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22 mars 2012 4 22 /03 /mars /2012 10:00

http://reunion.orange.fr/IMG/jpg/photo_1253120034533-1-0.jpgCette note m’a été inspirée par un extrait d’un entretien accordé par le romancier Alain Julien Rudefoucauld à Télérama(n° 3245), dont les pages culturelles sont toujours aussi nourrissantes, mais qui est de plus en plus entaché d’anglicismes, ce qui est un autre débat.

 

Rudefoucauld quitte l’Algérie à 12 ans en 1962 :

 

« L’arrivée de sa famille à Toulouse, protégée de la foule et des insultes par une haie de militaires. L’accueil de la prof de maths, au lycée de Toulouse : « Vous venez d’Algérie ? Eh bien, retournez-y ! » Et la mise en quarantaine qu’il subit immédiatement de la part de ses camarades de classe. La violence, alors, qui s’empare de lui, les conseils de discipline, le bac raté. »

 

J’ai deux ans de plus que cet écrivain. Comme je suis né dans un coron du Pas-de-Calais, mon vécu, heureusement pour moi, sera complètement différent. En 1962, je suis en classe de 3ème dans un grand lycée lillois. Le recrutement est petit et moyen-bourgeois. En début d’année, la grande majorité des élèves de ma classe est pour l’indépendance de l’Algérie. Quelques semaines après la rentrée, nous accueillons un camarade pied noir. Fils de commissaire de police. Extrêmement sympathique. Il a été indéniablement traumatisé par un départ brusqué de son pays natal et a beaucoup de mal à s’habituer aux brouillards automnaux du nord de la France. Il surmonte son mal être par l’humour. On l’adopte sans peine. On sympathise avec lui. Au point qu’en fin d’année nous ne sommes plus que deux, dans la classe, à être en faveur de l’Algérie algérienne tandis que tous les autres ont adopté la cause de l’OAS. Mes parents sont à fond pour l’Algérie algérienne. Bien qu’étant viscéralement de gauche, ils y ont quelques mérites : pendant la guerre, mon père eut comme prof d’anglais Guy Mollet qui fut pour lui une sorte de père spirituel, pendant que ma mère, de son côté, faisait du théâtre avec le futur président du Conseil (link).

 

Trois ans plus tard, dans un lycée amiénois, j’ai deux très bon copains, tous deux internes comme moi. Le premier est pied noir, aussi sympathique que le fils du flic lillois. Tout le monde l’aime et comprend sa douleur. Il nous explique fréquemment pourquoi il se sent algérien et rien d’autre. Des années plus tard, il retournera vivre pour toujours dans son pays natal. L’autre camarade est un fils de harki. Quand il nous arrive, il parle français comme une vache espagnole. Forcément, on se moque de son accent « bicot ». Du coin de l’œil, il nous fait comprendre qu’il va travailler et nous surprendre. Lors de l’élection présidentielle de 1965, je lui demande s’il soutient Tixier-Vigancour, le mentor d’extrême droite de Le Pen. Nullement, me dit-il. Il sait que la page est irrémédiablement tournée. Pendant les événements de 68, il militera au sein du PSU. Il suivra les cours de la fac de droit, aura le ministre socialiste Jean-Pierre Cot comme prof et finira lui-même prof de fac.

 

E la nave va, comme disait fellini.

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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 15:54

Pierre Verhas, après Le Monde, met en regard l'accident dramatique du car belge avec l'affaire Dutroux.


Le terrible accident de Sierre suscite en Belgique une émotion considérable. Une cinquantaine de pères et de mères ne riront plus jamais et bien des grands parents n’auront plus de joie de vivre. La perte d’enfants est la pire blessure.

 

Fallait-il une fois de plus que les médias en rajoutent ? N’est-il pas indécent de voir ces journalistes harceler des parents, des témoins, des secouristes en leur posant des questions stupides ? À l’indicible, il n’y a pas de réponse. Ils le savent bien, mais ils ne s’arrêtent jamais.

 

Est-ce l’événement qui mobilise les médias ou ceux-ci exploitent-ils cette tragédie pour se mettre eux-mêmes à l’avant de la scène de cette sinistre comédie humaine ? La dictature de l’audimat ne pousse-t-elle pas les chaînes de télé publiques comme privées à l’excès afin d’être « le premier » ? On imagine aisément les dirigeants de ces sociétés audiovisuelles se précipiter le lendemain sur les chiffres d’audience afin d’empocher les dividendes de l’émotion.

 

 emotion_sierre.jpg

 

 

 

N'est-ce pas indécent d'exploiter l'émotion ? Ici les enfants de Lommel

 

 

La « Libre Belgique » critique vertement le correspondant belge du journal « Le Monde » qui a mis en parallèle les émotions suscitées par l’affaire Dutroux, par les affaires de pédophilie dans l’Eglise catholique et la catastrophe de Sierre. On touche aux enfants et le Belge ne le supporte pas.

 

Où est le scandale ? Lisez plutôt : « Sidérée par le bilan de l'accident, la population est d'autant plus impressionnée qu'une grande majorité d'enfants figurent parmi les victimes. Après les terribles révélations, consignées dans un rapport officiel, sur les actes de pédophilie commis au sein de l'Eglise catholique durant des décennies mais, surtout, depuis l'affaire Marc Dutroux, les Belges ont une sensibilité à fleur de peau.

 

Les multiples disparitions de très jeunes filles organisées par le tueur pervers durant les années 1990 ont engendré un traumatisme durable dans le royaume. Par sa durée, la cruauté des révélations qu'elle a apportées et, surtout, la prise de conscience que la justice et la police étaient, à l'époque, incapables de protéger les plus faibles, cette affaire n'a pas fini d'impressionner. Et chaque accident impliquant des enfants ravive désormais les plaies mal cicatrisées des Belges. »

 

Cette analyse est pertinente. L’émotion – bien compréhensible – est cependant mauvaise conseillère. Les médias ne cessent de l’attiser empêchant ainsi de prendre les décisions les plus adéquates.

 

L’affaire Dutroux a désorganisé la Justice et accouché d’une réforme des polices qui n’a fait que renforcer le pouvoir d’une gendarmerie, véritable Etat dans l’Etat, au service de la classe dirigeante. L’émotion populaire, certes compréhensible, fut aveuglante et les cyniques en ont tiré parti.

 

Tout est fait pour étouffer les graves déviances de l’Eglise catholique qui ont fait des centaines de victimes. Là aussi, l’émotion fut exploitée pour éviter les réponses gênantes. Comme dans l’affaire Dutroux, ce furent des magistrats qui se retrouvèrent au banc des accusés. Ah ! Comme il est bon d’accuser un juge ! Mais la vérité, elle, ne figura pas à la barre.

 

Pour en revenir à Sierre, personne n’a posé la question des dangers du « tout à la route » qui provoque tant de drames. Les cyniques vous renvoient dans les ténèbres de la ringardise. Les médias vous noieront dans l’émotion, dans leurs plus sordides intérêts. Et les choses suivront leur cours habituel.

 

La cupidité qui guide ce monde continue à se draper dans l’indécence. Ainsi, la raison sera une fois de plus vaincue.

 

http://uranopole.over-blog.com/

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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 06:27

http://zenplanet.files.wordpress.com/2011/07/reve.jpgUn garçon et une fille de huit ans m’ont demandé de leur dactylographier le texte suivant. J’ai préservé intégralement le fond et la forme.

 

NATHAN TOILETTE

episode 1

Un jour Nathan était désesperer. Il avait que 13 ans, et il voulait se marier déjà. Mai ça maman disait toujours : Il est trop tôt pour se marier imbécile en plus tu portes des COUCHE-CULOTTE TU CHIES À CÔTÉ DES CABINÉ, et tu PUE et tes MOCHE tu t’est jamais DOUCHÉ est en plus tu CHIALE TOUT LE TEMP et tu dors encore avec un DOUDOU et tu crois qu’une meuf va t’épouser. Et t’est dernier de la classe et la maîtresse ta exclu de la classe

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parce ce que tu pue et tu pête tout le temp !!!

Le jour de ton anniversaire je t’offrirai une DS. Le jour de l’anniversaire de Nathan Toilette il a eu comme promis une DS. Il s’est vite connecté à un site “ AMOUR À GOGO ” et au bout de 5 min une MEUF, puis le répondeur dit “ vous vous marirer demain à 15 H puis je dit “ Youpie ” mai ma maman ne le sai pas. Je vais le dire à ma maman. Et le jour du mariage C’EST BEAU L’AMOUR. Il se marier et ur beaucoup d’enfant de merdeux.

 

episode 2

les enfant

Maleur les bébé chiez partout il fallait leurs changeait la couche toute les 2 min, il pété en classe toute les deux min, il gerber toute les 2 min, il chialer toute les 2 min, il séxé toutes les 2 min. Et surtout il chantait tout le termp “ je suis moche ” ses parents ne savait que faire. Quand le garçon grandit il fit un exposer. Sa sapeler “ Le sexe ”. Il y avait écrit ça :

Le sexe

Pour sexer

1)    ingredien : une meuf + un meck

2)    il doivent se desabiller

3)    il doivent faire en sorte que la bites et la chattes doivent se coller

4)    il doivent s’accouplet

5)    1 + 2 + 2 +4 = sexe

 

regarder : je vais faire un exemple avec Lili. Il sexe et puis au bout de neuf mois elle a un bébé. Maleur l’enfant s’avait parlait mais il parlait n’importe comment il disait : maman à son père, et disait papa à sa mère il disait mamie, à son papi et disait papi à sa mamie.

a suivre

 

Dans certains États des États-Unis, le garçon serait en prison pour avoir débauché une enfant de huit ans. En Arabie saoudite, on lui aurait coupé le zizi.

Plus sérieusement : dans l'École de l'avocat d'affaires de Neuilly et du DRH de l'Oréal, on ne fait plus de dictées en CE2, ni de productions écrites. On fabrique des illettrés. Les cours privés corrigeront le tir pour les enfants des plus fortunés.

 

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27 février 2012 1 27 /02 /février /2012 07:48

http://www.productions-perceval.com/images/expo7.jpgOu, comment rester à la pointe du politiquement correcte aux États-Unis.

 

Un homme majeur se rend dans un bois de Pennsylvanie (le bois de Penn, je suppose) avec sa chérie. Ils font crac-crac. Comme d’hab’, mais dans un bois, ce coup-là.

Comme, j’imagine, elle a envie de se débarrasser de lui, elle porte plainte. Le type se présente confiant devant le juge : ils sont majeurs et vaccinés, c’est (c’était ?) sa copine.

Le juge estime qu’il a profité du fait qu’elle était très amoureuse de lui et donc qu’elle était en état de sidération (stunned).

Le type a écopé de 5 ans de prison ferme.

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11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 06:27

 

 

17-1.1500083753.jpeg

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7 février 2012 2 07 /02 /février /2012 15:28

 

 

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5 février 2012 7 05 /02 /février /2012 15:30

 

Pise.jpg

 

Rébecca (25% italienne)

 

 

http://world-lolo.com/images/uploads/image.num1254206865.of.world-lolo.com.jpeg

 

Valentino Rossi (100% italien)

 

http://media.rtl.fr/online/image/2012/0202/7743039332_le-costa-concordia-au-large-de-l-ile-italienne-du-giglio-le-23-janvier-2012.jpg

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4 février 2012 6 04 /02 /février /2012 06:33

http://pabqt.free.fr/rues/montpencher/ecoles/voltaire/mont2005.jpgUn article de Morgane Bertrand pour Le Nouvel Observateur m’a rajeuni de 56 ans. J’en cite d’abord de larges extraits :

 

« Février 1956, ou le mois le plus froid du XXe siècle [1947 avait été pas mal, mais je n’étais pas né, avec un déficit thermique de plus de 10°C. Entre le 31 janvier et le 28 février 1956, une vague de froid (et de neige) s’abat sur la France et l’Europe, vitrifiant la Côte d’Azur jusqu’à l’Italie et recouvrant la côte Atlantique d’un manteau neigeux.

Pourquoi s’y intéresser ? Parce qu’elle n’est pas sans rappeler l’épisode de grand froid actuel. Points communs : la date, et la présence du même anticyclone situé au-dessus de la Finlande et le nord-ouest de la Russie, repoussant des masses d’air glacial sur l’Europe.

François Jobard, porte-parole de Météo France, joue la prudence :

Nous sommes encore loin de l’hiver 1956, anthologique avec un froid très intense qui a persisté de nombreuses semaines. Il n’est pas exclu que la vague actuelle dure deux ou trois semaines, mais elle est moins froide."

À l’époque, le thermomètre avait enregistré -24,8°C à Nancy, -20,6° à Besançon et -23,1° à Metz. Contre respectivement -12°, -11° et -12° vendredi 3 janvier 2012.

 

En 1956, la presqu’île de Saint-Tropez est coupée du monde ; Saint-Raphaël et Antibes disparaissent sous la neige ; Nice fait décoller ses avions au compte-goutte et annule son Carnaval. Les cours d’eau, le littoral Atlantique, l’étang de Berre sont gelés. Un match de hockey sur glace est organisé sur le lac du Bois de Boulogne, et des parties de belote sur le canal du Midi. La gare de Strasbourg est paralysée. Puis c’est au tour de Bordeaux, où l’armée est appelée en renfort pour dégager jusqu’à 80 cm de neige dans les rues. Jacques Chaban-Delmas, alors maire de Bordeaux et coincé hors les murs, organise le ravitaillement à distance.

De lourdes conséquences 

A la fin du mois, les stocks de charbon sont à sec, renfloués par 140.000 tonnes envoyées par les Américains. Dans l’hebdomadaire France Observateur, on peut lire le 23 février 1956 :

Si la vie industrielle ou la distribution du gaz et de l’électricité ont subi des perturbations qui entraînent plusieurs dizaines de milliards de perte pour l’économie, c’est la production agricole qui est la grande victime."

Destruction de la quasi-totalité des primeurs du Midi et d’une partie des légumes d’hiver du centre de la France, accompagnée d’une flambée des prix : déjà aux Halles, les choux-fleurs, les endives (cependant non gelées), les poireaux ont augmenté de plus 100%. »

 

Moi, je suis en CE2, à l’École Voltaire à Hénin-Liétard. L’instituteur, c’est mon père, ce qui ne me gêne pas du tout : comme homme du métier, il est très bon et j’aime beaucoup mon père. Chaque matin, nous partons ensemble pour l’école, ma petite main réchauffée par sa grande main. Après 1km5 de marche, nous avons les pieds gelés. Dans la classe, heureusement, un jeu de pantoufles nous attend. Mon père a pris, les conditions climatiques étant ce qu’elles sont, une mesure pédagogique toute nouvelle : au fond de la classe, il n’y a pas de chauffage central, mais un poêle à charbon que, comme ses collègues, il rallume le matin après s’être débarrassé des cendres de la veille. Mon père décide – ce qui en soit n’est pas bête du tout – que les mauvais élèves occuperont les premiers rangs et les meilleurs les derniers. Je me retrouve donc à 1m50 de la source de chaleur. Après toutes ces années, j’ai honte d’apporter cette explication prosaïque aux gentils cancres du CE2 de mon père qui voudront bien me lire.

 

Je n’ai pas un souvenir précis de l’intensité du froid, mais je me rappelle parfaitement que nous eûmes du verglas jusque fin mars, début avril.

 

La prochaine fois, je raconterai l’hiver 62 qui ne fut pas mal non plus.

 

PS : un vieil ami lot-et-garonnais me fait passer le témoignage suivant :

 Ton évocation de février 56 fait remonter en moi des souvenirs merveilleux. J'étais pensionnaire en 4e au collège de Villeneuve. Le Lot, que notre établissement surplombait, charriait des blocs de glace de la taille d'une gazinière. Une nuit, le thermomètre descendit à - 17 °C, les tuyaux d'eau éclatèrent et l'on nous renvoya dans nos foyers pour trois semaines. Vingt centimètres de neige. Nous passions notre temps à faire de la luge dans le pré entre la grange de Dumont et la première maison du bourg ou à glisser sur les deux mares qui existaient alors à droite du carrefour du "tour de ville" et de la route de Montastruc, en montant. 1956 fut une année terrible pour les paysans du canton : un samedi après-midi de juin, un orage de grêle ravagea les pruniers qui n'avaient pas éclaté en hiver, les vignes, les céréales. Les boulangers furent obligés de leur faire un an d'avance de pain. Le soir, quand le vieux car Augié qui nous ramenait de Villeneuve arriva sur la place, il y avait encore cinquante centimètres de grêlons sur les trottoirs. 

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3 février 2012 5 03 /02 /février /2012 15:50

 

Je propose la réponse de Luciole (moi, je reste à la maison).

 


 

photos,humour,poésie,tags,Paris,Luciole

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31 janvier 2012 2 31 /01 /janvier /2012 13:45

http://www.alalettre.com/pics/jardins.gifDans la production de grande qualité de Michel Quint, il est un ouvrage qui m’a fait vaciller, son magnifique Effroyables jardins (le film, malgré Jacques Villeret, n’est pas à la hauteur du livre). Quand j’ai lu ce texte, j’ai d’abord été frappé par la forme : un style étincelant, prodigieusement économique.


Au fil de la lecture, j’éprouvai une sensation bizarre : je me suis dis que je connaissais cette histoire, que j’avais complètement oubliée et que mes parents m’avaient racontée lorsque j’avais sept ou huit ans. Je découvris alors sur la quatrième de couverture que Michel Quint était né quelques mois après moi, à huit kilomètres de ma ville natale.

.

Je dévorai alors ce livre où je m’étais plongé avec tant de plaisir.


Telle que racontée par Michel Quint, l’histoire s’écartait de l’authentique et l’enrichissait. À bien des égards, elle semblait plus réaliste. Il me revint en particulier, du fond de ma mémoire un peu embrumée, que le “ traître ”, celui qui avait donné les autres aux Allemands, l’avait fait par pure jalousie, la jalousie incroyablement prosaïque d’un supporter d’une équipe de football amateur à l’égard de supporters d’une autre équipe.


En 2005, j’eus le plaisir d’assister à une causerie de Michel Quint dans une librairie de Tours, à propos de Et mon mal est délicieux, autre petite merveille. Lorsque la parole fut donnée au public, toutes les questions se rapportèrent à Effroyables jardins. L’une d’entre elles, qu’on lui avait sûrement posée à maintes reprises, attira tout particulièrement mon attention :


   Ce récit est-il biographique ou l’avez-vous inventé ?


Qu’allait dire l’auteur ?


Il répondit brièvement que son livre était entièrement de son cru.


Ayant étudié et enseigné la littérature pendant quarante ans, je savais un peu comment fonctionnent les écrivains, d’où vient l’inspiration, comment est donnée l’illusion du réel. Et comme je ne voulais surtout pas mettre en porte-à-faux ce romancier, ce professeur remarquable (il enseigne le théâtre dans un lycée de Roubaix, ce qui n’est pas donné à tout le monde), je me gardai bien d’intervenir devant les autres lecteurs.


Lorsque la séance de dédicace fut terminée, je m’approchai de lui, lui dis d’où je venais, et lui racontai ma version des faits. Comprenant son trouble, je lui remémorai ce que Bachelard pensait de la question, à savoir que les histoires les plus belles n’étaient pas celles qu’on avait vécues, mais celles qu’on avait rêvées.


La vérité romanesque n’existe pas. Lui, écrivant cette histoire qui avait traîné dans nos conscients et inconscients d’enfant, et moi le lisant, nous n’avions pas réanimé ce que nous avions vécu : il avait mis en littérature une expérience pour lui inédite, et j’avais adoré son livre parce que son talent m’avait fait préférer la “ fiction ” à la “ réalité ”. À tous les coups, la vie ne devient sens que lorsqu’elle est revisitée par l’art.


Je me souvins également de cette page où Julien Gracq explique que l’expérience artistique ne sert à rien d’immédiat, n’est pas « utilisable ». C’est pourquoi, soit dit en passant, la publicité ne peut être qu’esthétique, mais jamais artistique car, justement, elle sert à quelque chose.  

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