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22 juin 2016 3 22 /06 /juin /2016 05:30
Le Ministère de l'Education national, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche publie un rapport sur l'état de l'Enseignement supérieur et de la recherche en France en 2016 qui présente un état des lieux annuel et chiffré du système français d'enseignement supérieur et de recherche.

On peut mettre en regard ce rapport avec deux articles publiés par le site letudiant.fr qui présentent, d'une manière somme toute assez modérée, l'état d'esprit des universitaires fraçais aujourd'hui.

 

Faudra-t-il un suicide pour que l'opinion publique se rende compte de l'état de désolation mentale dans lequel se trouve les universitaires, un état identique à celui des employés de La Poste ou d'EDF, pour ne citer que ces deux entreprises.

Université : une communauté investie mais découragée

Camille Stromboni   |  Publ

http://www.letudiant.fr/educpros/enquetes/barometre-2016-le-moral-toujours-en-berne-a-l-universite.html

 
Baromètre EducPros 2016 - Moral des personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche

69 % des répondants au baromètre 2016 sur le moral dans l'enseignement supérieur et la recherche ne sont pas enthousiastes pour l'avenir de leur établissement. // © Julien Revenu 

BAROMÈTRE 2016. Épuisement, découragement, inquiétude pour l’avenir. Les personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche n’ont toujours pas le moral, d’après la troisième édition du baromètre EducPros. Malgré un attachement au secteur qui demeure intact. 

Les années passent mais le regain de confiance ne vient pas. Plus des deux tiers des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche ne sont pas enthousiastes pour l’avenir de leur établissement, d’après la troisième édition du baromètre EducPros, publiée le 14 juin 2016. La moitié des 1.600 répondants se dit toujours démotivée. La même proportion de sondés juge que son travail a un effet négatif sur la santé.

 

UNE VIE PROFESSIONNELLE ÉPUISANTE MAIS… STIMULANTE

 

Des chiffres témoignant de l’inquiétude d’une communauté qui restent plus élevés chez les universitaires (72 % confient leur absence d’enthousiasme pour l’avenir) que dans les écoles (56 %), et particulièrement forts dans les sciences humaines et sociales (81 %).

 

Pour définir leur vie professionnelle, les deux adjectifs qui arrivent en tête, chez l’ensemble des personnels, sont explicites : "épuisante" (41 % l’ont choisi) et "décourageante" (37 %).

 

En revanche, l’attachement au secteur demeure intact. Une écrasante majorité des personnels se dit fière de travailler dans son établissement (74 %) et trouve dans le travail une source de satisfaction (77 %). Avec tout de même une légère diminution sur ces deux indicateurs, par rapport à 2015 (– 3 points). "Stimulante" est quant à lui le troisième qualificatif le plus choisi par les sondés pour définir leur vie professionnelle.

 

"Ces variables caractérisant le moral sont quasi identiques depuis trois ans, relate François Sarfati, chercheur au Centre d’études de l’emploi, associé à la réalisation du baromètre EducPros depuis sa création, en 2014. On peut désormais considérer ce double sentiment comme une tendance lourde dans la communauté universitaire."

 

J’aime mon métier, mais c’est de plus en plus difficile de le faire. 
(J.-R. Bourge)

 

DES MOYENS RESTREINTS ET TOUJOURS PLUS D’ÉTUDIANTS

 

"J’aime mon métier, mais c’est de plus en plus difficile de le faire, confie Jean-Raphaël Bourge, chargé de cours à l’université Paris 8, engagé dans le mouvement contre la loi Travail. Cela vaut autant pour les précaires, comme moi, que pour les titulaires, qui sont de plus en plus submergés par les tâches administratives."

 

"On ne travaille pas dans ce secteur par hasard, c’est pour beaucoup une vocation et les personnels sont toujours très investis dans leurs missions. Mais le moral est dans les chaussettes, confirme Franck Loureiro, secrétaire du Sgen-CFDT en charge de l’enseignement supérieur. Cela s’explique avant tout par le manque de visibilité sur l’investissement de l’État dans l’université, alors que nous allons encore avoir 30.000 étudiants de plus par an… jusqu’en 2022 ! Si le budget ne suit pas, on va à la catastrophe. Et ce, dès la rentrée qui arrive."

 

Voilà la seule représentation de notre futur que l'on peut se faire : 'moins'.

"Aujourd'hui, autour de moi, on ne parle plus beaucoup de pédagogie, ni de vision d'avenir. Le seul mot qui résonne est 'réduction budgétaire', confie un enseignant d’une école d’ingénieurs, dans les commentaires libres du baromètre EducPros. On valorise celles et ceux qui prétendent faire la même chose avec moins d'heures. Voilà la seule représentation de notre futur que l'on peut se faire : 'moins'. Des dizaines de postes sont supprimés ; les départs à la retraite ou en mutation ne sont pas remplacés ; on tremble à l'annonce d'un congé maternité... Le moral des troupes se dégrade, et surtout, la qualité de l'enseignement. Mais qui s'en préoccupe ?"

"Les moyens baissant constamment, la possibilité et le temps requis pour mener des projets ambitieux à moyen ou long terme deviennent quasiment inexistants, renchérit un chercheur en sciences et technologie dans un organisme de recherche. Il en résulte un mal-être, des burn-out à répétition dans mon environnement."

Un moral faible qui pèse lourd au moment de juger le quinquennat Hollande.

 

 

 

L'université ne reconnaît pas les siens

Sophie Blitman   

 

http://www.letudiant.fr/educpros/enquetes/l-universite-ne-reconnait-pas-les-siens.html

 
Baromètre EducPros 2016 - Moral des personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Près des deux tiers des répondants à notre baromètre 2016 estiment que leur travail n'est pas reconnu à sa juste valeur, que ce soit dans leur établissement ou dans la société. // © Julien Revenu 

 

BAROMÈTRE 2016. Des salaires insuffisants, un manque de temps et de considération professionnelle : pour les personnels de l'enseignement supérieur et de la recherche, le compte n'y est pas, d'après le baromètre EducPros 2016. Certains tentent néanmoins de trouver du sens à leur investissement. 

L'enseignement supérieur français souffre d'un manque de reconnaissance persistant. Comme dans les deux éditions précédentes, près des deux tiers des répondants à notre baromètre 2016 estiment que leur travail n'est pas reconnu à sa juste valeur, que ce soit dans leur établissement ou dans la société.

 
"DÉCLASSEMENT SOCIAL"

 

Ce sentiment trouve d'abord un ancrage financier. D'après les résultats de notre baromètre, les trois quarts des personnels des universités, et les deux tiers dans les écoles et organismes de recherche considèrent ne pas être rémunérés à la hauteur de leurs responsabilités. Concernant le poste occupé, si 61 % des répondants disent exercer des fonctions en adéquation avec leur formation et leurs compétences, près d'un sur cinq affirme que ses compétences sont sous-employées.

 

Pour Hervé Christofol, à la tête du Snesup (Syndicat national de l'enseignement supérieur), ce malaise reflète le "déclassement social que les personnels du supérieur subissent depuis trente ans. Pendant cette période, nous avons perdu 25 % de notre pouvoir d'achat", affirme-t-il, insistant sur le fait que "nous sommes les derniers fonctionnaires à voir leur carrières revalorisées : nous passons non seulement après les enseignants du second degré, mais aussi après les cadres des ministères, les administrateurs territoriaux, les ingénieurs des Ponts, les directeurs des hôpitaux…", énumère le responsable syndical pour qui "les enseignants-chercheurs vont être la dernière roue du carrosse".

 

"SIDÉRATION" ET "CULPABILISATION"

 

Il en résulte, comme les années passées, un sentiment de démotivation qui concerne toujours près de la moitié des répondants. Ceux-ci mettent par ailleurs l'accent, de manière très concrète, sur des conditions de travail peu satisfaisantes : plus des deux tiers affirment ne pas avoir les moyens matériels de mener à bien toutes les missions qui leur sont confiées et les trois quarts disent ne pas en avoir le temps, d'autant qu'ils doivent aussi faire face à une hausse des effectifs étudiants.

 

"Les conditions matérielles de travail se dégradent de plus en plus, témoigne une enseignante-chercheuse dans une université en droit, économie, gestion. On est en sous-encadrement récurrent de profs et d'agents administratifs. On a donc des effectifs trop importants pour faire du bon travail sur le plan pédagogique. On nous dit alors d'utiliser les nouvelles technologies quand on ne capte qu'une fois sur deux le réseau ou qu'il n'y a pas de vidéoprojecteur installé dans toutes les salles et qu'il faut se trimbaler le vidéoprojecteur, l'ordinateur, une rallonge et parfois une chaise aussi  !"

 

"Les personnels sont tout simplement sidérés", renchérit Hervé Christofol. "Ils courent à droite et à gauche pour faire leurs cours, ils essaient de mener de front toutes leurs missions avec plus ou moins de réussite", décrit le responsable qui évoque "un mode de management par la culpabilisation".

 

On a des effectifs trop importants pour faire du bon travail sur le plan pédagogique.

 

"TROUVER DU SENS À SON MÉTIER"

 

Sans nier le malaise, le président de l'université de Cergy-Pontoise François Germinet veut se montrer positif et insiste sur la manière dont les établissements peuvent contrer ce sentiment, par exemple en organisant une cérémonie de remise des diplômes.

 

"Nous réunissons à cette occasion plus de 6.000 personnes, dont 2.000 diplômés de DUT, licence professionnelle ou master qui viennent accompagnés de leurs proches, détaille-t-il. Cet événement marque l'aboutissement du travail accompli durant toute l'année : cela matérialise le chemin parcouru, pour les étudiants comme pour les collègues. Les enseignants, mais aussi les personnels administratifs des composantes, ressentent une vraie fierté à voir ainsi défiler les promotions : le sourire qu'affichent les étudiants récompense nos efforts pour les accompagner durant leur formation. Cela donne du sens à ce que nous faisons."

 

Malgré tout, la reconnaissance institutionnelle se fait attendre, notamment en ce qui concerne l'engagement auprès des étudiants. Notre baromètre montre que, si les personnels estiment que leur investissement dans des projets de recherche est reconnu et valorisé, financièrement ou symboliquement, il n'en va pas de même sur le pédagogique. Dans les universités, ce sentiment  prévaut chez deux tiers des personnels.

 

Le constat est loin d'être nouveau : en septembre 2014, un rapport piloté par Claude Bertrand proposait d'instaurer une "prime d'excellence pédagogique ". Début juin, en marge de Futur en Seine, le festival de l'innovation en Île-de-France, le secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche Thierry Mandon a réaffirmé qu'il travaillait sur le sujet. Dont acte.

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