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9 mai 2011 1 09 /05 /mai /2011 06:38

http://mobile.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L292xH253/Bilan_Libertes_2007-2-d14d1.gifLa LRU, qui institutionnalise la "liberté", l'"autonomie" des universités, autorise tout et son contraire. Ainsi, elle permet aux autorités universitaires, comme l'explique ici l'universitaire Stephen Noble, de violer tranquillement la loi sur l'informatique et les libertés de janvier 1978.

 

Récemment, j'ai découvert, avec grande surprise, que certaines universités en France exigent que les candidats aux postes de Maître de conférences et de Professeur des universités envoient leurs dossiers par le biais d'une connexion électronique -- soit par l’intermédiaire d'un serveur dédié, soit par courrier électronique -- et ce à l'exclusion de tout autre mode d'envoi (par exemple, à l'exclusion du dossier dit "papier"). Cette situation m'a paru invraisemblable, car, concrètement, cela veut dire que les universités obligent les candidats à numériser une pièce d'identité et à envoyer cette pièce d’identité numérisée via une connexion électronique.

Il s'avère que la situation est en fait grave, même plus grave qu'on ne le croyait initialement : aujourd’hui, selon la Commission des informations et des libertés (C.N.I.L.), le Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ainsi que certaines universités en France sont en situation 
d'infraction pénaleNi plus, ni moins. Les raisons en sont les suivantes.

Premièrement, 
en vertu de l'article 22 de la loi sur l’informatique et les libertés du 6 janvier 1978, "les traitements automatisés de données à caractère personnel" doivent faire "l'objet d'une déclaration auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés". Or, selon la C.N.I.L., il s'avère que ni le serveur "Galaxie" ni le serveur spécialisé de certaines universités n'ont fait l'objet d'une déclaration auprès de la Commission.

Deuxièmement, aujourd'hui en France 
l'imposition d'un traitement informatique de données à caractère personnel est illégale. Les textes de référence sont la Délibération de la C.N.I.L. n° 02-017 du 21 mars 2002 ainsi que la Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995. Cette Directive prévoit notamment ceci dans son paragraphe 30 : "[...] pour être licite, un traitement de données à caractère personnel doit en outre être fondé sur le consentement de la personne concernée [...]".


La situation est d'autant plus grave que, encore selon la C.N.I.L., une jurisprudence établie par la Cour de cassation en date du 6 avril 2004 (
Arrêt n° 944) pourrait très bien s'appliquer. Cette jurisprudence a établi le principe selon lequel une décision qui s'appuie sur une procédure qui n'a pas fait l'objet d'une déclaration auprès de la C.N.I.L., et qui aurait dû faire l'objet d'une telle déclaration, est illégale. Concrètement, pour la communauté universitaire aujourd'hui, ceci implique que toute procédure qui passe par l’intermédiaire de "Galaxie" (recrutement, qualification...) pourrait faire l'objet d'un recours afin d'être annulée.

Vous aurez sans doute déjà mesuré l'importance de ces faits. Il semble que, dans l'enseignement supérieur, la situation soit sans précédent.

Mais, comme dit initialement, mon intérêt a été attiré sur ce sujet par le fait qu'on exige l'envoi d'une pièce d'identité numérisée via une connexion électronique. 
Aujourd'hui, le phénomène qu'on appelle "usurpation d'identité" existe bel et bien, ce phénomène est de plus en plus répandu, et les personnes qui en sont victimes ont les pires ennuis. L'existence d'un nombre important d'ordinateurs personnels et de serveurs contenants des pièces d'identité numérisées, tous connectés à Internet, dans les locaux des universités où la sécurité électronique peut parfois laisser à désirer, serait une aubaine pour des personnes avec des intentions néfastes. Aujourd'hui en France, la loi vous protège : il est illégald'exiger l'envoi d'une pièce d'identité numérisée par Internet.


Cette situation et ces informations concernent, bien entendu, l'ensemble de la communauté universitaire. C'est pourquoi il serait peut-être opportun d'en parler à vos collègues, afin de les en avertir et de s'opposer à l’imposition de cette pratique.

 

Stephen Noble

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