Ci-dessous un communiqué du Snesup qui montre à quel point la politique de Hollande, en matière de statut des personnels de l'Enseignement supérieur, est plus réactionnaire que celle de Sarkozy/Pécresse.
Une alerte est nécessaire sur l'article 43bis de la loi ESR introduit en commission par Le Déaut avec le soutien de Fioraso.
On avait dénoncé avec force l'inattention de la ministre aux statuts des personnels, se traduisant par une quasi-absence de ceux-ci dans le projet de loi. On aurait dû se méfier d’un article 43 à contenu vide qui gardait la place pour quelque chose. Une fois le projet soumis aux partenaires et aux instances y compris le CNESER, l'article 43 a été supprimé pour faire place aux véritables intentions du ministère : le 43bis a été introduit, dénoncé par le communiqué intersyndical du 28 mai avec juste raison.
Cet article s'applique aussi bien aux enseignants-chercheurs qu'aux enseignants et aux chercheurs ("personnels mentionnés à l'article L. 952-1") et combine la mobilité chère à Sarkozy et la modulation de service portée ainsi au niveau législatif : on pourrait parler de "mobidulation". Comme les couteaux suisses, l’article comporte plusieurs lames : la modulation de service proprement dite, la modulation temporelle chère à certains syndicats, la modulation spatiale aussi bien par changement de lieu que par changement d'établissement.
- Modulation spatiale: Reprenant et étendant les dispositions du décret de 84, l’article permet la mobilité « au sein du même établissement d'enseignement supérieur, entre établissements d'enseignement supérieur, avec les organismes de recherche et les fondations du secteur de la recherche, avec les services publics de toute nature et entre ces services et établissements et les entreprises, en France ou à l'étranger ainsi que des collaborations ou mises à dispositions dans des laboratoires ou institutions publiques, semi-publiques ou privées.
- Modulation de service et modulation temporelle : Ces personnels « participent aux missions du service public de l'enseignement supérieur définies à l'article L. 123-3. Leurs statuts leur permettent d'exercer ces missions simultanément ou successivement » Cette formulation permet aussi bien de cesser à un moment de faire de la recherche, que de répartir ces activités dans le temps. Ainsi les deux formes de modulation sont comprises dans cette phrase.
Le placement de toutes ces dispositions ensemble fait de cet article une trousse à outils complète de modulation permettant à chacune de ces trois formes de se combiner aux autres pour en multiplier les effets nocifs. Plaçant ces mesures au niveau législatif, le projet en renforce le caractère obligatoire. De plus, tous les garde-fous (nécessaire accord de l’intéressé, nécessité de préserver une moyenne de 192 h/TD pour les EC) ont été omis dans ce texte.
S’il advenait que cet article soit maintenu dans le texte final, ce serait une déclaration de guerre aux personnels, à laquelle devrait répondre une mobilisation de grande ampleur.
Par ailleurs, un amendement déposé par le gouvernement au Sénat vise à modifier radicalement le fonctionnement et surtout l'esprit du CNESER disciplinaire.
Le CNESER disciplinaire est une juridiction administrative INDÉPENDANTE, compétente soit en appel, soit plus exceptionnellement en premier ressort. La formation disciplinaire est composée d'enseignants-chercheurs (professeurs et maîtres de conférences) et d'étudiants élus. Elle élit son président parmi les professeurs, de sorte que le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche n'intervient pas dans cette instance.
En modifiant l’article L. 232-3 du code de l’éducation, qui deviendrait « Le président du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire est un conseiller d’Etat, en activité ou honoraire, nommé par le ministre chargé de l’enseignement supérieur. Un président adjoint, élu en leur sein par l’ensemble des enseignants-chercheurs membres de cette juridiction la préside en cas d’absence ou d’empêchement du président », le MESR rompt brutalement avec le principe d'indépendance du CNESER disciplinaire.
Si l'amendement était adopté, un Conseiller d'Etat, nommé par le MESR, serait le Président du CNESER disciplinaire. L'argument du renfort juridique ne peut aller à l'encontre du principe fondamental d'indépendance de la juridiction et aboutir à la mise sous tutelle de cette instance.
Un renfort juridique peut être envisagé, mais sous la forme d'un membre extérieur à la juridiction (Conseiller d'Etat ou professeur des universités spécialiste en droit), venant assister le Président élu du CNESER disciplinaire.
Enfin, que penser de la méthode du cabinet qui consiste à faire semblant de consulter le président du CNESER disciplinaire, à annoncer au SNESUP un travail de concertation préalable à des évolutions par décret, alors même que l'amendement est déjà déposé ?
Le SNESUP s'oppose de la manière la plus vigoureuse à ce tour de force visant à caporaliser le CNESER disciplinaire et exige le retrait de cet amendement inacceptable. Il s'adresse immédiatement aux collègues de la communauté scientifique, aux sénatrices et sénateurs qui doivent examiner cet amendement, pour que l'indépendance du CNESER disciplinaire soit garantie.