Une séquence d’un film vu voici plus de 40 ans m’est revenue à l’esprit, sans doute déformée.<br />
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Une église. Les fidèles endimanchés assistent à la messe. Bien droits, chaussures cirées, costumes impeccables, chapeaux. Le prêtre lit un évangile quelconque. Sur un autel latéral se dresse la<br />
croix avec un christ en pierre peinte, couleurs brillantes, visage assez réaliste.<br />
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Perdu, le Sauvage entre dans l’église. Hirsute, barbu, torse nu, vieux pantalon tenu avec une ceinture de ficelle, pieds nus, doucement il avance dans l’allée centrale, observant ces notables<br />
guindés qui eux-mêmes le fixent en murmurant. Le prêtre s’est tu.<br />
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Le Sauvage aperçoit alors ce christ cloué sur la croix et dont le visage exprime une grande souffrance sous la couronne d’épines. Oubliant l’assistance, cet intrus s’avance vers l’autel, y grimpe,<br />
se met à la hauteur du christ dans un brouhaha croissant de réprobation, puis doucement il l’enlace avec tendresse en pleurant.<br />
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Après quelques longues secondes, des fidèles se saisissent enfin de l’indésirable, l'arrachent à son acte sacrilège, le trainent dans l’allée et le jettent dehors, puis reprennent leurs places. Le<br />
prêtre termine son sermon sur le thème de la profanation.<br />
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Personne n’a remarqué deux larmes de sang qui coulent maintenant des yeux du christ…