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22 novembre 2011 2 22 /11 /novembre /2011 12:26

 

http://3.bp.blogspot.com/_kvN07aY6CKQ/TCkPf5jgtkI/AAAAAAAAAbw/2VqJz0zNLz0/s1600/déprime.jpgJe souhaite dire quelques mots du traitement, par les médias (en particulier France 2, France 3 et France Inter) du drame survenu au  Chambon-sur-Lignon – le viol puis le meurtre (suivi de crémation) de la  jeune Agnès par un de ses camarades de lycée.

 

Comme souvent, mes remarques sont une critique du journal "en creux", c'est-à-dire de ce qui a été tu, passé sous silence, ignoré ou négligé.

 

1. Première remarque : les journalistes se sont largement épanchés sur  la douleur des parents, des condisciples de la victime, mais aucun n'a  eu un mot pour la douleur, la honte, la déréliction des parents et  proches du présumé coupable. Or, avoir un proche criminel est aussi une  grande douleur que d'avoir un proche victime, douleur psychologique,  certes (comme celle des proches de la victime) mais aussi douleur  morale, parce que personne ne se précipite pour vous soutenir, personne  (à part quelques intimes) ne vous manifeste sa compassion.

 

Cette situation, pour les parents, est aussi injuste que celle qui  frappe les parents de la victime, d'autant plus, en l'occurrence, qu'il n'y a pas de "déterminisme social" (les parents du meurtrier présumé ne  viennent pas de la "banlieue", ils ne sont pas immigrés, ils ont même  des revenus très corrects, pour payer les importants frais de scolarité du collège cévenol). Ce coup du sort est du même ordre que celui qui les  atteindrait si leur fils avait été atteint d'une maladie génétique, d'un  dérangement de son organisme – et, à bien des égards, ces pulsions de  viol et de meurtre ne sont-elles pas, aussi, un dérangement de cette  partie de l'organisme qu'est l'esprit ?

 

2. Deuxième remarque : les journalistes considèrent comme "anormal"  qu'un individu – et, à plus forte raison, un jeune – commette de tels  forfaits. Or, ce qui devrait être intégré, c'est que de telles horreurs, loin d'être anormales, sont, dans une société, "normales", entendu au sens d'inévitables. Il est statistiquement normal que, sur 65 millions  de Français, des individus sortent de la norme, soit en "bien"  (capacités physiques ou intellectuelles exceptionnelles), soit en mal.

On pourrait même estimer que, comme les accidents de la circulation, il  est étonnant qu'il n'y en ait pas plus ! Chaque groupe social comporte  nécessairement son lot de désaxés, névrosés, etc. et il est même heureu  qu'il en soit ainsi et qu'on n'aboutisse jamais à une société  "normative" qui, à coup de pilules, de vaccins, ou de modifications génétiques, remettrait ses membres dans une hypothétique "norme". Une telle société atteindrait le fond – si tant est qu'il y en ait – du totalitarisme...

 

3. Troisième remarque : la perspective de cet horrible fait divers  change lorsqu'on le considère non dans son aboutissement (un meurtre)  mais dans son origine (une désocialisation, une perte des repères). Or,  cette désocialisation, cette perte de repères peuvent aussi bien prendre

les modalités, chez une jeune fille, d'une boulimie ou d'une anorexie,  ou chez un jeune homme, de conduites à risque – prise d'alcool, vitesse  excessive, recherche de dangers – qui aboutissent exactement au même  résultat, soit pour l'individu, soit pour les tiers. Souvent, dans la  nuit des samedis aux dimanches, de jeunes conducteurs précipitent leur  voiture de plein fouet contre un arbre, contre un mur ou contre un autre  véhicule, en tuant trois, quatre ou cinq personnes. La plupart du temps, cela ne fait l'objet que d'une brève, qui ne dure guère plus que  quelques secondes - et qui ne passe qu'une fois. Or, quelle est la  différence, pour les parents, par rapport à ce qui est survenu au  collège cévenol ?

 

4. Quatrième remarque : parmi les causes qui aboutissent à mourir avant  la majorité, le meurtre est l'une des plus rares. L'énorme majorité de   jeunes qui meurent avant 20 ans périt d'accidents de la circulation,  d'accidents domestiques, de noyades, de chutes d'arbres, de murs,  d'immeubles, etc. Le premier souci des parents devrait être de protéger  leurs enfants contre tous les dangers - et pas seulement contre celui de  meurtre. Dans la focalisation sur ce type de danger, il y a la même  irrationalité que dans la phobie des requins alors que les attaques de  ces derniers, par an, ne concernent pas plus qu'une dizaine de cas – infiniment moins que les seules piqûres de guêpes, abeilles ou frelons,  ou que les morsures des "braves toutous" de la maison...

 

On peut même se demander, parfois, si la société, plutôt que de chercher  à prévenir un acte (viol, crime) ou un fait (mort violente) ne cherche  pas davantage à punir un acteur (violeur, criminel) dont elle nourrit  une idée préconçue : noir, arabe, immigré, chômeur, déviant (trop  volubile, trop taciturne, trop bruyant...). Tout se passe comme si la  volonté de punir préexistait à la raison censée l'avoir suscitée.

 

Philippe Arnaud, Tours.

 

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commentaires

M
L'auteur de l'article pourrait aussi ajouter que plus on réprime et moins on éduque, ce qui est l'orientation actuelle, plus les gens devienent "fous" et commettent des actes irréparrables ! Tout<br /> le contraire de ce qu'il faudrait faire pour protéger l'intégrité de chacun, cela s'appelle l'épanouissement de la personne, mais pour la droite, c'est des gros mots, y a pas de profit immédiats ??
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