Ci-dessous un article que je n'avais pas l'intention de publier de nouveau. Paru en avril
2010 dans mon blog censuré et dans Le Grand Soir, ce texte consacré à Manuel Valls suscita de nombreuses
réactions allant dans mon sens.
L'actualité vallsienne m'amène à reproposer ce texte : le député vient en effet de publier
un livre titré Sécurité. Il n'en est pas encore à Fliquons les
pauvres, mais ça ne saurait tarder. C'est tout lui, cette thématique. Rue 89 parle de "rodomontades viriles", d'un discours d'ordre, d'autorité, un
discours "monorépressif qui passe bien à la télé".
Valls, l'homme à qui on offre des fleurs et qui ne les prend pas ?
Le dirigeant socialiste Manuel Valls s’est prononcé contre la grève des cheminots qui « coûte 20 millions d’euros tous
les jours ».
Valls vient de publier un livre intitulé Pouvoir. On pourrait épiloguer sans fin sur ce titre. Mais ne nous livrons
pas à de la psychanalyse de comptoir.
Valls propose de réformer les retraites de concert avec la droite. Dans le consensus. Et dans la « pédagogie ». Il
faut continuer à remettre en cause les régimes spéciaux, aligner le public sur le privé. Sans nivellement par le bas. Ah bon ? Proposer un système de retraite « à la carte ». Il
faudra cotiser 43 annuités. Pas de tabou ! Ne pas « s’accrocher à des acquis dépassés ».
Revenons aux cheminots qui n’ont pas vraiment apprécié l’injonction de Valls. Ces travailleurs luttent, entre autre chose,
contre la privatisation de la SNCF (qui a commencé il y a des années de manière subreptice et pas vraiment franche) et donc contre la fin de leur statut d’employés d’une entreprise de
l’État.
À Valls, des militants cégétistes du Nord-Pas-de-Calais viennent de répondre ceci (repris par le site Bella Ciao) :
« En cette journée d’action de grève chez les Cheminots, certaines personnes bien intentionnées nous ressortent :
« C’est une GREVE CORPORATISTE ».
Alors :
Si empêcher de mettre 1000 camions en plus par jour sur les routes, c’est corporatiste,
Si améliorer la sécurité des transports en empêchant de faire reculer les conditions sociales et de travail des cheminots,
c’est corporatiste,
Si dénoncer la politique de la SNCF qui est à l’inverse du "développement durable" et du grenelle de l’environnement, c’est
corporatiste
Si demander à avoir plus de moyens humains et matériels pour donner un service de qualité aux usagers, c’est
corporatiste,
Si dénoncer les dérives possibles en matière de Sécurité, c’est corporatiste
Si dénoncer que la SNCF met un maximum de moyens sur le TGV et pas sur le TER, alors que c’est le TER qui est du ressort du
Service Public, c’est corporatiste,
Si, si, si ....... nous pourrions donner des exemples comme ceux là par dizaines, alors si c’est cela être corporatiste, OUI
les Cheminots sont corporatistes du Service Public au service du public.
Les Cheminots, comme beaucoup d’autres salariés, sont soucieux de l’avenir des acquis sociaux, de la planète et des hommes et
des femmes qui y habitent, ils sont des penseurs d’avenir !!!
Alors OUI, la CGT appelle à Agir pour ne pas Subir, parce que les moyens existent, les Françaises et les Français et parmi
eux les cheminots valent plus que les banques. Alors que le gouvernement a trouvé les moyens en injectant des milliards pour sauver les banques, pourquoi n’aurait-on pas les moyens pour sauver
nos acquis sociaux ? Lorsque l’on voit le nombre de suicides, de dépressions que suscite la soit disante crise, dont nous ne sommes en rien responsable, oui les salariés ont raison de
lutter, non les cheminots ne sont pas des égoïstes qui luttent pour des privilèges, ceux qui ont des privilèges se sont les patrons du CAC 40 qui ont vu leurs salaires croître à la vitesse du
TGV, pendant que celui des cheminots se smicardisait ! »
Le blog Indépendance des chercheurs rétorque, quant à lui, ceci :
« Le 8 avril, les médias commentent le désaveu public adressé par le dirigeant et élu du Parti Socialiste Manuel Valls à
la grève des cheminots. Valls, qui fut l’un des participants à la rencontre de Bilderberg d’il y a deux ans, se plaint hypocritement du “ coût ” de la grève mais se montre beaucoup moins bavard
sur celui de la casse des services publics. Sous la “ gauche plurielle ”, Manuel Valls fut notamment chargé de la communication et de la presse au cabinet du Premier ministre Lionel Jospin, en
pleine frénésie de privatisations, de définition de stratégies de démantèlement des services publics et de planification de la casse sociale. Cette politique, commencée il y a environ ving-cinq
ans, poursuivie depuis par tous les gouvernements et renforcée par la mise en place progressive des structures marchandisées de l’Union Européenne, menace l’ensemble des services publics. Elle
correspond également à l’application de l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) depuis 1994. Le samedi 10 avril, une assemblée générale
de défense de l’éducation publique, de la maternelle à l’université, est prévue à Paris, au centre Censier. »
Tout pouvant arriver en politique (Sarkozy était dans les choux il y a moins de dix ans), Manuel Valls sera peut-être le
prochain Président de la République française. Quand on l’écoute à la radio, ce qui frappe à l’oreille, c’est qu’il a le phrasé de François Hollande. Mais il a un gros avantage sur lui :
huit ans de moins. Ils sont unis dans leur amour pour le social-libéralisme (ne jamais oublier que, dans cet expression, le mot important, le substantif, c’est libéralisme).
On vient toujours de quelque part. Si j’en crois Wikipédia (je n’ai pas d’autres lumières le concernant), Valls vient d’un milieu – catalan certes – mais aisé. Son père
était artiste-peintre, sa mère enseignante. Un de ses grands-pères, nous dit-on, « cacha des prêtres persécutés par les trotskistes et les anarchistes ». Ce grand-père était peut-être
« républicain et catholique », les prêtres persécutés étaient forcément franquistes, anti-républicains, en faveur de l’ordre du sabre et du goupillon.
Toujours selon Wikipédia, Valls se dit « blairiste », du nom de Anthony Blair, un Premier ministre travailliste qui
est allé, dans bien des domaines, plus loin dans la casse du monde du travail que la conservatrice Margaret Thatcher. Il se dit également (collons-nous des étiquettes anglo-saxonnes, ça fera plus
joli) « clintonien », du nom de William Clinton, un Président des États-Unis qui a fortement contribué a repousser le Parti démocrate toujours plus vers la droite, un parti dont Valls
voudrait que le sien s’inspirât davantage pour entrer dans la modernité.
En bon présidentiable, Valls sait faire la girouette. Il fut proche de Rocard, puis de Jospin. Lors du débat de 2005
concernant le Traité constitutionnel européen, dernier vrai débat contradictoire que la France ait connu, il se déclara en faveur du non, puis du oui après le vote interne au parti. Il fut du
nombre des élus PS qui trahirent le vote du peuple français en ratifiant le Traité de Lisbonne en 2007 lors du Congrès du Parlement français. Valls est, par ailleurs, un obsédé de la sécurité
(« Policing the poor », comme on dit outre-Manche). Son ancienne épouse travailla pour la société d’Alain Bauer, AB Associates, spécialisée dans les problèmes de délinquance,
de sécurité, de « veille stratégique », d’« assistance à la gestion de crise ». Conseiller de la police de New York (ce qui n’est pas donné à tout le monde) et de Sarkozy,
Bauer fut membre de l’Unef à la même époque que Valls, membre du Parti socialiste, et surtout président du Grand Orient de France, où Valls fit un passage éclair (toujours la girouette).
Si Valls accède un jour à la seule fonction digne de lui à ses yeux, nous serons bien gardés.
Je joins quelques commentaires et une de mes réponses :
11/04/2010 à 03:18, par Anonyme
Mon père était cheminot (conducteur électricien) ; il a fait la résistance et a participé à la
libération de Paris. Si il vivait, il serait fou et furieux de voire ce qui se passe. Je me rapelle ce qu’il disait sur Léon Blum. Ce dernier aurait déclaré : "-Nous socialiste nous sommes
et resterons les défenseurs loyaux du capital." Ca n’a pas changé. Ceux sont les mêmes, c’est à dire ces bons bourgeois, qui se sont débrouillés à la Révolution de 1789, pour se servir du peuple
pour abolir la noblesse et pour s’installer à la place de cette dernière, laisant ainsi le peuple de sa victoire. De ce fait la Révolution n’est toujours pas achevée. Nous avons besoin de gens
sérieux et honnêtes qui se battent pour le peuple et non pas de gens qui ne recherchent que la soif du pouvoir et d’intérêts personnels.Des "moi, je, moi, je, nous n’en voulons plus.Voter pour un
individu c’est grave ! Voter pour un idéal, c’est aspirer à un monde meilleur, c’est avancer en toute conscience vers une société plus juste et ça, c’est au peuple à le vouloir. Tous
ensemble oui, un individu seul, il n’est que de passage.
11/04/2010 à 10:42, par El Viejo Topo
Valls est à l’image de beaucoup de dirigeants du PS, "un gérant loyal du capitalisme" disait Blum. Son histoire personnelle a
peu d’intérêt. Son avenir "à gauche" encore moins.
Par contre, la question qu’il faut se poser si l’on veut changer cette société, c’est : peut-on éternellement faire
l’impasse sur des positionnements sociaux-libéraux du PS qui n’ont rien d’individuels mais représentent le fond d’une politique.
Kouchner a trahi, Besson a trahi, Allègre a trahi, Charasse a trahi.
Le soir du 2° tour des présidentielles, Royal déclarait sur le SMIG le contraire de ce qu’elle avait affiché pendant sa
campagne.
Aubry et Hollande montrent le bout de l’oreille sur les retraites.
Le "camarade" Lamy dirige l’OMC et le "camarade" Strauss-Kahn le FMI avec les orientations que l’on connait.
Parcours individuels ou réalité politique ?
Pour pouvoir être victorieux, le rassemblement pour le socialisme passe aussi par la dénonciation politique
de l’imposture social-démocrate.
El Viejo Topo.
11/04/2010 à 11:20, par Samuel
Métairie
Qu’un homme politique membre du parti "socialiste" soit issu d’un milieu aisé,ce n’est pas une sinécure. Ces gens n’ont pas
de convictions, ils s’inscrivent juste dans un dispositif institutionnel (parti) où ils seront susceptibles d’acquérir le plus de parts de marché. La politique de métier est une activité réservée
à la classe bourgeoise ou aristocratique qui cumule tous les capitaux (économique, social, symbolique selon Bourdieu). Par exemple, des jeunes au MJS se disent socialistes alors qu’ils sont sapés
comme des militants UMP, avec iphone, ipod ou je ne sais quoi d’autres technologies du capitalisme dans les poches, partent au Maroc ou en Argentine pour soulager leur conscience d’occidental.
Bref, je pense que les gens qui aspirent à monter en grade dans les partis pour trouver le pouvoir, sont des affameurs voire des criminels en puissance.
Comme vous dites, c’est la "gauche" qui a le plus privatisé. Le réel socialisme il est dans la tête des gens, pas dans la
politique de métier. Quand j’entends les gens, des jeunes, des étudiants, des ouvriers, des smicards, des travailleurs pauvres etc dire que tel ou tel homme est si, ça, cela, il y a comme un
dogme idéologique rempli de raccourcis : l’objectif est de faire croire que les politiciens et leurs suffrages changeront les choses, c’est un processus d’asservissement intellectuel du
peuple. Je pense que les gens sont d’accords sur le fond, personne n’ira dire qu’il laisserait les gens crever de faim en face d’eux, tous diraient qu’il faut partager. Qu’importe leur profession
et leur distinction de classe sociale, sur le fond, peu accepteront d’affamer de sang froid un des leurs. Et pourtant, tout le monde vote pour reproduire ces schémas de domination. C’est
l’institution qui est meurtrière, inhumaine. Quand le pouvoir et l’autorité sont distantes, là cela ne dérange plus, car tout est déresponsabilisé, délégué à d’autres puissances, et le crime
devient ainsi plus supportable. Alors NPA, FG, PS, Modem, UMP, FN ... il n’y a que la forme du discours qui change, mais pas le fond. Par dessus cela, il y a biensur le rôle de la propagande qui
vise à maintenir ces dispositions idéologiques au fin fond des cerveaux du citoyen lecteur-auditeur...qui vise à l’empêcher de réfléchir.
http://sam-articles.over-blog.com
13/04/2010 à 10:51, par délégué 59
J’ai rencontré Valls il y a 25 ans, il était alors auprés de M.Rocard et déjà entouré de son ami sécuritaire et de son ami
publicitaire. C’était un jeune loup aux dents longues rayant les parquets, il énervait déjà beaucoup ce présomptueux... Depuis il a fait du chemin l’ambitieux. Il a déménagé et changé de
département pour s’assurer un mandat de maire et un mandat de député en succédant sans grand risque à un élu socialiste. Quel dommage que son immense talent n’ai pas été mieux utilisé pour
conquérir sur la droite ces même mandats, cela aurait peut-être été trop risqué, cela aurait aussi pris du temps et Valls n’aime pas l’échec(il a laché Rocard et Jospin, ces losers)et surtout il
est pressé. Je ne sais si je le connais bien, mais ce que je sais de lui est qu’il est autoritaire, qu’il a une haute estime de lui-même, est-il de gauche, cela je ne l’ai jamais su, mais il est
opportuniste. Si l’on est attaché aux valeurs de la gauche, la vraie, pas celle des socio-libéraux dont il fait parti en apparence, alors cet homme politique n’est pas fiable, mais cela commence
à bien se savoir !
Mr Gensane je m’élèverai toujours et fermement- car c’est grave et dégradant - sur une étude de personnalité par membres
de la vie privée interposés. Cela risque de décrédibiliser votre analyse politique, fort intéressante. Dans tant de familles il y a tant de divergences et surtout : Vie privée : c’est
privé. Et pas monolithique sur les idées.stop. svp. on en a marre. on perd son temps.
23/04/2010 à 16:46, par Bernard Gensane
Chère Noémie, Je ne suis pas obsédé par la vie privée : il vaut mieux lire Le
Capital qu’une biographie de Marx, Hamlet qu’une vie de Shakespeare (l’idéal étant de lire les quatre).
Seulement, en politique, la vie privée et la vie publique, c’est neuf fois sur dix la même chose. Ceux qui arrivent par leur
seul mérite sont rarissimes. Vous avez soudain X ou Y, un type ou une typesse, qui apparaît en pleine lumière, soit comme figure médiatique, soit comme potentat politique, soit les deux. Cette
apparition vient toujours de loin : une, deux, voire trois générations. Il n’y a jamais de hasard, mais une éducation, des traditions familiales et de classe, des réseaux, des appuis. Valls
veut entraîner son parti dans une démarche schizophrène : pour simplifier, militer dans un parti qui s’appelle "socialiste", mais en reniant complètement le socialisme. Reconnaissons que,
pour authentiquement réactionnaire qu’elle soit, cette tâche n’est pas simple a priori et nécessite énergie et talent.
J’ai longtemps imaginé (mon nom est d’origine catalane, côté français) que la famille de Valls avait souffert du franquisme.
Si tel était le cas, elle s’en serait vite remise. Bref, il faut toujours savoir à qui l’on a affaire : en l’occurrence, un obsédé de la sécurité, un ennemi de la classe ouvrière, issu d’un
peuple qui a contribué, comme aucun autre en Europe aux idées et aux pratiques anarchistes.
Ce n’est pas banal...
Et, pour finir, un petit poème d'Emmanuel Renahy :
Valls Valsera
A la Rose, à la Rose
Valls Valsera
A la Rose s’en prendra …
Pour la casser …en mille …morceaux.