on peut s’appuyer sur des hommes et femmes de main comme Michèle Marchand, invisibles jusqu’à l’ouvrage de septembre 2018 ? A quoi bon, lorsque l’on sait pouvoir intervenir indirectement dans la production de l’information par le truchement d’un homme de main, Louis Dreyfus, qui s’est trouvé un temps à la fois directeur général du Monde, de l’Obset des Inrockuptibles,  responsable, dans tous ces journaux, du recrutement et du licenciement, des promotions et mises au placard de tous les journalistes des plus prestigieuses rédactions de Paris, où tous les journalistes de France rêvent d’être recrutés ? Xavier Niel ne censure jamais un article. A quoi bon, lorsqu’il est possible de le faire censurer – par les réseaux mafieux de Michèle Marchand, par les pressions ou craintes de pression de M. Dreyfus, par l’autocensure de tous ceux qu’il a soigneusement, avec ses camarades oligarques, précarisés et pressurisés  ? 

 

 

Tout cela, on prétend le découvrir, mais c’est une façon de parler. Car la toute-puissance à ses défauts, et si Xavier Niel, m’annonça en personne dès janvier 2014, alors qu’Emmanuel Macron n’était que secrétaire général adjoint de l’Elysée et inconnu du grand public, qu’il deviendrait Président de la République, alors on peut imaginer que je ne fus pas le seul à être mis au courant. 

 

Le beau-père putatif de Xavier Niel, Bernard Arnault, qui s’est permis le luxe de recruter le tout puissant ancien directeur des services secrets du pays, Bernard Squarcini, au sein de LVMH pour en faire son « monsieur sécurité  » – ce même M. Squarcini qui continue d’appeler ses anciens subordonnés pour leur demander des informations sur telle ou telle personne, et qui pour cela s’apprête à être condamné, car les magistrats du siège sont peut-être le dernier corps de fonctionnaires « d’élite » à ne pas avoir été absorbés par l’oligarchie –, Bernard Arnault donc, a mis au service du Macron candidat son appareil de sécurité pour compléter la protection que lui offrait médiatiquement, via son gendre Xavier 

Niel, Michèle Marchand.

 

Macron, le crépuscule d'un petit Dieu (4)

 

Cela est certes plus intéressant que de savoir que LVMH habille Brigitte Macron. Pourtant, s’interroger sur et dénoncer le fait que notre première dame se soit muée en enseigne publicitaire mouvante pour LVMH et LVMH exclusivement, abusant en cela de ses fonctions, créant un conflit d’intérêt évident, pourrait être un premier pas qui aurait permis de remonter aux basses œuvres de M. Squarcini, mais peut-être au-delà. Qui aurait amené à s’interroger, et dès lors découvrir, que M. Arnault connaissait en fait Brigitte Macron bien avant Xavier Niel, qu’il a en fait présenté M. Macron à Xavier Niel, par la grâce de Brigitte Macron qui était faite la professeure de ses enfants au sein du très sélectif et fermé lycée privé Franklin, temple de l’oligarchie où se forment les héritiers de l’élite du pays ; et que c’est en fait bien Bernard Arnault, via Delphine Arnault, et non l’insignifiant Pascal Houzelot, comme le prétend l’ouvrage Mimi- qui a fait se connaître Xavier Niel et Emmanuel Macron en premier. 

 

Voilà donc que l’on a découvert en passant que la désintéressée et généreuse Brigitte Macron, admirée par tous les Français depuis que la trafiquante de drogue Mimi Marchand est devenue sa meilleure amie enseignait non pas en un lycée public, non pas en un lycée difficile, mais dans l’un des lycées les plus cossus de Paris, choisi volontairement et où elle profitait de son poste pour se lier avec la principale fortune de France et la présenter à son ambitieux mari – que l’on disait alors désargenté et éploré – pour s’assurer que ce dernier se verrait mettre le pied à l’étrier et s’en trouverait aisément propulsé. Le jeune homme au regard tranchant, blanche colombe prête à se sacrifier pour la France, avant même d’être ministre ou secrétaire général adjoint de l’Elysée, comme soutien et ami non seulement l’oligarque Xavier Niel, mais aussi la première puissance financière de France, en plus de la banque Rothschild et de ses réseaux, qu’il obtiendrait en trahissant l’inspection générale des finances – en plus de la bourgeoisie amiénoise, en plus de ceux de Jean-Pierre Jouyet que l’on s’apprête à exposer, et ce alors même qu’il n’était organiquement, publiquement « rien ». Et l’on rappelle que la presse détenue par ces individus le présenterait, des années plus tard, par hasard et en toute indépendance journalistique, comme venant du néant, pur produit du génie et du mérite.

 

Cet homme pourtant déjà millionnaire, devenu millionnaire avant trente ans grâce à la vente des réseaux que lui avait offert la République à une banque privée, nous serait au contraire présenté comme le parangon de la démocratie libérale, de notre méritocratie républicaine, d’un système nettoyé. Cet homme dont tout le parcours exhale le service du soi n’aurait-il en fait été qu’un pantin au service de ceux dont il a appliqué, à la lettre, le programme, utilisant ses titres et qualités inventées– on le prétendrait même, faute de talents sur lesquels s’appuyer, philosophe reconnu et pianiste de renom ! – pour recouvrir cette opération bien huilée ? 

 

(La suite après-demain)

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commentaires

9
Panique au sommet de l’Etat:M.Grivois avec l’aide de son bras droit M.Son-Forget a diffusé sur des réseaux sociaux des images/vidéos pouvant être diversement appréciées.La dream team a toujours un tour dans son sac pour se montrer à son avantage.Branle-bas de combat :en pleine crise du coronavirus,la ministre de la santé qui ignore tout des campagnes électorales se lance au pied levé à la conquête de la ville de Paris.Ainsi,en macronie,exhibitionnistes,plaisantins,fantaisistes et ambianceurs se succèdent en improvisant,au jour le jour,sur un rythme endiablé :le spectacle est garanti !
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A
Branco est respectable, son parcours universitaire admirable, son courage tout autant , ses propos très instructifs mais son style n'est pas évident. Il faut s'accrocher car je me perds dans ses méandres explicatives. C'en est souvent pénible. Pourtant, quand même, l'ENS. J'espère tout de même beaucoup de publicité à ses écrits.
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G
D'accord pour le style. J'ai élagué. Il est jeune, il s'écoute écrire. Mais il est diablement courageux et efficace.